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02/12/2011

L'Eglise catholique dénonce le rôle du système économique dans le saccage écologique, notamment vis-à-vis du climat

  L'Eglise accuse le productivisme industriel ("facteur anthropique") :


 

Mystère d'obstination, ou difficulté à comprendre ?

Malgré vingt ans d'avertissements de l'Eglise catholique,

il y a encore des « fidèles » pour faire la sourde oreille

et contredire les positions du Saint-Siège...  que voici :

 

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Jean-Paul II et le facteur anthropique :

message du 1/01/1990

 
<<  Face à la dégradation générale de l'environnement, l'humanité se rend compte désormais que l'on ne peut continuer à utiliser les biens de la Terre comme par le passé. L'opinion publique et les responsables politiques en sont inquiets ; les savants dans les disciplines les plus diverses en étudient les causes. On assiste ainsi à la formation d'une conscience écologique qu'il ne faut pas freiner [1] mais favoriser, en sorte qu'elle se développe et mûrisse en trouvant dans des programmes et des initiatives concrets l'expression qui convient... 

L'effet de serre et ses dégâts « ont atteint désormais des dimensions critiques par suite du développement constant des industries, des grandes concentrations urbaines et de la consommation d'énergie. Les déchets industriels, les gaz produits par la consommation des carburants fossiles, la déforestation incontrôlée, l'usage de certains types de désherbants, de produits réfrigérants et de combustibles de propulsion, tout cela, on le sait, nuit à l'atmosphère et à l'environnement. Il en résulte de multiples altérations météorologiques et atmosphériques dont les effets vont des atteintes à la santé jusqu'à l'immersion possible, dans l'avenir, des terres basses... 

Les intérêts économiques l'emportent sur le bien des personnes, sinon même sur celui de populations entières. Dans ce cas, la pollution ou la destruction de l'environnement sont le résultat d'une vision réductrice et antinaturelle qui dénote parfois un véritable mépris de l'homme. […] Il n'est pas juste qu'un petit nombre de privilégiés continuent à accumuler des biens superflus en dilapidant les ressources disponibles, alors que des multitudes de personnes vivent dans des conditions de misère […] C'est maintenant l'ampleur dramatique du désordre écologique qui nous enseigne à quel point la cupidité et l'égoïsme, individuels et collectifs, sont contraires à l'ordre de la Création, dans lequel est inscrite également l'interdépendance mutuelle.  >>

 [ Dans ce message du Bienheureux Jean-Paul II (texte que je vous invite à lire dans son intégralité), on trouve dix notions écologiques fondamentales : 1. une vision du cosmos « pourvu d'une intégrité propre et d'un équilibre interne dynamique » ; 2. l'interdépendance de tous ce qui vit sur la Terre ; 3. la nécessaire sobriété de la démarche humaine envers la biosphère ; 4. le rôle néfaste du facteur anthropique (le pouvoir économique détruisant « des équilibres écologiques délicats ») ; 5. le scandale de l'accaparement des ressources par un très petit nombre (or l'ultralibéralisme et l'ultracapitalisme n'en étaient qu'à leurs débuts en 1990) ; 6. le principe de précaution, ainsi face aux OGM [2] ; 7. l'urgence d'un « système de gestion de ressources de la terre mieux coordonné sur le plan international » [3] ; 8. le devoir pour chaque Etat de « prévenir la dégradation de l'atmosphère et de la biosphère » sur son territoire ; 9. dans les pays du Sud, le lien entre pauvreté et déforestation : « on ne parviendra pas à un juste équilibre écologique si l'on ne s'attaque pas directement aux formes structurelles de la pauvreté existant dans le monde » ; 10. le lien entre le poids de la dette sur les pays pauvres et leurs politiques de production anti-écologiques : donc la nécessité de « réformes courageuses de structures », de « nouveaux modèles de rapports entre les Etats et les peuples », etc [4]. La vision écologique se retrouve avec force dans les pistes de solutions indiquées par le message de Jean-Paul II. Le pape critique la mentalité consumériste « indifférente aux dommages ». Il appelle les peuples riches à « l'austérité, la tempérance et l'esprit de sacrifice » dans « la vie de chaque jour » : ce qui suffirait à le faire traiter de « Khmer vert » par les hyper-papistes dont nous parlions plus haut, s'ils finissaient par admettre l'existence de ce message de 1990. ]

 

Jean-Paul II : audience générale du 17/01/2001

 

<< Si le regard parcourt les régions de notre planète, il s'aperçoit que l'humanité a déçu l'attente divine. A notre époque, en particulier, l'homme a détruit sans hésitation des plaines et des vallées boisées, il a pollué les eaux, défiguré l'environnement de la planète, rendu l'air irrespirable, bouleversé les systèmes hydro-géologiques et atmosphériques, désertifié les espaces verdoyants, accompli des formes d'industrialisation sauvage, en humiliant – pour utiliser une image de Dante Alighieri [5] – ce ''parterre'' qui est la Terre, notre demeure. C'est pourquoi il faut encourager et soutenir la "conversion écologique" qui, au cours de ces dernières décennies, a rendu l'humanité plus sensible à l'égard de la catastrophe vers laquelle elle s'acheminait. L'homme n'est plus le ''ministre'' du Créateur. En despote autonome, il est en train de comprendre qu'il doit finalement s'arrêter devant le gouffre. ''Il faut évaluer positivement l'attention grandissante à la qualité de la vie, à l'écologie..." (encyclique Evangelium vitae, § 27). Ce qui est en jeu n'est donc pas seulement une écologie ''physique'', attentive à sauver l'habitat des divers êtres vivants, mais également une écologie ''humaine'' qui rende digne l'existence des créatures, en protégeant le bien primordial de la vie dans toutes ses manifestations, en préparant aux futures générations un environnement qui se rapproche davantage du dessein du Créateur... Et en cherchant à faire en sorte que les biens de la Terre soient disponibles pour tous et pas seulement pour certains privilégiés, précisément comme le suggérait le Jubilé biblique (Lévitique 25, 8-13,23). >>

 

Benoît XVI comme Jean-Paul II,

face au facteur anthropique

 

Le successeur de Jean-Paul II poursuit dans la même ligne : on trouvera dans notre blog plusieurs de ses interventions en ce sens. En voici quelques-unes. Avant son élection, il avait écrit sa célèbre lettre à la revue L'Ecologiste qui venait de consacrer un article élogieux à son livre L'esprit de la liturgie. Dans cette lettre, le futur pape déclarait :

 « Je vous exprime toute ma gratitude pour votre belle présentation de mon approche sur la liturgie cosmique. J'espère que cette publication servira à un approfondissement du dialogue entre la théologie catholique et les diverses pensées écologiques, et éveillera au sein de l'Eglise une décisive prise de conscience de la responsabilité envers la Terre devant le Créateur. »

 L'Ecologiste publiera cette lettre dans son numéro 15, paru juste après le conclave ; ce qui lui permettra de titrer : Habemus papam... ecologistum.

 

À l'Angélus du 12 novembre 2006, Benoît XVI dénonce la cause économique (anthropique) du saccage de la planète pour accaparer ses ressources. Il lie ainsi, comme Jean-Paul II, la démarche sociale et la démarche écologique, en demandant que l'on change le modèle de développement qui blesse à la fois la Terre et l'homme :

 <<  Il faut certainement éliminer les causes structurelles liées au système de gouvernement de l'économie mondiale qui destine la majorité des ressources de la planète à une minorité de la population ! Cette injustice a été dénoncée en diverses occasions par mes vénérés prédécesseurs […] Pour avoir un effet à grande échelle, il est nécessaire de convertir le modèle de développement mondial ; c'est ce qu'exigent non seulement le scandale de la faim, mais également les urgences liées à l'environnement et à l'énergie. Toutefois, toute personne et toute famille peut et doit faire quelque chose pour soulager la faim dans le monde en adoptant un style de vie et de consommation compatible avec la sauvegarde de la Création et avec les critères de justice envers ceux qui cultivent la terre dans tous les pays. >>

 

Le 1er janvier 2007, dans son message pour la Journée de la paix, Benoît XVI accuse « une conception inhumaine du développement » :

 <<  Cela implique pour l'humanité, si la paix lui tient à coeur, d'avoir toujours plus présents à l'esprit les liens qui existent entre l'écologie naturelle et l'écologie humaine. […] Le problème, chaque jour plus grave, des approvisionnements énergétiques, nous aide à comprendre combien est étroit le lien entre les deux écologies. […] Ce sont des questions qui mettent en évidence que le respect de la nature est étroitement lié à la nécessité de tisser entre les hommes et entre les nations des relations dans lesquelles on porte attention à la dignité des personnes et qui puissent satisfaire leurs besoins authentiques. La destruction de l'environnement, son usage impropre ou égoïste et la mainmise violente sur les ressources de la Terre engendrent des déchirures, des conflits et des guerres, justement parce qu'ils sont le fruit d'une conception inhumaine du développement. >>

 

Le 2 décembre 2007, rassemblement de 500 000 jeunes catholiques italiens au sanctuaire de Lorette ; Benoît XVI lance un appel à sauver la Terre d'une forme de développement qui ignore « le délicat équilibre de la nature » :

 << L'avenir de la planète est confié aux nouvelles générations. Avant qu'il ne soit trop tard, il faut faire des choix courageux, qui sachent recréer une solide alliance entre l'homme et la Terre. Un oui ferme est nécessaire pour la protection de la Création, ainsi qu'un engagement puissant pour inverser les tendances qui risque de conduire à des situations de dégradation irréversible !  >>

 
En 2008, Benoît XVI fait faire à la Cité du Vatican un double geste qui prend spectaculairement position au sujet du facteur anthropique dans l'effet de serre et le changement climatique : le toit du grand auditorium est recouvert de panneaux photovoltaïques pour fabriquer l'électricité grâce au soleil ; d'autre part, la Cité du Vatican, « pour compenser ses émissions de dioxyde de carbone », plante une « forêt climatique » en Hongrie. Certes le Vatican pollue peu : 44 hectares, moins de mille habitants et pas d'usine ; mais le symbole est là. Organe de la planète catholique, le Saint-Siège devient le premier Etat climatiquement neutre. Et il signifie au monde entier son engagement face au facteur anthropique. Le message de Rome sera compris partout, sauf en Australie où l'on écoute plutôt Dallas.

 

La même année 2008, Benoît XVI envoie son ambassadeur à l'ONU, le nonce Celestino Migliore, parler devant l'assemblée générale sur le thème :« Affronter les changements climatiques – Les Nations-Unies et le monde à l'oeuvre ». Le Vatican demande la mise en commun des ressources, l'utilisation exclusive de technologies « propres », et une stratégie politique internationale coordonnée. « Le comportement personnel et collectif a un impact sur le climat », déclare l'envoyé du pape, soulignant ainsi – sans ambiguité – que le Vatican reconnaît l'existence du facteur anthropique.

 

Comme le dit le Compendium de la doctrine sociale catholique, les « graves problèmes écologiques » requièrent un changement « effectif » de mentalité, un nouveau style de vie, une nouvelle manière de consommer, d'épargner et d'investir, et cela pour deux raisons (§ 470) : « les perspectives effrayantes que laisse entrevoir la dégradation environnementale », et « la solidarité authentique au niveau mondial » ; et la solidarité que l'Eglise catholique prône depuis toujours, au contrepied des égoïsmes nationaux.

 

 

Conclusion

Jean-Paul II, Benoît XVI, et avec eux – par exemple – les évêques français (livret Grandir dans la crise, Cerf 2011), ne séparent pas les divers effets nocifs provoqués par le système économique actuel : atteintes à la vie et à la dignité humaines, d'une part, et atteintes au reste de la Création – notamment par la  dégradation atmosphérique due à la surchauffe productiviste, d'autre part. Aucun catholique n'a donc le droit de refuser la « conversion écologique » (Jean-Paul II a martelé cela). Et aucun catholique n'a le droit de nier la responsabilité humaine dans les atteintes à l'environnement ! Quiconque fait cela en se disant catholique est un imposteur, qui feint de ne pas connaître les textes officiels de l'Eglise. Or c'est ce que font certains, excluant que l'économique soit responsable de quoi que ce soit : étrange attitude de la part de chrétiens censés connaître la Bible. Au nom de quoi (par quelles allégeances inavouées) des catholiques - prétendant agir en tant que tels - se désolidarisent-ils de la parole officielle du catholicisme dans le monde ? À les lire, la réponse est hélas évidente : dans leur guerre picrocholine contre les scientifiques, peu leur importe le climat ; ce qui les rend furieux c'est que l'on mette en cause le productivisme capitaliste. Et ils ne sont même pas riches : ils font ça au béguin. comme on disait dans l'argot de Montmartre en 1900.  Quos vult perdere, Jupiter dementat.

 

 

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[1] Les cathos écolophobes reçoivent cette phrase en pleine figure depuis vingt ans, mais ils semblent doués d'insensibilité.

[2] « Evaluer les troubles provoqués dans la nature par des manipulations génétiques menées sans discernement et par le développement inconsidéré d'espèces nouvelles de plantes et de nouvelles formes de vie animale. » (§ 7).

[3] Benoît XVI ira plus loin en prônant un gouvernement mondial de l'économie. Il s'exposera ainsi à la censure de soi-disant papistes français, qui proclameront « non possumus, Saint Père » en accusant le pape de violer « le Principe de Subsidiarité ». (Ce sont des médecins de Molière : « il se trouve que le poumon, que nous appelons en latin armyan, ayant communication avec le cerveau, que nous nommons en grec nasmus, par le moyen de la veine cave, que nous appelons en hébreu cubile, rencontre en son chemin lesdites vapeurs, qui remplissent les ventricules de l'omoplate ; et parce que lesdites vapeurs... comprenez bien ce raisonnement, je vous prie ; et parce que lesdites vapeurs ont une certaine malignité » ).

[4] « Certains pays fortement endettés sont en train de détruire leur patrimoine naturel, entraînant d'irrémédiables déséquilibres écologiques, afin d'obtenir de nouveaux produits d'importation. » (§ 11).

[5]  Paradis, XXII, 151.

[6]  Comme le dit un de leurs blogs, "ça n'arrivera pas de notre vivant."

 

 

Commentaires

EGLISE, CLIMAT, ECOLOGIE, D'AUTRES REFERENCES ICI

Dans notre blog, références aux très nombreuses prises de position de l'Eglise sur la responsabilité humaine envers l'environnement, le climat, etc :

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http://plunkett.hautetfort.com/archive/2010/12/02/benoit-xvi-parle-du-rechauffement-climatique-et-du-renonceme.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/09/04/benoit-xvi-la-lutte-contre-le-rechauffement-climatique-et-le.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/16/attention-ce-message-de-benoit-xvi-est-crucial.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/09/22/vatican-le-p-lombardi-souligne-l-ouverture-ecologique-de-ben.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2008/06/23/le-vatican-et-le-rechauffement-climatique-l-eglise-confirme.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2011/05/19/pretendre-que-l-eglise-catholique-nie-le-role-humain-dans-le.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/18/mgr-migliore-insiste-le-vatican-agit-contre-son-propre-co2.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2010/12/01/rechauffement-le-vatican-s-engage-toujours-plus-dans-sa-lutt.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/10/copenhague-sur-le-climat-declarations-claires-et-fortes-de-m.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/16/eglise-ecologie-mgr-martino-et-mgr-toso-commentent-le-messag.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/09/eglise-et-changement-climatique-encore-des-propos-clairs-et.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/15/benoit-xvi-donne-sa-feuille-de-route-a-l-ecologie-chretienne.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2010/12/01/l-ecologie-a-l-ordre-du-jour-au-vatican.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2011/04/29/le-bienheureux-jean-paul-ii-on-assiste-a-la-formation-d-une.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2011/02/12/148-reponses-aux-climatosceptiques.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2010/07/01/le-vatican-de-plus-en-plus-ecologiste-message-sur-la-protect.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2010/03/04/ofnon-le-vatican-n-a-pas-une-position-favorable-aux-ogm.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/19/1eb61e9c8741521ccfd571096cbdc283.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/12/16/a-rome-caritas-et-les-agences-catholiques-pour-le-developpem.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/11/29/eglises-et-ecologie-un-blog-a-connaitre.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/11/26/ecologie%C2%A0-lettre-ouverte-aux-catholiques-sceptiques.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/11/24/l-eglise-catholique-mobilise-pour-sauver-la-planete-un-dossi.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/11/06/eglise-catholique-face-aux-changements-climatiques-caritas.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/10/01/appel-des-chretiens-pour-la-conference-de-copenhague.html

http://plunkett.hautetfort.com/archive/2009/08/08/ecologie-l-engagement-de-l-eglise-catholique-se-renforce-de.html

etc...
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Écrit par : EGLISE, CLIMAT, ECOLOGIE / | 02/12/2011

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