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Où va la COP 21 ? Pour l'instant, nulle part
Les avis de William Bourdon et Fabrice Nicolino :
► Fabrice Nicolino* (Le Monde, 4/12, extraits) :
<< Evidemment, la COP 21 sera un naufrage. Evidemment, on la présentera comme un triomphe de la société humaine... Il serait facile de moquer la petite armée planétaire des experts, [...] juristes et diplomates que nul ne connaît et qui n’ont donc aucun compte à rendre aux peuples directement concernés. Au reste, les peuples existent-ils ?... >>
<< ... La question de la responsabilité des transnationales dans le drame biblique en cours ne peut être esquivée. La logique de ces entreprises est de forer, d’extraire, de manufacturer et de vendre. Et ce faisant, d’entretenir comme le feu sous la soupe, le dérèglement climatique... >>
<< ..Il est évident que le cadre de la COP 21 interdit toute vérité. Car lutter contre le dérèglement climatique impose de revoir pour de vrai notre absurde appétit de biens matériels. Lesquels sont, jusqu’à plus ample informé, le moteur – véritablement à explosion – de l’industrie et des entreprises... Le dérèglement en cours s’explique en bonne partie par la prolifération d’objets inutiles, dont la production et l’élimination menacent de mort les principaux écosystèmes... >>
<< ...Arrêtons de répéter sans jamais agir qu’il faut changer notre façon de vivre et de consommer. L’heure est arrivée de mettre concrètement en cause la voiture individuelle, les écrans plats, les iPhone, le plastique, l’élevage industriel, le numérique et ses déchets électroniques, les innombrables colifichets – jouets, chaussures, cotonnades et vêtements, cafetières, meubles – venus de Chine ou d’ailleurs, les turbines, centrales, avions, TGV, vins, parfums partant dans l’autre sens... >>
<< ...N’est-il pas pleinement absurde de croire qu’on peut avancer en confiant la direction à ceux-là mêmes qui nous ont conduits au gouffre ? >>
2. William Bourdon**, (Libération, 4/12) :
<< L’humanité n’attend pas simplement un accord contraignant mais qu’également, les Etats soient eux-mêmes contraints de répercuter leurs obligations sur les principaux émetteurs de gaz à effet de serre, à savoir les entreprises privées. Or, 90 % d’entre elles sont responsables de 60 % de ces émissions. Ainsi, les engagements qui seront consignés dans le traité n’auront de portée que s’ils sont traduits dans la loi, de sorte que les manquements des acteurs privés puissent devenir justiciables... Le scandale Volkswagen est riche d’enseignements, pour le pire et le meilleur. Pour le meilleur, car il révèle que les systèmes les plus cyniques peuvent être confondus par une société civile «sentinelle». Pour le pire, car il démontre que le green washing est trop souvent un instrument pour enrôler les consommateurs dans une consommation éthique, alors même que les produits vendus ne le sont pas. Un groupe de travail, réuni au Collège de France sous la direction de Mireille Delmas-Marty, a rédigé 12 propositions juridiques pour la conférence de Paris sur le climat qui tendent à responsabiliser les Etats et les entreprises. Ces propositions mettent en évidence le paradoxe de la COP 21 : aboutir à un accord contraignant pour les Etats alors que, parallèlement, les entreprises usent universellement de manœuvres afin d’essayer d’échapper aux normes contraignantes et, par conséquent, au contrôle du juge... >>
<< ...Si l’autorégulation des entreprises était synonyme d’efficacité, les citoyens du monde s’en seraient aperçus. Ces derniers ont encore en mémoire l’autorégulation affichée par les grandes banques de la planète en 2008, lors de la crise financière qui a failli faire basculer toutes nos économies. De la même manière, on sait ce qu’il est advenu ou ce qu’il en est des engagements environnementaux s’agissant de Volkswagen. Il faut donc pénaliser les entreprises qui ne respectent pas leurs objectifs de réduction . Ceci suppose le renforcement de l’arsenal juridique de chacun des Etats, la mise en œuvre de pénalités lourdes, dissuasives (proposition 5), le renforcement de la responsabilité des sociétés mères et donneuses d’ordre (proposition 8)... >>
<< ...Il n’y aura pas de régulation des plus grands pollueurs de la planète si le droit d’arbitrage continue à méconnaître l’obligation des entreprises à respecter leurs engagements s’agissant de lutte contre le réchauffement climatique... >>
<< ...L’enjeu n’est rien de moins que de faire en sorte que l’accroissement des responsabilités des acteurs économiques privés ne se fasse jamais au détriment des citoyens ni de celui des Etats, lesquels sont responsables en première ligne de la protection des droits de l’homme. >>
3. Mon commentaire
Fabrice Nicolino est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Un empoisonnement universel – Comment les produits chimiques ont envahi la planète (Les liens qui libèrent, 2014) et Lettre à un paysan sur le vaste merdier qu'est devenue l'agriculture (Les Echappés, 2015). William Bourdon est avocat, spécialisé dans la défense des victimes de la mondialisation, et défenseur d'Yldune Lévy dans l'invraisemblable « affaire de Tarnac ». Il préside aussi l'association Sherpa qui travaille à rendre concrète la notion de responsabilité sociale des entreprises : en 2005, il a fait verser par Total 5,2 millions d'euros à des victimes birmanes.
A propos de cette COP 21 parrainée par BNP, Suez, Carrefour, EDF, Engie, Air France, Renault, Google, L'Oréal, Michelin, Ikea et autres amis du climat (cf. notre note d'hier), Nicolino et Bourdon, observateurs de la stratégie des firmes géantes, sont aussi vigilants que le pape François qui écrit dans Laudato Si' :
<< ...Il ne suffit pas de concilier, en un juste milieu, la protection de la nature et le profit financier [...]. Sur ces questions, les justes milieux retardent seulement un peu l’effondrement... Le discours de la croissance durable devient souvent un moyen de diversion et de justification qui enferme les valeurs du discours écologique dans la logique des finances et de la technocratie ; la responsabilité sociale et environnementale des entreprises se réduit d’ordinaire à une série d’actions de marketing et d
05/12/2015 | Lien permanent | Commentaires (5)
Syrie : le Vatican contre toute ingérence militaire étrangère
23/08/2013 | Lien permanent | Commentaires (24)
La société marchande libérale privatise la guerre
...et instaure l'ère des "armées" de mercenaires, danger international dénoncé par un rapport des Nations-Unies :
http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=40270&Cr=mercenar&Cr1=
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02/11/2011 | Lien permanent | Commentaires (3)
Libre-échange = Monsanto
La colère de Marie-Monique Robin :
http://www.arte.tv/sites/fr/robin/2013/08/31/coup-de-gueule/
<< Ce soir je suis en colère car jai reçu des nouvelles terribles de Colombie. Et ces nouvelles nous concernent tous ! Je les résume en quelques mots : la Colombie a signé un « accord de libre échange » avec les États-Unis qui est récemment entré en vigueur. Cet accord contient une clause qui oblige les paysans à cultiver des « semences certifiées », c'est-à-dire produites par les « sélectionneurs » comme Monsanto ou Syngenta.
Pour remplir cette « clause », l'Institut agro-alimentaire colombien a publié un texte, la résolution 970, qui menace d'amendes et de poursuites judiciaires tout paysan qui continuerait de faire ce qu'il a toujours fait : garder une partie de sa récolte pour ensemencer ses champs.
Depuis le 19 août, des dizaines de milliers de Colombiens paysans, étudiants, mineurs, chauffeurs routiers, médecins, se sont lancés dans les rues pour dénoncer cette violation dun droit humain fondamental : celui de se nourrir soi-même. De violents affrontements ont eu lieu à Bogota, où le président Santos a déclaré le couvre-feu et mobilisé 50 000 membres des forces armées et de la police militaire pour « mater les vandales » et défendre la loi dairain imposée par Monsanto et consorts.
Je connais bien la Colombie : cet immense pays à l'extraordinaire biodiversité a la capacité de nourrir sa population, s'il laisse ses paysans faire leur travail. Pour cela, il leur faut de la terre, et la majorité d'entre eux en est privée. Si maintenant, on les empêche de sélectionner leurs graines, c'en est fini de l'agriculture vivrière colombienne.
Comme ce fut le cas au Mexique après l'entrée en vigueur de l'Accord de libre échange nord-américain (ALENA), le pays sera envahi par les produits agricoles – bas de gamme et subventionnés – des États-Unis, les magasins Walmart et autres chaînes de discount ,qui pousseront à la rue des millions de petits paysans.
J'invite tous ceux et celles qui me lisent à regarder le reportage Les déportés du libre-échange que jai consacré à l'ALENA, et qui a été diffusé sur ARTE en février 2012 . Je l'ai mis en ligne sur mon site web, et on peut aussi le trouver comme bonus sur le DVD des Moissons du futur :
http://www.mariemoniquerobin.com/deportesdulibreechangeextrait.html
Vous trouverez sur ce blog d'autres billets concernant l'ALENA ainsi que des extraits du chapitre que je lui ai consacré dans mon livre Les moissons du futur. Ce soir, je mets en ligne un autre extrait de ce chapitre (voir ci-dessous).
Par ailleurs, je rappelle que l'Union européenne s'apprête à négocier un accord de libre échange avec les États-Unis, dont jai aussi commenté les effets dévastateurs qui ne manqueront de s'abattre sur le vieux continent (voir aussi sur ce blog). C'est pourquoi jai accepté de prêter mon image et mon nom à une affiche réalisée par le Collectif des Engraineurs qui s'est associé à la campagne qu'ATTAC et dautres organisations ont décidé de lancer dès l'automne. Rejoignez-les ! >>
24/09/2013 | Lien permanent
Jean-Marie Vianney (objecteur de conscience, insoumis, déserteur, saint patron des curés de paroisse)
A l'origine de la destinée du saint curé d'Ars, cet épisode audacieux que l'imagerie conventionnelle a enfoui par la suite :
Extrait de sa biographie, tirée du livre de Mgr René Fourrey Le curé d'Ars authentique (L'Échelle de Jacob, 2009) :
<< La guerre d'Espagne réclame alors beaucoup de soldats et Jean-Marie est enrôlé en 1809. Les étudiants ecclésiastiques étaient exemptés du service militaire, mais il est possible que les vicaires généraux aient pensé que, vu la grande ignorance de Jean-Marie Vianney, le présenter comme étudiant aurait pu sembler frauduleux. Le conscrit déserte. Il existe de cette désertion deux versions, dont chacune a pour elle plusieurs témoins. Selon l'une, Jean-Marie Vianney, qui avait été malade et était encore convalescent, éprouva des difficultés à rejoindre son régiment, s'égara et, pour ne pas être puni comme déserteur, accepta la proposition d'un paysan de le cacher sous un faux nom, comme instituteur dans son village. Selon l'autre version, la désertion fut délibérée. Même les témoins qui présentent la désertion comme quasi-involontaire font état de la répugnance que la guerre d'Espagne inspirait à Vianney, qui, comme la plupart des catholiques, croyait cette guerre contraire à la volonté de Dieu. Il s'installe sous un faux nom au village des Noës et y donne des leçons aux enfants dans diverses familles. Le maire et le curé sont au courant de sa situation irrégulière et, d'ailleurs, ne craignent rien des habitants du village, qui, comme la plus grande partie de la population paysanne de la région, sont disposés à protéger les réfractaires. Quand, le 25 mars 1810, Napoléon signe un décret amnistiant les insoumis à condition qu'ils se mettent à la disposition des autorités départementales, Vianney, par une décision dont le caractère délibéré ne fait cette fois aucun doute, décide de rester déserteur. Les autorités impériales, qui refusent de croire que le père de Jean-Marie ignore la cachette du déserteur, lui infligent de lourdes amendes pour faire pression sur lui et finalement, le jeune frère de Jean-Marie accepte de servir à sa place contre une indemnité payée par le père. Il semble que le père ait tenu grief à Jean-Marie de sa conduite en cette affaire. >>
Cinq leçons à retenir de cette aventure :
- la vassalité politique du clergé concordataire envers le régime (« mes généraux, mes préfets, mes évêques », dixit Napoléon) ;
- la « répugnance » que la guerre d'Espagne inspirait à Jean-Marie Vianney (23 ans), comme à beaucoup d'autres catholiques, même si l'Eglise concordataire célébrait les vertus du régime ;
- la solidarité de tout le village autour du jeune insoumis ;
- la persévérance de celui-ci dans l'insoumission malgré la promesse d'amnistie impériale : c'était réellement de l'objection de conscience de sa part ;
- et la division causée dans la famille Vianney par l'attitude de Jean-Marie : celui-ci ne cède pas au conformisme (si « naturel ») de l'unité familiale, pas plus qu'il n'a cédé au conformisme (si « traditionnel ») de l'obéissance civique.
La mort de Jean-Marie Vianney sous les drapeaux aurait privé la Communion des saints du « patron de tous les curés de l'univers »*. Son insoumission-désertion est aussi un exemple : celui d'une conscience chrétienne droite, juge d'une guerre injuste.
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* titre décerné par Pie XI en 1929.
Murviedro, 1809 : exécution de moines par l'armée française.
04/08/2012 | Lien permanent | Commentaires (5)
Au Bundestag, le discours magistral de Benoît XVI est salué par une ovation
Le pape a notamment parlé de l'écologie en des termes qui devraient amener les derniers écolophobes catholiques (des Français, hélas) à rectifier leur position :
Nous reviendrons à loisir sur ce très important discours, par lequel le pape Ratzinger a (comme d'habitude) modifié dès les premières heures de son voyage le climat d'hostilité préfabriqué. Tout de suite, je ne résiste pas au plaisir de signaler l'avant-dernier paragraphe du discours, qui fonde spirituellement l'évangélisation de l'écologie – et devrait convertir ses derniers contempteurs catholiques :
<< La raison positiviste, qui se présente de façon exclusiviste et n’est pas en mesure de percevoir quelque chose au-delà de ce qui est fonctionnel, ressemble à des édifices de béton armé sans fenêtres, où nous nous donnons le climat et la lumière tout seuls et nous ne voulons plus recevoir ces deux choses du vaste monde de Dieu. Toutefois nous ne pouvons pas nous imaginer que dans ce monde auto-construit nous puisons en secret également aux « ressources » de Dieu, que nous transformons en ce que nous produisons. Il faut ouvrir à nouveau tout grand les fenêtres, nous devons voir de nouveau l’étendue du monde, le ciel et la terre et apprendre à utiliser tout cela de façon juste.
Mais comment cela se réalise-t-il ? Comment trouvons-nous l’entrée dans l’étendue, dans l’ensemble ? Comment la raison peut-elle retrouver sa grandeur sans glisser dans l’irrationnel ? Comment la nature peut-elle apparaître de nouveau dans sa vraie profondeur, dans ses exigences et avec ses indications ? Je rappelle un processus de la récente histoire politique, espérant ne pas être trop mal compris ni susciter trop de polémiques unilatérales. Je dirais que l’apparition du mouvement écologique dans la politique allemande à partir des années soixante-dix, bien que n’ayant peut-être pas ouvert tout grand les fenêtres, a toutefois été et demeure un cri qui aspire à l’air frais, un cri qui ne peut pas être ignoré ni mis de côté parce qu’on y entrevoit trop d’irrationalité. Des personnes jeunes s’étaient rendu compte quelque chose ne va pas dans nos relations à la nature ; que la matière n’est pas seulement un matériel pour notre faire, mais que la terre elle-même porte en elle sa propre dignité et que nous devons suivre ses indications. Il est clair que je ne fais pas ici de la propagande pour un parti politique déterminé – rien ne m’est plus étranger que cela. Quand, dans notre relation avec la réalité, il y a quelque chose qui ne va pas, alors nous devons tous réfléchir sérieusement sur l’ensemble et nous sommes tous renvoyés à la question des fondements de notre culture elle-même.
Qu’il me soit permis de m’arrêter encore un moment sur ce point. L’importance de l’écologie est désormais indiscutée. Nous devons écouter le langage de la nature et y répondre avec cohérence. Je voudrais cependant aborder encore avec force un point qui aujourd’hui comme hier est largement négligé : il existe aussi une écologie de l’homme. L’homme aussi possède une nature qu’il doit respecter et qu’il ne peut manipuler à volonté. L’homme n’est pas seulement une liberté qui se crée de soi. L’homme ne se crée pas lui-même. Il est esprit et volonté, mais il est aussi nature, et sa volonté est juste quand il écoute la nature, la respecte et quand il s’accepte lui-même pour ce qu’il est, et qu’il accepte qu’il ne s’est pas créé de soi. C’est justement ainsi et seulement ainsi que se réalise la véritable liberté humaine.
Revenons aux concepts fondamentaux de nature et de raison d’où nous étions partis.
Le grand théoricien du positivisme juridique, Kelsen, à l’âge de 84 ans – en 1965 – abandonna le dualisme d’être et de devoir être. Il avait dit que les normes peuvent découler seulement de la volonté. En conséquence, la nature ne pourrait renfermer en elle des normes que si une volonté avait mis ces normes en elle. D’autre part, cela présupposerait un Dieu créateur, dont la volonté s’est introduite dans la nature. « Discuter sur la vérité de cette foi est une chose absolument vaine », note-t-il à ce sujet... L’est-ce vraiment ? – voudrais-je demander. Est-ce vraiment privé de sens, de réfléchir pour savoir si la raison objective qui se manifeste dans la nature ne suppose pas une Raison créatrice, un Creator Spiritus ? >>
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23/09/2011 | Lien permanent | Commentaires (10)
”L'Européen le plus moderne c'est vous pape Benoît XVI”
...aurait dit Apollinaire après le discours du pape hier au Bundestag (à lire sur le site du Vatican) :
On connaît Zone, le poème de Guillaume Apollinaire :
« À la fin tu es las de ce monde ancien
Bergère ô tour Eiffel le troupeau des ponts bêle ce matin
Tu en as assez de vivre dans l'antiquité grecque et romaine
Ici même les automobiles ont l'air d'être anciennes
La religion seule est restée toute neuve la religion
Est restée simple comme les hangars de Port-Aviation
Seul en Europe tu n'es pas antique ô Christianisme
L'Européen le plus moderne c'est vous Pape Pie X
Et toi que les fenêtres observent la honte te retient
D'entrer dans une église et de t'y confesser ce matin
Tu lis les prospectus les catalogues les affiches qui chantent tout haut
Voilà la poésie ce matin et pour la prose il y a les journaux
Il y a les livraisons à 25 centimes pleines d'aventures policières
Portraits des grands hommes et mille titres divers... »
Après avoir lu le discours au Bundestag, j'ai envie d'écrire : l'Européen le plus moderne c'est vous pape Benoît XVI. Ce serait plus exact (sans commune mesure) : ce pape – loin du passéisme – propose un renouvellement radical dans une ère sans précédent.
Tout s'articule autour du paragraphe 1 (dernières lignes), de certaines lignes des paragraphes 2-3-5-6, et du paragraphe 8.
> Paragraphe 1 : notre ère sans précédent et les problèmes qu'elles fait surgir... << L’homme est en mesure de détruire le monde. Il peut se manipuler lui-même. Il peut, pour ainsi dire, créer des êtres humains et exclure d’autres êtres humains du fait d’être des hommes. Comment reconnaissons-nous ce qui est juste ? Comment pouvons-nous distinguer entre le bien et le mal, entre le vrai droit et le droit seulement apparent ? >>
> Paragraphe 2 : l'insignifiance du relativisme... << Dans les questions fondamentales du droit, où est en jeu la dignité de l'homme et de l'humanité, le principe majoritaire ne suffit pas...>> Paragraphe 3 : <<Ce qui, en référence aux questions anthropologiques fondamentales, est la chose juste et peut devenir droit en vigueur, n'est pas du tout évident aujourd'hui...>> Paragraphe 5 : « Une conception positiviste de la nature, qui entend la nature de façon purement fonctionnelle, comme les sciences naturelles l'expliquent, ne peut créer aucun pont vers l'ethos et le droit, mais susciter seulement des réponses fonctionnelles...>> Paragraphe 6 : << Là où la raison positiviste s'estime comme la seule culture suffisante, reléguant toutes les autres réalités culturelles à l'état de sous-culture, elle réduit l'homme, ou même menace son humanité... [Elle] ressemble à des édifices de béton armé sans fenêtres, où nous nous donnons le climat et la lumière tout seuls et nous ne voulons plus recevoir ces deux choses du vaste monde de Dieu... >>
> La charnière du raisonnement est aux deux dernières lignes du paragraphe 6, quand le pape déclare : il faut << ouvrir tout grand les fenêtres >>, il faut << voir l'étendue du monde, le ciel et la terre, et apprendre à utiliser tout cela de façon juste. >>
Ces images intellectuelles sont d'une importance cruciale. Prises dans le registre de l'écologie, elles s'exhaussent en parabole de l'attitude de l'homme dans l'univers : c'est un appel à la responsabilité et à l'humilité, devant la condition humaine qui se déchiffre ultimement comme condition de créature.
> D'où l'interrogation-clé, au paragraphe 8 : << Est-ce vraiment privé de sens, que de réfléchir pour savoir si la raison objective qui se manifeste dans la nature ne suppose pas une Raison créatrice, un Creator Spiritus ? >>
À un questionnement sans précédent, la réponse proportionnée est une ouverture sur la recherche la plus radicale. C'est de cette façon que Joseph Ratzinger est l'Européen le plus moderne. C'est cela que les élus allemands ont ovationné hier, sans que les grands médias français nous en aient dit un seul mot.
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23/09/2011 | Lien permanent | Commentaires (2)
Face à l'OTAN : un hommage de gauche à de Gaulle
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Extraits de l’éditorial de Denis Sieffert, Politis, 3 avril :
« …Grâce à [de Gaulle], nous nous sommes tenus pendant une bonne quarantaine d’années hors de la sphère d’influence américaine. Nous en étions sortis, non d’ailleurs sans brutalité, un certain 7 mars 1966. […] Un an plus tard, toutes les bases américaines sur le sol français étaient fermées. Puis, c’est le grand discours de Phnom Penh, qui sonne comme un défi à l’empire englué dans la guerre du Vietnam. […]
À l’heure où vous lisez ces lignes, un président français s’apprête, lui, à brader ce qu’il y avait de plus précieux dans l’héritage gaullien. Depuis Bucarest, où il participe à un sommet de l’Otan, il va nous expliquer le pourquoi de ce subit rapprochement fusionnel avec l’hyperpuissance américaine.
[…] Nous voici au moment du passage à l’acte, à l’instant de la dissolution politico-culturelle dans l’univers anglo-saxon. […] C’est au Premier ministre britannique, Gordon Brown, que Nicolas Sarkozy a annoncé l’envoi de mille soldats supplémentaires en Afghanistan, obtempérant ainsi à l’ordre américain. Ce n’est pas le Parlement français qui en a eu la primeur ; celui-ci n’a eu droit qu’à un débat improvisé et privé de vote. Pourtant, plonger un peu plus encore notre armée dans une guerre vécue par tout un peuple comme une occupation n’est pas anodin. D’autant qu’il ne s’agit pas seulement de considérations de politique extérieure. Tout va de pair : l’engagement sous le commandement américain et l’admiration non dissimulée pour le modèle de société anglo-saxonne façon Reagan-Thatcher. Si les syndicats français avaient encore des illusions sur le caractère politique des affrontements que leur impose le pouvoir, l’exaltation du système « social » britannique, l’autre jour à Londres, les aura édifiés.
On devine les arguments : « le monde a changé » ; « nous ne sommes plus comme de Gaulle au temps de la guerre froide entre les deux blocs américain et soviétique ». Raison de plus ! Dans un monde unipolaire, il est plus urgent que jamais de garder ses distances. […] L’idéologisation du terrorisme procède du même refus de la complexité et du même déni des causes. L’illusion que seules la force et les bombes peuvent payer n’a guère changé. Certes, l’Afghanistan ou l’Irak ne sont pas le Vietnam. Les talibans ne sont pas le Viet Minh, et Moktada Sadr n’est pas Ho Chi Minh, mais les peuples bombardés, eux, se ressemblent tous. Et leur tendance à aller vers ceux qui résistent à l’envahisseur n’est guère différente. Autrement dit, il y a beaucoup plus de raisons aujourd’hui de garder à bonne distance des États-Unis une diplomatie qui devrait être européenne qu’au temps du général.
Que ferait de Gaulle ? […] Il transgresserait des interdits. Surtout décrétés par la seule puissance américaine à partir de ses intérêts et des fantasmes de sa classe dirigeante… »
[Fin de la reproduction d'extraits de l'éditorial de Politis).
04/04/2008 | Lien permanent | Commentaires (8)
Pape François : ”le Pasteur ressuscité prend sur ses épaules nos frères et soeurs opprimés”
Le message pascal urbi et orbi :
PÂQUES 2017
loggia centrale de la basilique vaticane
dimanche 16 avril 2017
<< Chers frères et sœurs,
Bonne fête de Pâques !
Aujourd’hui, dans le monde entier, l’Église renouvelle l’annonce pleine d’étonnement des premiers disciples : « Jésus est ressuscité ! »- « Il est vraiment ressuscité, comme il l’avait dit ! »
L’antique fête de Pâques, mémorial de la libération du peuple hébreu de l’esclavage, atteint ici son accomplissement : par sa résurrection, Jésus Christ nous a libérés de l’esclavage du péché et de la mort et nous a ouvert le passage vers la vie éternelle.
Nous tous, quand nous nous laissons dominer par le péché, nous perdons la bonne route et nous allons errant comme des brebis égarées. Mais Dieu même, notre Pasteur, est venu nous chercher, et pour nous sauver, il s’est abaissé jusqu’à l’humiliation de la croix. Et aujourd’hui, nous pouvons proclamer : « Il est ressuscité le bon Pasteur qui pour son troupeau est allé à la rencontre de la mort, alléluia ! » (Missel Romain, IV° dimanche de Pâques, Antienne de la communion).
A travers les temps, le Pasteur ressuscité ne se lasse pas de nous chercher, nous ses frères égarés dans les déserts du monde. Et par les signes de la Passion – les blessures de son amour miséricordieux – il nous attire sur son chemin, le chemin de la vie. Aujourd’hui aussi, Il prend sur ses épaules beaucoup de nos frères et sœurs opprimés par le mal sous ses différentes formes.
Le Pasteur Ressuscité va chercher celui qui est égaré dans les labyrinthes de la solitude et de la marginalisation ; il va à sa rencontre à travers des frères et des sœurs qui savent s’approcher avec respect et tendresse et faire entendre à ces personnes sa voix, une voix jamais oubliée, qui les rappelle à l’amitié avec Dieu.
Il prend en charge tous ceux qui sont victimes des anciens et des nouveaux esclavages : travaux inhumains, trafics illicites, exploitation et discrimination, graves dépendances. Il prend en charge les enfants et les adolescents qui sont privés de leur insouciance pour être exploités ; et qui a le cœur blessé par les violences subies à l’intérieur des murs de sa propre maison.
Le Pasteur Ressuscité se fait compagnon de route de tous ceux qui sont contraints de laisser leur terre à cause de conflits armés, d’attaques terroristes, de famines, de régimes oppressifs. A ces migrants forcés, il fait rencontrer des frères sous tous les cieux, pour partager le pain et l’espérance sur le chemin commun.
Dans les histoires complexes et parfois dramatiques des peuples, que le Seigneur Ressuscité guide les pas de qui cherche la justice et la paix ; et qu’il donne aux responsables des Nations le courage d’éviter l’expansion des conflits et d’arrêter le trafic des armes.
En ces temps, de façon particulière, qu’il soutienne les efforts de tous ceux qui s’emploient activement à apporter soulagement et réconfort à la population civile en Syrie, Syrie bien aimée et martyrisée, victime d’une guerre qui ne cesse pas de semer horreur et mort. Encore hier, un dernier et ignoble attentat contre les réfugiés en fuite a provoqué de nombreux morts et blessés. Qu’il donne la paix à tout le Moyen Orient, à commencer par la Terre sainte, comme aussi en Irak et au Yémen.
Que la proximité du Bon Pasteur ne manque pas aux populations du Sud Soudan, du Soudan, de la Somalie et de la République Démocratique du Congo, qui souffrent de conflits qui se perpétuent, aggravés par la très sérieuse famine qui frappe certaines régions de l’Afrique.
Que Jésus ressuscité soutienne les efforts de tous ceux qui, spécialement en Amérique latine, s’engagent à garantir le bien commun des sociétés, parfois marquées de tensions politiques et sociales qui dans certains cas aboutissent à la violence.
Qu’on puisse construire des ponts de dialogue, en persévérant dans la lutte contre la plaie de la corruption et dans la recherche de solutions valables et pacifiques aux controverses, pour le progrès et la consolidation des institutions démocratiques, dans le plein respect de l’Etat de droit.
Que le Bon pasteur aide la bien-aimée terre d’Ukraine, encore affligée par un conflit sanglant, à retrouver la concorde et accompagne les initiatives en vue d’adoucir les drames de tous ceux qui en souffrent des conséquences.
Que le Seigneur ressuscité, qui ne cesse pas de combler le continent européen de sa bénédiction, donne espérance à tous ceux qui traversent des moments de crise et de difficultés, spécialement en raison du manque de travail surtout pour les jeunes.
Chers frères et sœurs, cette année comme chrétiens de toute confession, nous célébrons ensemble la Pâque. Ainsi, d’une seule voix dans chaque partie de la terre résonne l’annonce la plus belle : « Le Seigneur est vraiment ressuscité, comme il l’avait dit ! ». Il a vaincu les ténèbres du péché et de la mort, qu’il donne la paix à notre temps.
Bonne fête de Pâques ! >>
16/04/2017 | Lien permanent
Macron en actes : n'est pas de Gaulle qui veut
Le one man show macronien ne fait que prolonger l'atlantico-libéralisme de Sarkozy&Hollande (à l'opposé de l'héritage gaullien) :
Une pratique autoritaire égo-centrée : pour booster quoi ? à l'extérieur, l'atlantisme. À l'intérieur, la liquéfaction libérale de la société... Voilà le contenu naissant de l'ère macronienne. Elle se présente comme une aggravation-accélération (rapidación, dirait le pape) de la tendance des deux précédents quinquennats.
Dans les premières semaines, l'opinion a apprécié que M. Macron paraisse prendre de la hauteur par rapport aux frénésies sarkozyennes et au néant hollandien. Elle n'a pas tardé à comprendre que cette rafale de "gestes symboliques" relevait de la com' plus que du politique. Recevant M. Poutine à Versailles, M. Macron se campe en roi mais récite au Russe la liste des griefs américains. Recevant M. Trump pour le 14 juillet, il se campe en chef de guerre : mais c'est au moment où il engueule les généraux, après avoir pris 850 millions aux armées contre la promesse de tenir plus tard la promesse trahie.
Ce que M. Macron ne veut pas remettre à plus tard, c'est la réforme de l'ISF en faveur de la spéculation financière : exemple du macronisme concret qui s'organise à l'abri des accessoires symboliques ("je suis votre chef", etc). N'est pas de Gaulle qui veut... Et puisque M. Macron se prétend - aussi - l'héritier de la fonction royale, je prélève ces mises au point dans le dernier numéro du bimensuel Royaliste [*]:
<< [Dans le discours de M. Macron au Congrès], les longs passages soigneusement rédigés par son porte-plume visent à camper Emmanuel Macron en prince-philosophe. Nous sommes loin du compte. [...] Le concept de souveraineté a été récupéré, non pour mettre en question les traités européistes et l'Otan, mais pour faire croire qu'un pays était souverain quand il était en ordre sur le plan budgétaire et en matière de "réformes". Même opération sur le thème de la justice sociale - déjà éventée par les ordonnances destinées à organiser la casse sociale... >>
<< Nous maintenons notre analyse quant à l'efficacité du bloc oligarchique : quand il s'agira de voter le saccage du Code du travail et les mesures d'austérité, la majorité "En marche" et ses complices de l'opposition "constructive" respecteront la discipline de classe et voteront sans défaillir toutes les lois scélérates dictées par l'Elysée... >>
<< L'élu du 7 mai n'a rien changé dans le mode de gouvernance établi au début du siècle : il s'est inscrit d'emblée dans le mouvement subversif qui nous a fait passer de la République à l'oligarchie, du gouvernement selon la visée de l'intérêt général à la prise en main du pouvoir par une petite minorité chargée de promouvoir un conglomérat d'intérêts privés - en l'occurrence ceux de la classe dominante. [Le projet de M. Macron] est l'accélération du processus de domination du pays par l'élite du pouvoir, des affaires et des médias [...] Emmanuel Macron pense et agit au mépris de la fonction arbitrale qui lui est assignée par la Constitution, selon l'ambition dictatoriale que suppose la pleine réalisation de l'ultralibéralisme... >>
Combien de Français penseront cela dans un an ?
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[*] qui n'a rien à voir avec l'extrême droite - ni même la droite.
17/07/2017 | Lien permanent | Commentaires (7)