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13/12/2011

Des chrétiens à gauche : les 'Poissons roses' à l'émission 'Le Grand Témoin' de Radio Notre-Dame


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Commentaires

TROPISME

> Du tropisme du vote catho... Émission très intéressante !
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Écrit par : Tangui / | 13/12/2011

ENFIN

> Enfin ça se décoince. Chrétiens indignés, Poissons roses, campagnes du CCFD contre la dictature de la finance. Il était temps et plus que temps que la parole catholique se libère.
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Écrit par : Alips / | 13/12/2011

"LE GRAND COMPROMIS"

> Le paradis terrestre n'est pas de ce monde, il n'est pas pour maintenant nous disent les poissons roses (et tant d'autres!).
Soumis à une idéologie redoutablement pernicieuse, les catholiques sont tentés de trouver prétexte dans cette vérité de foi, pour justifier le grand compromis avec l'ordre du monde, avec lequel il s'agirait de composer, tout en insufflant en lui plus d'esprit de justice et de solidarité. Le truc habituel...
Cette idéologie normalisatrice qui se déploie presque imperceptiblement est une machine à étouffer en douceur le souffle prophétique bouleversant contenu au cœur de notre foi.
Les poissons roses, dans tout ce qu'ils ont de sympathique, sans aucun doute de sincère et généreux, sont un énième avatar de cette ruse subtile, qui nous tient de sa poigne charmeuse.
L'idéologie du monde travaille à ce que, dans son rapport à l'engagement politique, la conscience chrétienne confonde ces deux choses :
- d'une part, l'illusion du paradis terrestre ici et maintenant, l'espoir vain de l'avènement définitif de la royauté sociale du Christ ici bas. Illusion à laquelle certaines théologies de la libération d'inspiration marxiste, ont en effet, du point de vue de la foi, tragiquement succombé. Contre cette illusion, nous savons par notre foi que la véritable espérance chrétienne n'est pas d'ordre politique, ne sera jamais orientée vers la réalisation de la cité terrestre parfaite enfin débarrassée du pêché, jusque dans ses structures. Le pèlerinage terrestre est avant tout celui de l'épreuve du mal.
- Mais, et d'autre part, suggère le rusé en nos oreilles, le renoncement à cette illusion impliquerait donc de la part des chrétiens, qu'ils renoncent en même temps à tout forme de radicalité dans l'ordre politique, à toute aspiration « utopique » à un autre monde, et qu'ils rejoignent donc tout naturellement les sentiers de la modération et du compromis (« loin de tout extrémisme ! »), le tout, bien évidemment (!) dans la joie, dans l'humour et dans la bonne humeur.
L'artillerie lourde de la langue de bois idéologique a tout prévu pour enfermer l'intransigeant, sensible à l'odeur du poisson pourri, derrière le formatage clean de l'opération poisson rose  : « rabat-joie », « sectaire », « qui dit non à tout ».
Oui c'est bien là qu'il faut frapper la ruse à la tête ! Le renoncement à l'illusion du paradis terrestre n'est pas renoncement à annoncer et oeuvrer ici bas à la préfiguration imparfaite, forcément imparfaite, de la cité éternelle qui nous attend et vers laquelle nous allons.
Comment subtilement confondre ces deux choses dans le concret du jeu politique?
En dénonçant l'idéologie libérale qui corromprait la vraie confiance sur laquelle reposerait le vrai libéralisme ;
en tenant sur la question de la dette et des politiques d'austérité un discours sincèrement radical (en apparence) sans toutefois faire référence une seule fois dans l'émission au mot même « capitalisme » et à la guerre menée par le pouvoir actionnarial contre les peuples; en brandissant le mythe de la gauche qui elle, contrairement à la droite, saurait s'attaquer à la source de toutes les injustices, et en faisant semblant d'oublier qu'en France, la gauche s'est non seulement soumise au désastreux tournant libéral mais l'a très largement initié;
en voulant nous faire gober cette véritable tartufferie selon laquelle le parti socialiste ferait de la lutte contre les inégalités le cœur de son programme, sans se presser à faire la longue liste des personnalités socialistes qui fréquentent assidument les réunions oligarchiques du Siècle tous les mois place de la « concorde » (sic); en affichant sur le plan économique un visage d'autant plus crédible qu'il est marqué du sceau de l'innovation et de la modération afin de faire évoluer le parti socialiste sur la question des « nouvelles moeurs » ;
en jouant donc du faux clivage droite-gauche, pour mieux éluder le vrai clivage qui aujourd'hui distingue l'immense majorité politique fidèle au cadre capitaliste-productiviste, des prophètes de la pauvreté joyeuse, qui peinent à se faire entendre à l'ombre du monde.
Bref, en nous annonçant, comme le fait Philippe de Roux à la fin de l'émission, le bipartisme et l'alternance PS-UMP pour les 50 années qui viennent (si, si!) seuls à même de nous garantir la démocratie contre les dangereuses illusions du paradis terrestre : en voilà un joyeux cadeau de Noël qu'on vient offrir aux chrétiens avec le doux visage de la nouveauté, insufflée au sein de notre monde politique vieillissant. C'est tragique.
Le marketing politique n'a guère de limites dans sa capacité à fixer le statu-quo en le parant du langage attrayant du dynamisme et de la nouveauté, ou en noyant l'esprit de compromission dans la complexité des choses. Infantilisme...
Arrêtons de tourner autour du bocal : voulons-nous renoncer oui ou non, imparfaitement mais sans compromis, au fantasme destructeur de la croissance économique et à la vision de l'homme compétiteur et conquérant qui va avec ?
Arrêtons de nous gargariser de mots, de bons sentiments, d'appels à la justice, à la confiance, au dialogue et aux solutions durables, pour mieux contourner le choix face auquel nous conduit cette question : celui de prendre ou non le tournant de la décroissance, qui seul dans l'ordre des idées politiques et anthroplogique de notre temps, rejoint le thème radical de la pauvreté évangélique dans la charité.
Oui, le choix politique de la sobriété et du partage, qui suppose de désigner clairement des ennemis, des structures, des organisations qui s'y opposent, c'est un basculement vers un autre monde, qui n'est pas le paradis terrestre, sauf aux yeux de ceux qui travaillent à parasiter et à empêcher ce choix.
C'est une clarification radicale des enjeux, et faire ce choix, pour un chrétien, c'est faire le choix le plus inconfortable qui soit, vis à vis de son entourage, de l'opinion commune, du rejet, de l'incompréhension voir de l'hostilité auxquels il risque fort de s'exposer, au nom de sa foi.
En suivant la voie des poissons roses, nous continuerons de nager dans la confusion, de nous noyer dans les eaux troubles de notre désespoir collectif, mais avec le sourire et dans la bonne humeur(soyons positifs!).
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Écrit par : serge lellouche / | 13/12/2011

IRLANDE ET ISLANDE

> Ils ont compris que la droite libérale devenait libertaire et que la gauche libertaire devenait libérale, mais n'en tirent pas les conséquences.
Un détail révélateur d'aveuglement: ils se demandent pourquoi l'Irlande n'a pas adopté les mêmes solutions que l'Islande. La réponse est pourtant simple, elle n'en n'a pas le droit, étant liée par les traités européens et ayant adopté l'euro.
Il est vrai que mettre en cause l'idole Europe est un gros mot pour bien des chrétiens. (je me répète).
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Écrit par : Pierre Huet / | 15/12/2011

à Pierre Huet:

> je n'ai pas encore écouté l'émission, mais à propos de l'Irlande et de l'Islande, ce n'est pas une question de droit. C'est une question de véritable démocratie. Le peuple islandais à tenu bon et n'a cessé de refuser la mise au pas par les banques anglaises. Tandis que la clique politique irlandaise a capitulé sans même se battre tandis que le citoyen irlandais, abruti par 15 ans d'enrichissement et de croissance folle est hébété par l'effondrement de son rêve de richesse et ne réagit même plus.
Qu'est-ce que le droit, finalement, une convention que tous le monde accepte dans l'intérêt commun, non? Se cacher derrière le droit est l'argument massue des politiques qui ont capitulé devant le matérialisme-mercantile.
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Écrit par : VF / | 15/12/2011

@ VF

> Le droit est plus qu'une convention, c'est une règle commune de vie et, sur le plan international, un engagement a prendre au sérieux. Comme nous, l'Irlande a signé des traités et doit les appliquer, ou alors s'en retirer. Tant que l'Etat irlandais n'aura pas choisi la bonne solution (s'en retirer) il ne peut que les appliquer sous peine de se discréditer complètement.
A noter que, pour la France, c'est exactement pareil. Nous avons été condamnés à des amendes à plusieurs reprises pour ne pas avoir appliqué des dispositions libérales des traités européens que nos gouvernement ont signé et notre parlement ratifié,et pour la même raison nous devons avaler les OGM, les droits de propriété industrielle sur les semences, la loi NOME sur l'électricité, et j'en oublie...
Simplement, il faut savoir ce qu'on veut: l'Europe ou la souveraineté, elle-même condition sine qua non de la démocratie à laquelle vous appelez. Il me semble que c'est aussi net qu'un théorème.
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Écrit par : Pierre Huet / | 15/12/2011

@ Serge

> Dans une préface de 1956 du roman d’Huxley « Le meilleur des mondes » :
« Leur faire aimer leur servitude, telle est la tâche assignée aujourd’hui par les états totalitaires aux ministres de la propagande, aux rédacteurs en chef des journaux et aux maîtres d’école.... Il est possible que s’abatte sur nous… l’horreur d’un seul totalitarisme supranational se développant, sous le besoin du rendement et de la stabilité, pour prendre la forme de la tyrannie providence...»
Tout ou presque est dans « Le meilleur des mondes », métaphore d’anticipation de la société de consommation : la mondialisation, le totalitarisme doux, le conditionnement béhavioriste, la prétention de la société providentielle parfaite, l’asservissement consenti, le bonheur sous psychotrope et anxiolytique, la contraception malthusienne obligatoire, la sexualité de loisir, la dissociation de la sexualité et de la procréation, la multiplication de partenaires éphémères, l’eugénisme à grande échelle, le rejet systémique de la famille, la chasse aux hérétiques, une réserve de sauvages.
Tout cela écrit et décrit il y a 80 ans, c’est très impressionnant. Donc, cher Serge, quel compromis, en effet ? Et de quoi parle-t-on ? Selon le niveau de prise de conscience de chacun, l’un parlera d’une chose quand l’autre aura déjà basculé radicalement ailleurs. Et celui qui a déjà basculé ne peut pas être compris par celui qui est toujours sur l’autre versant. Tant que tu n’as pas passé la brèche de Roland, tu peux être à 30 mètres de l’Espagne, tu ne la vois toujours pas…
Celui qui pense que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes se prélasse au soleil brûlant du cirque de Gavarnie ; celui qui pense qu’il y a simplement de lourds excès à corriger est arrivé au refuge de la brèche de Roland où il se repose après sa marche d’approche, mais il hésite à poursuivre l’ascension car un épais brouillard point ; celui qui atteint la brèche voit soudain l’Espagne avec une impressionnante clarté. Le soleil est sur ses orteils et le brouillard sur ses talons. Un pas en avant et tout est clair, un pas en arrière et c’est le brouillard, de nouveau.
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 15/12/2011

à Serge

> Tout à fait d'accord avec vous. Mais peut-être est-ce un petit pas dans la bonne direction que d'instiller un léger doute dans l'esprit de quelques chrétiens 'de bonne volonté', sur le fait qu'un "catho" vote nécessairement et automatiquement UMP (sur un mode 'pavlovien'?), sans même que la question ait un seul instant été posée ? ;-)
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Écrit par : J. Warren / | 15/12/2011

à Guillaume et JWarren,

> Il aura fallu 50 ans à la bourgeoisie catholique pour réaliser avec stupeur qu'il y a un monde au-delà de l'UMP. Plus que 50 ans à attendre pour qu'elle ne découvre éberluée un horizon au delà du tandem PS-UMP. Mais nous serons d'accord là-dessus, rien ne sera possible tant qu'elle ne sera pas passée par la case rock'n roll :
http://www.youtube.com/watch?v=aENX1Sf3fgQ
http://www.youtube.com/watch?v=nG7lDY-s24g&feature=related
En attendant de vous répondre plus longuement de retour de quelques jours à Vézelay, je vous propose avec joie cette perle de Noël, écrite par Anne-Marie Béneix, lue sur le fil de commentaires du site des chrétiens indignés.
Je crois qu'elle résume à elle seule pourquoi nous ne nagerons jamais avec les poissons roses, et exprime à merveille l'espérance des chrétiens indignés :
« Ce qui est inconcevable à l’homme, c’est l’amour de Dieu qui s’est incarné et est venu porter notre misère. A notre tour, notre vocation à la liberté nous fait découvrir que par le don, la gratuité, l’engagement, la vigilance bienveillante à l’égard de nos frères et sœurs, nous avons le pouvoir de changer la donne. Plus question d’ordre établi, plus question de rente, de privilège, de rang, de rôle, d’argent, de prérogative, la liberté donnée, vécue, transmet la joie du don total. Ainsi je crois que la justice couvrira la terre comme l’eau le fond de la mer. Et souvenez-vous de la béatitude : heureux ceux qui ont faim et soif de justice, ils seront rassasiés. Ou encore Cherchez le Royaume de Dieu et sa justice, tout le reste vous sera donné en plus ! »
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Écrit par : serge lellouche / | 17/12/2011

AC-DC

> Ah, cher Zorglub, The police, mon adolescence. Manque plus que les Pogues et AC-DC (là, généralement, le bourgeois cathos sort son crucifix et appelle l'exorciste).
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Écrit par : VF / | 17/12/2011

> Entièrement d'accord avec vous cher Pierre Huet !
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Écrit par : serge lellouche / | 17/12/2011

L'EMISSION

> J'ai enfin écouté l'émission. A vrai dire, je n'ai pas tout compris ce qu'ils disaient, je les trouve assez emberlificotés et pas bien à l'aise.
Loin de moi l'idée de vouloir faire votre métier à votre place, cher PP, mais il me semble que, face à des personnes ayant des ambitions politiques, la seule question qui vaille est la suivante : "selon vous, à partir de votre analyse, quels sont les priorités politiques d'aujourd'hui ?" (et, question subsidiaire, "que proposez-vous en conséquence ?").
J'ai l'impression que, cette analyse et cette question n'ayant pas été posées, on restait dans un flou très vague sur leurs analyses, leurs idées et buts réels ; à part faire de l'entrisme catho au PS, ce qui serait un moyen à discuter, pourquoi pas, mais sûrement pas une fin en soi, je ne comprends pas du tout leur programme.
A un moment, à propos de rejet du système politique qui ne serait plus représentatif de la population et de radicalité (sujets que vous abordiez), pourquoi n'avoir pas glissé subrepticement une question du type : "certains vont même jusqu'à se dire 'objecteurs de croissance', que répondriez-vous à ce positionnement ?", peut-être de manière plus fine bien sûr.
Voilà, mes petites remarques d'auditeur frustré de n'avoir pas compris le sens profond et le but de l'engagement de ces deux personnes apparemment pleines de bonne volonté.

PM


[ De PP à PM :
- Mes deux invités estiment au contraire avoir défini leurs priorités... et le moyen de les faire connaître ! Si leurs explications vous semblent vagues, c'est que sans doute vous ne croyez pas à la pertinence de leur analyse de fond et de leur choix stratégique.
- L'intérêt de cet entretien, à mes yeux, était de faire connaître au public catho l'existence de chrétiens sincères qui optent pour la gauche ; et de casser ainsi le carcan mental "catho = droite", déplorable enfermement qui nuit à la nouvelle évangélisation.
- Le programme des Poissons roses est exposé en détail sur leur site. Si j'avais commencé à les pousser sur le terrain de ces propositions concrètes (fiscalité etc), l'émission aurait eu l'air de se fourvoyer dans le pré-électoral : ce qui aurait carrément égaré l'auditeur.
- Je leur ai tendu la perche à propos des causes de la crise et de la nature du libéralisme. Ils répondent à cela par une distinction - à mon avis inexacte - entre le libéralisme économique et "l'idéologie libérale" : comme si celle-ci n'était pas la superstructure de celui-là. Mais je représentais Radio Notre-Dame, et n'étais donc pas là pour opposer aux invités mes propres analyses...
- La confrontation a eu lieu jeudi soir, au débat à l'église de la Trinité : Serge Lellouche y a participé et peut vous en dire deux mots.
- Politiquement, Philippe de Roux et Nestor Dosso veulent croire en la pérennité du PS et de l'UMP, à laquelle je ne crois pas (et je l'ai laissé entendre). C'est une différence supplémentaire par rapport aux objecteurs de croissance. ]

réponse au commentaire

Écrit par : PMalo / | 17/12/2011

CA DOIT ÊTRE CA

> Merci pour ces précisions. Je comprends bien que cette émission que vous animez n'est pas une tribune pour vos idées et donc que vous n'avez pu les "travailler" en votre nom propre.
"La confrontation a eu lieu jeudi soir, au débat à l'église de la Trinité : Serge Lellouche y a participé et peut vous en dire deux mots."
Alors, Serge ? J'attends avec impatience !
"Si leurs explications vous semblent vagues, c'est que sans doute vous ne croyez pas à la pertinence de leur analyse de fond et de leur choix stratégique."
Ça doit donc être ça !

PM


[ De PP à PM - Je précise que Philippe de Roux est conscient du décalage entre sa vision et la nôtre ; ce fut dit clairement à la Trinité. ]

réponse au commentaire
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Écrit par : PMalo / | 17/12/2011

A Patrice et PMalo

> Cette soirée à l'église de la Trinité a d'abord été pour moi la joie profonde de vous rencontrer enfin, Patrice. Découvrir il y a deux ans votre blog et tous ses commentateurs, à ce moment de mon cheminement, a été pour moi providentiel : je le crois vraiment, un lieu unique de clarification, où j'ai intensément perçu cette continuité entre la source de notre foi et l'engagement politique dans le sillage des objecteurs de croissance; alors, ces rencontres incarnées qui commencent à se faire, les unes après les autres, et jeudi avec vous, je les vis comme un fruit de la grâce.
Grande joie bien sûr aussi d'avoir rencontré au cours de cette soirée Damien Thiriet, animateur de la soirée et Catherine, fervente chrétienne indignée.
J'ai eu le sentiment qu'entre vous et Philippe de Roux, il s'est plus agi d'une discussion cordiale que d'un dialogue, tant vos perspectives à chacun semblaient imperméables l'une à l'autre.
Vous avez commencé par l'espérance, comme motivation surnaturelle pour sortir de l'impasse dans laquelle nous nous trouvons ; vous avez insisté sur les grands textes d'Eglise (notamment « Grandir dans la crise ») insufflant l'urgence de sortir du libéralisme ; vous avez souligné les grands traits d'un changement radical de modèle économique tant au niveau des expérimentations locales que des orientations politiques ; vous avez vu dans l'émergence du mouvement des indignés un signe des temps, qu'il s'agit pour les chrétiens de comprendre et d'évangéliser.
Sur tous ces points, il faut bien le dire, le contraste de perspective et d'élan avec votre interloccuteur était sidérant.
De son côté en effet, Philippe de Roux voyait avec insistance en Michel Houellebecq le grand prophète de notre temps, ce qui en soi en dit long sur ce que peut devenir le souffle prophétique dans le monde catholique en voie de normalisation, et sur la désespérance qui l'habite ; aucune référence n'était faite à son inscription en Eglise, ni aucune sensibilité perceptible à cet égard; par contre les références à l'entrepreneur qu'il est, étaient omniprésentes, dictant naturellement sa vision du réel : comment retrouver la confiance pour renouer avec une économie libérale saine ? Le tout agrémenté d'un florilège d'incantations : régulation, justice sociale, indépendance d'esprit, et recours au concept d'abondance frugale, forgé par Jean-Baptiste de Foucauld, et destiné comme tant d'autres, à fixer le statu-quo en le drapant du thème en vogue de la sobriété. Qui n'en appelle pas aujourd'hui à la sobriété ?
Entre vous, deux mondes, vraiment.
Ce qui me frappait en l'écoutant, c'est que semblait se cristalliser en douceur dans son discours, sans doute malgré lui car il m'est apparu comme une personne sincère, tous les contre-sens et confusions dont il s'agit, d'abord pour nous catholiques, de sortir.
Redonner sens et vie aux mots, c'est renverser radicalement l'ordre que l'idéologie voudrait leur imposer : quand l'idéologie dit A, il faut révéler que cela veut dire B. Quand elle dit B, le réel dit A.
Exemples : Philippe de Roux nous annonce que les 50 prochaines années seront marquées par l'alternance PS-UMP, seule garantie possible à la vitalité du système démocratique selon lui. Outre le fait qu'il risque d'être contredit dans quelques mois par Marine Le Pen, cette affirmation est contredite par le réel historique des 30 dernières années, au cours desquels ces deux partis ont travaillé activement à vider de sa substance la démocratie sur deux plans qui se complètent : en se faisant les serviteurs non plus du bien commun et du peuple électeur, mais des intérêts privés et de l'oligarchie financière et industrielle à qui ils ont complaisamment remis les clés de notre destin collectif ; en devenant les acteurs caricaturaux d'un simulacre démocratique, où à chaque élection on mime un pseudo-affrontement politique, qui voile le règne du consensus organisé par ces deux parties depuis 30 ans. Or la démocratie vivante se définit par le rapport conflictuel entre deux systèmes de valeurs.
C'est là-dessus que je suis intervenu en lui signalant que par cette alternance qu'il nous annonce, c'est la fin de toute alternative qu'il entérine. En gros, « oui », m'a-t-il répondu.
Mais ce qui est intéressant, c'est qu'il a justifié sa réponse par un refus de sa part de « rêver du paradis terrestre», et, « au contraire », par son souçi d'agir « avec humilité », « dans le concret plutôt que depuis une tour d'ivoire ».
Voilà, mot pour mot une rhétorique du mensonge idéologique qu'il s'agit de renverser : en affirmant que l'appel à sortir du cadre capitaliste-productiviste (donc l'annonce d'une alternative) ne relève pas d'une révolte de doux-rêveurs, mais précisément, d'une urgence de revenir au réel, celui d'une planète physiquement limitée et celui de besoins et désirs humains fondamentaux. Il traduit une attitude adulte enfin libérée du sentiment de toute-puissance par l'intériorisation des limites.
En affirmant que l'esprit d'humilité et de modération auquel Philippe de Roux croit se référer au sein d'un parti obsédé par la croissance économique et par la compétitivité de nos entreprises, et contre les tenants du « paradis terrestre » qu'il croit désigner, nous le redécouvrirons tous, individuellement et collectivement, dans la conversion de nos cœurs, de nos actes et de l'organisation sociale, dans le service et l'amour de ce qu'il y a de plus petit et de plus fragile dans la vie, dans toute vie, humaine, animale, végétale.
Dans cette conversion, le réalisme est réconcilié avec la vie, le concret avec l'émerveillement.
Peut-être commencerons-nous alors à laisser se rétablir et s'illuminer le lien entre le mystère d'un Dieu tout-puissant se faisant homme, nous révélant son amour infini en s'agenouillant à nos pieds et jusqu'à mourir pour nous sur la croix, et la réponse de l'homme à ce mystère d'amour, enfin tourné vers l'humble acceptation de son propre rabaissement, dans le service de ce qu'il y a de plus vulnérable. Peut-être commencerons-nous alors d'aplanir les chemins du Seigneur dans la joie et l'attente confiante de son retour...
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Écrit par : serge lellouche / | 18/12/2011

LE TEMPS DE LA CONVERSION ET DE LA REVOLUTION

> Merci Serge de ce retour. Cela confirme ce que je pense: entrez dans le système et il vous corrompt, vous digère et vous remodèle à son image. Les exemples ne manquent pas. Le temps de la conversion et de la révolution est venu. Il n'y a plus rien à espérer du système ou d'un quelconque homme (ou femme) providentiel. Le seul dont on ait quelque chose à attendre est le Christ et, si je me souviens bien, il n'est pas encarté.
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Écrit par : VF / | 18/12/2011

PERESTROIKA AU P.S. ?

> Merci à vous Serge et VF, je me sens proche de vos analyses.
Pour autant ces cathos décomplexés qui s'engagent au PS ( aux côtés de Montebourg?) font sauter deux verrous d'un coup: celui qui enferme le vote identitaire catho à droite d'une part, celui du vestiaire dans lequel les gens de la gauche déposent leurs convictions religieuses avant d'entrer, d'autre part. Perestroïka? On n'arrête pas une révolution pacifique en marche.
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Écrit par : Anne Josnin / | 18/12/2011

PP à J.F. Pion et G. de Guerry

> Votre texte s'adressant aux Poissons roses, je vous suggère de le leur envoyer. Notre blog est doublement étranger à ce débat : nous ne partageons pas leur optimisme au sujet du PS, et nous n'avons aucun désir de défendre le bilan des années Sarkozy.
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Écrit par : PP / | 13/02/2012

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