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22/10/2016

Le libéralisme numérique, nouvelle emprise totalitaire

silicon valley,libéralisme

"Le technolibéralisme entend à terme tout automatiser et orienter nos vies afin de satisfaire de seuls intérêts privés..." A lire au plus vite, le livre d'Eric Sadin (éd. L'Echappée) :


...après le roman effrayant de David Eggers Le Cercle (NRF, voir ici notes des 26-27-28/08). Extraits de l'entretien d'Eric Sadin [*] :

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<< La «silicolonisation», c’est la conviction que ce modèle [Silicon Valley] représente l’horizon indépassable de notre temps et qui, de surcroît, incarnerait une forme lumineuse du capitalisme. Un capitalisme d’un nouveau genre, paré de «vertus égalitaires» car offrant à tous, du «start-upper visionnaire» au «collaborateur créatif», en passant par «l’auto-entrepreneur», la possibilité de s’y raccorder et de s’y épanouir. Mais dans les faits, c’est un modèle civilisationnel fondé sur la marchandisation intégrale de la vie et l’organisation automatisée de la société qui en train de s’instaurer à grande vitesse...  >>

<<  Le technolibéralisme entend opérer une pression continue sur la décision humaine [...]. Cet «accompagnement» de nos vies par les algorithmes s’est institué lors de l’avènement des smartphones et des applications à partir de 2007. Et nous franchirons un nouveau seuil lorsque les assistants numériques tels Siri d’Apple ou Google Now, à l’efficacité encore balbutiante, en viendront à nous prodiguer des conseils pour tous nos faits et gestes du quotidien. Et plus encore. Ce sera notamment le cas avec la voiture autonome, qui ne se contentera pas de piloter le véhicule mais également notre emploi du temps [...] Cet accompagnement peut aussi prendre une forme coercitive pour servir comme jamais les objectifs de productivité et de compétitivité du projet technolibéral... >>

<<  L’intelligence artificielle est désormais érigée comme une sorte de «surmoi» dotée de l’intuition de vérité et appelée à guider en toutes circonstances nos vies vers les plus grands confort et efficacité supposés. [...]  C’est bien notre pouvoir de décision qui va peu à peu être dessaisi au profit de systèmes supposés omniscients et plus aptes à décider du «parfait» cours des choses dans le meilleur des mondes... >>

<<  La start-up, c’est la nouvelle utopie économique et sociale de notre temps. [...] La plupart des start-up échouent rapidement. Et pour les employés, le régime de la précarité prévaut. Une pression terrible est exercée par le fait de l’obligation rapide de résultat. Et on offre des stock-options qui, sous couvert d’intéressement à de futurs profits hypothétiques, évitent de rémunérer convenablement les personnes. Le technolibéralisme a institué des méthodes managériales laissant croire que chacun peut librement s’y épanouir. En réalité, tout est aménagé afin de profiter au maximum de la force de travail de chacun. [...] Quant aux travailleurs dits «indépendants» qui se lient aux plateformes, ils se trouvent soumis à leurs exigences et ne sont protégés par aucune convention collective. Enfin, les grands groupes savent opérer des montages complexes afin de se soustraire à l’impôt. Le technolibéralisme relève de la criminalité, non pas en col blanc, mais en hoodie [sweat-shirt à capuche, ndlr]. Et pourtant ce modèle est partout célébré. Mais comment un tel aveuglement est-il possible ? >>

<< Il est également temps de signifier aux responsables politiques que le soutien par des fonds publics à cet anarcho-libéralisme numérique n’est plus tolérable. En France, ce n’est pas à Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat au Numérique et ardente propagandiste du siliconisme, de décider abusivement des choses à notre place en vue de satisfaire les tenants de l’économie de la donnée. Ni non plus au Conseil national du numérique : les deux tiers de ses membres sont des responsables d’entreprises internet et de la donnée, ce qui constitue exactement un «conflit d’intérêt». C’est pourquoi, nous devons, à toutes les échelles de la société - citoyens, syndicats, associations - défendre le bien commun et notre droit à déterminer librement du cours de nos destins.... >>

 

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[*]  Libération, 21/10. Intégrale :  http://www.liberation.fr/futurs/2016/10/20/eric-sadin-l-a...

 

 

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Commentaires

EGGERS

> Je suis en train de finir le roman de D. Eggers. C'est d'une 'logique' computative implacable, et en effet effrayant.
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Écrit par : Alex / | 22/10/2016

ZING

> Et le plus paradoxal est que je suis en train de vous envoyer un 'zing' contre la logique numérique du Cercle... J'arrête !
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Écrit par : Alex / | 22/10/2016

@ Alex

> Vous nous cachez quelque chose. Rappelez-vous : le secret, c'est le mensonge ! A moi qui suis devenu transparent, mes 800 000 "watchers" m'ont dit que vous étiez un sale type. Ils ne comprennent pas comment je peux perdre mon temps à vous écrire un 'zing'...
J'ai fini 'Le Cercle' il y a quelques jours. Un des plus beaux et des plus terrifiants romans que j'aie lus. Dans son genre, très supérieur à '1984'... Beaucoup plus subtil. En plus, ce n'est pas de la SF, mais de l'extrapolation. On peut y être dans 4 ou 5 ans..à moins d'avoir été vitrifiés avant !
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Écrit par : Feld / | 22/10/2016

CROISSANCE CONTRE ENVIRONNEMENT

> Voici un article remarquable qui mérite d'être diffusé et qui rejoint vos préoccupations
http://www.natura-sciences.com/environnement/totalitarisme-croissance-economique976.html
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Écrit par : Nathalie Larnicol / | 23/10/2016

LIMITES

> La Silicon Valley reste le dernier domaine où partant de rien on peut faite fortune. On reste dans le système, dans l'idolâtrie de Mammon. Mais c'est le dernier espace du rêve américain. Quid quand cet espace aura atteint ses limites ?

franz


[ PP à Franz :
Mais il a DÉJÀ atteint ses limites : elles se confondent avec l'extension des domaines du marché, et ceux-ci en sont à marchandiser la biologie humaine (et, pour ça, à démantibuler les structures sociales) parce que les ressources environnementales et géologiques s'épuisent... ]

réponse au commentaire

Écrit par : franz / | 23/10/2016

LE VRAI PROBLÈME

> Le véritable risque, face à cette véritable révolution, c'est de lutter contre le courant au lieu de s'efforcer de le guider. L'Eglise, il y a deux siècles, s'est fourvoyée en ne voyant pas, dans la révolution industrielle, ni la part de progrès, ni celle de nouveauté irrémédiable. Lors de l'avènement de Léon XIII, et de la rédaction de Rerum Novarum, il était bien tard.
L'intelligence artificielle, les voitures automatiques, la nanorobotique, ce sont des progrès indéniables, et toute pensée "contre" ces techniques est irrémédiablement stérile, vouée être oubliée avec le monde industriel qu'elles rendent obsolète.
Notre défi, aujourd'hui, n'est pas de psalmodier que la technique est satanique. C'est bien plutôt de se demander comment mettre cette technique au service de l'homme. C'est plus compliqué. C'est plus exigeant.

Ferrante


[ PP à Ferrante :

Pourquoi déformer ce que nous disons afin de le rendre ridicule, ce qui permet de le réfuter ?
Personne ne dit que la technique est "satanique".
Personne ne nie l'immensité des découvertes qui produisent la robotique, abusivement nommée "intelligence artificielle".
Le problème n'est pas la technique en soi.
Le problème est le système économique global.
Il érige la "technology" en manipulatrice de notre vie la plus intime, afin d'en faire un gisement de nouvelles ressources et de profits financiers.
Vous devriez lire les publications évoquées par notre blog : elles émanent de spécialistes, extrêmement bien informés des rouages de cet appareil techno-scientifique engrené dans la grande machine financière.
Vous ne pouvez être indifférent à ces réalités...

ps - 'Rerum novarum' n'est pas un ralliement de l'Eglise au capitalisme industriel. C'est juste l'inverse : une critique radicale de l'idéologie libérale conduisant à la déshumanisation pour le profit. Et toute la doctrine sociale de l'Eglise agit dans la direction ouverte par 'Rerum novarum' : une modernité qui serait libérée de l'idole Argent. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Ferrante / | 23/10/2016

MOBY

> L'incroyable clip sur la chanson de Moby dénonce avec noirceur cette avenir siliconisé :
https://www.youtube.com/watch?v=VASywEuqFd8
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Écrit par : pascal / | 24/10/2016

@ Feld :

> j'ai fini le roman aussi, mais je trouve la fin décevante, avec le ridicule rôle joué par le personnage-hippocampe de Ty-Kalden.
Dans l'ensemble, il y a de quoi réfléchir, et des scènes qui sont de purs morceaux de bravoure (la traque de Mercer par SoulSearch), mais les personnages humains sont tellement extérieurs à eux-mêmes, sans réelle profondeur psychologique (sans doute volontairement : c'est l'humanité numérique), que l'on ne s'attache à aucun d'eux ; cela vire de plus en plus au roman à thèse, à la parabole didactique, ce qui est intéressant, mais on est loin de Dostoïevski ou de Faulkner.
Bref, cela manque de vie intérieure : et c'est normal, en un sens.
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Écrit par : Alex / | 25/10/2016

'ÉCRAN TOTAL'

> Un article sur un collectif que l'on pourrait qualifier de luddite : 'Ecran Total' .
http://rue89.nouvelobs.com/2016/10/25/samedi-ceux-refusent-les-ordis-linformatisation-vies-265499
Question : comment entrer en contact avec eux ? Pas de site web, pas de page FB, ... Le monde d'avant, quoi.
Mae, qu'est-ce que tu fais ? Tu acceptes ça ?
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Écrit par : Feld / | 26/10/2016

@ Alex

> C'est curieux. Moi, ces personnages m'ont ému. Ce ne sont pas des personnages de Dostoïevski, simplement des individus ordinaires de l'humanité numérique (à l'exception de Mercer, qui rappelle le "sauvage" du 'Meilleur des mondes'). A côté d'eux-mêmes, c'est clair. Des têtes à la fois vides et bien faites.
La profession foi finale de Mae Holland (sic) m'a un peu fait penser à une déclaration, pendant son procès, d'Irma Grese, pendue à 22 ans en 1947 pour crimes de guerre : « C'était notre devoir d'exterminer les éléments anti-sociaux afin d'assurer l'avenir de l'Allemagne ».
https://fr.wikipedia.org/wiki/Irma_Grese
A la fin, Mae ne fait "que son devoir".
Question : pourquoi, pendant des années, Ty n'a-t-il rien tenté à son niveau pour "briser la machine" ?
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Écrit par : Feld / | 26/10/2016

@ pascal

> Superbe clip!
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Écrit par : Feld / | 27/10/2016

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