12/03/2011
Le livre du pape – 4. La conversion du désir
Au chapitre 6, qui analyse les évangiles de l'agonie de Jésus à Gethsémani avant son arrestation (et en particulier le récit de saint Jean), Benoît XVI ouvre une perspective abyssale :
Ce récit de Gethsémani, dit-il,« exprime sans nul doute l'angoisse primordiale de la créature à l'approche de la mort, mais il y a toutefois quelque chose de plus : le trouble particulier de Celui qui est la Vie même, devant l'abîme de tout le pouvoir de la destruction, du mal, de ce qui s'oppose à Dieu et qui maintenant le submerge, qu'il doit maintenant et sans délai prendre sur lui : bien plus, qu'il doit accueillir en lui au point d'être personnellement ''fait péché '' (2 Corinthiens 5, 21)/ Et justement, parce qu'il est le Fils, il peut voir avec une extrême clarté toute la marée immonde du mal, tout le pouvoir du mensonge et de l'orgueil, toute la ruse et l'atrocité du mal qui met sur lui le masque de la vie et oeuvre continuellement à détruire l'être, à défigurer et anéantir la vie... »
Le mal « met le masque de la vie » : image impressionnante. Elle débusque nos mensonges. Ils sont instinctifs et polymorphes : « mon nom est légion car nous sommes nombreux», dit l'esprit impur [1]. La « culture de mort » – disait Jean-Paul II – se démultiplie : elle se pare de toutes les couleurs de la vie, de tous les désirs, du plus matériel au plus « spirituel », dopés en tant que « pulsions » (le marketing) et captés pour tourner en rond – au profit des actionnaires du manège ! C'est cet enfermement circulaire qui est mortel : Eros (tous les désirs) devient le masque de Thanatos. Toutes les envies et toutes les « causes », même apparemment honorables et pieusement badigeonnées, peuvent masquer du morbide, c'est-à-dire du pouvoir et de l'égocentrisme.
Pour libérer Eros de Thanatos, il faut le convertir, expliquait Benoît XVI dans Dieu est amour, son encyclique de 2006 : l'éros de l'homme doit faire écho à l'éros de Dieu envers l'homme. Un éros totalement gratuit et miséricordieux...
D'où la leçon de Gethsémani, ainsi résumée (« avec justesse », dit le pape) par le pourtant libéral Bultmann : « Jésus est là non seulement comme un prototype en qui le comportement demandé à l'homme devient visible de manière exemplaire... mais il est aussi et surtout Celui qui révèle : Celui dont le seul choix rend possible l'option humaine pour Dieu en une telle heure. »
Le pape explique : « Le drame du Mont des Oliviers consiste en ce que Jésus ramène la volonté naturelle de l'homme de l'opposition à la synergie et rétablit ainsi l'homme dans sa grandeur. Dans la volonté humaine naturelle de Jésus est en quelque sorte présente en Jésus lui-même toute la résistance de la nature humaine contre Dieu. Notre obstination à tous, toute l'opposition à Dieu, est là, et Jésus entraîne dans son combat la nature récalcitrante vers le haut, vers son essence véritable... Dans l'obéissance du Fils, nous sommes tous présents, nous sommes entraînés dans la condition de fils. »
[à suivre]
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[1] Marc 5, 9.
17:45 Publié dans Témoignage évangélique | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : christianisme, catholicisme, benoit xvi, jésus, gethsémani, jardin des oliviers, bultmann
Commentaires
LE MASQUE DE LA VIE
> "Le mal met le masque de la vie"
Etymologiquement "personne" signifie aussi le masque que portaient les acteurs grecs, porte-voix grimaçants, caricaturaux, permettant une identification immédiate et jusqu'aux derniers gradins du rôle interprété.
Il y a une manière d'être dans la société qui est caricature et même trahison de ce à quoi la vie nous appelle, et ce jeu du paraître sans consistance réelle mais qui étouffe l'être est d'autant plus puissant que l'on veut se faire entendre loin. Je vois la vie partout chez les humbles et les petits de ce monde,certes en souffrance, certes aux prises avec les forces du mal, mais elle se bat et de quelle manière admirable!, quand j'entends derrière les masques policés, même parfois de "bons cathos", le cliquetis morbide de squelettes gesticulants, et je ne sais au fond si le dernier clip de lady Gaga n'est pas qu'une mise à jour, en ce sens une oeuvre de vérité, de la danse de notre société toute puissante.
Très concrètement chez nous, derrière la politique de soutien du 3ème enfant, je constate autour de moi une politique d'"assassinat" du 4ème (à moins d'avoir les moyens financiers, d'où les familles de 4 enfants chez les bobos): je ne sais quelles sont les statistiques, dans les avortements, du nombre de 4èmes, donc chez des familles généreuses, ouvertes à la vie: mais le budget familial change du tout au tout, à commencer par la voiture, puis le logement et tout le reste, et il y a ici une vraie barrière sociale et financière, dont la démolition devrait il me semble être une priorité dans le combat pour la Vie. Qu'en pensez-vous?
AJ
[ De PP à AJ - Je pense comme vous sur ce point. Mais il faudra faire comprendre à certains que l'hostilité envers toute mesure sociale est incompatible avec le combat contre l'avortement. ]
réponse au commentaire
Écrit par : Anne Josnin / | 13/03/2011
LE PRIX DU LOGEMENT
> Abattre la barrière dont parle Anne passe en premier lieu par la baisse du prix du logement. Certains, à gauche, commencent à parler de plafonnement des loyers par la loi. J'y suis favorable et même davantage que cela : trouver un moyen de faire baisser l'immobilier à l'achat. Et tant pis pour cette valeur patrimoniale qui abolit, contre le bien commun, toute notion de valeur d'usage. C'est la logique du capitalisme : ce système mortifère "patrimonialise" tout. Les biens ne sont plus appréhendés comme moyens, donc reliés à une valeur d'usage, mais comme finalité patrimoniale. Accepter de voir baisser la valeur patrimoniale de son bien est sans doute une manière concrète de partager enfin et vraiment, aussi douloureux cela soit-il pour nos sages petit plans de bons pères de familles. Car si la propriété est vidée de toute notion de destination universelle des biens, elle devient un vol universel. C'est ce qu'elle est devenue. Aujourd'hui, la propriété c'est le vol !
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Écrit par : Guillaume de Prémare/ | 13/03/2011
VERTIGINEUX
> Oui, ce livre que j'achève à l'instant, est totalement vertigineux ! On n'en sort pas indemne. Voilà un compagnon de Carême qu'on aura envie de relire encore au temps pascal, et qu'on voudrait tout simplement ne plus quitter. Des passages archi-connus (croyait-on !) des évangiles pénètrent soudain jusqu'aux moëlles comme si la plume du pape nous les avait inoculés avec l'art d'un thérapeute consommé. On en sort "vacciné" contre une lecture ronron et pas trop foulante des Evangiles. Non décidément, comme disait Péguy à propos du Notre Père, "ce n'est pas de la mie de pain".
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Écrit par : Philippe Oswald / | 13/03/2011
A A Josnin et GDP
> La culture de mort avance toujours masquée en effet : "l'avortement par amour" de son enfant malade ou du conjoint qui ne veut pas être père, (qd je m'occupais de jeunes femmes confrontées à cette situation, c'était ce cas de figure au moins la moitié du tps) "l'euthanasie par amour" etc.
Cette vision est sans espérance : rien de mieux à proposer, la solution c'est la mort, la solution revient à une absence d'avenir. Mais qu'est-ce qu'une liberté sans vie
Pas d'espérance et pas de confiance ds l'être humain non plus. On vit dans l'instant et on propose cela a des gens qui justement auraient besoin d'air, de prendre du recul et besoin d'aide pr cela car il sont noyés dans l'événement, au fond d'eux ils espèrent une solution mais on ne leur montre que le plus noir.
Pas d 'espérance, pas de confiance ds l'humain, pas de vision d'avenir, et tout repose sur le sensible on fait pleurer Margot sans lui dire qu'on peut lui proposer mieux
Aujourd'hui avec le rejet de toute métaphysique, l'homme devient le centre de tout, la mesure de toute chose. Sa volonté doit diriger le monde. Au pire, c'est la nature qui se trompe. Et notre société libérale appelle cela liberté : faire ce qu'on veut (elle se croit prudente en ajoutant "tant que cela ne gêne pas autrui" , mais à terme, cela amène à penser qu'autrui est un obstacle ; cette définition amène tôt ou tard à la division sociale)
Au rythme de la déchristianisation , notre société a de plus en plus des réflexes, des modes de pensée qui rappellent ceux de l'Antiquité où tout était aussi mais inconsciemment cette fois, centré sur l'homme, du fait que même les dieux vivaient comme des hommes contrairement au Judaïsme et donc au Christianisme où l'homme est fait à l'image de Dieu.
L'Antiquité avait une mythologie qui justifiait le comportement humain, ras des paquerettes, des dieux : c'est comme ça, c'est fatal, c'est le Fatum ; elle n'avait pas de religion au sens judaïque donc chrétien : ce qui relie à la divinité, mène les hommes vers la divinité, vers le haut.
Dans l'antiquité, pr les Grecs, c'était à la loi à laquelle on obéissait qu'on jugeait de quelle cité était une personne, elle faisait le citoyen, l'homme libre, l'homme tout court. À l'origine, tous les peuples se sont donnés un nom, qui signifiait "homme". Du coup, quid des autres ?
Un vaincu pouvait devenir esclave : car prisonnier il n'est donc plus libre, donc dépendant de son vainqueur, donc quid de son humanité ? (Il a fallu que Sénèque écrive "les esclaves sont des hommes" pr qu'on en discute mais sans remettre l'esclavage en cause).
L'Antiquité, elle, constatait : il n'est plus libre, et s'en tenait là. Le fait faisait le droit : puisqu'il n'est plus libre, on peut en disposer. Pas de vision transcendentale, métaphysique, au delà de la physique donc, qui aurait amené à penser que l'homme mérite mieux que le fait.
Avec la déchristianisation, on revient à ce mode de pensée : aujourd'hui, un député dit en pleine Assemblée Nationale : "ce qui fait l'humain ce sont les rapports sociaux" et avec cela, il justifie l'euthanasie et l'avortement systématique des enfants hadicapés.c'est l'application de Sartre :" il n'y a pas de nature humaine, il n'y a que des rapports sociaux" ou de Marx et son "matérialisme social")
Selon cette définition : une personne ds le coma n'et plus humaine ; c'est la santé qui fait l'humain et logiquement, on justifie l'euthanasie.
Autre exmple : le "je domine donc je dispose" de l'Antiquité ( lisez les commentaires de César, c'es effarant) se retrouve ds l'argument des pro choice : l'embryon ne peut vivre sans sa mère donc elle peut dipose de lui.
Dans de telles condition qu'est-ce qui empêche de dire que les pays pauvres ne vivant que grâce à l'aide des pays riches, ceux-ci peuvent légitimement décider de leur sort ?
Sauf que l'être est à l'origine de tout (on ne parle que de ce qui est, même en pensée); beau ou laid, libre ou prisonnier, il s'agit d'un être humain qui se trouve dans ces situations.
Aujourd'hui, on n'a pas (pas encore) de combat de gladiateurs mais on a la téléréalité. Et des chaines existent eux USA où l'on ne diffuse que des vidéos d'accidents.
"Le masque de la vie", j'y pense aussi chaque fois que je vois une femme agée, défigurée par l'excès de chirurgie esthétique. Combat qui fait de la peine, enfantin car livré pr une cause futile et perdue d'avance. Un beau visage de vieille dame, le visage de ce qu'elle est, serait tellement plus épanouissant.
Prosopon, le masque de théâtre posé sur le visage "pour sonner" plus fort ds les théâtres autant que pour ressembler à quelqu'un, à un personnage : celui d'une femme jeune pr reprendre l'exemple ci-dessus, selon les canons (diktats ?) de la société à un moment donné. Rien d'éternel, une course, une fuite en avant.
Ce masque, ce "look",ce culte de l'apparence, camoufle (mal) l'être.
Pour ce qui est des logements, il y a des pays où l'achat d'une résidence secondaire est soumis à autorisation qd il s'agit de régions où les résidents à l'année s'entassent déjà ds des cages à poules. L'envie certes légitime d'une résidence secondaire passe après la nécessité d'avoir une résidence principale.
De grandes maisons occupées 2 mois par an à côté d'immeubles où 7 personnes vivent ds 80m2 ...
Il y a là une vraie politique sociale à mener.
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Écrit par : zorglub / | 14/03/2011
ABUSIVES
> Parfaitement d'accord pour lutter contre les résidences secondaires abusives : comment ne pas enrager en voyant des émirs ou des starlettes s'acheter dans Paris des appartements qu'ils utilisent peu ou prou, quand on sait les difficultés des parisiens à se loger ? Mais avant qu'un gouvernement étudie ce genre de mesures...
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Écrit par : Gilles Texier/ | 14/03/2011
D'accord avec vous Guillaume et Zorglub,
> oui à une véritable politique sociale du logement, comme d'aménagement du territoire !
Ce pourrait-être l'occasion d'un grand débat national plus opportun que celui, tendancieux, sur la laïcité, et où les représentants des différentes communautés religieuses pourraient travailler positivement ensemble, tant le chantier est immense, que ce soit dans les beaux quartiers, les banlieues, nos villes de province ou nos campagnes. Car derrière la question du logement, c'est très concrètement le vivre ensemble qui se construit.
Mais cela déplairait fortement à certaines puissances économiques et financières qui nous font subir leurs projets et nous chassent d'ici, nous parquent là, bétonnent ici,polluent là,... au gré de leur lubies financière.
Nous serions surpris par tout ce que nous apprendrions, certes sur les aberrations de nos politiques ,mais aussi sur les attentes réelles des uns et des autre, peut-être plus conciliables qu'on l'imagine, tant je crois que l'ennemi ce n'est pas le cas social ou le français de souche sud-méditerranéenne, mais bien le libéralisme sauvage.
Quand chacun aura un logement digne et un travail honnête, on pourra en reparler, de la laïcité,ce nouvel opium du peuple....
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Écrit par : Anne Josnin/ | 14/03/2011
au Président Josnin,
> il y aurait aussi bcp à dire sur les productions agricoles fondées uniquement sur les orientations financières, les directives européennes et non sur le besoin réel des populations
cela tourne à la monoculture...
amusant de constater que les directives bruxelloises ont augmenté la production de mais ds certaines régions ... d'où une augmentation du nombre de sangliers !
Petit exemple emblématique, la production de vin ds certains pays :
pour gagner de l'argent, être sûr de vendre, on ne fabrique plus que du vin qui a le même goût, pas très prononcé, pr plaire au maximum de gen d'où perte de savoir-faire, de goût.
Cela indique aussi l'état d'esprit : on produit pr vendre (normal) mais uniquement pr ça : plus de goût pr le travail bien fait
je dis bien on "fabrique" : ajout de copeaux de bois, sucre etc
c'est complètement artificiel
Le vin australien est au vin ce que le MacDo est au restaurant, un produit standard , pas mauvais mais pas bon
signé Zorg -hips ! - lub
autre pensée profonde : la seule production digne c'est celle fondée sur la qualité et non sur le prix
elle est digne de l'homme et de son génie
Qualité = durée, donc moins de gâchis, moins de gaspillages d'energie et de matière première, fierté des ouvriers etc
production fondée sur le prix : Il est normal de chercher à se mettre à la portée de toutes les bourses mais cela ne doit pas amener à produire de la cochonnerie, à limiter les salaires, à entretenir ds populations ds la médiocrité.
Pour caricaturer (à peine) :
Un produit de bonne qualité dure 5 ans par exemple, fabriqué avec 1 dose d'énergie et 1 dose de matière première pr un bon salaire
Un produit de piètre qualité : 1 an donc il faut en fabriquer plus pr remplacer, en utilisant encore de la matière première et de l'énergie et cela fait plus de déchets
Au plan humain : perte de la valeur des choses, de l'amour du travail bien fait, inversion des valeurs.
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Écrit par : zorglub / | 15/03/2011
OBSOLESCENCE PROGRAMMEE
> Certes, mais produit qui dure un an --> achat annuel du même produit (avec les innovations en plus) --> consommation --> croissance.
Le mécanisme est impossible à changer sans se poser la question de la croissance.
Obsolescence programmée + innovation + publicité + crédit sont les éléments incontournables, les moteurs de notre société/système économique.
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Écrit par : PMalo / | 15/03/2011
pour P Malo : :
> c'était sous entendu. vous avez raison de le dire noir sur blanc
la croissance par la conso grandissante est une fuite en avant. si l'on s'arrête de consommer tout tombe. or peut-on consommer de plus en plus ? oui si l'on produit de moins en moins cher
D'où les conditions de travail en baisse et les délocalisations ; des populations dont les vies dépendent uniquement des consommations des pays riches (ouvriers agricoles en Colombie et en Afrique) ou des classes riches : les caissières en France qui n'ont plus de vie de famille du fait de l'ouverture dominicale ou jusqu'à 21h30)
On ne doit pas vivre pr la croissance mais la croissance doit être le reflet, la conséquence, le parallèle d'une amélioration sociale.
l'un des problèmes l'incapacité à attendre ; l'impatience est le moteur de la conso effrénée.
Le crédit conso devrait être interdit pr bcp ; c'est de l'esclavage
je pense à mon frère travaillant à l'époque en Suisse ds la finance avant d'en partir pr raisons morales et opposition intellectuelle à ce fonctionnement, qui me disait "à quoi cela sert-il de gagner autant si je vis mal ? officiellement c'est pr gagner ma vie mais justement je n'ai plus de vie. "
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Écrit par : zorglub / | 17/03/2011
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