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12/03/2011

Le livre du pape - 3. Ce que la "liturgie" est en réalité

020311_jesus_nazareth.jpgExplications dans le tome 2

de  Jésus de Nazareth

(De l'entrée à Jérusalem

à la Résurrection) :


Une caractéristique du catholicisme est la «liturgie » de la messe : non seulement culte rendu au Seigneur présent parmi les baptisés assemblés, mais culte rendu à Dieu par l'Eglise au nom du Christ Souverain Prêtre, donc « déploiement des divers aspects de l'unique mystère pascal »  [1] « actualisation des mystères du Christ en vue de l'application de leur effet de salut ». Dans son livre, le pape [2] développe ces aspects à la lumière des évangiles.

Au chapitre premier, le pape montre comment la communauté chrétienne du Ier siècle comprend l'événement de l'entrée de Jésus à Jérusalem cinq jours avant la Passion (sous les acclamations des pèlerins : « hosanna, béni soit celui qui vient au nom du Seigneur »). Cette scène se révèle comme « représentation anticipée de ce que [l'Eglise] fait dans la liturgie »...

« L'Eglise salue le Seigneur dans la sainte Eucharistie comme Celui qui vient maintenant, qui est entré au milieu d'elle. Et, en même temps, elle le salue comme celui qui demeure toujours, Celui qui vient et nous prépare à sa venue. Comme pèlerins, nous allons vers lui ; comme pèlerin, il vient à notre rencontre, et il nous associe à sa "montée" vers la Croix et la Résurrection, vers la Jérusalem définitive qui, dans la communion à son Corps, est déjà en train de croître au milieu de ce monde. »

C'est la définition de l'eucharistie selon la théologie catholique, avec cette « Présence réelle » qui fut l'objet de tant de malentendus dans le passé – mais qui est le trésor de l'Eglise.

Au chapitre 2, sur le discours eschatologique de Jésus, le pape rappelle que  saint Paul [3] applique à Jésus le mot hilasterion (« instrument d'expiation »), mot qui désignait le propitiatoire [4] de l'Arche de l'Alliance, lieu de la présence de Dieu :

« Jésus lui-même est la présence du Dieu vivant. En lui se touchent Dieu et l'homme, Dieu et le monde. En lui se réalise ce que le rite du Jour de l'expiation voulait exprimer : dans le don de lui-même sur la Croix, Jésus dépose, pour ainsi dire, tout le péché du monde dans l'amour de Dieu et le fait fondre en Lui. S'approcher de la Croix, entrer en communion avec le Christ, signifie entrer dans l'espace de la transformation et de l'expiation. »

Au chapitre 5 sur la dernière Cène, le pape indique comment les disciples comprendront de ce qui s'est passé ce soir-là, et qu'annonçait le psaume 22 en termes voilés :

« C'est seulement peu à peu que ces connexions sont devenues claires pour les disciples. Mais, à partir des paroles d'action de grâce de Jésus qui confèrent à la berakha [5] juive un nouveau centre, la prière et l'action de grâce [6], l'eucharistia, se révèle toujours plus comme le vrai modèle influent, comme la forme liturgique dans laquelle les paroles d'institution prennent leur sens et où se présente le culte nouveau qui remplace les sacrifices du Temple, glorification de Dieu dans la parole, mais dans une Parole qui s'est faite chair en Jésus et qui désormais, à partir de ce corps de Jésus qui a traversé la mort, concerne l'homme tout entier, toute l'humanité, - et devient le commencement d'une nouvelle création. »

[à suivre]

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[1]  Catéchisme de l'Eglise catholique, § 1171.

[2]  Grand liturgiste : cf. notamment son livre L'esprit de la liturgie (Ad Solem).

[3]   Romains 3, 23 s.

[4]  Le couvercle d'or recouvrant l'Arche d'Alliance où venait Dieu pour écouter Moïse. Ce couvercle symbolisait la présence divine.

[5] « bénédiction ».

[6]  Au passage, le pape réfute l'idée selon laquelle l'eucharistie ne serait que « le repas du Seigneur ». (Par la notion réductionniste de « repas » on a pu dégrader l'eucharistie en simple convivialité, erreur qui reste dans les mentalités en 2011). En fait, explique Benoît XVI citant Jungmann, « c'est de la prière d'action de grâce [de Jésus], après le banquet du dernier soir, que la liturgie de la messe a commencé, et non du banquet lui-même. Ce dernier était considéré comme si peu essentiel et si facilement séparable que déjà dans l'Eglise primitive il était omis. Toutes les liturgies, par contre, ont développé la prière d'action de grâce prononcée sur le pain et le vin... Ce que l'Eglise célèbre dans la messe n'est pas la dernière Cène, mais ce que le Seigneur, durant la dernière Cène, a institué et confié à l'Eglise : la mémoire de sa mort sacrificielle. »  (Messe im Gottesvolk, 1970). Le mot signifiant « repas » ne sera jamais utilisé pour désigner l'eucharistie, jusqu'à la Réforme du XVIe siècle.

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Commentaires

ACTUALISATION

> Il est évident que le livre de J.R.[BXVI] n'est pas un ouvrage d'amateur. Je suis en train de le lire et j'y ai relevé parmi beaucoup d'autres les mêmes perles que vous, en fait elles ont parfois la beauté des dogmes et je pense souvent à J.H. Newman ; il y a des trésors de formulation absolument inépuisables et le dernier extrait que vous citez me fait souvenir de la formule apprise il y a plus de cinquante ans dans mon enfance :"La messe est le renouvellement non-sanglant du sacrifice de la croix."
Aujourd'hui le terme réactualisation serait plus exact, en se référant au cardinal Journet, sauf erreur, et dans tous les cas il s'agit de l'unique sacrifice du Christ Sauveur, pour reprendre la Lettre aux Hébreux : Notre seul et Unique (ehad pour l'hébreu) grand prêtre n'est pas incapable de compatir à nos faiblesses et c'est de Lui et de Lui seul que nous tenons notre accès auprès du Père dans la foi.
Bon voilà, en toute amitié, mais je ne pense pas que ces propos aient à être mis en ligne...enfin vous en ferez ce que vous voudrez et ils sont peut-être un peu trop brutaux, bien cordialement.
G.

[ De PP à G. :
- Brutaux ? Non, pourquoi ? Et il me semble que je dis la même chose que vous...
- D'accord sur le fait que le terme "actualiser" vaut beaucoup mieux que le terme "renouvelé", qui donne aux messes l'air de faire nombre par rapport à l'unique sacrifice de la Croix, alors qu'il ne s'agit pas de cela du tout. Si la terminologie avait été claire au XVIe siècle, la division de l'Eglise n'aurait peut-être pas eu lieu. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Gérald / | 12/03/2011

LE "REPAS", IDEE FAUSSE ET ORIENTATION REDUCTIONNISTE

> « Quelle joie de participer au repas du Seigneur ? »
C’est le titre d’un parcours de catéchèse pour la préparation des enfants à la première communion, sur lequel mon épouse attire mon attention, dont les développements privilégient la notion « table » ou de « repas ». Une telle insistance est-elle toujours utile dans l’approche de l’Eucharistie (comme semble l’indiquer implicitement le pape dans un extrait que vous rapportez, cher PP – votre note n°6) ?
Dans ce parcours, l’insistance sur la communion fraternelle conduit à quelques formulations peu claires, par exemple « le pain devient corps et sang qui rassemblent pour vivre l’amitié, la fraternité, le partage, la joie et la vie ». Le côté repas mémoriel l’emporte la plupart du temps sur l’aspect sacrificiel (sans pour autant l’ignorer), et ceci sans doute, parce que l’actualisation du sacrifice de Jésus, cette « action de grâce » dans laquelle il fait toute chose nouvelle à chaque messe, n’est pas suffisamment détachée de l’idée de « dernier repas ». Déjà Jean-Paul II soulignait cette difficulté dans l’introduction de son encyclique sur l’Eucharistie :
« Parfois se fait jour une compréhension très réductrice du Mystère eucharistique. Privé de sa valeur sacrificielle, il est vécu comme s’il n’allait pas au-delà du sens et de la valeur d’une rencontre conviviale et fraternelle. » (Jean-Paul II : « L’Eglise vit de l’Eucharistie », 9)
Bref, le « repas du Seigneur » serait-il une étape de la pédagogie de l’Eglise à rééxaminer en profondeur ? Benoît XVI écrit encore (merci à mon épouse, plongée la première dans ce tome 2) : « Un archaïsme qui voudrait retourner avant la Résurrection et à sa dynamique pour imiter seulement la dernière Cène, ne correspondrait pas du tout à la nature du don que le Seigneur a laissé à ses disciples. Le jour de la Résurrection est le lieu intérieur et extérieur du culte chrétien, et l’action de grâce, comme anticipation créatrice de la Résurrection de la part de Jésus, est la manière par laquelle, dans son don, il nous bénit et il nous entraîne dans la transformation qui, à partir des dons, doit nous gagner et se répandre sur le monde : “jusqu’à ce qu’il vienne” (1 Co 11,2§) » (Benoît XVI, Jésus de Nazareth, t. II, chap. 5, p. 168).
[à noter, dans ce passage, ce détail qui montre à mon avis la faiblesse du travail des traducteurs : dans l’expression « retourner avant la Résurrection et à sa dynamique » : le « sa » renvoie à « Cène » (plus loin dans la phrase), ce qui ne se comprend pas forcément tout de suite…).
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Écrit par : Denis / | 12/03/2011

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