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Après la rencontre des deux François : trois livres et un débat à Radio Notre-Dame ce matin
Invités de Louis Daufresne : Henri Madelin s.j. (Ainsi fait-il, Plon), Lorraine de Plunkett, traductrice de François, un pape surprenant (de la journaliste argentine Evangelina Himitian, Presses de la Renaissance), et Samuel Pruvot (François Hollande, Dieu et la République, Salvator). À réentendre ici
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27/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (2)
Pas une raison
"Il y a une colère du peuple : il faut la prendre en compte, mais ce n'est pas une raison pour donner quitus à tous les extrémismes." (Henri Guaino, RMC, 27/01).
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27/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (19)
Censurons Victor Hugo dans les lycées et collèges ! Expulsons-le du Panthéon !
...en application des « modules ABCD de l'égalité filles-garçons en CM1-CM2 » (Peillon / Vallaud-Belkacem) :
Depuis la rentrée 2013, dans le cadre de la campagne ''ne parlons plus que de sexe (et laissons le reste au Medef)'', les académies de Bordeaux, Clermont-Ferrand, Créteil, Corse, Guadeloupe, Lyon, Montpellier, Nancy-Metz et Rouen – soit 600 classes allant de la maternelle au CM2 – expérimentent les ''modules ABCD de l'égalité''. Ce programme sera généralisé à toutes les écoles en septembre 2014. Le 13 janvier, M. Peillon et Mme Vallaud-Belkacem étaient au groupe scolaire Château-Gaillard de Villeurbanne pour une présentation de l'expérience. Celle-ci ne consiste pas seulement à inculquer aux petits enfants ''une culture de l'égalité et du respect entre filles et garçons'', chose évidemment nécessaire ; elle vise implicitement à édicter l'interchangeabilité des sexes, en ''agissant sur les représentations des élèves''. Le postulat implicite est que la différenciation humaine entre masculin et féminin vient de codes sociaux arbitraires, et que les premiers codes sont les jeux d'enfants : les deux ministres semblent penser que la poupée produit la féminité, et le petit camion en plastique la masculinité. Les ''modules ABCD'' prescrivent donc l'interchangeabilité des jeux [*], étant acquis (pour les néolibéraux PS de l'Education nationale) que les filles jouant avec des petits camions deviendront des executive women, ce qui est évidemment l'idéal.
Entrés dans cette voie, M. Peillon et Mme Vallaud-Belkacem sont condamnés à aller plus loin et appliquer de façon cohérente leur programme de fabrication de l'Individu nouveau. C'est une procédure culturelle ? Alors il faut épurer non seulement les jeux des CM1, mais le programme littéraire des lycées et collèges où subsistent actuellement des zones d'ombre. Par exemple l'étude de Victor Hugo. L'enseignement public le prenait pour un porte-flambeau du Progrès ? Relu à la lumière des circulaires Peillon / Vallaud-Belkacem, on découvre qu'il nous ramène aux dizaines de millénaires les plus sombres de l'histoire humaine. Ouvrez Les Misérables, IIe partie (Cosette), livre 3, au chapitre 8 (chez les Thénardier) où l'on voit Cosette jouer avec un petit sabre de plomb. Applique-t-elle le ''module ABCD de l'égalité'' ? Pas du tout, hélas !
<< …Comme les oiseaux font leur nid avec tout, les enfants font une poupée avec n'importe quoi. Pendant qu'Eponine et Azelma emmaillotaient le chat, Cosette de son côté avait emmailloté le sabre. Cela fait, elles l'avaient couché sur ses bras, et elle chantait doucement pour l'endormir. La poupée est l'un des plus impérieux besoins et, en même temps, un des plus charmants instincts de l'enfance féminine. Soigner, vêtir, parer, habiller, déshabiller, rhabiller, enseigner, un peu gronder, bercer, dorloter, endormir, se figurer que quelque chose est quelqu'un, tout l'avenir de la femme est là. Tout en rêvant et tout en jasant, tout en faisant de petits trousseaux et de petites layettes, tout en cousant de petites robes, de petits corsages et de petites brassières, l'enfant devient jeune fille, la jeune fille devient grande fille, la grande fille devient femme. Le premier enfant continue la dernière poupée. Une petite fille sans poupée est à peu près aussi malheureuse et tout à fait aussi impossible qu'une femme sans enfants. Cosette s'était donc fait une poupée avec le sabre... >>
Que dire de ce texte ? Il fait peur. Il est du côté obscur. On ne peut pas construire la démocratie avec les catholiques, disait M. Peillon ; on ne peut pas non plus la construire avec des gens persuadés qu'une femme est différente d'un homme, mensonge qui barre l'avenir depuis les origines de l'humanité. M. Peillon doit envoyer une nouvelle circulaire (cette fois aux lycées et collèges) pour censurer l'oeuvre de Victor Hugo. Il doit aussi chasser Hugo du Panthéon, futur musée de la société nouvelle ! Que M. Peillon se dépêche d'accomplir cette tâche ; et qu'il se fasse aider par Mme Vallaud-Belkacem.
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[*] On se demande dans quel univers mental évoluent les ministres... Tous les parents savent que les 3 à 6 ans jouent indifféremment avec des jouets ''garçons '' ou ''filles''. Ma petite-fille et mes petits-fils le font sans que Najat soit venue le leur prescrire... Mais je vous laisse, on sonne à la porte.
18/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (31)
Dans le 'New York Times', l'économiste Paul Krugman ridiculise le conformisme libéral de François Hollande
Conformisme que la presse parisienne salue pourtant (avec enthousiasme) sous le nom de "virage" ! ...comme si Hollande avait jamais été autre chose que libéral :
<< ...Hollande annonce son intention de réduire les impôts des entreprises tout en coupant (sans précisions) les dépenses pour compenser ce coût, déclarant "il nous faut agir sur l’offre", et encore un peu plus loin, déclarant que "c’est l’offre qui crée la demande". Houla ! Voilà qui fait écho, presque mot pour mot, à une théorie fallacieuse (aujourd’hui abandonnée) connue sous le nom de ''Loi de Say'' : l’affirmation selon laquelle il n'y a pas de risque de demande trop faible, parce que les gens doivent bien dépenser leur argent dans quelque chose... Cela n’est simplement pas vrai, et ça l’est encore moins, dans les faits, au début de 2014. Toutes les preuves attestent du fait que la France déborde de ressources productives, à la fois en main-d'œuvre et en capital, qui restent assises à ne rien faire parce que la demande est inadaptée. Pour s’en convaincre, un seul regard à l’inflation suffit, puisqu’elle baisse rapidement. En effet, la France et l’Europe toute entière se rapprochent dangereusement d’une déflation à la japonaise.
Que veut donc dire le fait qu’Hollande ait choisi ce moment-là pour adopter cette doctrine qui a perdu de sa crédibilité ? C’est le signe de l’échec du centre gauche français. Pendant quatre ans, l’Europe a été sous la coupe de la fièvre de l’austérité, avec des résultats largement désastreux ; il est révélateur que le léger rebond actuel soit annoncé comme si c’était un triomphe politique. Etant donnée la dureté infligée par ces mesures, l’on se serait attendu à ce que les politiques de centre gauche réclament avec acharnement un changement de cap. Pourtant, partout en Europe le centre gauche a, au mieux (comme en Grande- Bretagne par exemple) fait de faibles critiques, à demi-mots, et le plus souvent s’est contenté de grincer des dents et de se soumettre. Lorsque Hollande est devenu le président de la seconde économie de la zone euro, certains d’entre nous ont espéré qu’il pourrait faire une différence. Au lieu de ça, il est tombé dans la soumission habituelle : une posture qui se transforme aujourd’hui en effondrement mental. Et la seconde dépression de l’Europe continue... >>
Paul Krugman, NYT, 17/01.
19/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (6)
”Qui leur racontera Jésus ?”
Réflexion d'Anne Josnin (enseignante) à partir de "l'ignorance sans nom d'élèves de l'enseignement catholique sur la vie de Jésus" :
A l’occasion du cours sur l’art, j’ai fait, une fois de plus, de trop, le révoltant constat de l’ignorance sans nom de mes élèves (enseignement catholique) concernant la vie de Jésus : sur une centaine de 'terminales', dont beaucoup catéchisés dès le primaire, seuls deux ou trois savaient qui est saint Pierre (comme indistinctement disciple ou apôtre ; je ne dis même pas chef de l’Eglise, ni Simon frère d’André : non mais allô quoi...) Voici ce que cela m’a inspiré, sous formes de pistes.
Tout d’abord, il me semble qu’il serait utile de faire le point sur la connaissance des fondamentaux – Evangiles, sacrements, voire histoire et actualité de l’Eglise – dans la population catéchisée, comme on procède pour les autres savoirs dans l’Education nationale et au niveau international, (en mathématiques par exemple). Non dans le but d’évaluer, mettre une note, sanctionner : mais dans un souci de vérité.
Les catéchistes devraient pouvoir s’approprier cet outil, et enfin chaque catéchumène, afin de savoir où il en est. De fait nous avons affaire à des groupes hétérogènes, que ce soit en paroisse ou à l’école, selon l’histoire de chacun. Cette hétérogénéité est une richesse, dans la mesure où elle est connue, et donc peut être accueillie. Ne pas prendre les moyens de savoir n’a jamais été une vertu pour les chrétiens, même si de l’extérieur on pourrait parfois le laisser croire.
Je ne parlei ici que de la découverte-appropriation de l’Evangile, pas de l’initiation aux sacrements.
Si nous pouvons, selon notre mode propre nous inspirer de l’Education nationale pour savoir d’où nous partons, ensuite – la catéchèse n’étant pas matière scolaire mais bien évangélisation – il est temps de larguer les amarres des pédagogies qu’elle pratique, sans discuter ici de leur (non)pertinence : les catéchistes ne sont pas des professeurs (ou doivent laisser tomber la blouse), mais des témoins, disciples de Jésus.
Cela libérerait les jeunes aussi du rôle qu’ils jouent dans une classe : il n’y a pas de cancre ni de premier de classe, mais des enfants en attente légitime d’aimer et d’être aimés. Si la famille est Eglise domestique, le plus doux visage de l’Eglise pour chacun, et plus encore en ces temps troublés, c’est la famille. Pas la classe.
Or que fait de mieux une maman, un papa, si ce n’est raconter ? Raconter grand-père et grand-mère, les bêtises de l’oncle Jules et les jeux d’hier, et puis les contes pour s’endormir. Il n’est pas besoin de diplôme ni de niveau culturel pour cela : c’est un savoir universel. Nous pouvons tous raconter, comme écouter.
C’est aussi et d’abord ce qu’a fait Jésus. Sur les genoux de Marie et Joseph, il a appris à écouter, puis à raconter à son tour, officiellement à ses douze ans, le jour de sa Bar Mitzvah. Or le modèle du catéchiste, c’est Jésus. Si les foules le suivaient, c’est qu’il captivait chacun par une Parole accessible et forte à la fois.
On retrouve là cette tradition de l'oralité, tellement méprisée de nos élites pensantes mais qui subsiste à la marge de nos sociétés – que ce soit dans l’intimité des familles ou dans nos banlieues, avec le slam, le rap, où l’on se raconte entre jeunes, mais aussi avec les prêches des musulmans ou des évangéliques.
Nous avons beaucoup progressé dans la (re)découverte des vertus de la tradition orale, dans laquelle Jésus baignait. Les écrits hébreux ont ceci d’exceptionnel que, ne comportant que des consonnes, ils ne deviennent compréhensibles que lus à voix haute, lorsque le souffle vient donner vie très concrètement avec l’ajout des voyelles, ce qui ne se peut que si le lecteur-souffleur a déjà entendu le passage. Les rouleaux des textes saints sont davantage supports pour la tradition orale, dans le contexte tourmenté d’un petit peuple qui a connu l’exode précipité, que véhicules d’une tradition écrite.
On sait ainsi que, dans la tradition orale, on mémorise avec le corps tout entier (d’où les balancements, ce que l’on retrouve dans le slam et le rap, modernes poésies où le rythme structure le verbe), on use de refrains (ces kérygmes dont notre jeune curé à Saint-Omer parle avec bonheur, je pense, en sont ?), on ponctue de mots et d’expressions qui découpent en chapelets réguliers de phrases les récits ainsi facilement mémorisables,….
Même les analphabètes, et ils sont nombreux en France !!, ont accès à ce qui est raconté. Et ils sont souvent les premiers à retenir et comprendre, en champions de la survie dans notre monde de l’écrit. Ils feraient peut-être même les meilleurs catéchistes. Sans doute aussi les chrétiens non-occidentaux, qui ont gardé ce trésor de la tradition orale. Enfin il est à rappeler que nos jeunes, s’ils baignent dans une société de l’écrit, ne lisent pas. Où, pour une minorité, à la dérobée des adultes. Le système les a dégoûtés de la lecture. C’est ainsi.
Il est urgent de raconter Jésus, comme Jésus racontait, à ceux qui sont en demande en venant au caté !! Apprendre, à son écoute, à parler à notre tour aussi en paraboles afin que tous comprennent, chacun à son niveau !
Retrouver cette simplicité première, quitte à laisser tomber même tables et chaises, pour se retrouver assis en rond autour de celui qui raconte. Et interroger, nous laisser interroger, comme on voit dans les Evangiles. Retrouver l’essentiel : nous faire porteurs de la Parole. C’est à la fois très simple, non discriminant et très exigeant, au sens où on ne peut se cacher derrière des techniques, savoirs ou savoir-faire savants, qui laissent le cœur vide, mais qu’on ne peut transmettre que ce que l’on s’est soi-même approprié. Autrement dit, cela seul qui est attendu du catéchiste, c’est de s’être imprégné, par la méditation-rumination, de la Parole. D’avoir donc commencé par écouter. N’est-ce pas ainsi que procédaient les premières communautés chrétiennes, par cet enseignement en cascade ? Dénuement des moyens, pour laisser toute place au feu du cœur. Si nous ne le faisons, qui le fera ?
Anne Josnin
14/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (19)
Les Français en ”dépression collective” ?
Ce que révèle l'enquête de Sciences Po :
Déployée sur toute la page 10 par Le Monde du 14/01, l'enquête du Cevipof (Sciences Po + CESE) annonce : ''les Français s'enfoncent dans la dépression collective''. Selon le Cevipof, le ''niveau de pessimisme'' est sans précédent. Au rejet des élites s'ajoute désormais la méfiance de chacun envers son prochain : la concurrence générale forcément heureuse (Alain Minc) devient guerre malheureuse de tous contre tous...
> Cette parano-pandémie est présentée par les agences comme une ''droitisation des esprits'', et les naïfs de droite croient y voir un ''réveil de la France bien élevée'' : voire de la France ''chrétienne'', chez les encore plus naïfs. C'est un faux-semblant : selon le Cevipof, aujourd'hui 66% des Français (seulement) ''disent faire confiance aux gens qui ont une opinion religieuse différente de la leur'' (ils étaient 73 % fin 2009) ; mais où le Cevipof voit-il une ''opinion religieuse'' largement partagée en France ? À en juger par la fréquentation des églises, les catholiques croyants sont nettement moins de 10 % de la population... S'agissant d'opinions ''religieuses'' de gens dont la plupart n'ont pas de religion, ce 66 % ne veut donc rien dire ! Ou plutôt, il déguise en ''opinion religieuse'' une peur ethnique envers les immigrés musulmans : et cette peur n'a rien à voir avec Jésus-Christ. Se réjouir de cette peur comme si elle allait dans le sens de la foi chrétienne, serait une illusion coupable. Les évêques ne partagent pas cette illusion ; c'est pourquoi leur lucidité les fait brocarder par les conservateurs agnostiques. (''Les évêques manquent d'énergie'', etc). [1]
> De cette ''peur de l'autre'' croissante et polymorphe, le Cevipof diagnostique divers symptômes : peur des gens d'une autre religion, peur des gens d'une autre nationalité... Si l'on considère comme de même nature l'idée de religion et l'idée de nationalité, comme font les ''athées pieux'' [2], on est dans l'idéologie identitaire et pas dans le christianisme ! Sur ce détournement se construit en ce moment une sorte de paganisme cathophile, grosse arnaque, au contrepied du christianisme et des directives du pape.
> L'arnaque est impulsée par le lobby libéral. Et le Cevipof (ou seulement le commentaire du Monde ?) y participe, en confondant volontairement le libéralisme (idéologie de classe de la ''caste cannibale'') et la liberté d'entreprendre, quand le Français moyen se rêve en petit patron. Or cette confusion est le plus radical des mensonges : le libéralisme et l'entreprise ne sont pas amis, puisque le libéralisme aboutit au casino financier, qui tue les entreprises en refusant de les financer... Mais les ''leaders d'opinion'' entretiennent la confusion. Ils sont payés pour ça.
> On constate donc une correspondance entre cette désinformation de l'opinion et les mouvements de rue manipulés par le lobby libéral, comme les bonnets rouges ou la manif du 29 janvier à Paris. Ceux qui croient y voir une ''prise de conscience'' se trompent, ou trompent le lecteur parce que c'est leur job.
> Selon le Cevipof, la proportion de Français pensant avoir ''le contrôle de leur avenir'' serait tombée à 51 %. Le Monde s'en alarme, crie au danger pour la démocratie et au péril bonapartiste ; il ne songe pas à analyser ce qu'est devenue la démocratie depuis le putsch ultralibéral des années 1990, renforcé en Europe par la machine de Bruxelles.
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[1] Et si les agnostiques conservateurs se mêlaient de leurs oignons ?
[2] dixit Mgr Daucourt, alors évêque de Nanterre.
14/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (1)
Progrès libéral : Hollande annonce la suppression des cotisations familiales dans les entreprises
Consacrée lors de la conférence de presse élyséenne, c'était une exigence du Medef au nom de "la liberté d'entreprendre". Qui financera maintenant ? On verra bien...
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14/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (14)
Jean-Baptiste Say, mort en 1832 : Hollande a trouvé son nouveau maître au musée Grévin du libéralisme
...et l'a cité ouvertement dans sa conférence de presse :
Archétype du pense-faux libéral, Jean-Baptiste Say fut l'un des premiers à proclamer l'idéologie de la concurrence ''libre et parfaite'', de l'autorégulation du marché et de l'équilibrage spontané des flux : piliers du système qui régente le monde depuis la fin du XXe siècle.
Say en déduisait l'impossibilité des crises de surproduction et du déséquilibre global dans l'économie de marché, ce qu'il résumait par cet abracadabra : ''toute offre crée sa propre demande''.
Ce principe est boîteux (comme le reste de la doctrine de Say) : tout le monde sait depuis les années 1930 que les entrepreneurs doivent s'adapter à la demande effective – celle des ménages –, l'anticipation sur les ventes futures déterminant le niveau de production réelle ; et cela encore plus dans les périodes de crise comme la nôtre, où les entrepreneurs préfèrent éviter les invendus (et où le phénomène retentit sur les salaires, les emplois et la consommation).
Or M. Hollande a proféré l'abracadabra de Say (''toute offre crée sa propre demande'') lors de sa conférence de presse d'hier.
Déjà discutable en elle-même, cette formule magique devient surréaliste dans le contexte de 2014 – et spécialement par rapport au propos de M. Hollande dans sa conférence de presse, puisqu'il voulait justifier ses nouveaux cadeaux au Medef.
Pour que ces cadeaux (les baisses de charges) aient un effet bénéfique sur la demande, il faudrait que les entrepreneurs les répercutent par des baisses de prix : et c'est ce qu'ils ne vont pas faire, n'étant soucieux que de reconstituer leurs marges.
Par ailleurs, les patrons de PME interrogés ce matin par les radios convenaient que leur urgence était de retrouver des commandes, plus encore que de voir baisser leurs charges.
''M. Hollande a donc fait un hors-sujet'', disent ceux qui l'en excusent parce qu'il avait d'autres préoccupations.
Les autres remarquent que citer Jean-Baptiste Say n'est pas innocent. M. Hollande n'a plus qu'à citer le furieux libre-échangiste Frédéric Bastiat, et la gauche sera revenue (maillet battant) à ses origines individualistes libérales et bourgeoises – où elle retrouvera sa fausse adversaire : la droite.
15/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (10)
Le bon sens du Dr Sax
Le médecin qui fait remarquer que les filles ne sont pas des garçons (et que les "nouvelles valeurs" marchent sur la tête) : ici
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15/01/2014 | Lien permanent | Commentaires (2)
Comment se déclarer ”anti-système” aujourd'hui, mais... sans embarquer sur la Nef des fous ?
Narrenschiff (la Nef des fous), 1549.
Intéressante analyse d'une sociologue :
http://www.slate.fr/story/83113/anti-systeme-definition : cet article d'analyse publié par Slate intéresse par son réalisme. Il faut en effet désinfecter le concept de "système", devenu "mot-valise" (dit la sociologue) lesté de n'importe quels contenus.
Qui parle de « système » ? Trois sortes de gens, donnant à ce mot trente-six sens différents : 1. des analystes (p. ex. Michéa), lucides mais écoutés seulement dans des cercles intellectuels, et qui donnent au mot "système" un sens anti-libéral ; 2. des microgroupuscules, starisés par les médias en raison de leur extrémisme somnambulique, et qui disent "à bas le système" en rêvant à 1934 ; 3. des foules, spontanées et considérables, mais dont le ras-le-bol est si général qu'il exprime des réflexes contradictoires... D'où l'ineptie du slogan "coagulons les colères" : des chômeurs "coagulés" avec leurs licencieurs (qui les remplacent par de malheureux sous-payables importés des Carpathes), ce serait la Nef des fous en bonnets rouges.
La vogue actuelle du mot "système" n'a donc rien de révolutionnaire. Ni même de politique, au sens fort du terme...
La sociologue y voit plutôt le signe d'une attitude psychologique : celle de citoyens dépressifs qui s'en prennent à un "système" comme ils auraient maudit le Ciel au Moyen Âge. Leur réflexe n'est pas une offensive sociale ; c'est un repli désespéré.
Ces citoyens doutent, non seulement de l'avenir collectif, mais désormais aussi de leur avenir individuel. Ils se replient sur eux-mêmes : 75 % des sondés déclarent aujourd'hui se méfier "des autres", ce qui ne va vraiment pas dans le sens d'une coagulation. "Ce positionnement anti-système peut toucher toutes les catégories sociales par des biais divers: évasion fiscale, délocalisations d’entreprises, travail au noir, économies marginales, contournement des règles, et notamment celles qui lient à la solidarité nationale. Il signe l’affaiblissement des valeurs civiques dans un contexte où beaucoup de monde se sent floué par le système actuel et où chacun s’accuse mutuellement des maux de la société", observe la sociologue. Aussi colériques soient-ils, ces citoyens restent dans le monde mental hyper-individualiste imposé par vingt ans de néolibéralisme.
Tant qu'ils n'en sortiront pas, tant qu'un nouveau phénomène collectif ne leur offrira pas un désir inédit de solidarité (et une voie concrète de solidarité), les "colères" aveugles s'enliseront dans l'abstentionnisme civique par scepticisme envers tous les partis ; avec des embardées de violences inutiles, au profit de manipulateurs genre FDSEA ou de prédateurs genre Dieudonné. Mais c'est aussi avec "l’auto-organisation, les solidarités de proximité et, ne l’oublions pas, l’autodérision, qu’ils soignent leur âme et surnagent dans ce monde sans pitié", conclut la sociologue. La dérision est un réflexe inquiétant : c'est La Nef des fous, texte du plus noir XVe siècle, quand une société surnageante se dépeint comme allant au naufrage. Mais "l'auto-organisation" et "les solidarités de proximité" sont un signe encourageant. Là est le début de la voie. Ça suppose de comprendre ce qu'est le seul véritable système oppresseur : l'idole Argent, dénoncée par le pape François. J'en parlerai par exemple mercredi soir, aux AFC de Chalon-sur-Saône, et le 18 mars dans une paroisse parisienne.
10/02/2014 | Lien permanent | Commentaires (12)