21/05/2015
Fourest et son soufflé au blasphème
Cuisine risible... et intellectuellement malhonnête :
Le nouveau livre de Caroline Fourest* se réduit subliminalement à ce syllogisme :
a) toutes les religiosités doivent être haïes ;
b) cette juste haine est le « blasphème » ;
c) blasphémons toutes les religiosités.
Ce n'est pas seulement un sophisme (logique fausse) : c'est une ineptie.
Le mot « blasphème » désigne « une parole qui outrage la divinité, la religion ou ce qui est considéré comme sacré » (Larousse). Considéré par qui ? Par la société et ses lois ! Sans le risque d'offenser les valeurs institutionnelles de l'Etat dont vous êtes citoyen, votre irrévérence n'est qu'une simple insulte aux valeurs du voisin.
Mélenchon a raison de le rappeler (http://www.jean-luc-melenchon.fr/arguments/en-republique-le-blaspheme-nexiste-pas/) : depuis deux siècles nos lois n'obligent plus personne à considérer une religion comme sacrée. Aujourd'hui, si vous insultez ou diffamez des chrétiens en tant que tels, vous ne blasphémez pas : vous irez (peut-être) en correctionnelle pour injures* aux personnes, mais pas pour offense au christianisme.
Dans le cas de l'islam, les lois françaises ne font pas d'exception. Le djihadisme fait courir un danger de mort aux « insulteurs du Prophète », mais la charia n'est pas la loi de la République française : on ne voit donc pas très bien devant quelle instance politique, dans l'Hexagone, Caroline Fourest prétend faire valoir son « droit au blasphème ».
On nous fait pourtant avaler depuis cinq mois une sorte de plat cuisiné, le soufflé au blasphème, gonflé à feu doux par l'inculture médiatique. En vertu du fantasmatique droit-au-blasphème, cette opération culinaire vise :
1. à conférer aux « blasphémateurs » une sorte de privilège de citoyens d'élite, voire d'accusateurs publics ;
2. et pour éviter d'avoir l'air « islamophobes » (en clair : xénophobes), à s'en prendre aussi, voire surtout, à l'Eglise catholique. Que lui reproche-t-on ? Ses positions sociétales... Ainsi la lutte des catholiques contre l'artificialisation du vivant est mise sur le même plan que le terrorisme islamiste.
Le point 1 cadre avec la dérive du débat public, qui glisse vers toutes les diversions pour cacher la démission politique et économique de l'Etat.
Le point 2 est d'une injustice venimeuse à l'égard de l'Eglise catholique. Lorsque les Kouachi ont tué les gens de Charlie Hebdo, les évêques ont exprimé leur compassion envers les victimes (réflexe du chrétien) ; lorsque fut découvert le projet d'attentat de Ghlam contre les paroissiens de Villejuif, Charlie Hebdo a hurlé de rire : réflexe de l'accusateur dénonçant la superstition chrétienne.
Mais tous les catholiques savent, ou devraient savoir, qu'être injuriés à cause du Christ fait partie de leur mission depuis deux mille ans, puisque c'est le Christ en personne qui les en prévient dans l'Evangile (Matthieu 5,11-12) : « Heureux êtes-vous si l'on vous insulte, si l'on vous persécute et si l'on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi. Réjouissez-vous, soyez dans l'allégresse car votre récompense sera grande dans les cieux ! C'est ainsi qu'on a persécuté les prophètes qui vous ont précédé. »
Quand le Christ parle de ceux qui ont naguère persécuté les prophètes, Il ne fait pas allusion à des persécuteurs étrangers, mais aux élites du peuple dont étaient issus ces prophètes... Les catholiques français – s'ils lisent l'Ecriture – n'ont pas de mal à transposer, et à constater que les insultes d'aujourd'hui (d'ailleurs limitées à quelques rebuffades gouvernementales et à la fraternisation de ministres avec Charlie Hebdo) sont une situation normale du point de vue chrétien.
J'ajouterai : infiniment plus normale que la situation d'antan, lorsqu'il y avait des lois contre le blasphème parce que l'Eglise s'appuyait sur l'autorité publique ! Le Français d'alors était à la fois fidèle-et-sujet : il avait donc un intérêt séculier à marcher droit religieusement, ce qui créait une confusion des mobiles très préjudiciable à la foi. Et cela jusqu'en haut de l'échelle sociale... Accablants sont les passages des mémoires de Saint-Simon sur l'attitude de la Cour à la chapelle de Versailles ; et encore plus accablants si l'on se souvient des ravages commis par le Roi-Soleil dans la vie religieuse de ses sujets.
Mais cette société d'Ancienne France est un objet de musée ! Parler de « droit au blasphème » est un mensonge (ou une ânerie) dans la France de 2015.
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* Eloge du blasphème, Grasset.
** et il faut que ce soit des injures non seulement très graves, mais d'une gravité conforme aux "nouvelles valeurs de la République" ! Sinon l'insulteur est relaxé au nom de la liberté d'expression.
11:20 Publié dans Histoire, Idées | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : blasphème, religions
Commentaires
> Pourquoi nous les superstitieux, sommes-nous plus respectueux que ces soi-disant humanistes ?
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Écrit par : Pantaléon / | 21/05/2015
NÉFASTE ET PERVERSE
> Salut en Christ,
Offenser les croyants et écraser la religion, voilà une manière extrêmement néfaste et perverse de vouloir s'opposer au fondamentalisme. Cette manière n'est en aucune façon le chemin qui mène l'Homme à sa destination, la Personne à sa plénitude. Seule la Mystique est capable de réduire le fondamentalisme à néant. C'est là précisément que Femen avec, oui, sa "cuisine risible", se fourvoie.
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Écrit par : Pierronne la Bretonne | 21/05/2015
RISIBLE
> oui, risible, cette cuisine qui nous présente l'Eglise catholique française de 2015 comme une menace pour la laïcité !
Mais pour qu'elle fasse bien voir ce qu'elle est réellement, l'Eglise doit renforcer sa visibilité et ne pas laisser des groupes marginaux profiter de la Toile pour faire écran.
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Écrit par : André Biguet / | 21/05/2015
MENTEUSE
> Ce qui serait courageux, de la part de Caroline Fourest, ce serait d'écrire un livre intitulé «Éloge du mensonge»!
Le mensonge, elle le pratique avec persévérance depuis des années, notamment dans ses ouvrages, où le mensonge éhonté voisine avec le mensonge soft consistant à se moquer très régulièrement de la rigueur qu'on est en droit d'attendre de quiconque publie un livre…
Ce qui reste hallucinant à mes yeux, ce ne sont pas les mensonges, les approximations, les incohérences et les erreurs répandues par Fourest : c'est qu'elle a réussi malgré tout à trouver sa place, sa «niche», si j'ose dire, dans le paysage médiatique, alors que nul ne peut ignorer son manque total de sérieux et d'honnêteté.
Que vaut un monde médiatique où quelqu'un comme elle peut, simplement, être connue? Que cherche ce monde-là en offrant des tribunes à quelqu'un comme elle…?
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Écrit par : Philarête / | 21/05/2015
> ce qui est triste c'est la place donnée à des gens qui de toute évidence ne tournent pas rond.
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Écrit par : E Levavasseur / | 21/05/2015
RUPTURE DE LA CHAÎNE DU FROID
> Soufflé, soufflé, comme vous y allez ! Il en existe d'excellents ! Celui que cuisine Caroline Fourest, en revanche, doit sortir du rayon "surgelés" après une panne d'électricité. Le plus surprenant est de l'entendre diffuser ses à-peu-près tous les lundis matins sur une radio de service public censément culturelle. Comme ici par exemple :
"Il y a des moments où l'on croit voir renaître la droite catholique de la fin du XIXe siècle, opposée à la loi Guizot et à la mixité à l'école, qu'elle décrivait comme le début du désordre sexuel et de la décadence. Encore un effort et on nous expliquera bientôt que les femmes ne doivent pas étudier comme les garçons. On fera des hashtag pour soutenir Boko Haram."
Pour de plus larges échantillons de cette pitoyable prose : http://www.huffingtonpost.fr/caroline-fourest/projet-de-loi-famille_b_5356067.html
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Écrit par : Sven Laval / | 21/05/2015
"JE SAIS QUI TU ES"
> Oui, bien en accord avec cette démystification. Le soufflé de l'image, sortant du four, est bien appétissant ... Si les sophismes produisent le même effet on comprend qu'il soit difficile de leur résister...
Le plus étonnant, quand on considère le cours des choses, c'est que Caroline Fourest et les légions auxquelles elle appartient font, bien malgré eux et ils enrageraient qu'on leur en fasse la remarque, une sorte d'éloge de l’Église catholique et qui serait là un éloge de nature mystique.
Car C.F., en visant (comme vous le décelez très bien) d'abord et surtout l’Église, avec tous les ingrédients (puisqu'on est dans le culinaire) de mauvaise foi et de sournoiserie qu'on ne peut que constater chez elle, reconnait, distingue, désigne les catholiques, soit nous pauvres, pécheurs et inconstants, comme l'ennemi à détruire.
Et si l'Esprit Saint nous montrait par là que cette Eglise-corps du Christ, telle quelle, est combattue, dans l'invisible, parce que bénie par le Père ? "Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. " Mc 1,24
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Écrit par : JM Achéritéguy / | 21/05/2015
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