05/03/2016
Convergences (4) : Amirshahi et le pape François
Comparer l'idée de l'ex-socialiste à Laudato Si' (et Santa Cruz) :
J'ai cité hier les propos de Pouria Amirshahi parce qu'ils constituent un élément de réponse à la question posée par des catholiques "issus de LMPT", qui ont tenté naïvement l'expérience chez Sarkozy et se retrouvent ainsi blousés, humiliés, et (pour la plupart) réveillés. La mécanique interne de l'ex-UMP et celle du PS sont similaires : comme dit Amirshahi, "les partis sont au mieux incapables et au pire dangereux".
La question des humiliés-réveillés est : "On ne peut rien faire à l'intérieur des boutiques électorales, mais il faut bien agir en politique. Alors que faire ?"
La réponse que fait le pape François* est parallèle à celle de Pouria Amirshahi : les boutiques électorales étant devenues indifférentes à la vraie politique (les biens communs et le bien commun), la vraie politique doit être prise en charge par les peuples, "à la base".
La réponse du pape et celle d'Amirshahi se recoupent d'ailleurs dans plusieurs domaines essentiels : changer de système économique, sauvegarder la planète, empêcher Mammon de marchandiser les biens communs de l'humanité.
Comment procéder ? Sous des formes à inventer qui diffèreront selon les latitudes, mais Laudato Si' le dit pour tout le monde : 1. le politique a abdiqué (au profit du financier) son rôle de contrepoids et de gouvernement ; 2. la "révolution culturelle courageuse" exigée par notre temps passe néanmoins par une action politique ; 3. c'est aux peuples de l'imposer aux sphères politiques, par une "saine pression". Là où le politique est décédé il faudra en inventer un autre ; la forme et le degré de cette pression populaire varieront selon les latitudes. Mais son objectif est clair. Il est universel. Il s'agit de contrecarrer la mondialisation ultralibérale, et de faire éclore partout une nouvelle façon de vivre en société.
Faisons le détail :
► Cette nouvelle façon de vivre ne correspond pas aux idées fixes de la droite et de l'ultra-droite. Elle demande une "conversion écologique" (humaine et environnementale)... C'est le message bergoglien à ceux qui feraient encore partie de ces milieux, mais qui - instruits par l'expérience récente - voudraient essayer autre chose : l'Evangile, par exemple.
► Le pape vient de recevoir le groupe chrétien des Poissons roses, qui compte plusieurs élus de gauche. On lira l'évocation de cette rencontre sur le site de Pierre-Yves Gomez (lien dans notre note d'hier) et - pour les abonnés - sur celui de La Vie. Cet événement souligne que le catholique n'est pas nécessairement "de droite" ou d'ultra-droite (en dépit de ce que racontent les sites de cette mouvance... et ceux de la gauche bobo)**. Ce qui laisse intacte la critique des machines politiciennes exprimée par Laudato Si' ! Les Poissons roses ne sont guère plus à l'aise dans le parti de Cambadélis, que les membres de Sens commun dans le parti de Sarkozy.
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* Laudato Si', discours de Santa-Cruz, etc.
** Les Poissons roses ne se réduisent pas à leur critique de la loi Taubira : ils sont réellement "de gauche" (la gauche non-libérale) sur le plan économique et social. Pour cette raison, ils sont plus cohérents que ceux des adhérents de Sens commun qui n'auraient pas (encore) compris l'affinité de la loi Taubira avec l'ultra-libéralisme...
10:32 Publié dans Idées, Livre : LA RÉVOLUTION DU PAPE FRANÇOIS, Pape François, Politique | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : politique
Commentaires
TERRAIN
> Oui, la comparaison s'impose. Le pape appelle à l'action concrète. Pas aux jeux d'esprit. Sur le terrain des reclassements s'opèreront forcément. Fin des clubs de milieux.
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Écrit par : S. Reymondon / | 05/03/2016
AMIRSHAHI
> Amishahi a raison de dire que le PS d'aujourd'hui est creux voire malfaisant comme tous les partis. On peut en dire autant des "Républicains". En Occident tous les grands partis "de gouvernement" sont creux. Ils se sont vidés en se soumettant au néolibéralisme. Celui-ci leur a injecté un semblant de contenu qui ne fait plus illusion : le discours de la Croissance et la dénonciation des Cruels Dictateurs : comme par hasard ceux qui ne filent pas doux devant Wall Street.
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Écrit par : maksoud / | 05/03/2016
SYMÉTRIQUE
> Ce qui se passe au FN est symétrique de ce qui s'est passé au PS et à l'UMP. Plus le parti Le Pen croit se rapprocher du pouvoir et moins il a envie d'une ligne antilibérale, parce qu'il doit prendre les voix de la droite installée.
Philippot comme Zarathoustrra entre dans son déclin. (das war ein kleiner philosophischer Scherz).
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Écrit par : Fritz / | 05/03/2016
LE SANS-FRONTIÉRISME
> La critique du libéralisme par les catholiques, qu'ils se croient de gauche ou de droite, se heurte au mur que constitue l'impératif moral (sorti d'on ne sait ou) du sans-frontiérisme. Pas de frontières: pas de législations nationales possibles, pas de législations nationales: pas de limite au libéralisme.
Alors, nécessairement, vide politique des grands partis tétanisés par cet impératif.
C'est la leçon de la capitulation sans condition de Syriza en Grèce, contrastant avec le redressement islandais.
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Écrit par : Pierre Huet / | 05/03/2016
LA DICTATURE QUI VIENT
> On peut craindre cependant que la "saine pression" des bergogliens se heurte d'ici peu à la dictature des bilderbergiens.
Nicolas Baverez sur Europe 1 déclare : "La France a choisi de ne pas se réformer" ; "la loi El Khomri est excellente"; "continuons à ne pas faire les réformes et nous aurons la révolution" ; "nous sommes au bord du chaos" ; "Mme Merkel est le seul leader responsable aujourd'hui en Europe".
Bref : parce que le peuple refuse les belles réformes concoctées par nos amis de la finance et de la politique nous allons vers le chaos.
Mais ce discours de Nicolas Baverez ne doit-il pas être décrypté ? Ne faut-il pas inverser les propositions et entendre plutôt : nous avons préparé maintenant tous les ingrédients pour créer le chaos. Si le peuple est trop récalcitrant nous allons déclencher la guerre civile pour justifier une dictature (déjà quasiment prête dans les textes) ainsi nous pourrons, pour notre plus grand profit, imposer un régime à la chinoise en France.
http://www.europe1.fr/emissions/l-interview-verite/nicolas-baverez-la-france-ne-fait-des-reformes-qua-loccasion-des-revolutions-2684206
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Écrit par : isabelle / | 05/03/2016
LE CHAOS DU LIBÉRALISME
> L'analyse d'Isabelle fait froid dans le dos, pourtant, effectivement, le chaos est l'arme préférée du libéralisme.
Savourons tout de même ces réflexions très bergogliennes trouvées dans 'Le Point' qui a pourtant des penchants bien libéraux :
http://www.lepoint.fr/dossiers/culture/comprendre-l-economie/pourquoi-une-societe-de-decroissance-est-elle-souhaitable-05-03-2016-2023155_3014.php
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Écrit par : Pascal / | 07/03/2016
LES CONVERTIS
> Je comprends que certains soient hostiles au changement, mais alors il faudrait aussi condamner les convertis : c'est quoi ces gens qui n'ont pas le courage de rester ce qu'ils étaient ?
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Écrit par : Emmeline / | 07/03/2016
TROIS PHÉNOMÈNES SUCCESSIFS
> Pour rebondir sur le commentaire de PH, le sans-frontiérisme me semble-t-il est la conjugaison de trois phénomènes successifs.
Le premier est l’aspiration de l’opinion occidentale à la paix après le choc gravé dans l’inconscient collectif des millions de victimes y compris civiles des deux guerres mondiales et de l’horreur de la Shoah. Le concept même de nation devient associé à l’idée de guerres à répétition et de colonialisme.
Le marxisme a sitôt après exploité ce sentiment en semblant donner le choix entre une internationale de peuples fraternels et la destruction dans l’enfer nucléaire. C’est le temps de la grande déstructuration insidieuse, le remodelage mental de générations à qui on n’apprend plus l’histoire linéairement ni les arts classiques. La seule frontière qui importe encore est le rideau de fer. Sans passé, sans culture propre, la nation disparait. Mouvement hippie transnational, Mai 68.
Après la chute du mur de Berlin et de l’URSS, dans ces peuples rendus craintifs et malléables par l’ignorance, deux courants creusent facilement leur sillon, utilisant différemment le ressort du mythe du progrès. Le premier, libre-penseur et anticlérical, prône la libération et l’émancipation de l’Homme par l’élimination de toute barrière morale et collective. Hédonisme. Tous faussement égaux dans l’identique. Libéralisme sociétal à exporter en même temps que les "valeurs républicaines".
Les filous argentés, eux, ont bien compris qu’ils n’ont plus besoin de soigner la classe moyenne, vitrine doctrinaire du temps de la guerre froide. Ne reste que des consommateurs à l'échelle mondiale, parfois des ouvriers potentiels pour ceux se contentant des salaires les plus bas (l’externalisation et la mécanisation sont passées par là). Un seul segment de marché, des produits et des publicités universels, des sociétés internationales devenues plus puissantes que les Etats endettés, le rêve du libéralisme économique. Qu’importe si le monde fonce dans le mur, ils ne seront plus là pour le voir. Encore que dernièrement, et alors qu’ils prennent un peu d’âge, nos milliardaires de la Silicon Valley ont massivement investi dans la recherche pour de la technologie rendant immortel (les sots). Début du transhumanisme et des pressions pour la manipulation du code génétique humain.
Situation stable, les deux courants collaborent dans une sorte de symbiose, chacun trouvant son compte.
En tant que chrétiens, nous ne devons ni sombrer dans le désespoir (tentation démoniaque) ni rester les bras croisés (les « tièdes »).
Bizarrement ces trois phases correspondent à l'enfance, l'adolescence et l'âge adulte de ma génération.
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Écrit par : JClaude / | 08/03/2016
PAS DE QUOI SE BILER
> Et une divergence qui personnellement me peine, venant d'une personnalité de la Décroissance. "La face cachée du pape François", de Paul Ariès :
http://www.maxmilo.com/product_info.php?products_id=373
Je m'attends au pire...j'ai lu il y a quelques jours une interview de PA dans Politis. Pour lui, ce qu'il considère comme l'entrisme de l'Eglise catholique dans la Décroissance est une abomination...
Feld
[ PP à F. - Ne vous tracassez pas pour ce type : il n'en finit pas de régler des comptes personnels, déguisés et gonflés (à la pompe à vélo) en grand combat pour "écraser l'Infâme".
Tout est parti de son départ de 'La Décroissance' : cherchant une nouvelle posture, il a choisi la cathophobie et s'est donc fait recueillir par Mediapart. Mais même là il s'est senti mal à l'aise, lorsque Plenel a laissé dire du bien de l'encyclique ! Il allait se sentir encore plus mal quand le pape a été acclamé en Bolivie par les militants du "buen vivir", dont PA se réclamait comme caution antipapiste...
Le voilà chez Politis ? il termine dans le désert.
Pas de quoi se biler ! ]
réponse au commentaire
Écrit par : Feld / | 13/03/2016
@ PP
> Oui, certes. Mais on ne sait pas quel écho ce bouquin pourrait avoir auprès de la partie la plus anti-catholique des "objecteurs de croissance".
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Écrit par : Feld | 15/03/2016
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