08/04/2015
Libéraux donc cathophobes
Gaspard Koenig et Daniel Borrillo, duo révélateur :
Nous avions présenté le jeune M. Gaspard Koenig dans une note* de décembre dernier : il venait de faire une crise de cathophobie, dans L'Opinion, contre le pape François auquel il reprochait sa dénonciation de la sphère financière. M. Koenig est un ultralibéral de droite, ce qui met sa cathophobie à l'abri de toute attaque de la part des bien-pensants (ils ne feront pas le jeu des socialo-communistes) ; et Le Figaro – qui vomit le pape François – célèbre Gaspard Koenig : « avec lui tout s'éclaire », affirme le journal.
Tout s'éclaire en effet. En voici la preuve, cette fois dans Libération (07/03) : ultralibéral à poil bleu, M. Koenig signe une page Rebonds avec Daniel Borrillo, ultralibéral à poil rose**, philosophe et sociologue du courant LGBTQ. Leur texte s'intitule Qui peut décider de mon sexe, de ma dignité, de ma mort ? Extraits (les mises en gras sont de moi) :
<<...Le combat de la modernité a donc porté à la fois sur l’émancipation et l’appropriation du corps, à rebours d’une tradition chrétienne qui considérait l’homme comme “l’usufrutier” de sa propre chair... >>
<< ...Nos députés l’ont d’ailleurs reconnu, en novembre, en votant à la quasi-unanimité la résolution réaffirmant le droit fondamental à l’IVG : l’exposé des motifs rappelait “les droits des femmes à disposer librement de leur corps”... >>
<< La libre disposition du corps n’est donc pas inscrite dans le marbre de la loi française. La Cour européenne des droits de l’homme a beau avoir reconnu, sur le fondement de l’article 8 de la convention, le droit à «l’autonomie personnelle», le Conseil d’Etat a beau avoir inscrit, dans sa jurisprudence Perruche, la dissociation du sujet et de son corps, le pouvoir politique reste frileux, invoquant les notions d’ “indisponibilité de l’état des personnes” ou de “corps hors commerce” pour justifier les limites à la liberté de l’individu vis-à-vis de lui-même, de sa procréation, de son genre et de sa mort. Il s’agit là, derrière le paravent facile de la “dignité humaine”, d’un discours autoritaire qu’il faut dénoncer... >>
<< C’est ainsi qu’une nouvelle forme de conservatisme antilibéral, de droite comme de gauche, définit et impose une certaine vision de l’humanité... >>
<< Nous proposons donc d’inscrire la libre disposition de soi dans la Constitution comme un droit fondamental. De là découleraient toutes les libertés qui restent mal assurées en droit français : liberté procréative, liberté sexuelle, liberté religieuse, liberté d’expression, liberté vestimentaire… Une fois acquis ce principe, les grands débats de société se régleraient naturellement, sur une base assainie. On dissocierait enfin la loi qui règle les rapports d’individus autonomes et la morale qui réunit les groupes et les communautés. Légaliser la GPA n’empêche pas de s’y opposer ! >>
Etc.
M. Koenig fut le collaborateur de Christine Lagarde et dirige le cercle Génération libre.
M. Borrillo est le stratège reconnu de l'abolition des normes.***
Ils pensent la même chose. Pourtant la droite conspue M. Borrillo et choie M. Koenig ! Serait-elle stupide ?
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*http://plunkett.hautetfort.com/archive/2014/12/03/cathophobie-liberale-5502821.html#more
** mais que Le Figaro n'inviterait pas car il semble voter pour le PS, parti des impôts ! (Quant au bleu et au rose, chacun aura reconnu les couleurs respectives de l'UMP et du PS).
*** Daniel Borrillo et le colloque de 2013 à l'EHESS : http://plunkett.hautetfort.com/archive/2013/04/07/la-loi-taubira-n-est-qu-une-etape-sur-la-voie-de-l-artifical.html#more
19:22 Publié dans Idées | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : libéralisme
Commentaires
@ P.P.
> "Ils pensent la même chose. Pourtant la droite conspue M. Borrillo et choie M. Koenig ! Serait-elle stupide ?" Votre question contient la réponse.
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Écrit par : Jean-Christophe / | 08/04/2015
ÉGOÏSME ET SUFFISANCE
> La loi « règle les rapports d’individus autonomes », selon Gaspard Koenig. Le Larousse précise : la loi est une « prescription établie par l'autorité souveraine de l'Etat, applicable à tous et définissant les droits et les devoirs de chacun ». Il me semble que ce monsieur devrait réfléchir sur l’expression « applicable à tous » qui sous-entend l’existence d’une société – eh oui ! il faut faire avec – et sur la mention des « droits et devoirs de chacun »…
C’est vrai, les partis pris islamophobes ou tout simplement haineux de « Charlie Hebdo » seraient donc applicables à tous, « liberté d’expression » oblige, et on en voit le résultat (dégâts directs ou collatéraux : des morts par centaines).
Le droit d’informer et le devoir de gouverner impliquent certaines responsabilités, à commencer par celle de respecter la réalité et le sens des mots, et par exemple de voir dans le nom de « chrétien » autre chose qu’un gros mot, et on en voit le résultat (RATP/chrétiens d’Orient, médias et Elysée/massacres de « non-musulmans »…).
Oui, reconnaître les convictions religieuses et leur accorder de par la loi un minimum de respect, cela devrait faire partie des droits et devoirs de chacun, et s’appliquer à tous… L’égoïsme et la suffisance règnent dans notre classe politique néolibérale comme dans nos principaux médias, c’est cela, surtout, que je retiens de l’intervention de MM. Borrillo et Koenig !
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Écrit par : Denis / | 08/04/2015
@ P.P.
> ce serait mieux sous climato-sceptique... c'est un peu comme la pub pour les régimes AVANT/APRÈS... en même temps, non ce n'est pas une catastrophe, non, juste l'apocalypse, le dévoilement d'une humanité en putréfaction...
http://www.slate.com/articles/technology/future_tense/2014/07/lake_mead_before_and_after_colorado_river_basin_losing_water_at_shocking.html
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Écrit par : Jean-Christophe / | 08/04/2015
ODEURS
> "liberté procréative, liberté sexuelle, liberté religieuse, liberté d’expression, liberté vestimentaire…"
Pourquoi ne pas se joindre à F.O. TAM (Montpellier) et réclamer la "Liberté d'être débarrasser des Roms et de leur odeur" ! Voilà un vrai combat libéral. Après avoir chassé les pauvres d'Orsay parce que leur "odeur" (le pauvre à une odeur, le riche un parfum) dérangeait des touristes, F.O. s'attaque à l'odeur des pauvres dans les transports publics. Quel courage. Marine n'a vraiment aucune raison de s'en faire pour 2017.
http://www.midilibre.fr/2015/04/07/montpellier-fo-et-le-delicat-probleme-des-odeurs-sur-la-ligne-9,1146914.php
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Écrit par : Jean-Christophe / | 08/04/2015
8 AVRIL 2015 SARKO A UNE SEMAINE DE RETARD
> "Tout n'est pas permis en politique", ajoute Nicolas Sarkozy, toujours sur Facebook."
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Écrit par : Prosper / | 08/04/2015
TSIPRAS CHEZ POUTINE...
> Mon Dieu que j'aurais aimé voir la tronche des commissaires européens...
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Écrit par : Jean-Christophe / | 08/04/2015
A L'ANCIENNE
> Cela rappelle "les esprits forts" du XVIIe siècle. Dans son 'Dom Juan', Molière a génialement montré que leur soi-disant "quête de la liberté" n'est qu'une descente aux enfers.
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Écrit par : Guadet / | 09/04/2015
> Finalement l'instituteur de Villefontaine est juste un peu trop en avance...
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Écrit par : isabelle / | 09/04/2015
LE FASCISME POLICIER STADE ULTIME DE L'ULTRA-LIBÉRALISME
> Question : ils ont été 768 entre le 1er mai et le 31 décembre 2013, puis 1,100 entre le 1er janvier et le 31 décembre 2014 et nous en sommes à 312 depuis le 1er janvier 2015... pardon ça c'était hier mercredi 8 aujourd'hui le décompte est à 316.
Qui sont-ils ?
Y-a rien à gagner...
Les victimes de tirs meurtriers de la police américaine.
http://www.killedbypolice.net/
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Écrit par : Henry Clerc / | 09/04/2015
> Mais où est donc l'entarteur...
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Écrit par : Carl / | 09/04/2015
LIMITES
> "Qui peut décider de mon sexe...?" s'interrogent MM. Koenig et Borillo : pourquoi s'arrêter en si bon chemin et ne pas se demander qui peut décider du sens de rotation de la Terre ou de l'ordre des saisons ? Décidément, les limites que la Création nous impose ne sont pas libérales.
Les extraits que vous nous donnez de ce texte sont édifiants, surtout le dernier, qui finit par : "légaliser la GPA n’empêche pas de s’y opposer" ; dans leur grande bonté, les libéraux prévoient de nous octroyer généreusement la permission de ne pas approuver ce que la loi rendra possible.
Quant à la compatibilité des libéraux avec les colonnes du 'Figaro' selon la couleur de leur pelage, peut-être faut-il en chercher l'explication dans les pages mode de 'Madame Figaro' ? Allez savoir, les opinions politiques ont parfois des motifs frivoles...
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Écrit par : sven laval / | 09/04/2015
LIBÉRALISME PHILOSOPHICO-ÉCONOMIQUE
> Il me souvient d’avoir ici même sur ce blog, laissé un commentaire dans lequel je reproduisais un extrait d’un livre de Georges Kalinowski, philosophe du cercle de Lublin dont on apprend dans « la philosophie à l’heure du Concile » (presses universitaires de l’IPC, 2014)qu’il était un ami de Karol Wojtyla. Le texte reproduit extrait d’ « Initiation à la philosophie morale »( http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0035-3841_1967_num_65_88_7970_t1_0573_0000_2) montrait le lien évident entre le libéralisme philosophique et le libéralisme économique.
J’avais dans ce commentaire exprimé combien il semble que des choses qui étaient évidentes il y a encore quelques décennies ne semblent plus l’être.
Le libéralisme classique et néo-classique est lié à une philosophie hédoniste : c’est l’utilitarisme.
L’utilitarisme est dénoncé comme philosophie morale par saint Jean-Paul II dans « Amour et responsabilité » dans le domaine sexuel. Dans cet ouvrage il précise qu’il s’applique à le dénoncer dans ce domaine car c’est là qu’il semble le plus dangereux à l’époque où l’ouvrage est écrit (soit les années 60).
Ce qui ne veut pas dire qu’il ne puisse pas être dangereux ailleurs en d’autres circonstances.
Keynes dans « Essays in Biography »(chap XIV) disait que l’économiste « doit être mathématicien, historien, homme d’Etat, philosophe ». Si l’on utilise une philosophie « vermoulue », les résultats s’en feront sentir inévitablement. Comme l’on disait au Moyen-Age : « e falso sequitur quodlibet », du faux il s’ensuit n’importe quoi, le vrai comme le faux, le faux comme le vrai.
J’avais fait remarquer dans mon commentaire que : « ce qui semble intéressant ici, c’est la mise en évidence de ce qu’aucun professeur d’économie ne dit jamais : le lien clair et explicite entre d’une part l’hédonisme et les hédonistes et le d’autre part libéralisme. Si cela peut passer inaperçu en cours d’économie, là normalement, n’importe quel catholique qui lit ce qui suit doit être choqué. Vous verrez on y parle même d’Adam Smith. Ces sont des choses dont on a souvent l’impression qu’elles ont été comme oubliées aujourd’hui, quand on ne tombe pas sur des gens dont on a franchement l’impression qu’ils font semblant de ne pas comprendre lorsque l’on les leur dit. Par exemple lorsqu’on parle d’Aristippe de Cyrène, et bien moi la dernière personne que j’ai entendu prononcer ce nom-pour en dire beaucoup de bien, il s’entend- n’est autre que … Michel Onfray. »
Quand l’utilitariste au plan sexuel cherche à maximiser le plaisir (saint Jean-Paul II parle même du calcul du plaisir), le professeur d’économie cherche à maximiser le profit (et des calculs il en fait…oh là oui). Je suis allé faire un tour sur le site de la Nef. J’ai trouvé un article de Charles Beigbeder http://www.lanef.net/t_article/pour-un-juste-liberalisme-charles-beigbeder-26060.asp?page=0
qui prétend que l’on peut dissocier le libéralisme économique du libéralisme philosophique…. Je remets donc ci-dessous le texte de Georges Kalinowski sur l’utilitarisme. On se rendra compte qu’on y parle d’Adam Smith, qui est bien un économiste que l’on retrouve dans un ouvrage de philosophie morale. Le niveau est indigent ou alors il fait semblant de ne pas savoir. Que l’on se rassure, le futur Président de la République sera bien conseillé.
Libéral ou catholique, c’est comme boire ou conduire, il faut choisir.
« Les morales du plaisir et du bonheur (morales hédonistes)
L’hédonisme est une doctrine très ancienne. Nous pouvons distinguer entre hédonisme antique et hédonisme moderne. L’hédonisme a pris dans l’Antiquité deux formes : celle de l’hédonisme positif d’Aristippe de Cyrène (V-IV avant J.Chr.) pour qui le plaisir était une jouissance physique et celle de l’hédonisme négatif d’après lequel le plaisir était surtout l’absence de souffrance. L’hédonisme moderne est assez varié. Nous ne mentionnerons que celui de Mill, de Renan, de France et de Gide.
John Stuart Mill, philosophe, moraliste, logicien et économiste anglais, se rattache à cet hédonisme moderne auquel il a donné lui-même le nom d’utilitarisme dans l’ouvrage portant le titre « The Utilitarisme ».
L’utilitarisme avant la lettre s’épanouit au XVIII s. en Angleterre (Hume, Hartley, Priestley, Paley, Bentham) et en France (Helvetius). Leur hédonisme diffère de celui des anciens par son caractère social. Alors que les cyrénéens (disciples d’Aristippe) et les épicuriens n’étaient préoccupés que du bonheur de l’individu, les utilitaristes anglais et français du XVII s. se soucient à la fois de l’intérêt (nom qu’ils donnaient au plaisir) de l’individu et de celui de tous les membres de la société. Leur morale reste cependant toujours fondée sur un sentiment d’égoïsme bien qu’elle revête tantôt un aspect pessimiste tantôt un aspect optimiste.
Les optimistes (Hartley, Adam Smith, à la fois moraliste et économiste dont l’ouvrage traduit en français sous le titre « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations » fonde le libéralisme économique classique) croient à la suite de Bernard Mandeville (auteur du « Conte des abeilles ») que l’harmonie entre l’intérêt individuel et l’intérêt collectif se réalise spontanément. Tout en restant foncièrement égoïste, l’homme est animé d’un sentiment de sympathie qui le pousse à rechercher le plaisir d’autrui, celui-ci étant la cause du notre.
D’après les pessimistes comme Hume, Bentham et Helvetius, l’harmonie des intérêts individuels et collectifs n’est jamais naturelle. Elle n’est qu’artificielle et doit être provoquée par une intervention des gouvernements.
La doctrine de J. St. Mill se rattache le plus étroitement à celle de Bentham. Ces deux moralistes pensent que la fin de l’homme c’est le plaisir, et que la règle morale suprême nous oblige à rechercher le plaisir de tous : pas de vrai bonheur individuel sans le bonheur de tous. A l’encontre de la plupart des hédonistes, Mill distingue plusieurs catégories de plaisirs. Il admet notamment une différence essentielle entre plaisirs inférieurs et plaisirs supérieurs. Ainsi affirme-t-il qu’il est préférable d’être Socrate insatisfait qu’un sot repus. » Georges Kalinowski, « initiation à la philosophie morale »1966, SEI,p62-63.
P.S : dans le texte on parle d’harmonie. Saint Jean-Paul II, dans sa dénonciation de l’utilitarisme dans le domaine sexuel parle du libéral qui avance l’argument de l’harmonie entre les désirs. Saint Jean-Paul II la qualifie d’ « harmonie douteuse ».
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Écrit par : ND / | 16/04/2015
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