23/04/2025
Non, le pape François n ‘a pas “déplacé les priorités du dogme vers les réalités sociales et sociétales” comme le prétend un quotidien parisien
Le pape François en audience générale : un enseignement ignoré des médias.
Cette affirmation anti-dogme est dans l’éditorial du Monde (23/04). Elle constitue un non-sens. Et elle montre une radicale incompréhension de la théologie de François :
“Les douze années du pontificat (…) auront été marquées par son intense volonté d’en déplacer les priorités : de l’Europe vers le monde entier, du dogme vers les réalités sociales et sociétales…” C’est ce qu’affirme l’éditorial du Monde daté d’aujourd’hui.
Dire que François a rééquilibré géographiquement l’Église en mettant en valeur l’hémisphère sud, c’est exact. Ce qui est inexact, et même risible, c’est d’opposer au “dogme” les “réalités sociales et sociétales” et d’affirmer que cette opposition a été opérée par le pape. Dire cela, c’est montrer que l’on ne connaît pas le sujet ; chose gênante quand on lui consacre la une et dix pages comme vient de le faire Le Monde – sur le ton sagace qui le caractérise.
L’éditorialiste parle de “dogme”. Il se trompe sur le sens de ce mot comme la plupart de ses confrères : ils appellent dogme ce qui leur paraît stable et non négociable dans le catholicisme – qu’il s’agisse de foi, d’idées, de règles ou de quoi que ce soit. Toute stabilité étant incompatible avec le climat de ruptures qui pèse sur la société actuelle, le “dogme” ainsi compris est logiquement la cible des médias ; ils lui opposent la séduisante instabilité du social et du sociétal postmodernes.
Mais dans le christianisme catholique, le mot “dogme” n’a pas le sens que lui attribuent les journalistes. Il veut dire tout autre chose. “Le mot dogme s’applique aux vérités appartenant à la foi de l’Église (…) Même des affirmations de l’autorité, si elles ne portent pas sur le contenu de la Parole divine, ne sont pas des dogmes”, souligne le Dictionnaire théologique de Louis Bouyer. Le dogme au vrai sens du terme est “l’expression d’une vérité surnaturelle” : une fenêtre ouverte sur l’infini. Les dogmes sont donc peu nombreux. Presque tous sont dans le Credo, texte bref, mais germe de la surabondante pensée catholique qui se développe avec les siècles – et dont l’une des dernières floraisons est l’écologie intégrale de Laudato Si’. Cette encyclique du pape François prouve l’enracinement christologique de la pensée d'Eglise: ainsi le dogme irrigue le “social” et le “sociétal” au lieu de s'y opposer, quoi qu'en dise Le Monde. Des dogmes du Credo à la critique du néolibéralisme (et du productivisme destructeur) par Benoît XVI puis par le pape François, il n’y a aucune rupture, aucun "changement de priorité”. Tout marche ensemble parce que tout est lié, comme dit Laudato Si'.
Amis des tables rases, les médias "progressistes" attribuent louangeusement à François une rupture qui n'existait pas dans sa pensée. Croyant par masochisme les médias "progressistes", le public d'ultradroite vitupère François d’avoir commis cette rupture (qu’il n’a pas commise). Ni les uns ni les autres n’ont lu les enseignements spirituels et sociaux de ce pape, pas plus qu’ils n’avaient lu ceux de Benoît XVI ; ça ne les empêche pas d'en parler avec assurance. “La France est sous les mots comme un champ sous les mouches”, disait Victor Hugo...
19:08 Publié dans Pape François | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pape françois
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