14/06/2025
La société du non-sens (1) : le crime du collégien
Nogent (Haute-Marne), 10 juin : pendant une opération de contrôle des sacs par des gendarmes devant le collège Françoise-Dolto, un élève de 14 ans sort un couteau ; une surveillante tente de s'éloigner, l'élève la rattrape en courant et la poignarde avant que les gendarmes ne le maîtrisent. La surveillante meurt à l'hôpital...
Stupeur au collège, où cet élève, “inconnu de la police”, était vu comme "ne posant pas trop de problèmes" (sinon – comme trop d’autres – une allergie personnelle envers l’autorité scolaire). Ensuite c’est la routine : déclarations affligées d'Elisabeth Borne, de François Bayrou et d’Emmanuel Macron… Minute de silence à l'Assemblée nationale, une fois de plus...
Mais ce que révèlera l’enquête judiciaire met en lumière un des aspects les plus inquiétants de notre panne de civilisation : l’élève assassin avait décidé de tuer une surveillante prise au hasard, “parce que, dit-il, je ne supportais plus leur attitude”.
Qu’appelle-t-il “leur attitude” ? Simplement le fait que les surveillantes appellent les élèves à respecter le règlement intérieur du collège. Ce que le jeune garçon ne supportait plus, c’était l’existence d’un règlement s’imposant aux individus. Voilà la clé du drame.
Ce qui est angoissant, c’est que notre société soit la première à avoir pour norme l’individualisme absolu : chacun dans sa bulle, chacun dans ses “pulsions” comme disent les publicitaires. Un élève de troisième a la pulsion de tuer une surveillante : donc il la tue... Les gendarmes constateront que le garçon n’en a “aucun remords”. Le psychiatre constatera qu’il n’a “aucun trouble mental”. C’est un élève normal, qui tue une surveillante parce qu’une autre surveillante, huit jours plus tôt, lui a dit de cesser d’embrasser sa petite amie dans les couloirs du collège. Petite cause, effet terrible.
C’est une autre caractéristique de notre société. Pourquoi la violence est-elle devenue un langage familier pour la jeune génération ? Et pourquoi autant de couteaux dans les cartables ? Là il faut faire attention à ce qu’on dit : dans les débats médiatiques, si vous incriminez l’addiction de jeunes à l’inhumanité des jeux vidéos (ou à la barbarie des réseaux dits sociaux), quelqu’un aussitôt vous traitera de “réac”. Ce qui est considéré comme “réac” aujourd’hui, c’est de critiquer les addictions. Pourquoi ? Parce que les addictions font marcher le business des smartphones et des vidéos. Le business c’est le progrès ; critiquer le progrès, c’est “réac”.
Tout nous ramène ainsi à un problème central : ce que le pape François appelait l’Idole Argent. Dans l’encyclique Centesimus Annus, Jean-Paul II appelait à ne pas “laisser le marché s’emparer de choses humains trop fragiles et précieuses pour lui être abandonnées”. Parmi ces choses irremplaçables il y a ce qui permet la vie en société : le sens du bien commun, le sens des disciplines collectives sans lesquelles la ville devient un coupe-gorge. Mais rares sont désormais les personnalités qui osent rappeler ça sur le scène publique, depuis que le politique est devenu l'annexe de la société de consommation. L’Eglise, elle, persiste à dire l’essentiel.
16:58 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mélanie, nogent, jeunes et couteaux
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