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01/07/2012

[2] Une lourde erreur de l'intégriste de base...

...préférer ses idées fixes aux directives du magistère :

catholiques,vatican ii,intégristes

Les aveugles se guidant eux-mêmes (Pieter Bruegel)



 

L'anecdote d'hier («Trois minutes navrantes mais symptomatiques») montre la vraie nature de l'intégrisme... et fait comprendre pourquoi Mgr Fellay dit à ses partisans que ses discussions avec Rome sont revenues au point de départ. « Nous ne pouvons pas signer », affirme-t-il. Ils ne peuvent pas « signer » parce que leur refus n'est pas rationnel : il est viscéral. Ce qu'ils appellent « défendre la tradition » consiste à rejeter l'Eglise réelle au nom d'un fantasme qu'ils appellent « Eglise de toujours » et qui n'est qu'une projection de leur mentalité de clan, aveuglée par des préjugés séculiers remontant à la seconde moitié du XIXe siècle.

L'Eglise réelle s'exprime tous les jours, à divers niveaux d'autorité de son magistère et sur les sujets de notre époque. Elle révulse les intégristes (et nombre de « tradis » se croyant « romains ») parce qu'ils sont étrangers à ce qu'elle dit. Leurs idées fixes séculières, inextricablement mêlées à la religion dans leur esprit, sont contredites par les prises de position de l'Eglise ; ils réagissent à cela en tournant le dos à ces prises de position. Sans s'en rendre compte, ils se sont ainsi éloignés de l'ecclésiologie catholique jusqu'à adopter l'attitude des tièdes qu'ils condamnaient naguère : prétendre que l'adhésion n'est due au magistère que lorsqu'il parle (ex cathedra) de la doctrine catholique. Pour le reste, croient-ils, on peut en prendre ou en laisser...

Ce principe grossier leur permet d'ignorer ce que dit l'Eglise quand ça ne va pas dans le sens des préjugés de leur clan. Autrement dit : dans la plupart des cas... Souvenons-nous de la consternation de ces gens devant l'encyclique Caritas in veritate, ou de leur silence devant les livres de la conférence épiscopale française.

Mais cette attitude est une erreur grave. Il est faux de dire que pour tout ce qui n'est pas de foi, notamment certaines questions de société, le catholique peut prendre ce qui lui plaît dans les positions de l'Eglise (et laisser tomber ce qui lui déplaît en raison de ses opinions de classe ou de clan).

Le champ des devoirs du catholique envers le magistère est beaucoup plus vaste que cela.

C'est même l'une des rares revues érudites issues de la mouvance « tradi » qui le rappelle à ses lecteurs ! Dans son numéro de mars 2012, Sedes Sapientiae a publié un dossier sur l'autorité magistérielle de Vatican II, qui souligne la nécessité (à côté de « l'assentiment de foi théologale ») de « l'assentiment religieux de l'intelligence et de la volonté, dans la mouvance et la logique de l'obéissance de la foi » : CIC, canon 752. Et dans ce cas, « l'adhésion demandée au fidèle est l'attention docile, répondant précisément au souci pédagogique du magistère. » L'attention ! A la rigueur la discussion respectueuse. Certainement pas l'indifférence, et encore moins le mépris exprimé dans l'anecdote d'hier. Comme le disait Pie XII dans Humani generis pour affirmer l'autorité du magistère ordinaire du pape : « ...Et l'on ne doit pas penser que ce qui est proposé dans les lettres encycliques n'exige pas de soi l'assentiment, sous prétexte que les papes n'y exerceraient pas le pouvoir suprême de leur magistère. »

 

 

Extraits du dossier de Sedes Sapientiae

 

<< Il ne manque pas de textes, officiels, parfaitement clairs, et qui expriment sans l'ombre d'une incertitude la volonté magistérielle de Vatican II. >>

 

<< [La déclaration de la commission doctrinale à la 123e congrégation générale du concile, le 16/11/1964], de même que les textes de Paul VI, montre l'intention exprimée du concile : exercer un véritable magistère doctrinal, au moins dans certains textes (tout simplement ceux qui se présentent comme tels). >>

 

<< Paul VI [dans sa déclaration du 12 janvier 1966] entend dire la même chose que ce qu'avait dit la commission doctrinale du concile, mais précise un point mal compris. Ce que le concile a évité de porter, ce sont des « définitions dogmatiques solennelles, selon le mode extraordinaire ». […] Ayant précisé ce qui n'avait pas eu lieu, Paul VI affirme la valeur générale de magistère authentique pour les enseignements conciliaires, en explicitant qu'ils possèdent l'autorité du magistère ordinaire suprême. >>

 

<< Le concile Vatican II a donc bien été, en fait comme d'intention, un exercice du magistère suprême, vrai et propre : manifestement authentique. Pour clore ce chapitre, et en vue d'entrer plus pleinement dans l'esprit de la FSSPX qui réclame des anathèmes et des condamnations pour reconnaître le magistère, l'autorité suprême pourrait, avec une pointe d'humour, envisager une déclaration de ce genre : « Si quelqu'un dit que le concile Vatican II n'a pas exercé le magistère suprême au sens vrai et propre, magistère qui requiert une adhésion différenciée des fidèles selon les divers degrés d'autorité de son engagement, qu'il soit anathème. » >>

 

<< Le magistère demande d'abord aux fidèles l'adhésion générique à ses actes, avant l'introduction des différenciations requises pour chaque point en particulier. C'est tout à fait normalement ce qui se passe dans le cas de Vatican II. Ne pas l'accepter, c'est se situer dans une attitude injustifiable aux yeux de la foi. >>

 

<< [Sur l'attention respectueuse due au magistère quand il parle d'autre chose que directement de la foi elle-même : c'est] un effort d'appropriation du raisonnement, de l'argument, de l'éclaircissement, qui caractérise le bon disciple. >>

 

<< [La déclaration conciliaire Dignitatis Humanae, 2 § 1] contient, comme élément affirmé directement et par soi, l'explicitation du lien entre la doctrine sur le droit à la liberté religieuse et la Révélation : « [Le concile] déclare que le droit à la liberté religieuse a vraiment son fondement dans la dignité même de la personne humaine, telle qu'elle est connue par la parole de Dieu et la raison elle-même. » […] Le texte affirme donc que le droit (lui-même affirmé) est fondé dans la doctrine révélée de la dignité de la personne humaine. Selon le sens usuel de la notion de fondement en matière doctrinale, c'est un lien nécessaire qui se trouve affirmé par là entre le droit à la liberté religieuse qui vient d'être déclaré et la Révélation elle-même. Par conséquent, le droit à la liberté religieuse est formellement présenté dans ce passage comme nécessairement lié à la Révélation, et donc comme à tenir défnitivement... >>

 

<< Le magistère simplement authentique, non infaillible mais pourtant divinement assisté et par là enraciné dans l'infaillibilité, réclame a priori et de soi une vraie adhésion de tous les fidèles : ce qui exclut le dissentiment de principe, le rejet pour simple motif d'insuffisance argumentaire, ou même l'attentisme du doute ou la prétention de se poser en « instance critique ». >>


 

Commentaires

PAS LES SEULS

> Les «intégristes» ne sont pas les seuls à vivre dans l’aveuglement. Ceux qu’on appelle les «progressistes» posent également des problèmes - au point que le site internet du magazine 'La Vie', dans le sillage d’un journaliste américain, s’interroge : « Doivent-ils quitter l’Eglise ? ».
Intégristes ou progressistes, ça n’est pas tant l’opposition du parti de l’ordre et du parti du mouvement que deux idéologies passéistes. Les tradis de la FSSPX ont gardé une mentalité de colonisateurs (type « Tintin au Congo ») – on y est libre de choisir la seule religion qui vaille –, tandis que les progressistes à tout crin (type Leadership Conference of Religious Women/LCWR) cultivent une mentalité de colonisés ; on y a une conception religieuse de la liberté, chacun étant surtout libre de bricoler de toute sa foi dans son petit coin (de tout son coin dans sa petite foi ?). Bref, l’absolutisme d’un côté, le relativisme de l’autre.
La Barque de Pierre, nouvelle Arche, fend les flots entre ces deux rives. La question est : faut-il aborder une fois de plus pour embarquer ceux qui conservent au fond d’eux-mêmes le sens de l’Eglise et de sa mission évangélisatrice ?
A ce qu’il paraît, Benoît XVI aurait mis un nouveau canot à la mer pour la FSSPX (Mgr Augustine di Noia, nouveau vice-président de la commission pontificale « Ecclesia Dei »). Il se dit qu’il n’y en aurait pas d’autre avant longtemps.
Du côté des progressistes, entre les religieuses américaines pied au plancher et les prêtres allemands ou autrichiens en roue libre, des barges abordent pour les embarquer mais ni les premières ni les seconds ne paraissent équipés contre les embruns, et ils refusent de toute façon pour la plupart de se mouiller dans la Nouvelle évangélisation lancée par Jean-Paul II et Benoît XVI.
Une question subsidiaire : sans acte d’autorité à l’égard des contestataires des deux bords, comment l’Eglise pourrait-elle tracer sereinement sa route ?
______

Écrit par : Denis / | 01/07/2012

"ACHARNEMENT THERAPEUTIQUE ?"

> à Denis - "A ce qu’il paraît, Benoît XVI aurait mis un nouveau canot à la mer pour la FSSPX (Mgr Augustine di Noia, nouveau vice-président de la commission pontificale « Ecclesia Dei »). Il se dit qu’il n’y en aurait pas d’autre avant longtemps". Acharnement thérapeutique sur la FSSPX qui semble avoir choisi définitivement de devenir secte schismatique ? En fait c'est plus simple : le cardinal Levada va partir en retraite... C'est Fellay qui fait croire que l'arrivée de Mgr di Noia serait un désaveu de Benoît XVI envers Levada. Hypothèse inepte, sachant que Levada et Benoît XVI sont les deux doigts de la main.
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Écrit par : portapia / | 01/07/2012

C.I.C.

> Que veut dire "CIC" ?

S.


[ De PP à S. - "CODEX IURIS CANONICI" : le code de droit canonique. Le blog de l'un de ses grands spécialistes est indiqué par notre propre blog, colonne de gauche : il s'agit de Mgr Dominique Le Tourneau, juge ecclésiastique à l'officialité de Lille, professeur au 'studium' de droit canonique de l'archevêché de Lyon, auteur de près de 80 articles scientifiques et d'un manuel de droit canonique. Et membre de l'Ordre du Saint Sépulcre, je n'aurais garde de l'oublier. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Soizic / | 01/07/2012

@ Soizic

> Si vous voulez en savoir un peu plus faites un tour par là : http://www.portstnicolas.org/l-eglise-5/ecclesiologie/Le-magistere-du-pape-et-des

@PP

> "Ce principe grossier leur permet d'ignorer ce que dit l'Eglise quand ça ne va pas dans le sens des préjugés de leur clan. " Il me semble que les catholiques libéraux font la même chose quand ils vous déclarent tout de go que Paul VI ou Benoît XVI sont mal formés en économie (comme s'ils n'avaient pas à disposition l'Académie pontificale des sciences sociales qui contient plusieurs prix Nobel d'économie, mais dont eux...ils ne font pas partie). Je suis donc pas surpris de voir que parfois les libéraux et intégristes... se rejoignent.
ND


[ De PP à ND - Plus que parfois ! On ne trouve jamais la moindre critique du système économique actuel sur les sites intégristes et traditionalistes. Déphasés par rapport au monde réel, ils semblent n'être pas au courant de l'existence d'une crise mondiale du capitalisme. Leur seule crainte est "le socialisme qui ruine les sociétés". ]

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Écrit par : Nicolas Dangoisse / | 01/07/2012

PAR IRONIE

> Ce qui est atterrant chez les "tradis", sans doute nommés ainsi par ironie :
- la liturgie ne peut être que celle de Trente - ni avant, ni après.
- l'expression du dogme ne peut être que celle de Vatican I - ni avant, ni après. On se demande en effet comment la foi régnait avant que ce concile ne définisse l'infaillibilité pontificale, puisqu'il n'y avait alors aucune affirmation faite "ex cathedra". Il ne fallait donc jamais obéir au pape.
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Écrit par : JG / | 02/07/2012

ET L'AMOUR ?

> Ce qui m'inquiète dans tout cela, c'est qu'il n'est question que de droits et de devoirs envers l'Eglise, comme si elle était une institution humaine, quand il me semble que ce qui nous meut d'abord dans notre relation à notre Mère, c'est l'Amour! Les textes de nos papes, de nos évêques,sont des lettres de feu que nous aimons lire et relire comme des amoureux, non pour y déceler telle ou telle maladresse dans le choix des mots, forcément limités, mais pour communier toujours davantage dans l'Esprit Saint. Imaginez que dans un couple le mari dise:" moi je ne lis pas les post-it qu'elle met la matin sur le frigo, non plus ses SMS, mais quand elle m'envoie une lettre depuis chez ses parents (et que je me paye un cafard monstre et que ne sais pas comment m'en sortir tout seul), là oui"! Ou qu'un enfant consulte le droit familial pour chacune des paroles et chacun des gestes de sa maman, avant d'y répondre...."Maman selon la loi tu es tenue de etc etc" Quand on en est-là, c'est qu'on est en situation de divorce, et si cela perdure au-delà du temps de la colère et de la souffrance liée à toute séparation, il faut se demander s'il n'y avait pas, dès le départ, nullité du mariage, je veux dire, si au fond il n'y a jamais eu autre chose de la part de certaines mouvances qu'une apparence d'appartenance à l'Eglise, mais sans adhésion du coeur. Qui est de l'Eglise, qui ne l'est pas, il y aura au Ciel bien des surprises!
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Écrit par : Anne Josnin / | 03/07/2012

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