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19/06/2012

Marisol Touraine, le sida et le don du sang : début du zapatérisme à la française ( les "nouvelles moeurs" pour faire oublier la soumission au libéralisme)

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Sa suppression de la mesure de sûreté pour le don du sang est gravement critiquée par les épidémiologistes, Aides et Libération :


 


 

Ministre de la Santé du gouvernement Ayrault, Marisol Touraine a choisi la Journée du don du sang, jeudi dernier, pour inaugurer le zapatérisme à la française en déclarant : « Les homosexuels hommes devraient être autorisés à donner leur sang... On peut et on doit revoir cette politique... Le critère ne peut pas être l'inclination sexuelle. »

Un tollé se fait entendre. Il ne vient pas de la droite ratapoil (occupée depuis dimanche à compter ses disparus), mais du corps médical et de l'association Aides. Et c'est le quotidien Libération, peu suspect d'être unfriendly, qui leur donne la parole ce matin :

 

<< Aujourd'hui, sur le front du sida, l'épidémie est forte chez les homosexuels, avec un nombre de nouveaux cas très élevé […] Or, les tests actuels de recherche du virus ont toujours une fenêtre d'incertitude. Il y a quelques jours de battement entre le moment de la contamination et celui de la détection par les tests. Donc, si durant cet intervalle la personne donne son sang, il y a une probabilité de ne pas s'en apercevoir. ''Le risque existe, note une épidémiologiste de renom. C'est pour cela que les gays sont exclus du don du sang.'' ''Discrimination, homophobie'', rétorquent certains […] En tout cas les données sont là : entre 2008 et 2010, 28 personnes ayant donné leur sang étaient contaminées à leur insu par le VIH. Parmi elles, 14 étaient des homosexuels […] Aides ne demande toujours pas la fin de cette exclusion [des homosexuels du don du sang]. Son président, Bruno Spire, estime qu'en ''l'état actuel des connaissances, le risque résiduel de transmettre le VIH chez une personne ayant un test négatif reste plus élevé dans la population homosexuelle masculine... Des personnes peuvent se déclarer ne pas prendre de risque alors qu'elles n'ont simplement pas conscience de ce risque.''  >>

 

L'association Aides conclut avec force : « le don du sang n'est pas fait pour démontrer l'égalité des droits. »

C'est exactement le contraire de ce que dit Marisol Touraine, quand elle proclame (voir plus haut) : « Les homosexuels hommes devraient être autorisés à donner leur sang... On peut et on doit revoir cette politique... Le critère ne peut pas être l'inclination sexuelle. »  

« Il faut parfois se méfier des bons sentiments », conclut Libération. Mais s'agit-il de sentiments ? Dans le cas de Mme Touraine, c'est plutôt la pensée qui est en cause : elle tient de son père, qui fut le plus artificieux des ratiocineurs mondains au sein de l'université française*. La dénégation du réel était la démarche de Touraine père. Elle semble aussi celle de sa fille.

Ainsi la ministre de la Santé sera utile au zapatérisme du tandem Ayrault-Hollande.

A ceci près que la recette est éventée depuis l'explosion sociale espagnole qui entraîna la chute de Zapatero : ce n'est pas en agitant les nouvelles moeurs qu'on fait oublier aux gens les réalités du système économique ; un système que le socialisme européen était censé contester – mais qu'il sert, ouvertement ou obliquement, depuis la fin des années 1980...

 

 

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* Description homérique d'Alain Touraine par Raymond Aron dans ses mémoires :

« Je ne nourrissais à son égard nul grief, nul ressentiment. Il me demanda d'être le directeur de sa thèse alors qu'elle était déjà terminée. Il souhaita être jugé par moi, soit qu'il me mît au-dessus des autres, soit que ma présence ajoutât à l'éclat de la cérémonie. […] Il avait tenu des propos — qui me furent rapportés plus tard — d'un fleurettiste sur le point de croiser le fer : « Je ne crains qu'Aron. » Je fis sentir à l'auditoire (la salle Louis-Liard était pleine à craquer) mes sentiments amicaux pour lui ; mes jugements sur la thèse le blessèrent d'autant plus. Je ne réglai pas de vieux comptes, je reprochai à Touraine de se lancer dans des analyses plus philosophiques que sociologiques sans la maîtrise des concepts, sans la formation du philosophe. Avais-je tort ou raison ? Il n'y a pas, en pareille matière, de preuve. Tout ce que je puis dire, pour ma défense, c'est que j'avais lu et relu l'ouvrage, demandé l'opinion d'un spécialiste indiscuté. Peut-être mon intervention n'aurait-elle pas été aussi dévastatrice, si elle n'avait encouragé Friedmann et Stoetzel à une surenchère de sévérité. Décontenancé, Touraine renonça presque à se défendre. L'atmosphère se fit irrespirable ; Labrousse me murmurait : « C'est trop, ce n'est pas possible. » Jacques Le Goff s'agitait sur son banc, tenté de prendre la parole pour interpeller les juges : Geeorges Friedmann, le maître et le protecteur tout d'un coup si dur, et Jean Stoetzel, venu d'un univers étranger à la VIe section. Alain Touraine revécut pendant des semaines, en rêve ou plutôt en cauchemar, cet après-midi. Le soir, il recevait le Tout-Paris intellectuel ou mondain qu'il avait invité à l'avance... »

Alain Touraine allait écrire cinquante livres d'illusionnisme péremptoire. Sa fille a de qui tenir.


 

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Commentaires

ET DANS 'LE MONDE'

> Le cahier spécial du 'Monde' sur le don du sang (14/06) donnait déjà la parole aux épidémiologistes et au président d'Aides :
" L'Institut de veille sanitaire (InVS) se fonde sur des données épidémiologiques pour justifier cet interdit : le nombre de personnes contaminées par le VIH est 65 fois plus élevé parmi les gays que parmi les hétéros. Surtout, le taux d'incidence de la maladie, c'est-à-dire le nombre de nouvelles infections enregistrées chaque année, est 200 fois plus élevé dans cette population."
"Même avec la mesure d'exclusion, un risque, faible, demeure... 'Les hommes ayant eu des relations sexuelles avec d'autres hommes contribuent pour moitié à ce risque', explique Josiane Billonel, épidémiologiste à l'InVS."
" Le président de l'association Aides se dit réservé. 'Beaucoup de gens pensent ne pas prendre de risques, mais en prennent', explique Bruno Spire. 'Du point de vue du coeur nous sommes d'accord, du point de vue de la raison nous ne pouvons pas plaider pour cela.' "
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Écrit par : PP / | 19/06/2012

PÈRE ET FILLE

> Pourquoi s'en prendre au père quand l'unique responsable de ce délire sanitaire est la fille ?
BJL


[ De PP à BJL - Parce qu'Alain Touraine a joué un rôle-clé dans la pression idéologique en faveur de la rupture avec le réel, tournant pris à la moitié des années 1980 et qui a transformé la pensée "démocrate" en effort pour refouler tout le concret. On en a vu les applications dans plusieurs domaines graves : la construction européenne, détournée de son sens ; l'érection des revendications privées et communautaristes en "avancées citoyennes" ; etc. Je me souviens (1988 ou 1989) d'un mémorable déjeuner chez Ledoyen avec Louis Pauwels et Touraine, pendant lequel le grand mandarin ne cessa d'exorciser le réel à coups d'abstractions. En ne consultant pas les épidémiologistes ni Aides en matière de don du sang (pour pouvoir appliquer au nom d'un "droit" abstrait à "l'égalité" la bourde de campagne de François Hollande), Marisol Touraine procède à la manière d'Alain Touraine raisonnant naguère sur la société française. On peut légitimement en conclure que la fille tient du père. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 19/06/2012

RETOUR AUX ANNEES 1980-1990

> Etonnante vocation de Mme Touraine à rechausser les bottes de ses prédécesseurs des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, tant celles des ministres Fabius, Dufoix et Hervé, tous relaxés finalement des accusations pesant sur eux dans l’affaire du sang contaminé, que celles du docteur Garretta, qui dirigeait alors le Centre national de transfusion sanguine. A l’époque, le Dr Garretta avait été notamment condamné pour tromperie sur les qualités substantielles d’un produit, et il avait même encouru l’accusation d’empoisonnement. Mme Touraine aspirerait-elle à lui faire concurrence ? Mais ne nous emballons pas, soyons indulgents : pour l’instant Mme Touraine n’est que responsable, pas coupable !
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Écrit par : Denis / | 19/06/2012

LES PERSONNES TRANSFUSEES

> Et quant aux personnes transfusées qui ne peuvent pas elles non plus donner leur sang, également pour des raisons de sécurité sanitaire, elles ont très bien compris le motif de cette interdiction et ne crient pas à la discrimination.
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Écrit par : Barbara / | 20/06/2012

Cher Patrice,

> Votre charge contre Alain Touraine me renvoie personnellement à cette tranche de vie du milieu des années 90, lorsque j'ai suivi durant de nombreuses années son séminaire à l'EHESS. C'est peu dire, je suis bien loin des repères intellectuels et politiques qui étaient alors les miens, néanmoins je peux difficilement lire cela de votre part sans réagir, en connaissance de cause.
Certes, ma réaction à la lecture de vos mots a une dimension affective liée à ce passé, mais je tiens à apporter objectivement plus que des nuances, justifiées par ce qui m'a marqué à l'époque, de la personne et de la pensée d'Alain Touraine.
Son séminaire était tout sauf celui d'un maître à penser tout-puissant, écrasant ses élèves de son savoir et les subjuguant par de fascinants tours de magie gestuels et rhétoriques. Bref, le contraire d'un séminaire à la Jacques Lacan. Si Alain Touraine est un mandarin de part son statut et son aura intellectuelle, je ne crois certainement pas qu'il le soit dans son for intérieur.
J'ai vécu ce rendez-vous hebdomadaire du jeudi matin comme un moment de liberté de parole assez rare, où les réflexions et témoignages du public, très international, étaient constamment sollicités par Touraine. J'avais alors été frappé par la bienveillance et l'ouverture de son écoute, l'attention toute particulière qu'il accordait à la parole et à l'expérience propre à chaque personne, y compris des sensibilités qui le contredisaient parfois frontalement.
Touraine, dénégateur du réel ?
Il ne faut pas oublier qu'au début de sa carrière universitaire, dans les années 50 puis dans la décennie suivante, la sociologie française était imprégnée d'un fonctionalisme et d'un structuralisme hégémoniques, dont les théories écrasaient la personne et l'acteur sous le poids d'un système social ultra-normé, de structures immuables, et d'habitus enfermants, sous lesquels on proclamait alors tambours battants « la mort du sujet ».
La personne était réduite soit à une illusion (en générale bourgeoise), soit à son « rôle » dans la société, soumise à l'ensemble des normes sociales et culturelles profondément intégrées. Tout questionnement autour de l'autonomie du sujet était rendu suspect aux yeux de la pensée officielle.
L'apport essentiel de Touraine est précisément d'avoir replacé au cœur du monde social la question de la personne, la force vivifiante et transformatrice des mouvements sociaux (écologistes, mouvements régionalistes ou étudiants, solidarnosc en Pologne, les mouvements de libération en Amérique Latine, etc...) pour résolument s'orienter vers une sociologie du sujet, qui, faut-il le préciser, n'a rigoureusement rien à voir avec l'individu rationnel et calculateur du libéral Raymond Boudon.
Il y a clairement une source chrétienne dont la pensée de Touraine est imprégnée, et à laquelle il se réfère dans ce recentrement de la théorie sociale sur la personne, appréhendée dans ses dimensions les plus intérieures et dans son aspiration relationnelle, plutôt que comme bon soldat d'une cause sociale supérieure, devenue idole.
On peut certes reprocher à Touraine (et c'est clairement là-dessus que je m'en suis éloigné!) d'avoir à l'inverse finalement contribué à une forme d'idolâtrie du changement social, et en cela d'avoir sans doute pour partie succombé aux sirènes libérales-libertaires en vogue, mais cela n'efface certainement pas cet apport que j'ai décrit en quelques lignes.
Ne jetons ni le bébé avec l'eau du bain, ni le Touraine avec l'eau de la Loire ! :)

SL


[ De PP à SL - Votre témoignage est clair, mais contradictoire avec les nombreuses prises de position de Touraine en faveur du factice. J'ai du mal à imaginer que le Touraine que j'ai rencontré et lu (milieu des années 1980) puisse être le même que le vôtre (milieu des années 1990) ! ]

réponse au commentaire

Écrit par : Serge Lellouche / | 20/06/2012

@ PP et Serge

> L'enfer est pavé de bonnes intentions ... Une conclusion possible est qu'un artificieux ratiocineur peut être aussi un brave type de bonne foi. C'est un peu ce que Raymond Aron laisse entendre qui, dans le même passage de ses mémoires (si j'en crois Wikipedia), dit aussi de Touraine: "J'éprouvais et j'éprouve toujours pour lui une véritable sympathie. Dans la communauté des sociologues parisiens, il tranche par son élégance, sa noblesse naturelle et son authenticité".
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Écrit par : luc2 / | 20/06/2012

INJUSTICE

> Maintenant le don du sang par les homosexuels fait partie des "nouvelles mœurs"??? Vous allez un peu loin PP...
Oui, la famille naturelle est constituée d'un homme et d'une femme mais voilà ce que nous dit le catéchisme « Un nombre non négligeable d’hommes et de femmes présentent des tendances homosexuelles foncières. Ils ne choisissent pas leur condition homosexuelle; elle constitue pour la plupart d’entre eux une épreuve. Ils doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute marque de discrimination injuste. ». Madame Touraine ne répond-t-elle pas à une discrimination injuste? 14 homosexuels positifs pour combien d'homosexuels donneurs sains?

P


[ De PP à P. - Ce qui fait partie de la mise en scène "nouvelles moeurs", c'est le raisonnement de Mme Touraine... qui est désavoué par Aides pour des raisons de simple épidémiologie : qu'on le veuille ou non, les chiffres du HIV sont inquiétants chez les homosexuels depuis plusieurs années. (Ce n'est pas moi qui le dis mais les institutions de santé : je n'ai aucune opinion personnelle sur ce sujet, n'étant pas médecin). Dans un domaine aussi grave, la parole doit être laissée aux experts. Y mêler une idéologie quelle qu'elle soit, y compris dans une bonne intention, n'est pas une attitude responsable... Et la "discrimination" dans le domaine de la lutte contre une épidémie n'est pas injuste : c'est simplement médical.
Ne voyez dans ce constat aucun préjugé. Je m'en tiens à ce que dit Spire à contre-coeur : les faits sont là, même si c'est triste. ]

réponse au commentaire

Écrit par : pierre / | 21/06/2012

Les commentaires sont fermés.