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Gaza : ”un rouleau compresseur”

Témoignage de Nicolas Palarus (Médecins sans frontières) :

 

<< Ce n'est pas du tout ''militaire'', ce que l'armée israélienne est en train de faire ici. La grande mosquée, la télévision, le port, maintenant la centrale énergétique : tout a été détruit. Il n'y a absolument rien de ''chirurgical'' là-dedans... Les choses peuvent encore empirer, bien que la situation soit déjà catastrophique. Il est de plus en plus difficile de faire notre travail. Les équipes sont épuisées, et il ne reste plus que nous, l'ONU et le Croissant rouge. .. Israël bombarde tout ce qui bouge, même les réfugiés de l'ONU... Il y a deux jours, un médecin est mort, frappé par un missile lorsqu'il se trouvait dans une voiture de l'ONU.. Ils bombardent n'importe où. Bien que leurs objectifs officiels soient les tunnels et le désarmement du Hamas, ils bombardent des zones de peuplement. Leur logique m'échappe. Moi, j'ai l'impression qu'Israël ne s'intéresse pas du tout aux dommages collatéraux... Accuser les Palestiniens de se servir des civils comme de boucliers humains ne tient pas du tout... La réalité, c'est que les gens ne savent pas où aller.... Dans la bande de Gaza, nous sommes dominés par le désespoir. [Les pays occidentaux] ne voient pas qu'ici, un rouleau compresseur est en train d'écraser tout ce qui bouge. >>

(recueilli par Filippo Ortona, Libération 1er/08)

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01/08/2014 | Lien permanent

Kiev : des milliers de nostalgiques de 1941 défilent aux flambeaux en scandant ”mort à l'ennemi”

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... pour célébrer la mémoire de Stepan Bandera :

Ces milliers de jeunes et de moins jeunes répondaient à l'appel des deux partis d'extrême droite, Svoboda (ex-Parti social-nationaliste) et Pravyi Sektor, ainsi que des deux bataillons paramilitaires d'épuration ethnique : Azov et Aïdar. Les manifestants scandaient les slogans de 1941 : « Gloire à la nation, gloire aux héros, mort à l'ennemi ». En tête de cette grande parade, un peloton d'honneur portait une effigie géante de Bandera, entourée des drapeaux rouge-noir de l'armée nationaliste UPA de 1941, et suivie d'une forêt de drapeaux bleu et jaune du groupe parlementaire Svoboda et des nombreux groupes néo-nazis d'Ukraine (Una-Unso etc) mêlés - c'est l'habitude à Kiev depuis un an - à la bannière étoilée de l'Union européenne.

Cette information apparaît sur les sites d'information français, alors que vient d'éclater à Paris le scandale du reportage du magazine Elle à la gloire d'une militante du bataillon Aidar... qui se révèle être une activiste néo-nazie virulente.

Après l'élection présidentielle ukrainienne du 25 mai 2014, le journal Le Monde affirmait que les partis, ligues, mouvements et milices néo-nazis étaient quantité négligeable dans le pays.



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02/01/2015 | Lien permanent

Le cardinal Pell aurait pu consulter son compatriote

    ...au lieu de s'aventurer à désavouer le pape... 

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                 Le Pr Will Steffen (Université nationale australienne).



 

Le 16 janvier 2015 dans la revue Science, l'équipe internationale de chercheurs groupée autour du climatologue Will Steffen annonçait que « la planète a dépassé certaines de ses limites » : l'érosion de la biodiversité est dans le rouge, la déforestation africaine et sud-asiatique explose sous l'effet de la spéculation foncière, l'agro-industrie inonde les sols de phosphore et d'azote. Et la menace de changement climatique augmente...

Will Steffen est climatologue. Il sait, lui, de quoi il parle. Et sa nationalité est australienne : il enseigne – entre autres – à l'université nationale de Canberra, où se trouve son laboratoire. On peut donc se demander pourquoi S. Em. Mgr le cardinal Pell*, aussi australien que lui et professant (mais dans le Financial Times) un ardent respect pour « la science », ne s'est pas informé auprès de Will Steffen sur la situation climatique. Cette démarche lui aurait évité de faire hausser les épaules aux scientifiques en tentant de tacler Laudato Si' en un domaine – le climat – sur lequel il est visiblement désinformé ; contrairement au pape qui, lui, a longuement consulté les spécialistes.

 

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* Je lui exprime mon respect le plus protocolaire, pour n'être pas invectivé derechef par le twittos pieux qui ne voit pas d'objection à ce qu'un cardinal tacle le pape, mais trouve que je me déshonore en protestant contre ce tacle. L'ultramontanisme des beaux quartiers serait-il équivoque ?

 

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« Coucou, 'Sens commun' »

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Si j’étais à Sens commun (mais combien sont-ils encore ?), je serais rouge avec la honte en lisant ce sarcasme de Libération :

 

<<  Geoffroy Didier propose une «révolution» : "La droite [doit] vivre avec son temps". Incroyable, suffisait d’y penser... Et parmi les pistes évoquées par l’eurodéputé LR ce matin, dans une tribune au Monde, il y a ceci : "Que la droite se pose au moins la question de l’ouverture de la PMA, qui serait une avancée sociale comme le fut de fait le mariage pour tous, et avant le pacs, et encore avant l’IVG. Plutôt que de laisser une minorité remettre en question chacun d’eux, la droite devrait afficher une volonté de protéger de tels acquis sociétaux..." Coucou, Sens commun ! Gonflé, de la part du directeur de la campagne européenne du très conservateur (et anti-IVG) François-Xavier Bellamy ? Si Didier s’était déjà déclaré pour l’ouverture de la PMA aux couples de femmes «à titre personnel», il prenait soin de préciser : "Je respecte aussi le point de vue [...] d'autres qui, dans la même famille politique, avec des mêmes valeurs communes, ne pensent pas comme moi.» Mais c’était fin 2017 et depuis, la "droite Trocadéro" est tombée à 8 % dans les urnes. >>

 

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À la Concorde, M. Macron héroïcise les soignants

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Leur rendre hommage est certainement bien. Leur rendre l’hôpital (et les payer décemment) serait mieux :

Le chef de l'Etat préside une fête militaro-civique visant à élever les soignants au rang de héros. Cet hommage est indiscutablement mérité, loin de nous l’idée d’en douter – même si l’exécutif fait depuis dix ans un abus croissant de ce genre de cérémonies, comme pour se faire pardonner ses responsabilités…

Mais avant d’être célébrés à la Concorde dans un déferlement de bleu-blanc-rouge, les personnels hospitaliers étaient dans la rue pour défendre les revendications que la Macronie refusait d’entendre depuis deux ans : desserrer l’étau techno-financier qui assujettit l’hôpital à des impératifs commerciaux néfastes, et rémunérer les personnels de façon enfin décente. Le fameux “Ségur” n’apporte qu’un début de réponse à la seconde attente, et aucune à la première. Pire : sitôt finie la première vague de Covid-19, les gestionnaires et les (étranges) ARS ont repris le pouvoir, s’attirant ainsi ce cri de guerre des soignants : “Non au retour à l’anormal”.

La vérité est que la Macronie, originellement outil de l’anormalisation (alignement de tout sur le business), semble y revenir toujours en dépit des envolées oratoires du chef de l’Etat. La nocivité humaine et sociale de cet engrenage est devenue flagrante dans sa version médicale lors de l’épidémie. Pour en sortir il faudrait un changement radical de paradigme ou “de logiciel”, comme ils disent : et l’on peut craindre que ce ne soit pas demain la veille. Le soutien aux luttes sociales va nous appeler souvent et longtemps.

 

 

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Russie, Ukraine etc : leçon de sagesse par Edgar Morin

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C'est à lire d'urgence ici :  https://www.nouvelobs.com/idees/20220526.OBS58953/guerre-en-ukraine-j-essaie-de-ne-pas-desesperer-par-edgar-morin.html

 

En lisant ce remarquable texte, je me souviens de nos conversations avec Edgar Morin  quelque temps avant la chute de Gorbatchev : nous étions à Moscou, groupe d'intellectuels français invités par l'Union des écrivains soviétiques. Hébergés comme des officiels à la résidence Octobre – tapis rouges, plantes vertes et buste de Lénine en haut de l'escalier de marbre ! –, nous observions  le bizarre climat qui régnait alors sous le nom de perestroika ("reconstruction") et qui se traduisait surtout à la télévision par d'interminables palabres de Gorbatchev lui-même à la porte des usines pour tenter d'expliquer à l'ouvrier moyen que l'URSS ne pouvait continuer comme ça et qu'il fallait des changements radicaux... Le changement radical n'allait pas tarder : éviction de Gorbatchev par la vieille garde du Parti, puis contre-putsch d'Eltsine et liquidation brutale de l'ère soviétique ; la "reconstruction" allait plutôt ressembler à une destruction économique et sociale et à une invasion de l'ex-URSS par les intérêts politico-financiers occidentaux. Ce qui devait inévitablement entraîner un retour de flamme, qui allait prendre la forme du poutinisme. On connaît la suite. Et j'adhère à la vision qu'Edgar Morin propose aujourd'hui, fort de sa longue expérience.

 

 

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27/05/2022 | Lien permanent

Le catholicisme est essentiellement social (2)

Suite et fin de la synthèse du livre d'Henri de Lubac :

Troisième partie

 

- La situation présente : Croyant commenter les textes fondamentaux des deux premiers siècles, Renan définit ainsi le christianisme : «Une religion faite pour la consolation intérieure d'un tout petit nombre d'élus ». On se demande comment il a bien pu lire ces textes.

Ce qui reste vrai, c'est qu'à l'époque de Renan, l'écho de cette doctrine universelle était bien amorti. Dans une partie de l'enseignement courant, une bonne dose d'individualisme s'était infiltrée.

On a souvent signalé à ce sujet l'influence conjuguée de la logique aristotélicienne et du droit romain sur l'élaboration théologique au moyen-âge : propension à découper, définir et isoler les objets. Mais le processus s'inscrit dans un développement général de l'individualisme au cours des derniers siècles.

Un autre ennemi a été dénoncé, expliquant cette lente dérive théologique : la controverse. Certes l'hérésie a toujours été une occasion de progrès pour la doctrine orthodoxe, mais elle comporte aussi le danger d'un progrès unilatéral si le raidissement sauveur n'est pas suivi d'un approfondissement. Par exemple, après Luther qui l'avait profanée, on n'a plus osé pendant longtemps parler de la « liberté chrétienne ». Sacrifiant excessivement aux nécessités de la controverse, le théologien luttant contre l'hérésie tend malgré lui à se placer au point de vue de l'hérétique, faisant ainsi implicitement des concessions à son adversaire. Ainsi la théologie moderne de l'Eglise s'est largement située par opposition à l'individualisme protestant. Un tel accent fut mis sur les droits du pouvoir ecclésiastique dans la chrétienté, puis sur les prérogatives de la hiérarchie, que la solidarité spirituelle des membres du corps mystique en fut plus d'une fois pratiquement oublié.

Dans le pouvoir ecclésiastique, on risquait de ne plus voir qu'une institution tout humaine, au service d'un petit groupe humain, gardienne d'un « ordre » délibérément fermé. De même, dans la théologie de l'Eucharistie, l'action rétrécissante des controverses n'avait pas non plus manquer de s'exercer.

Ce propos donne la mesure de la tâche immense qui s'annonce : «Il faut arracher notre enseignement d'école à l'individualisme où, depuis le XVIème siècle, semble-t-il, nous l'avons laissé s'engager au nom de la clarté et pour des motifs de controverse. Au lieu de construire nos traités de la Grâce et des Sacrements, de l'Eucharistie et même de l'Eglise, comme s'il n'y avait jamais en face du Rédempteur qu'une poussière d'individus, chacun réglant pour son propre compte le bilan de ses relations personnelles avec Dieu, comme aux guichets de ce monde passent successivement des contribuables, des voyageurs et des administrés, sans lien organique entre eux, il nous faudra remettre au premier plan le dogme du Corps mystique en lequel consiste l'Eglise, où il y a des membres articulés, un seul système nerveux, un seul système sanguin, et une seule tête, car le mystère du Verbe incarné est d'abord le mystère du nouvel Adam et du Chef de l'Humanité » (E.Masure, Semaine Sociale de Nice, 1934).

 

- Personne et Société : Trop grave, on ne peut éluder cette question : mettre autant en relief, comme nous l'avons fait, le caractère social du dogme, n'est-ce pas diminuer dangereusement cette autre vérité, non moins essentielle, que le salut est pour chacun affaire personnelle ? Ne devra-t-on pas reconnaître qu'il existe dans la tradition chrétienne deux enseignements difficilement conciliables ?

Ne nous étonnons pas d'une telle antinomie, apparente, entre le Corps social de saint Paul et le personnalisme chrétien. Tout le dogme n'est qu'une suite de « paradoxes » déconcertant la raison naturelle. L'antinomie présente nous place devant les rapports de la distinction et de l'unité, en vue de mieux saisir l'harmonie du personnel et de l'universel.

Les parties concourent d'autant plus à l'unité qu'elles sont moins des « morceaux » et davantage des membres. L'expérience sensible de la vie nous amène à constater que dans la hiérarchie des êtres, le vivant acquiert plus d'unité interne à mesure qu'en lui s'opère une différenciation plus profonde des fonctions et des organes. L'être indifférencié, le pur homogène, est aussi peu un que possible : c'est une poussière anonyme. Le constat est le même dans l'ordre moral. La foi, elle, par le plus secret de ses mystères, nous fait toucher la vérité. Ne croyons-nous pas en effet qu'il y a trois Personnes en Dieu ? Ne surgissent-elles pas dans l'unité, de l'unité d'une même Nature ?

L'unité n'est aucunement confusion, pas plus que la distinction n'est séparation. Ce qui oppose n'est-il pas pour autant relié, et par le plus vivant des liens, celui d'un mutuel appel ? Pas plus qu'en se soumettant à Dieu ou qu'en s'unissant à Dieu, l'homme, en s'intégrant au grand Corps spirituel dont il doit être membre, ne se perd ou ne se dissout. Il se trouve au contraire, il se libère et s'affermit dans l'être. L'union différencie et la solidarité solidifie.

La personne n'est pas une monade transcendante : il faut être regardé pour être éclairé, et les yeux « porteurs de lumière » ne sont pas ceux de la seule divinité. D'autre part, être personne, n'est-ce pas essentiellement entrer en rapport avec d'autres pour concourir à un Tout ? L'appel à la vie personnelle est une vocation, c'est à dire un appel à jouer un rôle éternel. Et c'est parce que le monde est une histoire, une histoire unique, que la vie de chacun est un drame.

L'Esprit que le Christ a promis aux siens de leur envoyer, son Esprit, est à la fois Celui qui fait pénétrer l'Evangile au fond de l'âme et Celui qui le répand partout. Il creuse en l'homme de nouvelles profondeurs qui l'accordent aux « profondeurs de Dieu », et il le jette hors de lui-même jusqu'aux confins de la terre ; il universalise et il intériorise ; il personnalise et il unifie.

Ce double mouvement de l'Esprit apparaît pleinement dans la conversion de Paul. Sa conversion est une vocation. Il ne peut demeurer en tête à tête avec ce Christ qu'il vient de trouver en lui. Du même coup, avec la même urgence que le service de ce Christ, le service des hommes ses frères, s'impose à lui. «Le genre humain entier n'est point à l'étroit dans son coeur » (Charles Bonnet). L'Image de Dieu, l'Image du Verbe, que le Verbe incarné restaure, c'est moi-même, et c'est l'autre et c'est tout-autre, c'est le point de notre unité même en Dieu, point d'une parfaite solidarité de l'intime et de l'universel.

La spiritualité catholique n'aura donc pas à choisir entre une tendance « intérieure » et une tendance « sociale ». Rien ne serait plus funeste que de croire aisément réalisable une vraie catholicité. Nul n'y accède que par la voie étroite. Il y a en nous ce que nous devons aimer chez les autres, une image de Dieu à restaurer. Il faut couper beaucoup de liens naturels, si l'on veut établir les divines liaisons de la grâce. Dans tout ce qui touche à l'esprit, l'utilitarisme est redoutable ; au contraire, la capacité de présence croît avec celle de recueillement : «La vraie religion est une vie cachée dans le coeur » (Newman, La vie chrétienne). La communion des esprits ne s'opère que par ce qu'ils ont de plus personnel. Le plus haut degré de la vie spirituelle reçoit de Ruysbrocck le nom de « vie commune », parce qu'en cet état l'homme est au service de tous.

«Il y a beaucoup d'âmes, mais il n'y en a pas une seule avec qui je ne sois pas en communion par ce point sacré en elle qui dit Pater Noster » (Claudel, Cantique de Palmyre).

 

Transcendance : Les progrès des sciences sociales nous aident à mieux comprendre la dépendance de l'individu par rapport aux diverses communautés et les aspirations nouvelles à l'unité. Tout comme les représentations nouvelles sur notre histoire et nos origines empiriques, ils peuvent nous être précieux pour une meilleure intelligence du catholicisme, dans son souci de l'histoire universelle et son intérêt pour l'humanité totale.

Le catholicisme peut et doit prendre appui sur ces aspirations à l'unité humaine, pour amener les hommes de bonne volonté jusqu'au seuil du catholicisme, seul capable de réaliser cette unité en un sens éminent. En effet, une destinée transcendante, supposant elle-même l'existence d'un Dieu transcendant, est indispensable à la réalisation d'une destinée vraiment collective. De toute nécessité, il faut un Lieu où l'humanité soit recueillie ; un Centre où elle converge ; un Eternel qui la totalise. Il lui faut un Aimant qui l'attire.

Le Devenir, à lui seul, n'a pas de sens ; c'est un autre nom de l'absurde... S'il y a devenir, il doit y avoir un jour achèvement, et s'il doit y avoir achèvement, il doit y avoir, dès toujours, autre chose que du devenir.

Ayant ainsi d'abord épousé l'élan qui emporte notre siècle pour tenter de le redresser en lui montrant son Terme et les conditions de son aboutissement, il faut maintenant avoir le courage de critiquer les voies où cet élan se détourne et s'enlise. Ayons le courage de se montrer résolument inactuel face au « social » entièrement temporalisé qui domine aujourd'hui les esprits. Ici nous heurtons de front les idéologies qui luttent pour la conquête du monde, et spécialement le marxisme.

La transcendance que Marx renie était le seul garant de sa propre immanence. Si l'homme croit reprendre pour soi les attributs usurpés de la divinité, l'être humain se dissout dans le social, aliéné et dissocié d'avec lui-même, réduit à une fonction sociale ; et ce, même si tel n'est pas l'idéal consciemment nourri par ceux qui rêvent d'une société sans Etat et sans classes. L'intériorité personnelle ne peut qu'être étouffée si l'homme est réduit à des « rapports sociaux ».

Quand les disciples de Marx s'en apercevront enfin, ils n'auront plus le goût de célébrer la « révolution totale », ils n'auront plus le goût de chanter leur délivrance de « l'angoisse métaphysique » et de « l'obsession de Dieu ». Il leur faudra bien revenir alors à « ces maudites questions éternelles » comme disait Dostoïevski, et ils comprendront pourquoi un révolutionnaire aussi hardi qu'eux-mêmes, Proudhon, criait : «Je pense à Dieu depuis que j'existe » !

L'existence socialement la plus parfaite et socialement la plus heureuse, serait la chose la plus inhumaine, si elle n'était pour la vie intérieure. Le temporalisme absolu du système de Marx n'est pas seulement chimérique en ses espoirs, il est en cela absolument indésirable. C'est la vision d'un monde infiniment plat. L'homme social, l'homme historique de Marx n'a que deux dimensions. Le sentiment de l'Eternel doit lui restituer sa profondeur.

Combien sommes-nous reconnaissants en cela à l'Eglise de nous rappeler toujours, notre essentielle condition. Si les hommes d'aujourd'hui sont si tragiquement absents les uns aux autres, c'est d'abord qu'ils sont absents d'eux-mêmes, ayant déserté cet Eternel qui seul les enracine dans l'être et leur permet de communier entre eux. Tel est avant tout le rôle social de l'Eglise : elle nous rend à cette communion. Or ce sentiment d'un salut commun et d'une solidarité de tous par rapport à tous est la meilleure préparation qui soit aux tâches sociales – il est pour chacun la meilleure introduction au « catholicisme social ».

 

Mysterium Crucis : Quel que soit le domaine où sa réflexion l'ait conduit, le chrétien est toujours ramené à la c

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Chrétiens dans l'Europe de demain : un avenir ardu et exaltant, loin du relativisme et de l'intégrisme

Un cas typique aujourd'hui, les Pays-Bas :

 

L'un d'entre vous  signale ces deux articles d'Avvenire (le quotidien des évêques italiens) qui appellent les choses par leur nom. Méditons ce qu'ils nous disent. Ils confirment que l'optique pastorale des années 1970 fut une erreur. Mais ils montrent aussi que l'Europe devient un terrain sociologique et psychologique inédit, où l'évangélisation ne pourra se faire que dans la vérité plénière - donc dans la sincérité et la sobriété, par des moyens simples et pauvres, loin des relativismes autant que des arrogances :

 

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<<  A Amsterdam, que reste-t-il de Noël ?

-------par Marina Corradi



Amsterdam est en fête pendant cette période de Noël. Illuminations fastueuses éclairant la rue Damrak et la place du Dam, pistes de patinage grouillantes de jeunes qui rient, Pères Noël, musique de
Jingle bells sortant des grands magasins bondés. Mais que reste-t-il de Noël dans ce pays qui est l’un des plus sécularisés d’Europe et où, selon un sondage, 58 % de la population ne sait pas exactement ce qui s’est passé ce jour-là ? Dans ce pays qui compte 900 000 immigrés arabes sur 16 millions d’habitants et 20 mosquées rien qu’à Amsterdam ?

Oude Kerk, la plus ancienne église de la cité, construite en 1309, se dresse au cœur du centre ville. Tout autour, il y a le
Red Light District, le quartier chaud. Dans les vitrines où elles s’exposent, les prostituées venues d’Amérique du Sud et d’Europe de l’Est frappent à la vitre pour attirer l’attention des passants. Certaines portent un bonnet de Père Noël. Regardez-les et essayez d’imaginer l’histoire qui les a amenées ici. Elles sourient, enjôleuses. Mais les mille lumières de la ville créent une ivresse qui couvre la fausse gaieté de ces ruelles. Allez plus loin. Nieuwe Kerk, l’église où étaient couronnés les rois de Hollande, est un musée. La seule "église" de la ville à être pleine est celle de Scientologie, six étages en plein cœur de la ville. "Institut de technologie religieuse"
peut-on lire sur une affiche à l’intérieur. Des tests gratuits sur le stress sont proposés. Il y a beaucoup de monde.

Elle est étrange, cette série d’églises qui ne sont plus des églises mais des immeubles d’habitation, des boîtes de nuit, des mosquées. Regardez les éboueurs, les ouvriers qui entretiennent les rues, les serveurs des pizzerias : ils sont presque tous marocains ou turcs. Il y en a près d’un million. Et même si les immigrés provenant de pays chrétiens sont presque aussi nombreux, les Néerlandais ont peur de tous ces musulmans. Le parti de droite populiste de Geert Wilders est le deuxième en nombre d’avis favorables et les élections vont avoir lieu dans quelques mois. Deux Néerlandais sur trois disent qu’il y a trop d’immigrés. En banlieue, des quartiers comme Slotervaart sont des ghettos entièrement musulmans, où il est presque impossible de rencontrer un Néerlandais : ils sont tous partis. Et Rotterdam, où le pourcentage de musulmans est encore plus élevé et dont le maire est musulman, a été appelée
"Eurabie le cauchemar"
par un journal américain. En réalité, il y a moins de femmes voilées au centre des villes néerlandaises que dans certains quartiers de Milan. Bien que les assassinats de Van Gogh et Fortuyn aient profondément secoué les Néerlandais et qu’il y ait des imams fondamentalistes, la grande majorité des musulmans semblent vouloir travailler et vivre en paix.

En vérité la peur de « l’Eurabie » semble n’être
qu’une conséquence d’un phénomène encore plus radical : la sécularisation quasi totale d’un pays qui, jusqu’à la dernière guerre, était catholique ou protestant mais en tout cas chrétien. Un écroulement : aujourd’hui seuls 7 % des catholiques vont à la messe le dimanche et 16 % des enfants sont baptisés. Les Pays-Bas ont été un pays pionnier des mariages homosexuels et de l’euthanasie. "Après le concile Vatican II – dit le professeur Wim Peeters, enseignant au séminaire du diocèse de Haarlem-Amsterdam – l’Eglise néerlandaise a connu une crise profonde. La génération des années 50 est partie et a oublié d’éduquer ses enfants". L’enseignement religieux a été supprimé dans les écoles en 1964. Deux générations de Néerlandais ont oublié l’alphabet chrétien. Sur le registre du séminaire de Haarlem, le nombre de prêtres ordonnés chute à la fin des années 60. En 1968, il n’y en a même pas eu un. "Je crois – dit Peeters – que nous n’aurions rien à craindre de l’islam si nous étions chrétiens. On a souvent l’impression qu’aujourd’hui les Néerlandais ont peur de tout : d’avoir des enfants, ainsi que des immigrés. Mais la peur est l’exact opposé de la foi."


Si l’on cherche encore Noël, il y a, au 40 Oudezijds Voorburgwal, dans le
Red Light District, un petit porche. Là, au dernier étage du Museum Amstelkring, on trouve une église, une église clandestine, remontant au temps des persécutions calvinistes qui interdisaient le culte catholique. Sous le toit, un autel, un orgue, dix bancs auxquels les fidèles accédaient en se cachant. L’église s’appelle "Ons’Lieve Heer op Solder", Notre Bien-aimé Seigneur du Grenier. Le Christ au grenier, se demande-t-on, est-ce cela, Noël à Amsterdam ?

Et pourtant… Aujourd’hui i
l y a 45 séminaristes au séminaire de Haarlem-Amsterdam, ce qui reflète aussi une forte présence néocatéchuménale. L’évêque, Mgr Josef Punt, explique qu’aujourd’hui quelque chose a changé par rapport à la crise la plus dure, il y a 20 ou 30 ans. En 1968, dit-il, pas un seul prêtre n’est sorti de ce séminaire, mais "actuellement 15 nouveaux prêtres sont ordonnés chaque année dans tous les Pays-Bas, ce qui maintient les effectifs à un niveau stable. Dans ce diocèse quelques centaines d’adultes demandent chaque année le baptême. On perçoit une nouvelle demande, née d’un sentiment de vide. Certes, il s’agit de chiffres faibles. Nous sommes une Eglise missionnaire. Tout est à reprendre à zéro. Dans les monastères hors des villes, nous créons des centres d’évangélisation pour les gens éloignés de la foi qui veulent la redécouvrir. Dans notre école catholique de Haarlem nous n’arrivons pas à satisfaire toutes les demandes d’inscription. J’ai la sensation que ces parents, même s’ils ne sont plus croyants, sont fascinés par la beauté du christianisme et la désirent pour leurs enfants
."

Il faut de la foi pour y croire, dans cette ville où, dans les clochers d’églises qui ne sont plus des églises, les cloches sonnent de douces mélodies de Noël. Mille Pères Noël et pas une crèche. Sauf une, toute petite, dans les locaux de l’Armée du Salut, près de la Centraal Station, où l’on sert des repas aux pauvres. Vingt clochards engourdis par le froid, des thermos géants de café chaud, et cette petite crèche.
Il y a aussi une pauvre maison, au 147 Egelantinstraat, presque en banlieue. On sonne, une sœur de Mère Teresa vient ouvrir. Elles sont quatre. Ici, chaque matin, il y a la messe, chaque soir les vêpres. Une chapelle sans ornements, deux soeurs en adoration. Sous l’autel, la mangeoire de la crèche.

Mais si le sens de Noël est une demande, une attente, on le rencontre encore dans les rues de cette ville. C’est le sabot vide que les enfants mettent dans la cheminée la nuit de la Saint Nicolas, le 5 décembre, dans l’espoir d’un cadeau. Ce sont les clochards et aussi, si on les regarde dans les yeux, les jeunes prostituées des vitrines du
Red Light District. Ce sont les vieillards qui marchent d’un pas hésitant dans la neige, craignant de tomber et de finir invalides dans un hôpital où on les regardera peut-être comme des poids morts. Ce sont les fillettes à la table d’une pizzeria italienne derrière le Dam, qui chantent en se tenant par la main : "I wish you a merry Christmas and a happy new year". Oui, une année heureuse. "Malgré tout – nous a dit le professeur Wim Peeters – la demande de bonheur et donc de Dieu reste toujours dans le cœur de l’homme".
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" Deux générations ont été perdues "

Interview du cardinal Adrianus Simonis



L’archevêque émérite d’Utrecht, le cardinal Adrianus Simonis, 78 ans, est le "grand vieillard" de l’église néerlandaise. Il est connu et aimé dans le pays, même par les musulmans.
"Peut-être – explique-t-il en souriant – parce que j’ai dit que les musulmans fidèles à Dieu iraient dans les cieux les plus élevés du Paradis". Mais le cardinal, qui vit aujourd’hui dans un village du Brabant, Nieuwkuijk, paraît moins optimiste quant à ses Pays-Bas. "Oui, il y a peut-être des signes d’une nouvelle tendance, mais ce sont des chiffres très faibles", dit-il. "Il reste ces 58 % de Néerlandais qui ne savent plus ce qu’est exactement Noël. Il y a les gens qui sont troublés par le nombre de mosquées aux Pays-Bas. Je peux le comprendre, mais ici le véritable problème est antérieur à l’immigration : c’est que nous nous sommes perdus, que nous avons perdu notre identité chrétienne. Si cette identité était forte, nous n’aurions pas peur des musulmans. Oui, il y a un problème de fondamentalisme musulman aux Pays-Bas, mais la majeure partie des immigrés n’y adhère pas. Plus que l’intégrisme, ce qui me préoccupe chez les jeunes générations musulmanes, c’est que la sécularisation progresse. Je crains qu’ils ne finissent par se convertir à la religion qui domine vraiment l’Occident : le relativisme."  (En effet, en voyant les jeunes Marocains dans les McDonald’s d’Amsterdam et leurs sœurs en pantalons moulants, on se demande si les nouvelles générations musulmanes ne sont pas déjà en train de nous copier, à tous points de vue).

Q. – Eminence, est-ce que le racisme, la xénophobie, ne sont pas des problèmes ici ?

R. – Je ne crois pas. Les Néerlandais sont un peuple tolérant. Je ne vois pas de vague raciste à l’horizon.

Q. – A Haarlem l’évêque dit que l’on commence à percevoir chez les jeunes un sentiment de vide, le manque de ce qui a été oublié…

R. – C’est vrai, ils sont nombreux à ressentir un vide. Mais ils ne savent pas aller plus loin, ils ne savent pas que demander et à qui. Ils n’ont pas été formés à reconnaître et à percevoir le désir de leur cœur. En ce sens je suis convaincu, comme Mgr Punt, que l’Eglise des Pays-Bas est vraiment appelée à être missionnaire.
Deux générations ont été perdues. Il s’agit de repartir de zéro, au sein d’une culture indifférente au christianisme, avec des médias qui ne sont pas amicaux.

Q. – Vous avez 78 ans. Vous étiez un enfant au moment de la guerre. A l’époque, est-ce que les Pays-Bas n’étaient pas un pays fortement chrétien ? Que s’est-il passé ensuite ?


R. – C’était probablement un christianisme trop marqué par un moralisme rigide. Il en est résulté une rébellion radicale, comme est radical le caractère des Néerlandais. Ils ne sont pas capables de croire seulement “un peu’” en quelque chose. C’est tout ou rien. Ils sont devenus l’opposé de ce qu’ils étaient.

Q. – Mais aujourd’hui il y a 45 étudiants au séminaire de Haarlem et chaque année quelques centaines d’adultes demandent le baptême. A Amsterdam j’ai trouvé les sœurs de Mère Teresa en adoration devant le Crucifié. Ici les catholiques sont peu nombreux mais ils sont forts…

R. – C’est vrai. Il est certain que, dans une situation comme la nôtre, le sel doit - comment dirais-je ? - devenir plus salé...

Q. – Aux messes de Noël, que comptez-vous dire aux fidèles ?

R. –
Qu’ils ont peut-être oublié le fait chrétien, ce qui en est l’essence : Dieu s’est fait homme, il est venu au monde dans la pauvreté, humble et fragile comme un nouveau-né, par amour pour nous.

Q. – Savez-vous, Eminence, qu’il y a peu de temps, dans un petit village près d’ici, Drunen, j’ai vu une centaine d’enfants sortir de l’église catholique où venait d’avoir lieu une cérémonie de Noël ?


R. – C’est sans doute ce jeune prêtre nouvellement arrivé qui se donne du mal… "

L’histoire recommence, une fois de plus. Pour qu’elle recommence, il suffit du visage d’un chrétien. >>

 

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L'oraison funèbre d'Abel Chennouf, assassiné à Montauban

 Kabyle.com

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prononcée par l'abbé Christian Venard, aumônier catholique du 17e RGP :

 


Abel, mon camarade parachutiste, mon frère, voilà une semaine, jour pour jour et presque heure pour heure, je tenais ta main, encore chaude de la vie que venait de te prendre un assassin. Je tenais ta main en priant pour toi, en pensant à ta maman et en te confiant à notre Maman du Ciel, la Vierge Marie. Je ne connaissais pas encore Caroline, mais si tel avait été le cas, je t’aurais aussi parlé pour elle et pour ce petit bébé que vous attendez. Puis je me suis penché sur ton camarade Mohamed Legouad qu’essayaient de maintenir en vie les remarquables équipes d’urgentistes. Enfin, j’ai assisté au départ vers l’hôpital de Loïc Liber, qui à cette heure même se bat, entouré de son papa et de sa maman, pour rester en vie. Que de souffrances. Que d’incompréhensions. Mais aussi que de solidarité, de soutien, d’hommages et, pour nous chrétiens, de foi (comme le rappelait hier l’évêque aux armées en la cathédrale de Montauban) et d’espérance, malgré tout !

Il y a deux mille sept cents ans, à Rome, au cœur même du forum, symbole et centre de la vie de la Cité, un gouffre s’ouvrit. L’oracle consulté livra cette réponse : pour combler ce gouffre, Rome devait y engloutir ce qu’elle avait de plus précieux. Chacun s’interrogeait encore sur ce qui pouvait être de plus précieux, quand un jeune cavalier, un jeune homme armée, Curtius, se jeta avec son cheval dans le gouffre qui se referma aussitôt. Oui, ce que Rome avait de plus précieux était un jeune militaire défenseur de la Cité.

Le criminel terroriste qui a mené ces actions dans lesquelles tu as perdu la vie, Abel, a tenté d’ouvrir un gouffre. Le prix à payer pour le combler est bien sûr infiniment trop lourd ; mais mon ami Abel, tu es devenu, comme Curtius, symbole de ce que notre pays, la France, possède de plus précieux. Et désormais, c’est ainsi que tu nous apparaît : jeune caporal parachutiste, mort pour la France, dans un attentat terroriste qui voulait mettre à bas notre Patrie.

Abel, je veux aller encore plus loin. C’est parce que tu portais l’uniforme français, parce que tu étais fier de ton béret rouge, que ce criminel t’a visé. Ce que ce meurtrier ne pouvait savoir c’est aussi tout ce que tu représentes aujourd’hui pour notre patrie. Issue d’une famille à la fois alsacienne (avec tout ce que cette région fait ressortir en notre pays des souffrances liées aux deux conflits mondiaux) et kabyle (et comment ne pas évoquer ici les douloureux événements d’Algérie), ta famille choisit la France avec (et je reprends les mots mêmes de ton cher papa), avec toutes ses traditions, y compris ses racines les plus profondes, qui sont chrétiennes. Comment ne pas voir, mon ami Abel, dans une telle accumulation de symboles, ce que nous avons de plus précieux cette capacité que possède notre patrie française de prendre en son sein, tous ceux qui veulent devenir ses fils.

Au moment où nous allons te porter en terre, dans cette terre pétrie des ossements de nos pères (c’est cela la patrie aussi), Abel, avec toute ta famille, tes amis, tes camarades parachutistes, je te fais le serment que nous soutiendrons Caroline et ton enfant. Que nous resterons présent auprès des tiens. Désormais c’est à Dieu que nous te confions, au travers des rites catholiques qui accompagnent nos défunts. Nous savons que tu es vivant auprès du Père. Tu as rejoint Jésus, ce Dieu fait Homme, cet innocent mort à cause de la méchanceté et la violence qui habitent trop souvent le cœur des hommes. Ton sacrifice se trouve comme enveloppé dans celui du Christ Jésus. En te retrouvant jeudi dernier, gisant sur le sol montalbanais, en prenant ta main et en voyant couler de tes blessures ce sang si rouge et si pur, je confiais au Seigneur de la Vie, cette vie qui s’écoulait de toi. Et si aucune larme ne sortait de mes yeux, comme tant de tes camarades, c’est mon cœur qui pleurait sur toute violence faite aux innocents sur cette pauvre terre. Et c’est à l’Innocent qui a versé son Sang pour nous réconcilier avec son Père, qui a versé son propre Sang en rançon pour toutes les violences, que je confiais ta belle âme.

Abel, français d’origine alsacienne et kabyle, catholique par choix, parachutiste au service de la France, que notre grand saint patron, que l’archange saint Michel t’accueille et te fasse entrer au sein du Père, avec le Fils et le Saint-Esprit. Amen.


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26/03/2012 | Lien permanent

”L'inhospitalité des Européens est incompréhensible”

...écrit l’archevêque de Tunis, Mgr Maroun Lahham :

<< Cela ne s’était jamais vu depuis que la Tunisie est Tunisie et la Libye la Libye. La Tunisie ne s’était pas encore relevée de son tsunami politique et social, que la Libye voisine est entrée dans une rébellion armée que personne ne prévoyait. Et comme il y a des millions (on parle de trois millions) d’étrangers qui travaillent dans tous les domaines en Libye, on a assisté à un exode de masse vers la Tunisie et l’Égypte.

Entre 250.000 et 300.000 personnes ont passé la frontière tuniso-libyenne. Elles étaient de toutes les nationalités : Égyptiens, Tunisiens, Africains subsahariens, Bengali, Pakistanais, Érythréens, Somaliens, Chinois, Indiens. Les pays les moins pauvres ont pu effectuer le rapatriement de leurs citoyens, d’autres attendent depuis trois mois, surtout les Nigérians, les Somaliens et les Érythréens.
Nous avons assisté à des scènes formidables de solidarité et d’accueil. Au début, l’accueil était spontané. Les habitants des villages près de la frontière portaient de quoi manger et boire. Ensuite, les ONG ont rejoint le mouvement, dont la Caritas Tunisie, France, Canada, Liban. La Croix rouge et le Croissant rouge tunisien, qatari et émirati se sont joints et on a fini par avoir des tentes pour tout le monde et la frontière tuniso-libyenne est devenue un lieu de passage pour ceux qui rentrent dans leurs pays et un lieu de résidence pour ceux qui attendent que la tempête passe pour revenir travailler en Libye, comme avant.

L’Église de Tunisie a envoyé dès les premiers jours un prêtre et trois religieuses pour aider les réfugiés. Il arrivait que les sœurs préparaient, avec d’autres volontaires, des repas pour 10.000 personnes chaque jour. Nous avons un prêtre nigérian dans le diocèse, et il visite régulièrement les camps ; il a même célébré la messe de Pâques dans une grande tente que les Érythréens avaient transformée en chapelle. Plus de 150 personnes ont assisté à la messe. Caritas Tunisie a présenté un projet d’urgence à la Caritas Italie et à la CEI. Des subsides sont arrivés et cela nous permet d’assurer les dépenses nécessaires au prêtre et aux religieuses.

Reste la grande question : combien de temps cela va durer ? La situation militaire en Libye s’enlise, la confrontation militaire entre les rebelles et les phalanges de Kadhafi continuent, les bombardements de l’OTAN n’arrivent pas à trancher. On vit dans l’incertitude la plus absolue.
La situation actuelle à la frontière, d’après les religieuses présentes sur place, se présente comme suit : : entre 4000-5000 réfugiés africains ou asiatiques attendent des jours meilleurs pour retourner, soit dans leurs pays respectifs soit en Libye.
Mais il y a aussi des milliers de Libyens qui ont fui la guerre. Ces Libyens sont de trois catégories : des gens aisés qui ont passé la frontière et ont rejoint l’Europe via l’aéroport de Djerba ; la deuxième catégorie constituée de Libyens ayant des parents dans le sud tunisien qui les ont accueillis dans leurs maisons ; et la troisième catégorie (on parle déjà de 50.000) sont logés dans les camps, ou hébergés dans des maisons que les habitants de la ville de Tataouine leur ont offertes gratuitement, ou dans des tentes. Le ministère de l’éducation nationale a donné des consignes aux écoles du sud tunisien pour intégrer les enfants libyens dans les écoles des divers gouvernorats.

 Tout ceci s’est passé alors que des milliers de Tunisiens sont arrivés à Lampedusa, avec toutes les problématiques que cela a causé. Je ne parle pas de la dimension juridique ou politique de ce phénomène, ce n’est pas de ma compétence. Mais je parle de la dimension humaine. Ce sont des jeunes au chômage (19% de chômage avant la révolution). Le tourisme occupait 450.000 jeunes qui se sont retrouvés du jour au lendemain sans travail, le contrôle des frontières s’était affaibli à cause de la situation politique et sécuritaire dans les grandes villes.

J’essaie de me mettre dans la mentalité d’un Tunisien : 20.000 Tunisiens sont arrivés dans une Europe, en crise peut être, mais riche tout de même, et ils sont mal reçus, alors que plus de 200.000 (dix fois plus) d’étrangers sont arrivés dans une Tunisie, pas aussi riche que l’Europe, mais surtout qui sort d’une grave crise politique, et les Tunisiens les ont reçus les bras ouverts,  leurs ont ouvert leurs maisons, leurs écoles, et ont partagé avec eux leur pain quotidien.

Vu de la rive sud de la Méditerranée, où l’hospitalité est à la fois une valeur et un devoir, c’est incompréhensible… tout simplement. >>

 

http://www.oasiscenter.eu/fr/node/6957

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