Comment boycotter Bruxelles

Vous posez cette question, et voici une réponse insolite... de la part d'un membre du parti de François Hollande :

A votre question en écho à la note d'hier sur les farines animales, la réponse pourrait venir plus vite qu'on ne croirait - à lire la tribune publiée vendredi par Malek Boutih, député PS de l'Essonne et ex-président de SOS Racisme. Partant du sondage TNS Sofres indiquant une montée des "idées du FN" dans l'opinion française, Boutih fait – sous l'angle PS évidemment – des observations réalistes :

1. la montée de ces idées qualifiées de "FN" est liée, selon Boutih, à la "récession sociale" et au sentiment (largement répandu) que le système politique n'est plus opérationnel ;

2. la droite est condamnée pour cette même raison : "par ses éléments de langage manipulateurs, par sa politique de destruction des acquis sociaux et des prérogatives des Etats, elle a fragilisé les fondements de notre pays" ; d'où son "effacement politique, lié au bilan calamiteux des Trente Libérales" ;

3. face à l'extrême droite, qui profite de cette calamité (et du coma de la droite), la réponse - écrit Boutih - "est la démondialisation" : "Je parle de garantir l'autonomie de notre nation. Je crois que, pour contrer le FN, il est plus que temps de réhabiliter la notion d'autonomie, celle de la nation mais aussi des individus, car elle seule rend crédible l'engagement collectif. Nous devons reconstruire un pays où chaque individu contrôle le pouvoir politique : un régime autonome est celui dont les institutions favorisent la participation du plus grand nombre aux décisions collectives. Car l'extrême droite s'est nourrie du sentiment de privation du pouvoir des citoyens par le mécanisme européen..."

4. "Il faut donc, avant tout, briser ce système de dépossession du destin des peuples, celui de la soumission aux institutions, aux appareils, aux forces financières, aux vérités assénées par des experts toujours irresponsables. Soyons courageux, car l'Union européenne ne se réformera pas par la pythie du consensus. Si les députés européens applaudissent les mises en garde du président de la République quand il évoque cette crise politique, il en est autrement avec les autres chefs d'Etat et la Commission toujours nourrie au lait du laisser-faire libéral."

5. "La gauche française a toute sa place dans ce combat : c'est à nous de réunir les forces progressistes d'Europe et de les unifier dans un combat contre le poids des institutions, le capitalisme débridé, la désindustrialisation et le libéralisme érigé en dogme. Pour changer l'Europe, la République doit se relever. Réhabiliter l'idée d'intervention publique et redonner la voix aux électeurs..."

(Libération, 15/02, page Rebonds)

 

On est libre de ne pas croire Malek Boutih, qui dans le passé participa aux enfumages bobos. On peut sourire à l'idée d'un Hollande engageant le combat contre le "capitalisme débridé". (La seule promesse électorale qu'il ait tenue est le mariage gay : encore un enfumage bobo).

 Mais il y a dans le texte de Boutih un ton nouveau. Ce député avoue que la République est couchée devant le "capitalisme débridé". Il comprend – enfin – que la déprime française vient de la soumission de la République au "mécanisme européen". Il admet qu'il va falloir "briser" ce mécanisme, qui dépossède les peuples de leur destin. 

Si Malek Boutih pense vraiment ce qu'il a écrit, c'est une rupture avec la classe dominante : celle des génuflexions devant les multinationales – et des taubirages pour enfumer l'opinion.

Il va falloir qu'il assume.