Rechercher : armées privées
Le pouvoir libéral peut compter sur les Black Blocs...
Cocktail molotov forcément au service de de la "défense des corporatismes et des inégalités" (c'est-à-dire le mouvement social vu par les macronistes)
16 h – Toujours là pour saloper un mouvement social, les très obscurs BB sont maintenant en tête de manif à Paris afin (comme chaque fois) d'incendier des bistrots, des feux de circulation, des baraques de chantier... et de choquer le téléspectateur :
"Tensions dans le cortège", annoncent naturellement les agences : comme si ces exactions venaient des vrais manifestants.
Nous aurons sans doute droit à de graves déclarations du gouvernement sur l'urgence de défendre la République. Contre ces bandes armées (laissées un peu trop libres de leurs actions) ? Ou plutôt, latéralement, contre le mouvement social ?
Les BB font ce travail de provocateurs depuis des années. Parfaitement profilés par les polices de l'UE, ils restent néanmoins libres d'opérer. C'est l'habitude...
Les deux ou trois que l'on a tout de même dû interpeller à Nantes à la mi-journée venaient d'Allemagne et des Pays-Bas.
05/12/2019 | Lien permanent | Commentaires (2)
Luc Ferry, président d'honneur des Amis de Galliffet ?
À Radio Classique hier, Luc Ferry (philosophe institutionnel de la droite) donnait son sentiment sur les émeutes de Gilets jaunes :
► "Que [les policiers] se servent de leurs armes une bonne fois, écoutez, ça suffit ! "
► "On a, je crois, la quatrième armée du monde : elle est capable de mettre fin à ces saloperies, faut dire les choses comme elles sont !"
La réplique à M. Ferry pourrait bien être cette chanson de 1871 :
https://www.youtube.com/watch?v=58v-IpXXUiQ
Léon Bloy : « Par nature, le Bourgeois est haïsseur et destructeur de paradis. Quand il aperçoit un beau domaine, son rêve est de couper les grands arbres, de tarir les sources, de tracer des rues, d'instaurer des boutiques et des urinoirs. Il appelle ça monter une affaire. »
(Éxégèse des lieux communs, éd. Rivages, coll. « Rivages poche / Petite Bibliothèque », 2005)
08/01/2019 | Lien permanent | Commentaires (7)
Pape François : sa première 'exhortation apostolique'
Texte intégral : ici
(Voir notamment - parmi bien d'autres choses - la critique papale de la fausse théorie économique de la rationalité du marché...)
Présentation du document par Mgr Fisichella, président du Conseil pontifical pour la promotion de la Nouvelle Evangélisation :
<< Evangelii gaudium : l'Exhortation apostolique du Pape François écrite à la lumière de la joie, pour redécouvrir la source de l'évangélisation dans le monde contemporain. C'est ainsi que l'on pourrait résumer le contenu de ce nouveau document que le Pape François donne à l'Eglise pour préciser les chemins que la pastorale doit emprunter dans un avenir immédiat. C'est une invitation à retrouver une vision prophétique et positive de la réalité, sans pour autant se cacher les difficultés. Le Pape François nous encourage et nous engage à regarder devant nous, au-delà de ce temps de crise, faisant une nouvelle fois de la croix et de la résurrection du Christ l' « étendard de la victoire » (85).
A plusieurs reprises, le Pape François fait référence aux Propositiones du Synode d'octobre 2012, montrant ainsi combien la contribution du Synode fut importante dans la rédaction de cette Exhortation. Le document va cependant plus loin que l'expérience synodale. Le Pape y imprime non seulement sa propre expérience pastorale, mais aussi l'invitation à accueillir le moment de grâce que vit l'Eglise, afin d'avancer avec foi, conviction et enthousiasme la nouvelle étape de l'évangélisation. Reprenant l'enseignement de Evangelii nuntiandi de Paul VI, il place de nouveau au centre la personne de Jésus Christ, premier évangélisateur qui appelle chacun de nous à prendre part avec lui à l'œuvre du salut (12). « L'action missionnaire est le paradigme de toute œuvre de l'Eglise » (15) affirme le Saint Père. C'est pourquoi il nous faut accueillir ce temps favorable pour discerner et vivre la « nouvelle étape » de l'évangélisation (17) qui s'articule autour de deux thèmes qui forment la trame de l'Exhortation. D'une part, le Pape François s'adresse aux Eglises particulières, confrontées aux défis et aux opportunités propres aux différents contextes culturels, pour qu'elles soient en mesure de spécifier le travail de nouvelle évangélisation dans leurs pays. D'autre part, le Pape indique un dénominateur commun, pour que toute l'Eglise, et chaque évangélisateur, puisse adopter une méthode commune, signe que l'évangélisation est un chemin où l'on marche à plusieurs, jamais de façon isolée. Les sept points, regroupés dans les cinq chapitres de l'Exhortation, constituent la vision du Pape à propos de la nouvelle évangélisation : la réforme de l'Eglise sur la voie de la mission, les tentations des agents pastoraux, l'Eglise comprise comme la totalité du Peuple de Dieu qui évangélise, l'homélie et sa préparation, l'intégration sociale des pauvres, la paix et le dialogue social, les motivations spirituelles de l'engagement missionnaire. Le lien entre tous ces thèmes est l'amour miséricordieux de Dieu qui va à la rencontre de chacun pour manifester le cœur de la révélation : la vie de chacun trouve son sens dans la rencontre de Jésus-Christ et dans la joie de partager cette expérience d'amour avec les autres (8).
Le premier chapitre développe la réforme de l'Eglise sur la voie de la mission, appelée à « sortir » d'elle-même pour aller à la rencontre des autres. Le Pape y exprime la « dynamique de l'exode et du don que représente le fait de sortir de soi, de cheminer et de semer toujours, et toujours plus loin » (21). L'Eglise doit faire sienne l' « intimité de Jésus qui est une intimité itinérante » (23). Comme nous y sommes désormais habitués, le Pape s'attarde en des expressions qui font leur effet et crée des néologismes pour faire comprendre la nature de l'évangélisation. Parmi eux, le « Primerear », c'est-à-dire Dieu qui nous précède dans l'amour, montrant à l'Eglise le chemin à parcourir. L'Eglise n'est pas dans une obscure impasse, mais avance sur les pas du Christ (Cf. 1 P 2, 21), pour cela sûre du chemin qu'elle parcourt. C'est pourquoi elle avance sans peur. Elle sait qu'elle doit « aller à la rencontre, chercher ceux qui sont loin, parvenir jusqu'aux croisements des routes pour inviter les exclus. Son désir de proposer la miséricorde est inépuisable » (24). Pour aller dans cette voie, le Pape François insiste sur la « conversion pastorale », qui veut dire passer d'une vision bureaucratique, statique et administrative de la pastorale à une perspective missionnaire, où la pastorale est en état permanent d'évangélisation (25). De même qu'il y a des structures qui facilitent et soutiennent la pastorale missionnaire, il y a malheureusement « des structures ecclésiales qui peuvent conditionner le dynamisme évangélisateur » (26). L'existence de pratiques pastorales dépassées et fanées oblige à la créativité pour repenser l'évangélisation. En ce sens, le Pape affirme : « Une détermination des objectifs sans un travail de recherche communautaire des moyens à prendre pour les atteindre est vouée à demeurer une pure fantaisie » (33).
Il faut donc « se concentrer sur l'essentiel » (35) et savoir que seule une dimension systématique, c'est-à-dire unifiée, progressive et proportionnée de la foi, peut nous venir en aide. L'Eglise doit pouvoir établir une « hiérarchie des vérités » et sa relation avec le cœur de l'Evangile (37-39). Il nous faudra éviter de tomber dans le piège d'une présentation de la foi seulement sous son aspect moral, en s'éloignant du caractère central de l'amour. Dans le cas contraire, l' « édifice moral de l'Eglise risque de s'effondrer comme un château de carte, et ceci est le plus grand danger » (39). Le Pape insiste fortement pour que l'on trouve l'équilibre entre le contenu de la foi et le langage pour l'exprimer. La rigidité avec laquelle on tient à la précision du langage peut parfois en ruiner le contenu en se détournant d'une authentique vision de la foi (41).
Le passage important de ce chapitre est le n° 32 où le Pape François montre l'urgence qu'il y a à avancer dans certaines perspectives de Vatican II. Il s'agit en particulier du primat du Successeur de Pierre et des Conférences épiscopales. Déjà, dans Ut unum sint, Jean-Paul II avait demandé qu'on l'aide à mieux comprendre les objectifs du Pape dans le dialogue œcuménique. Le Pape François va dans le même sens et se demande si une telle aide ne pourrait pas parvenir d'une évolution du statut des Conférences épiscopales. Un autre passage (n° 38-45) est particulièrement important quant aux conséquences qu'il implique dans la pastorale : le cœur de l'Évangile « s'incarne dans les limites du langage humain ». La doctrine s'insère dans la « cage du langage », pour employer une expression chère à Wittgenstein, ce qui implique un vrai discernement entre la pauvreté et les limites du langage, et la richesse - souvent encore inconnue - du contenu de la foi. Le danger est réel que l'Église ne prenne pas en compte cette dynamique. Il peut ainsi arriver que sur certaines positions, il y ait comme un enfermement et une sclérose du message évangélique, en n'en percevant plus le développement propre.
Le deuxième chapitre est consacré aux défis du monde contemporain et aux tentations qui amoindrissent la nouvelle évangélisation. Tout d'abord, le pape affirme qu'il est nécessaire de retrouver son identité sans complexe d'infériorité qui amènerait à « cacher son identité et ses convictions... parvenant ainsi à étouffer la joie de la mission en une sorte d'obsession d'être comme tout le monde et d'avoir ce que les autres possèdent » (79). Les chrétiens tombent alors dans un « relativisme encore plus dangereux que le relativisme doctrinal » (80), parce qu'il touche directement la façon de vivre des chrétiens. Il arrive ainsi que dans de nombreuses manifestations de la pastorale, les initiatives sont plombées par la mise en avant de l'initiative et non des personnes. Le pape affirmé que la tentation est réelle et commune d'une « dépersonnalisation de la personne ».
De la même façon, le défi de l'évangélisation devrait être abordé comme une chance pour croître, plutôt que comme une raison de tomber en dépression. Mort à l' « esprit défaitiste » (88). Il nous faut retrouver le primat de la relation personnelle sur la technique de la rencontre qui déciderait comment, où et pour combien de temps il faudrait rencontrer les autres en partant de ses préférences (88). Parmi ces défis, il nous faut relever ceux qui ont un rapport direct avec la vie. La « précarité quotidienne avec ses funestes conséquences », les différentes formes de « disparité sociale », le « fétichisme de l'argent et la dictature d'une économie sans visage », l' « exaspération de la consommation » et le « consumérisme effréné »... nous place face à une « globalisation de l'indifférence » et une « dépréciation moqueuse » de la morale, qui exclut toute critique de la domination du marché, qui, à travers la théorie de la « rechute favorable » illusionne sur les réelles possibilités d'agir en faveur des pauvres (Cf. N° 52-64). Si l'Eglise demeure crédible en beaucoup de pays du monde, y compris là où elle est minoritaire, c'est en raison de ses œuvres de charité et de solidarité (65).
Pour l'évangélisation de notre temps, face au défi des grandes « cultures urbaines », les chrétiens sont invités à fuir deux expressions qui en détruisent la nature et que le Pape François appelle « mondanité » (93). Il s'agit en premier lieu de la « fascination du gnosticisme » : une foi repliée sur elle-même, sur ses certitudes doctrinales, et qui transforme l'expérience qu'on en fait en critères de vérité pour juger les autres. Le « néo pélagianisme autoréférentiel et prométhéen » de ceux pour qui la grâce n'est qu'un accessoire tandis que leur engagement et leurs forces sont seuls responsables du progrès. Tout ceci contredit l'évangélisation et crée une sorte d' « élitisme narcissique » qui doit être repoussé (94). Qui voulons-nous être, se demande le Pape ? « Généraux d'armées défaites » ou bien « simples soldats d'un bataillon qui continue à combattre » ? Le risque d'une « Eglise mondaine drapée dans le spirituel et le pastoral » (96) est bien réel. Il nous faut donc résister à ces tentations et offrir le témoignage de la communion (99) qui s'appuie sur la complémentarité. A partir de là, le Pape François milite pour la promotion des laïcs et des femmes, de l'engagement pour les vocations et les prêtres. Regarder ce que l'Eglise a accompli comme progrès ces dernières années nous éloigne d'une mentalité de pouvoir, au profit du service pour une construction unifiée de l'Eglise (102-108).
L'évangélisation est la mission de tout le peuple de Dieu, sans exclusive. Elle ne peut être réservée ou déléguée à un groupe particulier. Tous les baptisés sont directement concernés. Dans le troisième chapitre de l'Exhortation, le Pape François en explique le développement et ses étapes. On met en évidence en premier lieu le « primat de la grâce » qui agit inlassablement dans la vie de tout évangélisateur (112). Puis est développé le rôle des différentes cultures dans le processus d'inculturation de l'Evangile, et le danger de tomber dans « l'orgueilleuse sacralisation de sa propre culture » (117). Enfin, on parle du rôle fondamental de la rencontre personnelle (127-129) et du témoignage de vie (121). On insiste enfin sur la valeur de la piété populaire, où s'exprime la foi authentique de tant de personnes qui donnent ainsi le témoignage de la simplicité de la rencontre de l'amour de Dieu (122-126). Pour terminer, le Pape invite les théologiens à valoriser les diverses formes d'évangélisation (133), et s'arrête assez longuement sur l'homélie comme forme privilégiée d'évangélisation, et qui demande une vraie passion et un vrai amour de la Parole de Dieu et du peuple qui nous est confié (135-158).
Le quatrième chapitre est consacré à la dimension sociale de l'évangélisation. C'est un thème cher au Pape François parce que « si cette dimension n'est pas clairement prise en compte, on court le risque de défigurer le sens authentique et intégral de la mission d'évangélisation » (176). C'est le thème majeur du lien entre l'annonce de l'Evangile et la promotion de la vie humaine en toutes ses expressions. La promotion intégrale de toute personne nous empêche d'enfermer la religion en un fait privé, dépourvu de conséquences sur la vie sociale et publique. Une « foi authentique implique toujours un désir profond de changer le monde (183). Deux grands thèmes font partie de ce passage de l'Exhortation. Le Pape en parle avec une grande passion évangélique, conscient que l'avenir de l'humanité est en jeu : l' « intégration sociale des pauvres » et « la paix et le dialogue social ».
S'agissant du premier point, l'Eglise, à travers la nouvelle évangélisation ressent comme sienne la mission de « collaborer pour résoudre les causes instrumentales de la pauvreté et pour promouvoir le développement intégral des pauvres », comme d'accomplir « des gestes simples et quotidiens de solidarité face à la misère concrète « qui est chaque jour devant nos yeux »(188). Ce qui ressort de ces pages denses, c'est l'appel à reconnaître la « force salvifique » des pauvres, et qui doit être au centre de la vie de l'Eglise avec la nouvelle évangélisation (198). Il nous faut donc redécouvrir d'abord l'attention, l'urgence, la conscience de ce thème, avant toute expérience concrète. Pour le Pape François, non seulement l'option fondamentale pour les pauvres doit être réalisée, mais elle est d'abord une « attention spirituelle » et « religieuse » et est pour cela prioritaire (200).
Sur ces thèmes, la Parole du Pape François est franche et sans détour. Un « Pasteur d'une Eglise sans frontière » 8 210), ne peut se permettre de regarder ailleurs. C'est pourquoi il demande avec force de considérer la question des migrants et énonce clairement les nouvelles formes d'esclavage. « Où est celui qui tue chaque jour dans la petite fabrique clandestine, dans le système de prostitution, les enfants utilisés pour mendier, en celui qui doit travailler caché parce qu'il n'est pas régularisé ? Ne nous leurrons pas. Il y a de nombreuses complicités » (211). De mille manières, le Pape défend la vie humaine depuis son commencement et la dignité de tout être vivant (213). Sur le second aspect, le Pape énonce quatre princip
26/11/2013 | Lien permanent | Commentaires (11)
Le pape aux diplomates : un message percutant et complet sur la crise planétaire en tous domaines...
...en particulier l'environnement, dont Benoît XVI parle en des termes disqualifiant (une fois de plus) l'écolophobie et le négationnisme climatique :
DISCOURS DU PAPE BENOÎT XVI
AU CORPS DIPLOMATIQUE
ACCRÉDITÉ PRÈS LE SAINT-SIÈGE
POUR LA RENCONTRE TRADITIONNELLE
POUR L'ÉCHANGE DES VŒUX
Lundi 11 janvier 2010
Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Cette rencontre traditionnelle du début de l’année, deux semaines après la célébration de la naissance du Verbe incarné, est pour moi une grande joie. Comme nous l’avons proclamé dans la liturgie : « Dans le mystère de la Nativité, celui qui par nature est invisible se rend visible à nos yeux ; engendré avant le temps, Il entre dans le cours du temps. Faisant renaître en Lui la création déchue, Il restaure toute chose » (2ème préface de la Nativité). A Noël, nous avons donc contemplé le mystère de Dieu et celui de la création : par l’annonce des anges aux bergers, nous est parvenue la bonne nouvelle du salut de l’homme et du renouvellement de tout l’univers. C’est pourquoi, dans le Message pour la célébration de la Journée Mondiale de la Paix de cette année, j’ai invité toutes les personnes de bonne volonté, à qui les anges ont promis justement la paix, à protéger la création. Et c’est dans le même esprit que je suis heureux de saluer chacun d’entre vous, en particulier ceux qui sont présents pour la première fois à cette cérémonie. Je vous remercie vivement pour les vœux dont s’est fait l’interprète votre doyen, Monsieur l’Ambassadeur Alejandro Valladares Lanza, et vous redis combien j’apprécie la mission que vous accomplissez près le Saint-Siège. Par votre entremise, je désire faire parvenir de cordiales salutations et des souhaits de paix et de bonheur aux Autorités et à tous les habitants des pays que vous représentez dignement. Ma pensée s’étend aussi à toutes les autres nations de la terre : le Successeur de Pierre tient sa porte ouverte à tous et désire entretenir avec tous des relations qui contribuent au progrès de la famille humaine. Depuis quelques semaines, de pleines relations diplomatiques ont été établies entre le Saint-Siège et la Fédération de Russie, c’est là un motif de profonde satisfaction. De même, a été très significative la visite que m’a faite récemment le Président de la République Socialiste du Vietnam, pays cher à mon cœur, où l’Eglise célèbre sa présence multiséculaire par une Année jubilaire. Dans cet esprit d’ouverture, au cours de l’année 2009, j’ai reçu de nombreuses personnalités politiques venant de divers pays ; j’ai aussi visité certains d’entre eux et je me propose à l’avenir, dans la mesure du possible, de continuer à le faire.
L’Eglise est ouverte à tous parce que, en Dieu, elle existe pour les autres ! Elle participe donc intensément au sort de l’humanité qui, en cette année à peine commencée, apparaît encore marquée par la crise dramatique qui a frappé l’économie mondiale, provoquant une instabilité sociale grave et diffuse. Dans l’Encyclique « Caritas in veritate », j’ai invité à rechercher les racines profondes de cette situation : en dernière analyse, elles résident dans une mentalité courante égoïste et matérialiste, oublieuse des limites inhérentes à toute créature. Aujourd’hui, je voudrais souligner que cette même mentalité menace également la création. Chacun de nous pourrait citer, probablement, un exemple des dommages qu’elle provoque à l’environnement, partout dans le monde. J’en cite un, parmi tant d’autres, dans l’histoire récente de l’Europe : il y a vingt ans, quand tomba le mur de Berlin et quand s’écroulèrent les régimes matérialistes et athées qui avaient dominé pendant plusieurs décennies une partie de ce continent, n’a-t-on pas pu prendre la mesure des profondes blessures qu’un système économique privé de références fondées sur la vérité de l’homme avait infligé non seulement à la dignité et à la liberté des personnes et des peuples, mais aussi à la nature, avec la pollution du sol, des eaux et de l’air ? La négation de Dieu défigure la liberté de la personne humaine, mais dévaste aussi la création. Il s’ensuit que la sauvegarde de la création ne répond pas principalement à une exigence esthétique, mais bien davantage à une exigence morale, car la nature exprime un dessein d’amour et de vérité qui nous précède et qui vient de Dieu.
C’est pourquoi je partage la préoccupation majeure que causent les résistances d’ordre économique et politique à la lutte contre la dégradation de l’environnement. Il s’agit de difficultés qui ont pu être constatées encore dernièrement, lors de la XVème Session de la Conférence des Etats parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, qui s’est tenue à Copenhague du 7 au 18 décembre dernier. Je souhaite que dans le courant de cette année, d’abord à Bonn, et puis à Mexico, il soit possible de parvenir à un accord pour affronter cette question de façon efficace. Il s’agit d’un enjeu d’autant plus important qu’il en va du destin même de certaines nations, en particulier certains Etats insulaires.
Il convient, toutefois, que cette attention et cet engagement pour l’environnement soient bien ordonnés dans l’ensemble des grands défis qui se posent à l’humanité. Si l’on veut construire une vraie paix, comment serait-il possible de séparer, ou même d’opposer, la protection de l’environnement et celle de la vie humaine, y compris la vie avant la naissance ? C’est dans le respect que la personne humaine a d’elle-même que se manifeste son sens de la responsabilité pour la création. Car, comme saint Thomas d’Aquin l’enseigne, l’homme représente ce qu’il y a de plus noble dans l’univers (cf. Summa Theologiae, I, q. 29, a.3). En outre, et je l’ai rappelé lors du récent Sommet mondial de la FAO sur la Sécurité alimentaire, « la terre est en mesure de nourrir tous ses habitants » (Discours du 16 novembre 2009, n. 2), pourvu que l’égoïsme ne conduise pas à l’accaparement par quelques-uns des biens destinés à tous !
Je voudrais souligner encore que la sauvegarde de la création implique une gestion correcte des ressources naturelles des pays et, en premier lieu, de ceux qui sont économiquement défavorisés. Ma pensée va au continent africain, que j’ai eu la joie de visiter au mois de mars dernier, lors de mon voyage au Cameroun et en Angola, et auquel ont été consacrés les travaux de la récente Assemblée spéciale du Synode des Evêques. Les Pères synodaux ont signalé avec préoccupation l’érosion et la désertification de grandes étendues de terre cultivable, à cause de la surexploitation et de la pollution de l’environnement (cf. Propositio 22). En Afrique, comme ailleurs, il est nécessaire d’adopter des choix politiques et économiques qui assurent « des formes de production agricole et industrielle respectueuses de l’ordre de la création et satisfaisantes pour les besoins essentiels de tous » (Message pour la célébration de la Journée Mondiale de la Paix 2010, n. 10).
Comment oublier, d’autre part, que la lutte pour l’accès aux ressources naturelles est l’une des causes de plusieurs conflits, entre autres en Afrique, ainsi que la source d’un risque permanent dans d’autres cas ? C’est aussi pour cette raison que je répète avec force que, pour cultiver la paix, il faut protéger la création ! Par ailleurs, il y a encore de vastes étendues, par exemple en Afghanistan ou en certains pays de l’Amérique Latine, où malheureusement l’agriculture est encore liée à la production de drogue, et où elle constitue une source non négligeable d’emploi et de subsistance. Si on veut la paix, il faut préserver la création par la reconversion de telles activités et je voudrais demander, une fois encore, à la communauté internationale de ne pas se résigner au trafic de la drogue et aux graves problèmes moraux et sociaux que celle-ci engendre.
Oui, Mesdames et Messieurs, la protection de la création est un facteur important de paix et de justice ! Parmi les nombreux défis qu’elle lance, l’un des plus graves est celui de l’augmentation des dépenses militaires ainsi que du maintien et du développement des arsenaux nucléaires. D’énormes ressources économiques sont absorbées à ces fins, alors qu’elles pourraient être destinées au développement des peuples, surtout des plus pauvres. C’est pourquoi j’espère fermement que, lors de la Conférence d’examen du Traité de non prolifération des armes nucléaires, qui se tiendra au mois de mai prochain à New York, soient prises des décisions efficaces en vue d’un désarmement progressif, visant à libérer la planète des armes nucléaires. Plus généralement, je déplore que la production et l’exportation des armes contribuent à perpétuer conflits et violences, comme au Darfour, en Somalie ou en République Démocratique du Congo. A l’incapacité des parties directement impliquées à s’extraire de la spirale de violence et de douleur engendrée par ces conflits, s’ajoute l’apparente impuissance des autres pays et des Organisations internationales à ramener la paix, sans compter l’indifférence quasi résignée de l’opinion publique mondiale. Il n’est pas besoin de souligner combien de tels conflits endommagent et dégradent l’environnement. Comment, enfin, ne pas mentionner le terrorisme, qui met en danger tant de vies innocentes et provoque une anxiété diffuse ? En cette circonstance solennelle, je voudrais renouveler l’appel que j’ai lancé le 1er janvier, lors de la prière de l’Angelus, à ceux qui font partie de groupes armés, quels qu’ils soient, afin qu’ils abandonnent la voie de la violence et ouvrent leur cœur à la joie de la paix.
Les graves violences que je viens d’évoquer, associées aux fléaux de la pauvreté et de la faim, ainsi qu’aux catastrophes naturelles et à la destruction de l’environnement, contribuent à grossir les rangs de ceux qui abandonnent leur propre terre. Face à un tel exode, je désire exhorter les Autorités civiles, intéressées à divers titres, à œuvrer avec justice, solidarité et clairvoyance. En particulier, je voudrais mentionner ici les Chrétiens du Moyen-Orient. Assaillis de diverses manières, jusque dans l’exercice de leur liberté religieuse, ils quittent la terre de leurs pères, où se développa l’Eglise des premiers siècles. C’est pour leur apporter un soutien et pour leur faire sentir la proximité de leurs frères dans la foi que j’ai convoqué pour l’automne prochain l’Assemblée spéciale du Synode des Evêques sur le Moyen-Orient.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, je n’ai évoqué jusqu’ici que quelques aspects liés à la problématique de l’environnement. Cependant, les racines de la situation qui est sous les yeux de tous, sont d’ordre moral et la question doit être affrontée dans le cadre d’un grand effort d’éducation, afin de promouvoir un changement effectif des mentalités et d’établir de nouveaux modes de vie. La communauté des croyants peut et veut y participer, mais, pour ce faire, il faut que son rôle public soit reconnu. Malheureusement, dans certains pays, surtout occidentaux, se diffuse parmi les milieux politiques et culturels, ainsi que dans les médias, un sentiment de peu de considération et parfois d’hostilité, pour ne pas dire de mépris, envers la religion, en particulier la religion chrétienne. Il est clair que si le relativisme est considéré comme un élément constitutif essentiel de la démocratie, on risque de ne concevoir la laïcité qu’en termes d’exclusion ou, plus exactement, de refus de l’importance sociale du fait religieux. Une telle approche, cependant, crée confrontation et division, blesse la paix, perturbe l’écologie humaine et, en rejetant par principe les attitudes différentes de la sienne, devient une voie sans issue. Il est donc urgent de définir une laïcité positive, ouverte, qui, fondée sur une juste autonomie de l’ordre temporel et de l’ordre spirituel, favorise une saine collaboration et un esprit de responsabilité partagée. Dans cette perspective, je pense à l’Europe, qui, avec l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, a ouvert une nouvelle phase de son processus d’intégration, que le Saint-Siège continuera à suivre avec respect et avec une attention bienveillante. Notant avec satisfaction que le Traité prévoit que l’Union européenne maintienne avec les Eglises un dialogue « ouvert, transparent et régulier » (art. 17), je forme des vœux afin que, dans la construction de son avenir, l’Europe sache toujours puiser aux sources de sa propre identité chrétienne. Comme je l’ai dit, durant mon voyage apostolique en République Tchèque, au mois de septembre dernier, celle-ci a un rôle irremplaçable « pour la formation de la conscience de chaque génération et la promotion d’un consensus éthique de base qui est utile à toute personne qui appelle ce continent ‘ma maison’ ! » (Rencontre avec les Autorités politiques et civiles et avec le Corps diplomatique, 26 septembre 2009).
Poursuivant notre réflexion, il est nécessaire de relever que la problématique de l’environnement est complexe ; on pourrait dire qu’il s’agit d’un prisme aux facettes multiples. Les créatures sont différentes les unes des autres et peuvent être protégées, ou au contraire mises en danger de diverses manières, comme nous le montre l’expérience quotidienne. Une de ces attaques provient des lois ou des projets qui, au nom de la lutte contre la discrimination, attentent au fondement biologique de la différence entre les sexes. Je me réfère, par exemple, à des pays européens ou du continent américain. « Si tu enlèves la liberté, tu enlèves la dignité », dit saint Colomban (Epist. N. 4 ad Attela, in S. Columbani Opera, Dublin, 1957, p. 34). Toutefois la liberté ne peut être absolue, parce que l’homme n’est pas Dieu, mais image de Dieu, sa créature. Pour l’homme, le chemin à suivre ne peut être fixé par l’arbitraire ou le désir, mais doit consister, plutôt, à correspondre à la structure voulue par le Créateur.
La sauvegarde de la création comporte aussi d’autres défis, auxquels on ne peut répondre que par la solidarité internationale. Je pense aux catastrophes naturelles, qui, durant l’année passée, ont semé morts, souffrances et destructions aux Philippines, au Vietnam, au Laos, au Cambodge et dans l’Ile de Taiwan. Comment ne pas rappeler aussi l’Indonésie et, plus près de nous, la région des Abruzzes frappées par des tremblements de terre dévastateurs ? Face à de tels évènements, une généreuse assistance ne doit jamais manquer, parce que la vie même des créatures de Dieu est en jeu. Mais la sauvegarde de la création, en plus de la solidarité, a besoin aussi de la concorde et de la stabilité des Etats. Quand surgissent des divergences et des hostilités entre ces derniers, pour défendre la paix, ils doivent poursuivre avec ténacité la voie d’un dialogue constructif. C’est ce qui advint, il y a vingt-cinq ans, avec le Traité de Paix et d’Amitié entre l’Argentine et le Chili, conclu grâce à la médiation du Siège Apostolique. Il a porté d’abondants fruits de collaboration et de prospérité, qui ont profité, d’une certaine façon, à toute l’Amérique Latine. Dans cette même région du monde, je suis heureux du rapprochement que la Colombie et l’Equateur ont entrepris après plusieurs mois de tension. Plus près de nous, je me réjouis de l’entente conclue entre la Croatie et la Slovénie à propos de l’arbitrage relatif à leur frontière maritime et terrestre. Je me félicite également de l’Accord entre l’Arménie et la Turquie en vue de la reprise de relations diplomatiques, et je souhaite aussi qu’à travers le dialogue, les relations entre tous les pays du Caucase méridional s’améliorent. Durant mon pèlerinage en Terre Sainte, j’ai appelé de façon pressante les Israéliens et les Palestiniens à dialoguer et à respecter les droits de l’autre. Encore une fois, j’élève ma voix, afin que soit universellement reconnu le droit de l’Etat d’Israël à exister et à jouir de la paix et de la sécurité dans des frontières internationalement reconnues. Et que, de même, soit reconnu le droit du Peuple palestinien à une patrie souveraine et indépendante, à vivre avec dignité et à se déplacer librement. Je voudrais, en outre, demander le soutien de tous, afin que soient protégés l’identité et le caractère sacré de Jérusalem, son héritage culturel et religieux, dont la valeur est universelle. Seulement ainsi, cette ville unique, sainte et tourmentée, pourra être signe et anticipation de la paix que Dieu désire pour toute la famille humaine. Par amour du dialogue et de la paix, qui sauvegardent la création, j’exhorte les gouvernants et les citoyens de l’Iraq à dépasser les divisions, la tentation de la violence et l’intolérance, pour construire ensemble l’avenir de leur pays. Les communautés chrétiennes veulent elles aussi y apporter leur contribution, mais pour cela il faut que leur soient assurés respect, sécurité et liberté. Ces derniers mois, le Pakistan a été aussi durement frappé par la violence et certains épisodes ont visé directement la minorité chrétienne. Je demande que tout soit fait afin que de telles agressions ne se renouvellent plus et que les chrétiens puissent se sentir pleinement intégrés dans la vie de leur pays. S’agissant des violences contre les chrétiens, je ne puis omettre de mentionner, par ailleurs, le déplorable attentat dont vient d’être victime la communauté copte égyptienne ces derniers jours, alors même qu’elle fêtait Noël. Concernant l’Iran, je souhaite qu’à travers le dialogue et la collaboration, soient trouvées des solutions communes, aussi bien au niveau national qu’au plan international. Au Liban, qui a surmonté une longue crise politique, je souhaite de continuer sur la voie de la concorde. J’espère que le Honduras, après un temps d’incertitude et d’agitation, s’achemine vers une normalité politique et sociale retrouvée. Et je souhaite qu’il en aille de même pour la Guinée et pour Madagascar, avec l’aide effective et désintéressée de la communauté internationale.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, au terme de ce rapide tour d’horizon, qui, à cause de sa brièveté, ne peut mentionner toutes les situations qui mériteraient de l’être, me reviennent à l’esprit les mots de l’Apôtre Paul, pour qui « la création tout entière crie sa souffrance » et « nous aussi, nous crions en nous-mêmes notre souffrance » (Rm 8, 22-23). Oui, il y a tant de souffrances dans l’humanité et l’égoïsme humain blesse la création de bien des façons. C’est pour cela que l’attente du salut, qui concerne toute la création, est encore plus intense et qu’elle est présente dans le cœur de tous, croyants et incroyants. L’Eglise indique que la réponse à cette aspiration est le Christ « premier-né par rapport à toute créature, car c'est en lui que tout a été créé dans les cieux et sur la terre » (Col 1, 15-16). Fixant sur Lui mon regard, j’exhorte toute personne de bonne volonté à œuvrer avec confiance et générosité pour la dignité et la liberté de l’homme. Que la lumière et la force de Jésus nous aident à respecter l’écologie humaine, conscients que l’écologie environnementale en trouvera aussi un bénéfice, car le livre de la nature est unique et indivisible ! C’est ainsi que nous pourrons consolider la paix, aujourd’hui et pour les générations à venir. Bonne année à tous !
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11/01/2010 | Lien permanent | Commentaires (3)
Une prophétie pour les derniers jours de l'Avent
Court récit sur l'Antéchrist, par Soloviev
(extrait de son ultime livre) :
Vladmimir Sergueïevitch Soloviev, 1853-1900.
«J'ai voulu faire ressortir clairement comment sont reliés au problème du Mal les aspects vitaux de la vérité chrétienne, sur lesquels de divers côtés le brouillard s'amasse, surtout ces derniers temps. » (V.S.)
<< ...L'Europe du XXIe siècle se présente comme une union d'États plus ou moins démocratiques : les États-Unis d'Europe. Les progrès de la civilisation extérieure reprennent à un rythme accéléré. Mais les objets qui intéressent la conscience intérieure — le problème de la vie et de la mort, celui du destin final du monde et de l'homme, compliqués et embrouillés qu'ils sont par de nombreuses découvertes et recherches en physiologie et en psychologie — restent toujours sans solution... L'humanité a définitivement dépassé ce stade de l'enfance philosophique. Mais il s'avère clairement par ailleurs qu'elle a aussi dépassé la capacité enfantine de croire naïvement et inconsciemment. Même dans les écoles élémentaires on n'enseigne plus que Dieu a créé le monde ex nihilo. Dans ces domaines, une sorte de niveau théorique commun a été défini, au-dessous duquel aucun dogmatisme ne peut descendre. Si donc l'immense majorité de ceux qui pensent reste tout à fait incroyante, le petit nombre des croyants devient pensant par nécessité, appliquant la recommandation de l'apôtre : soyez des enfants par le cœur, non point par l'intelligence.
En ce temps-là, il y avait parmi les rares spiritualistes croyants un homme remarquable — beaucoup le disaient surhomme — qui était tout aussi éloigné de l'enfance de l'intelligence que de celle du cœur. Il était encore jeune, mais son génie supérieur lui avait valu vers l'âge de trente-trois ans une très vaste réputation de grand penseur, d'écrivain et d'homme public. Conscient de posséder en lui une haute force spirituelle, il s'était toujours montré spiritualiste convaincu, et son intelligence claire ne manquait jamais de lui montrer la vérité de ce en quoi on devait croire : le bien, Dieu, le Messie. Il y croyait mais il n'aimait que lui-même. Il croyait en Dieu mais au fond de son cœur il ne pouvait s'empêcher de se préférer à Lui. Il croyait au Bien, mais l'œil omniscient de l'Éternel savait que cet homme s'inclinerait devant la force du mal dès qu'elle l'aurait corrompu ; non qu'il se laisserait tromper par les sens ou les passions inférieures, ni même par l'appât démesuré du pouvoir, mais qu'il succomberait à l'amour démesuré de soi... En un mot, il pensait être ce que le Christ avait été en réalité. Toutefois cette conscience qu'il avait de sa très haute valeur ne l'amena pas, en fait, à reconnaître qu'il avait une dette morale envers Dieu et le monde mais à y voir un droit et un privilège sur autrui, et sur le Christ avant tout. Initialement, il n'était pas non plus hostile à Jésus. Il reconnaissait Sa dignité et Sa signification messianique, mais, sincèrement, il ne voyait en lui que le plus grand de ses prédécesseurs ; la grandeur morale du Christ et Son unicité absolue restaient incompréhensibles à cette intelligence que l'amour-propre obscurcissait...
Apothéose massive de l'individualisme
À ce stade, l'homme-qui-vient présente encore assez peu de traits originaux et caractéristiques. Mahomet, par exemple, considérait ses rapports avec le Christ de façon semblable, et c'était un juste que l'on ne peut accuser de mauvaises intentions. Cet homme imbu de soi se préférera donc au Christ et le justifiera également par le raisonnement suivant : « Le Christ, en prêchant et en réalisant dans sa vie le bien moral, fut le réformateur de l'humanité, mais moi j'ai pour vocation d'être le bienfaiteur de cette humanité en partie réformée et en partie irréformable. Je donnerai aux hommes tout ce qu'il leur faut... Je distinguerai chacun d'entre eux et lui donnerai ce qu'il lui faut ».
...Ce juste plein d'orgueil attend la sanction suprême pour entreprendre le salut de l'humanité. Mais il ne la verra pas venir. Il a déjà trente ans, trois années passent encore. Et voici qu'une pensée lui traverse l'esprit et le pénètre comme un frisson brûlant jusqu'à la moelle des os : « Et si... ? Et si ce n'était pas moi, mais l'autre... le Galiléen... S'Il n'était pas mon précurseur, mais le vrai, le premier et le dernier ? Mais alors, c'est qu'Il est vivant... Où donc est-Il ? Et s'Il venait à moi... ici, à l'instant... Que Lui dirais-je ? Il faudrait que je m'incline devant Lui comme le dernier imbécile chrétien, et que je bredouille stupidement comme un moujik : "Not' Seigneur Jésus-Christ, aie pitié d'moi, pécheur", ou que je m'étende les bras en croix comme une vieille Polonaise ? Moi, ce génie lumineux, ce surhomme ? Non, jamais ! »
Alors, au lieu de l'ancien respect froid et raisonnable qu'il avait pour Dieu et le Christ, naît et se développe dans son cœur une certaine terreur d'abord, puis une envie brûlante qui comprime et resserre tout son être, et enfin une haine furieuse qui lui coupe le souffle. « Moi, moi, moi, pas Lui ! Il ne compte pas parmi les vivants, et n'y comptera pas. Il n'est pas ressuscité, non, non et non ! Il a pourri, Il a pourri dans le tombeau, Il a pourri comme la dernière des... » Et l'écume à la bouche, il bondit convulsivement hors de chez lui, saute la barrière du jardin et, par un sentier rocheux, s'enfuit dans la nuit noire...
Sa fureur s'apaisa et fit place à un désespoir sec et lourd comme ces rochers, et sombre comme cette nuit. Il s'arrêta au bord d'un ravin à pic et entendit tout en bas le bruit sourd d'un torrent qui dévalait sur les cailloux. Une tristesse insupportable accablait son cœur. Tout à coup, quelque chose remua en lui. « Dois-je L'appeler et Lui demander ce que je dois faire ? » Et dans l'obscurité une image douce et triste lui apparut. « Il a pitié de moi... Non, jamais. Il n'est pas ressuscité, non, non ! » Et il se jeta dans le vide. Mais quelque chose d'élastique, telle une colonne d'eau, le maintint en l'air. Il ressentit comme une décharge électrique, et une force le rejeta en arrière. Il perdit un instant connaissance et se retrouva sur les genoux à quelques pas du ravin. Devant lui se détachait une figure qui jetait une lumière phosphorescente et trouble. Deux yeux en sortaient, et leur éclat insupportable lui pénétrait le cœur...
Il voit ces deux yeux perçants et entend, à la fois en lui et en dehors, une voix étrange, sourde et comme étouffée, mais en même temps distincte, métallique et totalement privée d'âme, tel le son d'un phonographe. Et cette voix lui dit : « Mon fils bien-aimé, en toi j'ai mis toute ma complaisance. Pourquoi ne m'as-tu pas recherché ? Pourquoi as-tu révéré l'autre, le méchant, et son père ? C'est moi qui suis ton dieu et ton père. L'autre misérable, le crucifié, il nous est étranger, à toi comme à moi. Je n'ai d'autre fils que toi. Tu es le seul, l'unique, mon égal. Je t'aime et n'exige rien de toi. Tu es assez beau, grand et puissant sans cela. Fais ce que tu as à faire en ton nom à toi, pas en mon nom. Je ne suis pas envieux. Je t'aime. Je ne te demande rien. Celui que tu prenais pour Dieu a exigé de Son fils l'obéissance, une obéissance sans limite, jusqu'à la mort de la croix, et Il ne l'a pas aidé sur la croix : je n'exige rien de toi, et je t'aiderai. Pour toi-même, pour ta valeur et ta supériorité propre, par amour pur et désintéressé pour toi, je t'aiderai. Reçois mon esprit. De même qu'auparavant mon esprit t'a engendré dans la beauté, maintenant il t'engendre dans la force ».
Et à ces mots de l'inconnu, les lèvres du surhomme s'écartèrent involontairement, les deux yeux perçants s'approchèrent tout près de son visage, et il sentit un courant âcre et glacé entrer en lui et emplir tout son être. Il éprouva en même temps une sensation de puissance inouïe, de vigueur, de légèreté et de ravissement. Au même instant, la figure lumineuse et les deux yeux disparurent soudain, quelque chose souleva le surhomme au-dessus du sol et le déposa instantanément dans son jardin, à la porte de chez lui.
Le lendemain, non seulement les visiteurs du grand homme mais même ses serviteurs furent frappés de son air particulier et comme inspiré. Mais ils eussent été bien plus étonnés s'ils avaient pu voir avec quelle facilité et quelle vitesse surnaturelles il écrivit, enfermé dans son cabinet, l'ouvrage célèbre intitulé La Voie ouverte vers la paix et la prospérité universelles... Ce livre, composé après l'aventure du ravin, révélera la puissance jusqu'alors sans précédent de son génie. Ce sera quelque chose d'universel et qui abolira toutes les contradictions... Et tout cela sera réuni et lié avec un art si génial que le penseur ou l'homme d'action le plus borné n'éprouvera aucune difficulté à voir et à accepter l'ensemble de son seul point de vue à lui, sans rien sacrifier à la vérité elle-même, sans se hausser réellement pour elle au-dessus de son propre moi, sans aucunement renoncer en fait à son étroitesse, sans corriger le moins du monde la fausseté de ses vues et de ses aspirations, ni en combler l'insuffisance. Ce livre étonnant sera d'emblée traduit dans les langues de toutes les nations civilisées, et même de certaines qui ne le sont pas. Pendant toute une année, les réclames des éditeurs et l'enthousiasme des critiques empliront des milliers de journaux aux quatre coins du monde. Des éditions à bon marché avec portrait de l'auteur se répandront à des millions d'exemplaires, et tout le monde cultivé — or en ce temps-là cela équivaudra presque à tout le globe terrestre — sera rempli de la gloire de l'incomparable, du grand, de l'unique ! Personne n'opposera d'objection à ce livre et chacun croira y voir la révélation de la vérité totale.... Et, non content d'entraîner tout le monde, le merveilleux écrivain sera agréable à chacun. Ainsi s'accomplira la parole du Christ : « Je suis venu au nom de mon Père et vous ne m'agréez pas ; un autre viendra en son propre nom et vous l'agréerez ». Car pour être agréé il faut être agréable.
Sans doute certains esprits religieux, tout en couvrant le livre d'éloges, finiront quand même par demander pour quoi le Christ n'y est pas mentionné une seule fois. Mais d'autres chrétiens rétorqueront : « Grâce à Dieu ! Dans les siècles passés, le sacré a déjà suffisamment été avili par toutes sortes de zélateurs importuns ; un écrivain profondément religieux doit donc, de nos jours, se montrer très prudent. Du moment que le contenu du livre est empreint de l'esprit authentiquement chrétien d'amour agissant et de bienveillance universelle, que voulez-vous de plus ? » Sur ce point tous seront d'accord.
Globalisation militaire et financière
Peu de temps après la parution de La Voie ouverte, qui avait fait de son auteur le plus populaire de tous les hommes qui eussent jamais vu le jour, l'assemblée constituante internationale de l'Union des États d'Europe devait se réunir à Berlin. Cette Union était menacée par des conflits qui n'opposaient plus, cette fois, des nations, mais des partis politiques et sociaux. Les chefs de file de la politique européenne commune sentaient que l'on manquait d'un pouvoir exécutif commun. L'unité européenne, obtenue au prix de tant de difficultés, pouvait à chaque instant retomber en pièces... Alors les « initiés » résolurent d'instituer une autorité exécutive personnelle, dotée de pouvoirs suffisants. Le principal candidat fut un membre occulte de l'ordre : « l'homme-qui-vient ». Lui seul était mondialement connu. Éminent artilleur de profession et, de son état, gros capitaliste, il avait des amis dans tous les milieux financiers et militaires... L'homme-qui-vient fut élu à la quasi unanimité président à vie des États-Unis d'Europe. Quand il apparut à la tribune dans tout l'éclat de sa, force et de sa juvénile et surhumaine beauté et qu'il exposa, avec une éloquence inspirée, son programme universel, l'assemblée, captivée et charmée décida dans un élan d'enthousiasme, de lui conférer les honneurs suprêmes et, sans passer au vote, le nomma Empereur romain. Le congrès prit fin dans l'allégresse universelle, et le grand élu fit paraître un manifeste qui commençait ainsi : « Peuples de la Terre ! Je vous donne ma paix », et se terminait par ces mots : « Peuples de la Terre ! Les promesses sont accomplies ! La paix universelle et éternelle est assurée. Toute tentative pour, la troubler se heurtera immédiatement à une résistance invincible. Car il y a dorénavant sur terre un pouvoir central qui est plus fort que tous les autres pouvoirs pris ensemble ou séparément. Ce pouvoir invincible et absolument souverain m'appartient à moi, élu de l'Europe et empereur de toutes ses forces... »
Ce manifeste produisit l'effet désiré. En dehors de l'Europe, et particulièrement en Amérique, se constituèrent partout de puissants partis impériaux qui obligèrent les États à adhérer, selon diverses modalités, à l'Europe unie sous l'autorité suprême de l'empereur romain. Il restait encore des peuplades et des États indépendants en divers endroits d'Asie et d'Afrique. L'empereur, avec une armée peu nombreuse mais formée de régiments d'élite russes, allemands, polonais, hongrois et turcs, part pour une promenade militaire qui le mène d'Asie orientale au Maroc et, sans faire couler beaucoup de sang, soumet tous les récalcitrants....
En un an les fondements de la monarchie universelle, au sens propre du mot, sont établis. Les germes de la guerre sont arrachés jusqu'à la racine... Pour la seconde année de son règne, l'empereur romain universel publie un nouveau manifeste : « Peuples de la Terre ! Je vous ai promis la paix, et je vous l'ai donnée. Mais l'ornement de la paix, c'est la prospérité. Celui qui, vivant en paix, est menacé par la misère, ne tire aucune joie de la paix. Venez à moi maintenant, vous tous qui avez faim et froid, pour que je vous nourrisse et vous réchauffe ».
Il annonce alors une réforme sociale simple et universelle, déjà indiquée dans son livre, et qui avait séduit tous les esprits nobles et raisonnables. Maintenant qu'il avait concentré entre ses mains toutes les finances mondiales, ainsi que des propriétés foncières colossales, il pouvait réaliser la réforme souhaitée par les pauvres sans causer de torts sensibles aux riches. Chacun put recevoir selon ses capacités, et chaque capacité selon son travail et ses mérites.
Face au christianisme
...Mais les animaux repus, d'habitude ne veulent pas seulement dormir, mais aussi jouer. À plus forte raison l'humanité a toujours exigé circenses post panem.Le surhomme-empereur comprendra ce qu'il faut à la foule. Il recevra alors à Rome la visite d'un grand thaumaturge d'Extrême-Orient, tout enveloppé d'une épaisse brume d'anecdotes étranges et de fables barbares. Selon les bruits répandus pa
20/12/2012 | Lien permanent | Commentaires (8)
Dodo la Saumure à Eurostat ?
…c'est la pure logique du libéralisme :
Hayek (doctrinaire du libéralisme au XXe siècle) félicitait rétrospectivement Mandeville (XVIIIe siècle) d'avoir édicté le principe selon lequel les vices privés font la prospérité publique. D'où les nouvelles règles édictées par la norme Esa 2010 d'Eurostat : l'Italie en 2015, mais aussi la Grande-Bretagne et les autres pays d'Europe, vont intégrer les ''revenus estimés provenant de la drogue et de la prostitution'' dans le calcul du PIB. Objectif : gonfler les taux de croissance et améliorer les notations. En France l'Insee tique encore, objecte des arguments philosophiques, etc ; mais on ne voit pas comment notre postdémocratie – ayant accompli de considérables progrès sur le plan sociétal – pourrait s'opposer longtemps à ce progrès-là. D'autant que les 29 Etats membres de l'UE sont tenus d'appliquer Esa 2010 (qui entre en vigueur dès le mois de septembre) ''afin que les données restent comparables''. La machine commande. Associé à l'idéologie libérale, ça donnera des résultat pittoresques ; Dodo la Saumure va finir eurocrate.
03/06/2014 | Lien permanent | Commentaires (7)
La ”négociation du libre-échange” UE-USA s'ouvre... malgré le scandale des écoutes !
...et contre la volonté des peuples, puisque :
a) l'UE ne demande pas aux USA de renoncer à espionner les Européens comme adversaires économiques ;
b) ni de renoncer à subventionner le made in USA ;
c) ni de renoncer à faire abolir les normes européennes dans des domaines de santé publique : ainsi nous devrons subir la viande aux hormones, les volailles à l'acide, les produits transgéniques...
etc.
Pour couronner le tout : l'objectif américain – consenti d'avance par la majorité des gouvernements européens – est de livrer ceux-ci (pieds nus et la corde au cou) aux firmes privées, qui pourront faire condamner les Etats dès qu'une velléité d'argument d'intérêt public menacera leurs profits. Pour comprendre à quoi ils devront s'attendre, les Européens auraient intérêt à s'informer sur "l'amendement Monsanto" voté par le Congrès des Etats-Unis !
Mais ces négociations vont, nous dit-on, durer deux ans. Ce délai donne le temps d'organiser une protestation de masse.
08/07/2013 | Lien permanent | Commentaires (8)
Bruxelles prépare le web oligarchique
à lire ici
L' eurocommissaire Neelie Kroes : un plan contre la neutralité du web et l'égalité entre utilisateurs. Les riches seront privilégiés. Les blogueurs libéraux sont pris à leur piège... "Tu l'as voulu, Georges Dandin !" (Molière).
Mais le spécialiste des nouvelles technologies Fabrice Flipo explique (dans la revue Silence) que que, selon l'Observatoire du numérique, le trafic mondial va quadrupler entre 2011 et 2016 pour atteindre 300 milliards de gigaoctets : « Ce qui est probable, souligne-t-il, c'est qu'on va vers des coupures ou des ralentissements épisodiques, du fait de l'accroissement extrêmement rapide du nombre de données transportées, qui met au défi les opérateurs, privés ou publics, de parvenir à augmenter la capacité du réseau dans les mêmes proportions. »
21/07/2013 | Lien permanent | Commentaires (5)
L'empire du fric : une tyrannie d'exigences au delà du réel
La colère des Catalans : " Eurovegas ? Ni ici, ni nulle part !!! "
Pour réaliser en Espagne son projet d’EuroVegas - un gigantesque complexe dédié au jeu - le milliardaire américain Sheldon Adelson a transmis aux autorités espagnoles sa liste d’exigences démesurées :
<< ...exemption de la TVA, des impôts sur le jeu, des cotisations sociales, réforme du code du travail, régime légal dérogatoire durant 30 ans, subventions européennes, don des terrains, autorisation de jeu pour les mineurs, autorisation de fumer dans les bâtiments, etc ... Le cynisme brutal du promoteur de cette zone de non droit - que se disputent aujourd’hui Madrid et Barcelone, donne la mesure de ce qu’ont abandonné les nations européennes en se mettant à la merci des marchés et des fortunes privées : non seulement leur souveraineté, mais aussi leur dignité. >>
Toute l'affaire en détails :
http://contreinfo.info/article.php3?id_article=3232
22/03/2012 | Lien permanent | Commentaires (6)
Tunisie : les parents d’élèves expriment leur indignation après le meurtre du P. Marek Rybinski
S'il y a une chose claire, c'est la réaction de la population de Manouba après l'assassinat du P. Marek Rybinski, prêtre polonais de 34 ans, découvert poignardé hier dans le garage d’une école catholique qui accueille 700 élèves tunisiens - essentiellement musulmans. Extrait du reportage d'Europe 1 :
<< Dans le quartier, les habitants sont abasourdis. Les parents des élèves se sont rassemblés devant l’école samedi : "On a tous peur pour nos enfants. On a aussi peur pour les pères [NDLR : les religieux], qui n’ont rien fait de mal à personne", explique la mère d’un élève de sept ans... Samedi, la police criminelle tunisienne se trouvait sur les lieux du drame mais n’a fait aucun commentaire. De son côté, le père Laurent, qui dirige cette école privée, n’arrive pas à mettre de mots sur son émotion. Les parents d’élèves ont, eux, l’intention d’exprimer leur tristesse et leur colère lors d’une marche prévue dimanche dans le quartier. Elle s’achèvera devant l’école, où des bougies seront déposées en mémoire du prêtre assassiné. >>
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19/02/2011 | Lien permanent | Commentaires (2)