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L'interview du pape à la télévision mexicaine

Précisions notamment sur le débat nécessaire autour de la famille, et sur les migrants dont François veut se faire la voix :

http://www.news.va/fr/news/deux-ans-de-pontificat-le-pape-se-confie-a-la-tele

 

Radio Vatican - << Pour le deuxième anniversaire de son pontificat, le pape François a accordé une interview à la télévision mexicaine Televisa. Il s’est exprimé très librement sur les deux premières années de son pontificat, son lien avec l’Amérique latine, ses relations avec son prédécesseur Benoît XVI, mais aussi son état d’esprit le 13 mars 2013, jour de son élection au trône de Pierre.

Extraits :

Il était venu à Rome avec seulement une petite valise, convaincu de retourner à Buenos Aires pour le dimanche des Rameaux, il avait déjà préparé l’homélie. « Je n’étais pas dans la liste des papabili, ça ne me venait pas à l’esprit, d’ailleurs à Londres les bookmakers ne me situaient qu’à la 42e ou 46e place, rappelle-t-il avec humour. Les journalistes ne me considéraient que comme un potentiel grand électeur, qui, au plus, aurait pu indiquer un nom, et ils étaient tranquilles. » 

François a par ailleurs sèchement réfuté le propos de la journaliste sur le fait qu'il aurait obtenu 40 voix lors du conclave de 2005.

Il a rappelé les propos de son ami, le cardinal Claudio Hummes, actuellement délégué de la conférence épiscopale brésilienne pour l’Amazonie : « Il m’a dit ‘ne t’inquiète pas, ainsi l’Esprit Saint fera son œuvre’.  Lorsque les deux tiers ont été atteints, le cardinal m’a embrassé et m’a dit de ne pas oublier les pauvres, cette phrase a commencé à tourner dans ma tête et c’est cela qui m’a porté au choix de ce nom. Durant le vote je priais le rosaire et je me sentais très en paix, presque jusqu’à l’inconscience. Cette paix, pour moi c’était un signe que ce vote était ce que Dieu voulait. Depuis ce jour je ne l’ai pas perdue, cette paix. C’est quelque chose comme un cadeau ».

Le pape a précisé ses souvenirs des instants qui suivirent l’élection : «  Ensuite qu’est-ce que j’ai fait, je ne le sais pas, Ils m’ont fait me mettre debout, ils m’ont demandé si j’acceptais, j’ai dit que oui, Je ne sais plus s’il m’ont fait jurer quelque chose ou pas, je ne me souviens pas. J’étais en paix. Je suis allé changer la soutane, je suis sorti pour saluer d’abord le cardinal Diaz, qui était en chaise roulante, puis j’ai salué les autres cardinaux. Ensuite, j’ai demandé au vicaire de Rome et au cardinal Hummes de m’accompagner, ce qui n’était pas prévu dans le protocole. Nous sommes allés prier dans la chapelle Pauline, pendant que le cardinal Tauran annonçait mon nom. Ensuite je suis sorti, et je ne savais pas quoi dire. Et le reste vous en avez été les témoins, c’est sorti spontanément, j’ai dit simplement : priez pour moi pour que Dieu, à travers vous, me bénisse. Tout est sorti spontanément, comme le fait de prier pour Benoît. »

Dans cette interview, le Pape François n’a pas nié que les contraintes pratiques liées à sa charge lui pèsent parfois… « Ça ne me déplait pas d’être pape. Ce qui me ferait plaisir, ce serait de pouvoir sortir un jour, sans être reconnu est d’aller dans une pizzeria, manger une pizza ! À Buenos Aires je sortais beaucoup, ici je trouve d’autres façons de sortir, au téléphone, ou d’une autre façon. »

« Moi, j’ai la sensation que mon pontificat sera bref, 4 ou 5 ans, peut-être 2 ou 3. Deux sont déjà passés. C’est comme une sensation un peu vague, peut-être que c’est comme la psychologie du joueur de hasard qui se convainc qu’il perdra, de façon à ne pas se faire d’illusions, et à être content s’il gagne. Je ne sais pas… Mais j’ai la sensation que le Seigneur m’a mis ici pour une chose brève, et rien de plus. Mais c’est une sensation. Je laisse toujours ouverte la possibilité ».

L’exemple de Benoît XVI

Dans cet entretien, François redit aussi que la renonciation de Benoît XVI a créé un précédent, et peut-être une nouvelle tradition : « il y a certains cardinaux au pré-conclave, aux congrégations générales, qui se sont interrogés sur ce problème théologique, très intéressant. Je crois que ce qu’a fait le Pape Benoît ouvre une porte. Il y a 60 ans, il n’y avait pas d’évêques émérites, aujourd’hui il y en a 1400. Est venue l’idée qu’un homme de plus de 75 ans ne pouvait plus porter le poids d’une Eglise particulière. De même, je crois que ce qu’a fait le Pape Benoît, avec tant de courage, a ouvert, une porte institutionnelle pour la notion de "papes émérites" ».

Pas question toutefois de créer un âge de retraite systématique : « je n’aime pas trop l’idée d’une limite d’âge, car la Papauté est une grâce spéciale, mais je partage l’idée de ce qu’a fait Benoît. Je l’ai vu l’autre jour au Consistoire. Il était heureux, content, respecté par tous. Je suis allé le retrouver, je lui parle souvent au téléphone. C’est comme un grand-père sage à la maison, un homme loyal jusqu’à la mort, un homme de Dieu ».

Chantiers en cours : la réforme de le Curie et le Synode sur la famille

L'interview aborde également les chantiers lancés par le pontife argentin. Sur la réforme de la Curie, le pape François s’est montré incisif : « je crois que c’est la seule cour qui reste en Europe. Les autres se sont démocratisées, même les plus classiques. Il y a quelque chose dans la cour pontificale  qui maintient une tradition un peu atavique. Je ne le dis pas de manière péjorative, c’est une question de culture. Mais ceci est en train de changer, la Curie peut garder l’aspect d’une cour mais être un groupe de travail au service de l’Eglise et des évêques ».

Le pape rappelle que le Synode sur la famille a été convoqué « surtout à cause des graves difficultés que la famille vit dans la société, en particulier pour les jeunes ». De ce constat découlent un certain nombre de dossiers prioritaires : « la préparation au mariage, l'accompagnement de ceux qui cohabitent, des nouveaux époux, de ceux qui ont échoué et qui donnent vie à de nouvelles unions. L’important est de bien comprendre le sacrement de mariage pour éviter que de nombreux mariages soient plus un évènement social que de foi ».

La lutte contre les abus sexuels

Le pape précise que la commission pour la protection des mineurs n’a pas été instituée seulement pour régler les cas d’abus mais surtout dans une optique de prévention, véritablement pour la protection des mineurs. « Le problème des abus est grave. La plupart adviennent dans le milieu familial et parmi les relations proches. Mais un seul prêtre qui commet un abus, c’est suffisant pour mobiliser toutes les structures de l’Eglise pour affronter le problème » souligne t-il.

François parle de l’importance de l’écoute des victimes et raconte sa propre expérience au Vatican, lorsqu' il en a reçu six. « La destruction intérieure qu’ils subissent est dévastatrice, et un seul prêtre qui se rend coupable, c’est suffisant pour nous faire honte, et pour faire tout ce qu’il est possible de faire. » Le pape François reconnaît à Benoît « le courage d’avoir dit publiquement à quel point c’est un crime de détruire un enfant avec ces actions ».

La relation avec les évangéliques

Saluant les évangéliques qui offrent « la proximité, la capacité d’être proches des gens, de les saluer, de les connaître ». Le pape tient à différencier les « mouvements évangéliques honnêtes et bons et les mouvements sectaires, notamment ceux qui dérivent vers la théologie de la prospérité ». Il pense que les évangéliques ont des choses positives à apporter aux catholiques, notamment sur l’art de la prédication. « Les homélies sont parfois un désastre, ce sont des leçons de théologie qui n’arrivent pas au cœur, alors nous devons nous convertir. Le concept protestant de l’homélie est beaucoup plus fort, c’est presque un sacrement. A la base du départ des catholiques il y a la distance, le cléricalisme, les homélies ennuyeuses, contre la proximité, la travail, l’intégration, la parole de Dieu ardente ».

Le pape tient ainsi à souligner l’important travail entrepris à Buenos Aires entre l’Eglise et les pasteurs évangéliques. Il met en garde contre une Eglise trop auto-centrée, « il y a le défi d’un fort cléricalisme qui crée une certaine distance des gens. Le cléricalisme en Amérique latine est un des obstacles au développement du laïcat » même si « la piété populaire a permis aux laïcs d’être créatifs et libres, à travers le culte, le procession ».

Un pape latino et solidaire des migrants

Concernant son voyage de septembre prochain en Amérique du Nord, le pape François a précisé qu’il pensait entrer aux Etats-Unis en passant par la frontière terrestre avec les Etats-Unis à Ciudad Juárez, avant de renoncer à ce projet. Mais François promet de consacrer plus tard au moins une semaine de visite au Mexique, visité par Benoît XVI en 2012. Il considère la Vierge de Guadalupe comme une « source d’unité culturelle, une porte vers la sainteté au milieu de tant de péchés, de tant d’injustices, de tant d’abus et de tant de mort ».

Il rappelle que le passage de la frontière avec le Mexique ne concerne pas seulement les Mexicains mais tous les Latinos en quête d’un avenir meilleur aux Etats-Unis. « La migration est le fruit d’un mal-être, fruit de la faim. La même chose arrive en Afrique, avec la traversée de la Méditerranée par des gens qui viennent de pays passant des moments difficiles, à cause de la faim, des guerres. Les migrations aujourd’hui sont liées à la faim et au manque de travail, Les gens sont écartés, contraints à chercher du travail ailleurs .»

Il a tenu à souligner les efforts des Européens : « l’Italie a été très généreuse et je tiens à le dire. Le maire de Lampedusa, qui est une femme, s’est activée, quitte à transformer cette île touristique en terre d’hospitalité, C’est une chose héroïque. Grâce à Dieu, je vois que l’Europe est en train de réviser la situation. Je me réjouis que l’Europe soit en train de réviser sa politique migratoire ».

Le pape veut se faire la voix des migrants, sa sensibilité aux souffrances des migrants « n’est pas de type idéologique, mais elle est spontanée, elle vient de son histoire personnelle et de celle de ses parents », eux-mêmes migrants italiens venus tenter leur chance en Argentine.  >>

 

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14/03/2015 | Lien permanent

Brésil : mobilisation contre la Coupe du monde, mobilisation des paysans sans terre

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 Face à Dilma Rousseff, ça bouge au Brésil :

 

Mme Rousseff est l'idole des médias français : ex-gauchiste passée au néolibéralisme, elle a la double légitimité qui fait les insubmersibles dans le monde occidental. Mais nos médias vont devoir ramer pour la défendre, à voir ce qui se passe au Brésil ! Là-bas l'indignation populaire monte devant la Coupe du monde de foot : douze super-stades ont été construits dans douze villes du pays ''alors que la Fifa n'en réclamait que huit'', et Mme Rousseff les a payés trois fois leur prix aux grandes sociétés de construction. À Rio, des quartiers entiers ont été démolis pour la grande foire touristique planétaire de la Coupe : 250 000 habitants ont été expulsés et quasiment pas indemnisés. Une protestation violente a eu lieu le 13 mars à Rio, Recife, Goiana et surtout São Paulo, capitale financière du pays : la troisième depuis le mois de janvier, organisée par le collectif NVT (Não Vai Ter Copa, ''la Coupe n'aura pas lieu''). En juin 2013, des millions de Brésiliens étaient descendus dans la rue pour huer les dépenses liées à la Coupe et exiger des investissements dans les transports, le logement, la santé et l'éducation ; NVT vise à rééditer cette mobilisation en 2014. ''Dilma Rousseff a abdiqué au profit des multinationales'', accusent aujourd'hui les déçus de ce qui fut naguère, le Parti des travailleurs.

Au nombre de ces déçus : le Mouvement des paysans sans terre (MST), qui annonce la reprise de la lutte sur le terrain, et contre lequel Mme Rousseff prépare une loi assimilant au ''terrorisme'' les occupations de terres et de voies publiques. Ce qui annonce des heures très dures... Le MST ne baissera pas les bras, tant la situation est devenue inique : Mme Rousseff bloque l'application de la loi agraire, et cent mille familles attendent en vain dans des campements que leur soient octroyée une terre. Pendant ce temps, les multinationales de l'agro-alimentaire ont acheté plus de 30 millions d'hectares pour y produire du maïs OGM destiné à l'éthanol pour les automobilistes de l'hémisphère nord. Le Mato Grosso - grand producteur de transgénique - importe 90 % de ses aliments, mais il a exporté 18 millions de tonnes de maïs OGM en 2013 vers les Etats-Unis. Et six millions de ses habitants ont été déplacés, dont 700 000 vers des bidonvilles de l'Etat de São Paulo. C'est l'une des applications de ce que la bien-pensance appelle ''la modernisation conservatrice'' : impulsée par le capital transnational, et opérée par le lobby brésilien des agro-industriels baptisés ruralistas (très écoutés de la classe politique et des médias), elle s'applique actuellement à 300 millions d'hectares.

Face à cette ''lutte de classes'' des agro-industriels contre les paysans, le MST milite pour : a) la fin des monopoles sur les semences [*] ; b) l'agriculture biologique et familiale, avec répartition équitable des terres et des semences ; c) la défense de la biodiversité agricole ; d) la redéfinition des relations avec l'industrie ; e) la reprise en main de la gestion de l'eau ;  f) la reforestation, alors que Mme Rousseff brade l'Amazonie aux industriels.

''Cela signifie qu'il faut reprendre l'occupation des terres, malgré les risques que cela comporte'', annonce le MST. Il annonce aussi une alliance avec les mouvements de protestation urbaine, comme la mobilisation contre la Coupe. Les Paysans sans terre, mouvement à l'origine duquel on trouve beaucoup de chrétiens dont des prêtres, espèrent une solidarité internationale. Répondons à leur appel !

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[*] Menée au nom de la concurrence libre et parfaite, la dérégulation libérale aboutit à des situations d'oligopole ou de monopole. Le libéralisme est un mensonge.

 

 

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”Décroissance” ou national-capitalisme ?

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Des mots qui fâchent : 

 

 

Un fil de commentaire contient des réflexions divergentes sur ce qu'il faut souhaiter : la rupture avec le capitalisme de violence économique ? ou la simple renaissance des haies protectrices nationales, sans rompre avec ce capitalisme ?

Ceux qui tiennent pour la position n° 2 semblent penser que l'idée de ''décroissance'' est invivable, contraire à la sécurité économique pour tous, etc.

Mais telle que la plaident ses avocats (Serge Latouche, Nicolas Ridoux, Vincent Cheynet...), la ''décroissance'' ne consiste pas à faire ''comme aujourd'hui mais moins, donc encore pire''. Elle consiste à faire autre chose : un modèle économique entièrement autre. En quoi consisterait ce modèle ? Le débat est ouvert. Nombre de ''décroissants'' disent même que ce débat n'a pas de sens parce qu'il ne saurait y avoir de ''programme'' antiproductiviste comme il existe un programme productiviste... Leur affirmation lance le bouchon un peu loin, mais souligne la différence de nature entre : 1. l'idéologie productiviste libérale, 2. l'idéal d'un monde libéré du système qui a produit cette idéologie.

Dans le dernier numéro de La Décroissance précisément, un chroniqueur,  présentant l'antilibéralisme comme un simple « schisme » à l'intérieur du capitalisme [*], ironise sur les polémiques entre libéraux et antilibéraux :

« Contre le schisme national-capitaliste, le haut clergé libéral monte au créneau. Pilotant la destruction de la société française depuis des décennies, il vient donner des leçons aux schismatiques nationalistes avec la crédibilité qu'on imagine... Economistes libéraux et antilibéraux, pro et anti euro, accaparent tous les espaces de débat relatifs aux questions monétaires, qui sont décisives ; Ils ne divergent pourtant que sur les stratégies à adopter dans l'univers de la violence économique. Or c'est celle-ci qui doit être désarmée par les tenants de l'écologie et de l'émancipation sociale.... »

''Désarmer la violence économique'' ? C'est exactement ce que demandent les encycliques sociales depuis Léon XIII (et aujourd'hui François) : seul moyen de placer les activités économiques au service de l'homme, au lieu de placer l'homme au service des activités économiques – qui ont d'ailleurs de moins en moins besoin de lui, dans la version financiarisée du capitalisme tardif.

Ce ''désarmement'' serait une révolution, et d'un type inédit : une révolution contre la violence en soi... On peut sourire et parler d'utopie. (Mais ça revient à évacuer aussi comme utopie la parole du Christ : ''cherchez le Royaume de Dieu et sa justice, le reste sera donné par surcroît'' ; le sourire devant ce surcroît est particulièrement déplacé sur la figure de grands experts catholiques).

Et le rêve d'un national-capitalisme est plus utopique que le désarmement en question. L'idée de désarmer la violence économique a le mérite de la cohérence, alors que le rêve d'un national-capitalisme est incohérent. Le capitalisme n'est pas ''national''. Il est violent par nature, sa violence déracine les haies de toutes les sociétés, et c'est ainsi depuis le début du XIXe siècle... (Certains tenants du capitalisme de 2014 se disent ''nationaux'' et/ou ''conservateurs des valeurs'' : pure incohérence, comme le constatait Marx dès 1848).

La logique du capitalisme tardif culmine avec le Mammon de la financiarisation, érigé sur le productivisme industriel (voire contre lui dans les vieux pays occidentaux). Renverser l'idole, comme le pape nous y appelle, impliquerait de faire naître une autre économie : sobre, locale, solidaire, non spéculative, indexée sur les besoins réels, etc : tout ce que contient le mot-valise de ''décroissance''.

On dit que c'est ''impossible'' ? il arrive que la maladie rende ''impossible'' la survie du malade, mais il n'y a pas de quoi sourire.

Voilà en quels termes se pose le débat de fond – à mon avis.

 

PS - Plusieurs nous objectent que ce combat doit se mener avec des gens en chair et en os, mais que beaucoup de ceux qui rejettent (eux aussi) le capitalisme tardif aimeraient nous pendre aux réverbères par réflexe anti-catho. Cette objection ne change rien à l'analyse. Et notre premier travail consiste à ouvrir les yeux des cathos. On s'y emploie... Pour les réverbères on verra après.

 

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[*]  Ce jugement n'est fondé qu'en partie. La critique du libéralisme économique est inséparable de celle du capitalisme tardif - et d'ailleurs de ses effets ''sociétaux''. Question de cohérence ! Le libéralisme économique est historiquement inséparable du productivisme capitaliste, dont il est la forme idéologique.

 

 

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Climat : la religion du Créateur contre la religion du Profit

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Billet de Stéphane Foucart (journaliste spécialiste de l'écologie) dans Le Monde du 6 /06 :  

 

À l'annonce du jeûne pour le climat parrainé notamment par la Conférence épiscopale française (notre blog : 4/06), Stéphane Foucart écrit dans Le Monde que c'est le début d'un affrontement entre « deux formes de pensée religieuse » : d'un côté, les fidèles du Dieu Créateur ; de l'autre, les « fondamentalistes du marché », selon qui « les seules lois de l'offre et de la demande, adjuvées par la libre entreprise et l'innovation technique, peuvent résoudre tous les problèmes rencontrés par les sociétés ».

Foucart souligne que l'idolâtrie de l'Argent (comme dit le pape François) est bien un  culte : « Cette religion du marché – pensez à sa ''Main invisible'' qui, comme celle d'une divinité antique, détourne magiquement le cours des choses [*] – a ses temples, son clergé, ses missionnaires ».

La science fait comprendre que le changement climatique (comme tout le saccage environnemental) vient de la Machine économico-financière, aussi blessante pour la Terre que pour les Terriens ; mais la Machine parvient à faire écran entre la science et le public. D'où le raisonnement du journaliste :

- les scientifiques échouant à convaincre le public que la Machine n'est pas la solution mais le problème, cette défaite de la science entraîne « l'entrée en lice des Eglises traditionnelles dans le débat » ;

- conclusion du journaliste : « Dans le débat sur le changement climatique, ce qui reste pourrait donc être à l'avenir un face-à-face entre les Eglises et le marché. Un peu comme si nous nous en étions remis à un affrontement de dieux, les anciens contre le nouveau. »

 

>  Curieuse et intéressante analyse de la part d'un journaliste du Monde ! Avec deux approximations quand même :

1. Dieu étant révéré comme l'unique Créateur dans les trois religions monothéistes représentées au 'jeûne pour le climat', pourquoi parler de dieux au pluriel ? ;

2. pourquoi écrire que la religion intervient parce que  les voies de la science « et de la raison » échouent à convaincre ? La tradition de la théologie catholique, l'encyclique Fides et Ratio de Jean-Paul II, et toute l'œuvre de Benoît XVI, montrent l'attachement du catholicisme à la raison au sens classique (non au sens idéologique) du terme.

Mais ce que Foucart dit à juste titre, c'est que, face au Marché-Moloch qui avale tout le séculier, sonne l'heure de forces qui ne sont pas séculières : les amis de Dieu face aux amis de Mammon.

On peut d'ailleurs appliquer un raisonnement comparable à la réunion de prière Peres-Abbas-François-Bartholomée : quand tout semble perdu, il reste Dieu.

 

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[*] D'où mon malaise, au colloque AED du 27 novembre, en entendant un autre intervenant développer théologiquement une analogie entre la Main invisible du marché et Dieu le Père ! Ce n'est pas le genre de choses que l'on aime entendre dans les colloques catholiques. On imagine la jubilation que ce propos peut déchaîner chez les cathophobes anti-libéraux... (Il y a autant de cathophobes chez les anti-libéraux que chez les libéraux).

NB – Une rumeur (à laquelle j'hésite à croire) affirme que l'AED monte un colloque écolophobe à l'automne. Dieu fasse que ce soit faux. Sachant qui en serait le personnage principal, on ne voit pas en quoi une journée de désinformation dans le dos du pape servirait la cause de l'Eglise en détresse.

 

 

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Le Conseil constitutionnel retoque la loi Florange...

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...le jour où les prudhommes de Toulouse constatent que les Molex ont été licenciés "sans cause réelle ou sérieuse" :

 

 

Les tendances ultralibérales au Conseil constitutionnel, au Conseil d'Etat et à la Cour des comptes sont un problème. D'autant que le ''gouvernement des juges'' est l'un des engins de l'UE ultralibérale : on le voit avec la Cour européenne et sa jurisprudence-cliquet.

Mais le droit ne crée pas la réalité, contrairement à ce qu'imaginent les juristes depuis l'An II.

Et il y a plusieurs formes de droit, qui peuvent entrer en collision. Exemple : le Conseil constitutionnel et le conseil des prudhommes de Toulouse.

Le 27 mars, au bout de quatre ans de bataille juridique et syndicale, les prudhommes toulousains ont constaté que le licenciement économique des salariés de l'usine de connecteurs automobiles Molex de Villemur-sur-Tarn était ''sans cause réelle ou sérieuse''.

Comme l'explique l'avocat des salariés, l'usine était parfaitement viable, et son insolvabilité fut ''organisée'' par sa maison-mère (Molex Inc) pour déménager l'activité vers les Etats-Unis... Molex Inc s'est donc débarrassée des salariés français sous un prétexte fabriqué selon une stratégie froide, qui se retourne aujourd'hui contre les managers US. Condamnés à indemniser leurs victimes, ceux-ci feront sans doute appel…. 

On saura alors si la chambre sociale d'une cour d'appel peut avoir la même indépendance qu'un conseil de prudhommes, ou si l'economically-correct a encore resserré son emprise.

 

Car plus on monte dans la hiérarchie hexagonale, plus l'economically-correct règne dans les esprits.

Le même 27 mars, le Conseil constitutionnel a censuré l'une des très rares initiatives sociales prises par le gouvernement Ayrault : la ''loi Florange'', selon laquelle les dirigeants de toute entreprise de plus de mille salariés souhaitant fermer un site devraient lui chercher un repreneur pendant trois mois. Chercher, non pas trouver : on voit la timidité du texte. Néanmoins il scandalisait le Medef. Laurence Parisot, avril 2013 : ''Cette loi est une aberration, c'est ne pas comprendre ce qu'est la destruction créatrice !'' Détruire des emplois dans le Tarn pour en créer dans le Nebraska, c'est ce que Mme Parisot appelle le ''fonctionnement normal'' de l'économie française (selon l'idée qu'elle s'en fait).

Or la loi Florange choque aussi les ''Sages''. Ils viennent d'invalider son dispositif central, pour ''atteinte inconstitutionnelle au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre''.

Le bon plaisir des managers et des actionnaires est donc couvert par la Constitution française ? Les citoyens français risquent de ne plus voir plus l'utilité de ce texte, s'il désarme le politique au profit du financier. 

Autre argument du Conseil: bien que ne pouvant dépasser au total 2% du chiffre d'affaires, l'amende prévue (en cas de violation de la loi Florange) serait ''hors de proportion avec la gravité des manquements réprimés''... On voit quelle vision de la société ont les Sages. Pour rappel, il s'agit de MM. Debré, Giscard, Denoix, Canivet, Charasse, Haenel, Barrot, et de Mmes Bazy, Belloubet et Maestracci. 

Le Medef  se réjouit que le Conseil constitutionnel soit ''parvenu aux mêmes conclusions'' que lui.

Le député PS Yann Galut  déclare : ''ce qui me surprend, c'est l'évolution des Sages.'' Mais il ne devrait pas être surpris... Qu'il regarde le comportement des ministres, de M. Ayrault, de  M. Hollande ! Débarrassé de la loi Florange, qui était pourtant l'une de ses promesses de campagne [*], voilà le président de la République entièrement en phase avec les multinationales. La docilité au ''fonctionnement normal de l'économie'' (selon Mme Parisot) est la chose du monde la mieux partagée. 

Sauf par le magistère de l'Eglise catholique...  

Encyclique Laborem exercens (Jean-Paul II, 1981) :

''Les moyens de production ne sauraient être possédés contre le travail, et ne peuvent être non plus possédés pour posséder, parce que l’unique titre légitime à leur possession[]est qu’ils servent au travail, et qu’en conséquence, en servant au travail, ils rendent possible la réalisation du premier principe de cet ordre qu’est la destination universelle des biens et le droit à leur usage commun.''

 

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[*] Toutes ces promesses ont été annulées, sauf celle qui évoquait le mariage gay. Être ''de gauche'' se réduit-il désormais à cela ? Ce serait instructif, dans le genre capitulation.

 

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Pétrole en Amazonie : malgré 90 % des Equatoriens, Rafael Correa cède aux pays riches

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La "révolution dans un seul pays" est-elle impossible ?

 

524891087[1].pngLe président Rafael Correa avait promis aux Equatoriens une "révolution citoyenne" associant : a) le changement social, b) la sauvegarde de l'environnement, sujet crucial ici puisqu'il s'agit d'une partie de l'Amazonie, poumon vert de la planète. En effet, la région de Yasuni abrite – outre 2 274 variétés d'arbres – une réserve de biosphère incomparable : 696 variétés d'oiseaux, 382 de poissons, 169 de mammifères, 121 de reptiles, des milliers d'espèces d'insectes... Classée par l'Unesco, elle a été érigée en parc national. Mais le sous-sol de Yasuni contient également le cinquième des ressources pétrolières de l'Equateur : trois sites dits "ITT" (Ishpingo-Tambococha-Tiputini), qui promettent 900 millions de barils de brut. Exploiter "ITT" serait désastreux pour ce patrimoine écologique mondial qu'est la forêt amazonienne de Yasuni, et rejetterait dans l'atmosphère 400 millions de tonnes de CO2 supplémentaires...

En 2007, donc, dans l'intérêt universel et avec l'appui massif de la population équatorienne, Correa avait annoncé à l'ONU la "sanctuarisation" de Yasuni. L'Equateur, membre de l'Opep, renonçait à exploiter "ITT" (qui lui aurait rapporté 7,2 milliards de dollars), à condition que les plus gros consommateurs de pétrole mondiaux versent à ce pays la moitié de son manque à gagner (soit 3,6 milliards de dollars sur douze ans). "L'initiative Yasuni est une proposition pionnière et innovante, une alternative aux discussions dominantes au niveau mondial" commentait alors le chercheur en sciences politiques Matthieu Le Quang à Quito [1]. En 2010, le PNUD (ONU/développement) avait ouvert un fonds spécial à cet effet.

Aujourd'hui c'est l'échec : les pays gros consommateurs n'ont versé au fonds spécial que... 13 millions de dollars en trois ans. "Le monde nous a lâchés", constate Correa. Il a donc annoncé cette semaine la fin de l'initiative Yasuni. Les trois sites vont être mis en exploitation dans les prochaines semaines. La catastrophe environnementale est en marche, réplique équatorienne du ravage opéré au Brésil par le régime Rousseff !

Rafael Correa a donc cédé aux pays riches et abandonné son programme ("largement inspiré des propositions du mouvement social, des Indiens et des écologistes", rappelait le militant Luis Saavedra).

Cet échec était prévisible, avait annoncé Le Quang, puisque les pays de l'hémisphère Nord n'allaient pas "soutenir une initiative qui revenait à remettre en cause la base des sociétés capitalistes" ! [2]

Mais un point doit être souligné. Selon ElComercio.com citant les sondages, plus de 90 % des Equatoriens persistent à s'opposer à l'exploitation du pétrole à Yasuni. Mieux : ce chiffre est en progression ! Paulina Recalde, de l'institut Perfiles de Opinión, souligne que le soutien populaire à l'initiative de sanctuarisation est passé de 83,7 % (en 2011) à 92,7 % (en 2013), et monte jusqu'à 93,9 % à Guayaquil, capitale économique du pays : une ville de quatre millions d'habitants qui se flatte d'avoir "l'aéroport le plus moderne d'Amérique du Sud". Du coup, le ministre de l'Energie, Alberto Acosta, déclare qu'une mise en exploitation du pétrole de Yasuni "ne pourrait être autorisée que par référendum".

L'expérience Yasuni poussait à regarder l'avenir en face : anticiper la raréfaction et le renchérissement du pétrole, et réorienter l'économie des pays riches. Ceux-ci ont donc rejeté l'expérience... La révolution dans un seul pays est-elle donc impossible ? Les Equatoriens n'ont pas l'air de le penser, puisqu'une si grande majorité d'entre eux demande qu'on laisse le pétrole de Yasuni là où il est. Dans l'un au moins des pays du monde, "dejar el crudo bajo tierra" est devenu un objectif populaire ; voilà un thème de réflexion.

 

2013 : http://www.yasuni-itt.gob.ec/inicio.aspx

 

2010 : http://plunkett.hautetfort.com/search/yasuni  (note 2) 

 


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[1]   Le Monde, 12/08/2010.

[2]  id., 16/08/2013.

 

 

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Affaire Bourdouleix : un propos haïssable et un article irresponsable

Le premier vise les gens du voyage.

Le deuxième jette le soupçon sur les catholiques :

 

Le député-maire de Nice a peu de tendresse envers les Roms. Que lui-même qualifie de « haïssable » la phrase du député-maire de Cholet, donne la mesure d'une indignation partagée par tout le monde. Même si elle ressemble à une brève de comptoir, la phrase de Gilles Bourdouleix a été proférée par un député : elle ne peut pas être minimisée.

Etant donné son contenu, elle ne peut pas non plus être comparée à quoi que ce soit.

Mais il y a dans la presse de ce matin une autre phrase, que tout journaliste sérieux qualifiera d'irresponsable. Elle figure en page 3 de Libération, et elle prétend placer la faute du député-maire de Cholet dans le contexte de... la religion des habitants du département. Voici ce que dit le journal : « Sur ces terres très bleues pâles et fortement teintées de catholicisme du Maine-et-Loire, Bourdouleix... », etc.

Comme si la faute du maire de Cholet avait quelque chose à voir avec le catholicisme !

Libération n'a pas l'air de savoir que l'Eglise défend les Roms. Si le rédacteur avait eu la curiosité de consulter ne fût-ce que Google, il aurait vu par exemple ce que je cite ici en note [1]. Même si le catho-bashing est de règle chez les bobos depuis six mois, mieux vaut s'informer soi-même si l'on fait métier d'informer autrui.

 

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[1] Exemples des positions catholiques à l'égard des Roms :

  

 

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Mariage homosexuel : pas si simple !

Homosexuels en désaccord avec l'Inter-LGBT, élus PS scrupuleux, socialistes tendance "Poissons roses", juristes et psychologues alarmés par un effacement de la filiation, philosophes de gauche attachés à la différenciation sexuelle, catholiques à l'écoute des évêques et du pape, ils posent la vraie question : disloquer la famille et la filiation est une exigence du consumérisme, mais une atteinte à l'humanité !


Dans Le Figaro de ce matin : « à première vue le mariage homosexuel se présente comme une formalité pour le gouvernement » et « 65 % des Français y sont favorables selon le dernier sondage Ifop », mais « les éminents juristes qui peuplent les ministères [...] marquent une hésitation avant, comme ils disent, de "toucher d'une main tremblante à notre code civil, c'est-à-dire à ce qui fait la personne, son nom, son patrimoine, sa filiation, sa nationalité". Réticents, semble-t-il, à bousculer l'institution du mariage sans en avoir bien fait comprendre toutes les conséquences... »

Et dans L'Est républicain (22/08), les scrupules du député PS Dominique Potier qui a battu Nadine Morano (UMP partisane de la dénaturation du mariage) :

<< L'E.R. - Vous êtes député de Toul après avoir battu Nadine Morano. Comment avez-vous vécu ces deux mois et demi ?

Dominique Potier  - Avec enthousiasme. Ils m’ont apporté la confirmation que le combat politique que j’avais mené avait un sens pour répondre au changement attendu. Je crois profondément qu’un député n’est pas seulement un observateur, il n’est pas un godillot mais une personne qui, à partir de sa propre expérience, défend une vision du monde, enracinée dans son parcours de vie, c’est cette trempe-là de députés que je rencontre à l’Assemblée.

Vous soutenez néanmoins le gouvernement qui est censé mettre en œuvre le changement. Or, tous les clignotants sont à l’orange, voire au rouge…

Probablement que les prévisions de croissance devront être revues à la baisse. Mais le gouvernement est engagé sur deux mouvements fondamentaux : d’abord le rétablissement des comptes publics tout en s’engageant en faveur de l’éducation et de la sécurité, la santé, ensuite les réformes structurelles en mettant l’accent sur les capacités de production, la réindustrialisation et la transition énergétique, en développant les outils de financement de la croissance qui font actuellement défaut, notamment pour financer les PME.

On entre dans la rigueur ou l’austérité ?

Il faudra de la rigueur budgétaire. Il en va de notre souveraineté et de notre non-soumission aux marchés. Il s’agit d’aller vers une fiscalité plus juste. La CSG n’est pas exclue. Mais bien d’autres hypothèses sont à l’étude, de manière à toucher le moins possible les classes populaires. Il faut explorer les revenus du capital et des classes les plus privilégiées. La loi de finance rectificative a permis de corriger les inégalités accrues par la politique Sarkozy et de revenir à plus d’équité.

Vous ne cachez pas vos convictions catholiques. Comment avez-vous perçu le discours des évêques consacré à la famille, le 15 août ?

Je revendique mes convictions de catholique social mais sans les porter en étendard. Je n’ai pas été choqué par l’expression plutôt mesurée des évêques qui relève de la liberté d’expression plurielle dans un état laïque. Leur intervention aurait sans doute paru plus équilibrée s’ils avaient usé de la même franchise de ton à propos des questions de justice sociale sous le gouvernement précédent.

Le mariage gay est un engagement de François Hollande…

Je n’ai pas de certitude sur le fond. J’attends de voir la proposition de loi. Ce n’est pas trahir la gauche que de demander un débat de fond avec une écoute plurielle.

Quelle est votre position sur l’euthanasie ?

Quand il y aura débat sur la fin de vie, je souhaiterais la liberté de vote, au nom de la clause de conscience. Ce ne sont pas des débats clivants gauche-droite. Quand une question touche à l’essence même de l’homme, il faut créer les conditions d’un débat ouvert. >>


NB - Ni les élus PS objecteurs de conscience, ni les militants "Poissons roses", ni les juristes rigoureux, ni les psychologues inquiets, ni les homosexuels en désaccord avec le LGBT, ni les catholiques appliquant la directive (d'action auprès des élus) donnée par les évêques... ne viendront à la manif de Civitas - parade extrémiste utile seulement à ses organisateurs, et propre à donner un argument-massue aux partisans du projet de loi : "on a raison d'être pour, puisque ceux-là sont contre."

 

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Le sympathique Montebourg sait-il où il va ?

Arnaud Montebourg " risque d'apporter des preuves supplémentaires que les Etats savent à nouveau parler fort mais demeurent radicalement impuissants ", écrit Libération qui publie un entretien avec le ministre dans la foulée de son algarade avec PSA...

 

Ecartons évidemment le point de vue des idéologues libéraux. (Indignés que Montebourg ose déclarer « je ne suis pas le ministre des cours de Bourse », ils montrent leur vraie nature : chiens de garde du casino).

Mais notons la mise en garde de Libération. Elle est exacte. Une chose est de prendre – à bon droit – la posture de l'imprécateur anti-néolibéral. Autre chose est d'avoir une action concrète dans l'immédiat, et de voir clair dans l'avenir.

Or, que dit Montebourg et quels sont (pour l'heure) ses résultats ?

Côté résultats, Libération note que Montebourg a sauvé le groupe alsacien Lohr et ses 940 salariés en le faisant reprendre par Alstom et FSI sans suppression de postes. Mais pour Fralib, Unilever continue à faire des bras d'honneur aux ex-salariés et au ministre. Pour Doux, le ministre est impuissant devant des intérêts privés ostensiblement indifférents aux emplois. Pour les télécoms, on attend de voir si Montebourg avancera dans sa direction annoncée : la relocalisation et l'augmentation des forfaits mobiles...

Côté déclarations, Montebourg (parlant à Libération) semble ne rien céder. On lui demande s'il regrette d'avoir accusé Peugeot d'avoir caché la fermeture d'Aulnay ? Il répond : « Ces mots ont été pesés... Cela fait partie du questionnement naturel d'un ministre en charge du bien public, à l'égard d'une entreprise qui a pris des décisions lourdes touchant des milliers de salariés, et qui bénéficie d'aides publiques... L'entreprise doit être préservée, soutenue, aidée. Mais mon ministère n'est pas celui des mondanités, c'est celui de l'action et du rassemblement patriotique au service de notre industrie. Nous n'esquiverons pas les problèmes et les désaccords. Nous n'enfouirons pas les dossiers comme nos prédécesseurs dans les armories profondes de la République. » On lui reproche d'avoir eu « des mots très durs avec Sanofi » ? Il répond : « Ils m'ont annoncé leur intention de licencier. Je leur ai dit qu'avec le niveau de leurs profits (5 milliards d'euros l'année dernière et 2,5 au premier semestre 2012), ça n'était pas acceptable... » On lui reproche d'avoir l'air de préférer les syndicats aux patrons ? Il répond : « Quand je suis attaché à défendre une loi de reprise des sites rentables, ça ne fait pas plaisir au Medef. » Dans le même esprit, il ajoute : « Le cours de bourse de PSA n'a pas attendu l'annonce du plan de fermeture pour chuter... Je suis parfaitement conscient que nous vivons dans un univers de marché, mais il y a 8000 familles qui sont menacées par le chômage. Je ne suis pas le ministre des cours de Bourse, toujours volatils, mais du redressement de l'économie, qui nécessite des choix dans la durée. »

Lorsque Montebourg dit : « on ne peut accepter que la concurrence 'libre et non faussée', c'est-à-dire sauvage, aille jusqu'à détruire les emplois et les outils de production », aucun esprit honnête et informé ne le contredira. Spécialement pas les catholiques ! (ceux qui connaissent la pensée sociale de leur Eglise*).

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Le problème est l'avenir. Montebourg a raison de plaider pour le « long terme », dimension absente de la mentalité libérale de casino. Mais à long terme, justement, le productivisme montebourgeois est condamné par des phénomènes irréversibles : raréfaction-renchérissement du pétrole et de certaines matières premières, saturations de l'environnement, etc. Montebourg a raison de dire à Libération : « démondialiser c'est rapprocher les lieux où l'on produit des lieux où l'on consomme » ; mais produire et consommer quoi ? pour les besoins des groupes d'intérêts productivistes, ou pour les besoins réels des gens ? selon des modes de production ravageurs (le gaz de schiste devenu bleu-blanc-rouge), ou selon les normes d'une économie réorientée ?

Autant de questions auquel le gouvernement Ayrault (« l'ayraultport ») et l'Elysée-Hollande ne répondent pas, étant sur les mêmes rails que feu Sarkozy.

Conclusion provisoire : Montebourg est sympathique, peut-être même sincère par moments ; il semble être le seul membre du gouvernement à voir certaines réalités ; suggérons-lui de se demander où il va.


ps / Je connais les griefs qu'on articule à son encontre, mais le passé de Montebourg n'est pas la question ici.

 

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* Compendium de la doctrine sociale de l'Eglise catholique, encycliques Centesimus Annus (Jean-Paul II) et Caritas in Veritate (Benoît XVI), etc.

 

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Avant les fêtes du 15 août : une étude dans 'La Terre Sainte' sur le symbole de la Croix de Jérusalem

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...aujourd'hui signe de la responsabilité de la planète catholique envers les habitants de la Terre Sainte :



 


Le numéro d'été de la revue La Terre Sainte, éditée à Jérusalem, contient une remarquable étude historique – par l'ambassadeur Mordechay Lewy* – sur la véritable origine et les significations de l'emblème de la Croix de Jérusalem.

 

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Présentant cette étude, Marie-Armelle Beaulieu (rédactrice en chef de la revue) signe ces réflexions avec lesquelles tout vrai pèlerin de Terre Sainte sera en accord :



<< La croix de Jérusalem, elle est partout présente en Terre Sainte. Elle flotte au vent des drapeaux, elle est peinte sur les portes, gravée aux linteaux des maisons, elle orne les lampadaires. On la trouve sur les écoles et les chasubles, sans oublier les mitres. En bijoux, elle se décline en pendentifs, boucles d'oreilles, bagues, boutons de manchettes. Vous pouvez aussi la porter en t-shirt, casquette, en sac en bandoulière, etc, ou l'acheter en presse-papiers, porte-serviettes, assiettes, et bien sûr croix murale.

Elle symbolise Jérusalem, du moins pour les chrétiens latins et peut-être aussi pour bon nombre de pèlerins d'autres confessions, car aucune autre Eglise n'a de croix qui dise Jérusalem à elle seule. Certes toutes les croix devraient le faire puisque c'est ici qu'a eu lieu la Passion du Christ et sa résurrection. Mais après tout, elle est la seule à porter explicitement le nom de la Ville Sainte. Elle vient estampiller tout ce qui se veut catholique jusqu'à l'excès, catholique quand ce n'est pas croisé.

L'art l'a prêtée aux chevaliers croisés, ce qui est une erreur historique (voir article page 32). Pourtant il y a effectivement des chevaliers qui de nos jours encore portent sur leur uniforme d'apparat un manteau que l'on ne peut porter que lors de célébrations liturgiques ou de réceptions officielles de l'Ordre cette croix grecque croisetée dans les cadrans qu'est la croix de Jérusalem. Ce sont les chevaliers et dames du Saint Sépulcre. Sur la photo, on les voit descendre les pentes du Mont des Oliviers à Jérusalem lors d'une procession des Rameaux.

Mais que l'appellation de chevalier ne nous trompe pas. Pour chrétienne, catholique et latine que soit la croix de Jérusalem utilisée comme emblème, rien ne s'éloigne plus de l'esprit des croisades que l'esprit de ceux qui l'utilisent encore en Terre Sainte, qu'il s'agisse de la Custodie (franciscaine), du Patriarcat latin ou des chevaliers du Saint Sépulcre. Que les uns et les autres tiennent à leurs valeurs chrétiennes et à leur patrimoine, c'est incontestable, mais tous oeuvrent en permanence sur le terrain pour l'unité de Jérusalem et de la Terre Sainte. Leurs problématiques ne sont pas politiques, même si elles ne sauraient oublier qu'un conflit agite le pays. Mais fondamentalement, leur vocation et leurs oeuvres sont un service à la ville et à cette terre afin que chaque jour davantage elles portent mieux le qualificatif de « sainte » et que cette sainteté rejaillisse sur ses habitants.

Ne voir dans cette croix que le signe d'un passé – glorieux ou non – serait bien réducteur. Ce dont elle est le signe aujourd'hui : c'est que la Passion et la Résurrection du Christ nous engagent. Elles nous engagent à aimer cette terre de toutes les façons. En bâtissant, en enseignant, en soignant, en partageant, en offrant, en priant, en rencontrant, en dialoguant, en prêchant, en célébrant, en jouant, en processionnant, en chantant, en riant, etc.

Alors oui, cette croix est partout. Pas comme un signe de possession mais comme une trace d'un passage de l'amour.

Ici on a aimé concrètement.

On abuse de ce signe ? Oui. Bien sûr que oui. Charge à nous de lui redonner son sens, de le faire vivre, d'aimer la Terre sainte en actes et en vérité et en relevant les manches. Il y a mille moyens de l'aimer pour de vrai, sur place ou depuis son pays d'origine. Si vraiment vous calez, nous sommes prêts à vous donner des idées ! >>

 

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* ambassadeur d'Israël près le Saint-Siège.

 

La Terre sainte - Abonnement : 24 euros (à l'ordre du Commissariat de Terre Sainte, 7 rue Marie-Rose 75014 Paris, tél. 01 45 40 86 21).

 

Le 24 avril dernier, Marie-Armelle Beaulieu, le frère Stéphane Milovitch (franciscains de Bethléem), Philippe Agret (directeur du bureau de Jérusalem de l'AFP) et Chantal Abu Eisheh (fondatrice avec son mari de l'association d'échanges culturels Hébron-France) ont été élevés à la dignité de chevalier dans l'ordre national du Mérite par le consul général de France à Jérusalem.


 

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13/08/2012 | Lien permanent

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