Rechercher : armées privées
Afghanistan : le général Desportes menacé par Paris
...pour avoir dit la vérité :
À la suite de son entretien (Le Monde, 2 juillet) sur l'échec américain en Afghanistan, le général Vincent Desportes [photo], directeur du Collège interarmées de défense, a été convoqué par le chef d'état-major des armées, Edouard Guillaud. Lequel a demandé au ministre de la Défense de punir le général Desportes. Dans l'interview, le général jugeait que le limogeage du général McChrystal, commandant de l'OTAN en Afghanistan, « ouvre un débat » alors que « la situation sur le terrain n'a jamais été pire ». Question du journal au général : ce débat ne devrait-il pas impliquer la coalition internationale ? Réponse désabusée du général : « c'est une guerre américaine ».
Récapitulons :
- les Américains mènent en Afghanistan une guerre perdue d'avance pour plusieurs raisons, dont celle-ci : comme à l'époque du Vietnam (ou des guerres civiles sud-américaines), leurs buts sont troubles et leur mentalité manifeste une incompréhension des populations ;
- les généraux américains méprisent aussi leurs alliés européens (surtout les Français) et ne se gênent pas pour le dire à la cantonade : cf le général McChrystal dans Rolling Stone, note de ce blog du 24/06 ;
- ce mépris US achève de détruire la légitimité de l'Otan, gendarmerie américaine : car le vassal ne doit rien au mauvais suzerain. Et faut-il avoir un suzerain ?
- Cette situation rend dérisoire le retour de la France dans l'Otan (« alliance » de tout le monde contre personne).
- Le général Desportes, autorité en matière stratégique, donne au Monde un entretien nuancé et précis dans lequel il confirme que les choses vont très mal en Afghanistan et que les Américains (tout en ne sachant pas où ils vont) ne veulent écouter personne ;
- le chef d'état-major des armées demande donc une sanction contre le général Desportes : et il la demande au plus politicien et au plus atlantiste des ministres de la défense de la Ve République, Hervé Morin.
Voilà où l'on en est.
03/07/2010 | Lien permanent | Commentaires (15)
Obama, Nobel de la Paix ! Le père Ubu a voté
Une décision
rationnellement
indéfendable :
-
Le prix Nobel de la Paix est censé récompenser « la personnalité ayant le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à la réduction des armées permanentes, à la réunion et à la propagation des progrès pour la paix ».
Sous cet angle, le président Obama n'était pas l'homme de la situation.
Au mieux, il n'a rien à son actif : notamment dans la « guerre rampante » israélo-palestinienne qu'il n'a pas pris les moyens d'apaiser.
Au pire, Obama a un passif : l'aggravation constante du conflit d'Afghanistan, « sale guerre » de riches contre des pauvres, guerre interminable, sanglante et absurde, accumulant les morts innocents et donnant chaque jour un peu plus de popularité à l'ennemi que l'on était censé réduire. Au début de son mandat, Obama a fait le choix du pire : l'enlisement militaire et l'extension éventuelle des combats au Pakistan ; c'est l'engrenage vietnamien.
Voilà le bilan actuel du président Obama en tant que « peacemaker ». Un bilan peu reluisant. Comment d'ailleurs le serait-il, moins d'un an après l'entrée en fonctions de l'intéressé ?
Les intentions affichées par Obama dans ses discours sont bonnes, ainsi que le relevait cet été le cardinal Cottier dans L'Osservatore Romano [*] ; le drame est qu'elles ne sont suivies d'aucun effet. Dans ces conditions, comment les jurés Nobel ont-ils pu lui attribuer le prix de la Paix, décision ubuesque ?
Si l'on devait attribuer le prix pour des discours et des voyages, le pape Benoît XVI aurait été un infiniment meilleur Nobel de la Paix que Barack Obama. Ses analyses sont autrement plus incisives, ses connaissances plus vastes, ses intentions plus profondes. Et lui, au moins, n'est pas le « commander-in-chief » d'une armée qui bombarde des noces de village.
________________
[*] Ce qui exclut du débat ceux qui voudraient la guerre au Proche-Orient et approuvent celle d'Afghanistan ; les bellicistes sont mal placés pour jauger un prix de la Paix.
-
09/10/2009 | Lien permanent | Commentaires (20)
Medvedev ”met fin à l’action militaire russe”
…la Géorgie étant (dit-il) « punie » de son agression contre l'Ossétie du Sud :
Dépêches : << Le président russe Dimitri Medvedev a ordonné mardi la fin de l'action militaire en Géorgie après, a-t-il souligné, que les soldats russes ont puni la Géorgie et restauré la sécurité des civils et des soldats russes de la paix en Ossétie du Sud.
"La sécurité de nos soldats de la paix a été restaurée. L'agresseur a été puni et a subi des pertes conséquentes. Son armée a été désorganisée", a souligné le président russe.
Toutefois, dans son discours télévisé depuis le Kremlin, il a donné ordre aux soldats de se défendre et d'écraser toute action agressive ou résistance armée de la part des forces géorgiennes : "S'il reste des poches de résistance ou s'il se produit une quelconque action agressive, vous prendrez les mesures nécessaires pour les détruire", a-t-il dit en direction de son ministre de la Défense.
Peu avant, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait estimé que le président géorgien Mikhaïl Saakachvili devait quitter le pouvoir et exigé que les troupes géorgiennes quittent définitivement l'Ossétie du Sud. Lavrov a déclaré que le Kremlin ne parlerait pas à Saakachvili et que la meilleure que le président géorgien puisse faire est "de démissionner".
Le président français Nicolas Sarkozy est attendu à Moscou pour négocier une trêve proposée par l'Union européenne dont il est le président en exercice dans le violent conflit qui oppose Moscou et Tbilissi à propos de la région séparatiste d'Ossétie du Sud. >>
Tout le dispositif verbal déployé par le président américain se retrouve donc en porte-à-faux : allusions à l'impérialisme conquérant, menaces sur les relations russo-américaines, etc. Autre victime collatérale de ce faux-pas bushien : le mythe "euro-atlantique" d'une UE forcément alignée sur les intérêts US.
12/08/2008 | Lien permanent | Commentaires (11)
Terre Sainte : une protestation des évêques français
"Après le revirement de la Cour suprême israélienne en juillet dernier, les travaux de construction du mur de séparation ont repris dans la vallée agricole de Crémisan, au sud de Jérusalem. Cette portion du mur de « sécurité » (commencé en 2002) devrait, à nouveau, rendre très compliquée la vie de nombreuses familles palestiniennes qui verront leurs terres passer côté israélien, rendant ainsi leur accès et leur culture très difficile" :
Communiqué de presse
Les chrétiens de Bethléem (et de son faubourg, Beit Jala) se voient petit à petit chassés de leurs terres ancestrales. Depuis de longues années déjà, une "colonie", Gilo a confisqué une partie de leur terrain. Plus récemment une autre colonie, Har Gilo, en a confisqué une autre partie.
Aujourd’hui, l'armée a entrepris de construire un mur pour, en fait, relier les deux colonies. En aucun cas il ne s'agit de sécurité, il existe déjà un mur entre Bethléem et Jérusalem. Cette construction amènera à l’annexion par Israël de cinq cents hectares de terres palestiniennes environ !
Rappelons que la Cour internationale de Justice a demandé à Israël de stopper la construction d'un mur qui enfreint la 4e convention de Genève. Et rappelons encore que la Cour suprême d'Israël avait demandé à l'armée de stopper la construction de ce mur avant de revenir sur cet avis. Modifier de quelques mètres son tracé ne justifie pas la reprise de cette construction.
Nous ne pouvons pas nous résigner à voir les chrétiens poussés hors de la Palestine. Il est temps que les consciences se réveillent ! Il est temps, pour les deux peuples, palestinien et israélien, de retrouver l'espérance. Cela exige des uns et des autres justice et équité.
Mgr Michel Dubost
Évêque d’Evry
Président du Conseil pour les relations interreligieuses
Membre de la Coordination pour la Terre Sainte
07/09/2015 | Lien permanent | Commentaires (3)
Barack Obama est passé par Paris : mais ça n’a pas lancé notre presse dans un abîme de réflexions
Au passage d’Obama en Europe – notamment à Paris -, mes confrères se sont livrés à des comparaisons de prestance entre le candidat US et ses hôtes (allemands, français, anglais). Futilité pandémique des médias. En outre, cet exercice de comparaison était privé de sens. La véritable question aurait été celle-ci : à l’heure où le chaos financier occidental appelle à une résurrection des pouvoirs politiques, ces derniers sont-ils en mesure de ressusciter ?
S’ils ne le sont pas, on voit mal ce qui pourrait remédier au chaos.
Cette question n’a pas été posée par les médias, parce qu’ils considèrent comme incorrecte l’idée d’un retour du politique. « Le » politique est ostracisé en Europe. On veut bien de « la » politique, jeu qui ne dérange pas les intérêts privés (par exemple : la milliardaire Carla Bruni déclarant : « je suis viscéralement de gauche »*) ; mais les esprits restés bloqués à l'heure du « global » excluent le retour des Etats, gardiens régionaux du bien commun, partenaires souhaitables d’un rééquilibrage de la planète. Envisager un virage néo-interventionniste est vu comme un quasi-délit. Ce virage servirait les intérêts des peuples ? Ces intérêts-là n’entrent plus en ligne de compte, la philosophie des élites s’y oppose. Demandez à M. Mandelson.
C’est en ces termes que la situation se présente, même si les médias vous disent autre chose. Pour entendre des analyses plus réalistes (ou moins intéressées) en matière politique, économique et sociale, il faut se mettre à l’écoute du Saint-Siège. Mais si.
>
_______
(*) Ce qui veut dire : « partisane des nouvelles mœurs libérales-libertaires ». (Et non : « opposée au capitalisme ultralibéral », évidemment !). A ce compte, même Bertrand Delanoë pourrait se dire « de gauche ».
28/07/2008 | Lien permanent | Commentaires (5)
Lobbies et Parlement : le malaise après le vote
Qui a dit : "transparence" ?
Les députés ont voté mardi soir l'interdiction, pour les collaborateurs parlementaires, d'être rémunérés par des lobbies - et d'être ainsi les représentants d'intérêts privés auprès du député ou du sénateur.
Le public croyait que cette pratique était déjà interdite : il découvre que non, et s'en étonne.
Il apprend aussi que le gouvernement a tenté de s'opposer à cette interdiction : et que cette opposition fut exprimée par Mme Belloubet, ministre de la Justice.
Des élus REM n ont d'ailleurs pas voté l'amendement ; la rapporteure du projet elle-même, Yaël Braun-Pivet, prônait un "dispositif de déclaration" plutôt qu'une interdiction.
Ces réticences affichées ont indigné des élus de gauche : "Je m'inquiète de ce que nous sommes en train de transmettre à l'extérieur" (Olivier Faure, PS).
La majorité des députés ont d'ailleurs rejeté les amendements communistes qui voulaient faire contrôler aussi les contacts de lobbyistes avec l'Elysée, le Conseil d'Etat et le Conseil constitutionnel.
Mais surtout, la loi fait l'impasse sur l'activité elle-même des lobbies : activité qui vise à dévier ou retarder le vote de lois encadrant - dans l'intérêt général - certains secteurs économiques... Cette timidité en dit long sur ce qu'est devenu le politique depuis quelques dizaines d'années.
► Il existe aussi une quarantaine de clubs parlementaires, parfois gérés par des cabinets de relations publiques, dotés de budgets souvent importants, et ouverts aux contacts de députés et sénateurs avec les intérêts privés : déjeuners, dîners, colloques etc. Quelques exemples pittoresques : le "Club des amis du cochon", voué aux intérêts de la filière agro-industrielle porcine ; "l'Observatoire de l'oeuf", autre filière agro-industrielle ; le "Club des parlementaires amateurs de havane", qui fut lié au cigarettier British-American Tobacco (enquête 2013 de Cash Investigation) ; le "Club de la table française" (304 membres sous la précédente législature), soutenu financièrement par Pernod-Ricard, Danone Eaux ou Grey Goose ; etc.
27/07/2017 | Lien permanent | Commentaires (7)
Corée du Sud : le pape et l'échec du modèle économique
Face au productivisme inhumain et à la démission du politique, les jeunes Sud-Coréens organisent (eux aussi !) des veillées aux chandelles sur la voie publique :
Pour comprendre l'intérêt des Sud-Coréens pour la visite papale, il faut savoir que leur pays – longtemps présenté par nos médias comme le parangon du succès libéral – vit aujourd'hui l'échec du modèle. Comme l'écrit Philippe Pons, célèbre spécialiste de cette partie du monde, la catastrophe du ferry Sewol (300 morts) « a révélé les carences d'un système politico-économique qui accorde la primauté à la croissance et au profit au détriment de la sécurité de la population » : 3000 morts par an dans les entreprises. « Chaque jour la presse tire un fil supplémentaire de la pelote d'intérêts publics et privés à l'origine du drame [du Sewol]», rapporte Pons... Nos bien-pensants français auraient encore plus de mal en Corée qu'en France à incriminer « l'étatisme » : là-bas encore plus qu'ici, l'Etat (souligne Pons) est « en proie à la voracité des affairistes » et « souffre du pantouflage institutionnalisé des fonctionnaires qui passent dans le privé ». En Corée et ailleurs, le système produit les mêmes effets.
Et la Corée du Sud, comme la France, a ses jeunes veilleurs ! « Ils n'affrontent pas la police anti-émeutes comme leurs aînés : mobilisés par les réseaux sociaux, ils participent à des veillées aux chandelles. » Comme en France, ils sentent que l'ennemi n'est pas tel ou tel parti mais le système économique au sens large : « se battre, disent-ils, mais contre qui ? […] Aujourd'hui le mal vient du système. » « L'élan productiviste est entamé » et les jeunes veilleurs sud-coréens renvoient dos à dos « les hommes politiques de tout bord », explique Pons.
Voilà pourquoi le peuple coréen, chrétiens et non-chrétiens confondus, écoute les paroles du pape argentin.
16/08/2014 | Lien permanent
Le manque de masques en France vient du dogme libéral
Les premières enquêtes sur le scandale du manque de masques renvoient au délire anti-Etat et anti-stocks qui a formaté les années de la glorieuse “révolution libérale” :
2011, avant-dernière année de celui qui voulait être appelé “Sarko l’Américain” : une “grande concertation” avec le privé est organisée par le gouvernement, qui veut se défaire du stock d’Etat d’un milliard de masques chirurgicaux et 700 millions de masques FFP2. Motifs de cette braderie : 1. l’existence de stocks en tous domaines est condamnée par le dogme libéral au profit de la fameuse “logique des flux” ; 2. en vertu du dogme, lors des crises sanitaires graves le “flux” d’approvisionnement de la France en masques sera censé reposer désormais sur… la Chine, usine du monde. One world, free trade.
Où passent les stocks de masques français après 2011 ? En principe ils partent dans les entreprises, l’Etat se déchargeant désormais de la protection sanitaire des salariés (toujours en vertu du dogme) ; mais au vu de la situation de 2020, on peut se demander ce qu’il est réellement advenu des stocks après leur dispersion. Gaspillés ? Vendus à l’étranger ? Mystère. La transparence du privé est très relative. Toujours est-il – constatent les enquêteurs – qu’en janvier 2020 l’Etat ne détient plus que 145 millions de masques chirurgicaux et aucun masque FFP2. Quand le coronavirus explosera en territoire français, ce sera juin 40... D’autant que l’industrie de la Chine ne sera plus capable de fournir de masques au monde dont elle était censée être l’usine. Et que la principale usine de masques en Europe est en Allemagne, Etat qui s’est empressé de mettre l’embargo sur sa production ! On mesure en cela ce qu’est réellement l’Union européenne… ("sans laquelle nous serions en guerre les uns contre les autres”, disent les conformistes).
L’affaire des masques s’ajoute ainsi à l’ensemble de la crise du virus pour condamner la globalisation libérale.
Reste à venir maintenant le tsunami de la crise économique mondiale, qui s’annonce pire que 2008 et 1929, et qui consacrera l’effondrement du système sur nos têtes – au prix d’indicibles souffrances humaines. Il y a des cas où l’on souhaiterait n’avoir pas eu raison d’avance…
21/03/2020 | Lien permanent | Commentaires (40)
Panne mondiale Windows : l'effet d'une tyrannie
Tyrannie Microsoft à laquelle nos dirigeants économiques et politiques consentent volontiers en France :
Dans le monde entier, le super-crash Windows a paralysé (et perturbe encore dans ses séquelles) des aéroports, des hôpitaux, des services publics, des grandes entreprises comme L'Oréal, Bouygues-Télécom ou Fnac-Darty, et d'innombrables petites entreprises via leurs prestataires. La panne venait elle-même d'un prestataire de Windows: la société Crowdstrike, autre firme privée américaine, conceptrice et opératrice de l'outil de "sécurité" (!) dont dépendent des centaines de milliers d'ordinateurs Windows sur les cinq continents. C'est une simple mise à jour déclenchée en pleine nuit par Crowdstrike – avec la désinvolture aveugle des mises à jour Windows – qui a provoqué le crash : la mise à jour était défectueuse. Et Crowdstrike a mis des heures à s'en apercevoir... Cet accident très fautif va coûter cher à ses victimes ; elles s'organisent pour attaquer les coupables en justice.
Il faut en tirer plusieurs leçons : 1. la planète économique est captive de son inféodation à la gamme de systèmes d'exploitation Windows, à ses nouvelles versions perpétuelles et à ses "mises à jour" forcées et continuelles : mises à jour imposées au nom de la... sécurité ! et l'on voit ce que ça donne avec la cagade de Crowdstrike. 2. Cette tyrannie de géants du privé est acceptée sans réserve par nos dirigeants économiques et politiques ; c'est à Microsoft que recourt ainsi l'Education nationale française, ce qui ridiculise les ambitions "souveraines" de nos gouvernements... Voilà une situation de quasi-monopole approuvée par des gens dont pourtant le décor mental est le libéralisme, qui condamne en théorie les moindres atteintes à la concurrence ! 3. Cette tyrannie Windows est permise par la globalisation mondiale (financière et technologique), qui permet aussi la diffusion mondiale et instantanée de toute panne Windows. Quels politiques français, de l'ultragauche à l'ultradroite, dénoncent cette situation ? Aucun : ils sont trop occupés à ressusciter la Quatrième République.
25/07/2024 | Lien permanent | Commentaires (3)
Washington-OTAN-Paris : vers une guerre ”occidentale” contre la Russie ?
Washington et l'OTAN parlent maintenant d'envoyer des armes à l'armée de Kiev en déroute. C'est le deuxième cliquet vers un affrontement militaire de "l'Occident" (?) avec la Russie :
Cette guerre avec une puissance nucléaire, officiellement personne ne la veut. Mais tout se passe comme si l'engrenage de l'attaque "occidentale" tournait déjà. On sait depuis 1914 comment éclate une guerre mondiale : c'est le mécanisme fatal des alliances et la pression d'intérêts économiques enveloppés d'idéologie. Or :
■ le mécanisme des "alliances" est en place depuis que l'OTAN (au lieu d'être dissoute après la chute de l'URSS et la fin du pacte de Varsovie) fut maintenue et élargie aux dimensions mondiales, devenant ainsi le ban et l'arrière-ban du suzerain washingtonien ;
■ les intérêts économiques sautent aux yeux : ils sont exclusivement américains. Washington n'a jamais admis que la Russie tente de se ressaisir après le dépeçage eltsinien de son économie : d'où la mise en place d'une stratégie politico-militaire anti-russe dès 1994, stratégie dont l'OTAN est l'outil... et qui contredit de plein fouet les intérêts européens. On sait que la machinerie de l'UE est indifférente aux intérêts de l'Europe : elle roule pour l'hyper-classe globale, ce qui est autre chose.
■ L'enveloppe idéologique est double, voire schizophrène :
1. à Washington c'est l'impérialisme néoconservateur poursuivi par Obama sous une forme plus sournoise. Cet impérialisme est la vieille ambition de "leadership global", mais qui se crispe au moment où le monde secoue ce leadership : crispation US drapée dans le prétexte de la "lutte contre le terrorisme global"... (Terrorisme dont feraient absurdement partie, par exemple, Poutine et al-Baghdadi en tant que "brutal dictators").
2. En Europe, l'enveloppe idéologique est encore plus absurde... et non moins dangereuse. Une loi russe "homophobe" ne suffisant tout de même pas à légitimer une guerre (quoique ?), on réactive le fantasme de "Moscou-voulant-asservir-l'Occident". D'où l'apparition plus qu'étrange, dans nos médias, d'un vocabulaire datant de 1942 : "combattants européens", "ours russe", "main de Moscou" ; et une non moins étrange complaisance de nos médias envers les bataillons de "volontaires" ostensiblement nationaux-socialistes qui tiennent lieu d'armée à Kiev.
Ces bataillons nazis se font étriller par les rebelles du Donbass. Les appelés ukrainiens de l'armée régulière, démotivés et désemparés, ne sont pas en meilleure posture. Le pouvoir de Kiev, fabrication américaine à peine dissimulée (voyez la composition du gouvernement) est au bord de la déroute militaire, mais aussi de la catastrophe économique puisqu'il s'est coupé de son marché naturel : l'espace russe.
C'est alors que le Pentagone, qui semble avoir pris les commandes dans cette affaire, hausse le ton et franchit un pas vers la guerre. Le général Dempsey, chef d'état-major américain inter-armées, annonce "d'autres options que diplomatiques". Le général Breedlove, "commander-in-chief" de l'OTAN, annonce l'envoi d'armes aux troupes de Kiev (drones et missiles pour un montant de trois milliards de dollars selon le NYT). La conseillère d'Obama "pour les questions de sécurité", Susan Rice, pousse dans le même sens. Inutile de préciser que les armes américaines sophistiquées qui seront livrées à Kiev seront servies par des spécialistes américains, voire euro-otaniens. Ainsi des Américains et des Européens tireront sur les rebelles du Donbass : l'intention est même de tirer "sur les Russes", puisque l'armée russe est en Ukraine – à en croire l'OTAN. Le premier tir de missile US dans le Donbass visera symboliquement la Russie. On sait comment tournent ces choses.
On vient ainsi de franchir un cliquet dans l'engrenage d'une guerre qui serait effroyable, compte tenu de l'arsenal du pays que l'on veut attaquer.
En ramenant la France dans la vassalité de l'OTAN, M. Sarkozy nous a réenfermés dans la position d'agresseur-cible dont le général de Gaulle nous avait sortis. Le plus beau est que les conseillers politico-militaires d'Obama vouent un mépris total à la France : "un tas de merde", avait dit Mme Rice du plan français d'intervention au Mali... Ce plan était ce qu'il était, et ses résultats sont aléatoires puisque les djihadistes sahariens sont solidement basés (et lourdement armés) en Libye grâce à M. Sarkozy ; mais la phrase de Mme Rice exprimait surtout l'indifférence de Washington envers le problème djihadiste*. Comme sa prédécesseur(e) qui se nommait également Rice, Mme Rice bis ne fait pas la guerre aux djihadistes : elle fait la guerre à... la Russie. Vous savez pourquoi.
Soumis à ces intérêts qui ne sont pas les nôtres, enfermés dans une OTAN où nous n'aurions jamais du revenir, nous voilà dans le convoi d'une guerre qui n'aurait pour nous aucun sens, mais qui en aurait un pour le capitalisme en crise : comme en 1914.
ps - C'est peut-être l'une des explications du "soutien" d'Obama au nouveau gouvernement grec. En menaçant d'empêcher l'UE de suivre Washington contre la Russie, Tsipras gêne Obama. En soutenant Tsipras dans l'affaire de la dette, Obama obtient que la Grèce ne mette pas son veto à des opérations européennes anti-russes. Le Premier ministre grec : Ulysse aux Mille Ruses ?
_______________
* Sauf dans les cas spécifiques où ce problème menace, ou pourrait menacer, l'Etat d'Israël.
02/02/2015 | Lien permanent | Commentaires (10)