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01/08/2025

Que reproche le Conseil d'Etat au projet de loi sur la Corse

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Il faut regarder d'un peu plus près ce qui choque les magistrats du Conseil dans le texte du gouvernement : 


D’un côté la Macronie : elle a improvisé. De l’autre côté, le Conseil d’État : il prétend nous ramener à 1790, quand la Constituante, pour transformer la France en collectivité abstraite, supprima les provinces nées de l’histoire et les remplaça par un découpage administratif centré sur Paris. Jusque là, les Français avaient été les habitants d'une diversité d'écosystèmes géoculturels : chaque province était “une communauté historique, linguistique, culturelle, et ayant développé un lien singulier avec sa terre”. Or cette phrase, je la trouve dans un texte réformateur de 2025 : le projet de loi constitutionnelle sur l’autonomie de la Corse, présenté en conseil des ministres le 30 juillet. C’est ce projet que les magistrats du Conseil d’État, soudain jacobins, se sont senti le devoir de retoquer.

Dans leur critique du projet de loi, les conseillers d’Etat rejettent la notion de “communauté” : ils lui préfèrent celle, très floue, de  “population”. Ils demandent surtout la suppression des mots “lien singulier avec la terre”. Le Conseil d’Etat renoue ainsi avec l’esprit du député de 1789 Jacques-Guillaume Thouret, qui voulait effacer les cultures enracinées en abolissant les provinces, nées de l’histoire, et en divisant le territoire français en rectangles égaux*.

Le dossier corse est pour le moins complexe. Mais les arguments du Conseil d’État sont idéologiques. Dire que la région corse n'est habitée que par une “population”, non par une communauté, c’est dire que les Corses n’ont pas plus de droits sur leur île que les non-Corses : ce qui mériterait au moins discussion**. D’autant que le projet de loi ne donne pas de pouvoir législatif aux Corses dans les domaines régaliens, et que cette précaution respecte l’appartenance de l’île à la République française. Finalement ce projet n’est qu’une décentralisation plus poussée que les timides précédents. Pas de quoi sonner l’alarme ! Sauf, bien sûr, si les magistrats ont une idée derrière la tête.

 

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* Thouret ne réalisait pas qu’une partie de ces rectangles serait tombée dans la mer. A ses yeux, ce qui comptait était de transformer la France en abstraction administrative. Ce qui eut lieu en fin de compte, sous une forme moins géométrique que le projet Thouret.

** Discutable aussi : l’opinion selon laquelle distinguer entre Corses et non-Corses serait “discriminatoire”. Depuis vingt ans on fait un abus croissant du concept de discrimination, au point de juger discriminatoire (donc illégitime) la distinction entre citoyens français et citoyens étrangers : distinction sans laquelle il deviendrait impossible de gouverner.

 

 

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