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05/05/2009

Si le politique ne ressuscite pas pour domestiquer la finance, le monde ira dans le mur

Alarme, même dans les journaux les moins suspects d’anticapitalisme :


 

Le Monde daté du 4 mai (Frédéric Lemaître): « A Wall Street, là où, c’est bien connu, travaillent les plus brillants cerveaux de la planète, l’heure est de nouveau à la fête. En tout cas, on s’y prépare. Assez discrètement pour ne pas provoquer la colère des "cols bleus" de Chrysler et de General Motors (encore des syndiqués qui n’ont rien compris), mais assez bruyamment pour que New York se reprenne à espérer… » Motif de cette réjouissance : « les banques américaines ayant au premier trimestre renoué avec les profits, le temps des primes est revenu… La banque Goldman Sachs, par exemple, au cœur du système, a provisionné 4,7 milliards de dollars. Si elle continue à ce rythme durant les neuf mois suivants, elle pourra verser une prime de 569 220 dollars à chaque salarié au début de l’année prochaine… Alors que traditionnellement, les banques d’affaires consacraient la moitié de leurs revenus aux rémunérations de leurs petits génies, Morgan Stanley s’apprête, cette année, à leur reverser 68 % du gâteau. »

Ces banques doivent leur survie aux centaines de milliards de dollars accordés par le gouvernement, donc par le contribuable américain  – souligne le journal.

Il y a quatre semaines, l'illustre G 20 préconisait de changer le mode de rémunération des financiers,  en  remplaçant  les  primes  pousse-au-crime par des « critères durables ».  N’était-ce qu’un effet d’annonce ? « Pour les professionnels de la finance, il est, au contraire, urgent de revenir aux bonnes vieilles pratiques, si lucratives, malgré les dégâts qu’elles provoquent (surtout chez les autres)…»  A Paris, des banques demandent déjà à l’AMF d’agréer de nouveaux « produits financiers hautement complexes » ! A Bruxelles, la Commission entre en guerre contre les gouvernements pour servir les intérêts des hedge funds. A Berlin, le SPD et la CDU proposaient d’obliger les  super-patrons à « assumer sur leur patrimoine leurs erreurs de gestion », et de ne verser les « parts variables de salaire » qu’à l’issue du contrat de travail ; à cela, l’homologue allemand de Mme Parisot riposte en traitant le SPD et la CDU de « dilettantes ». Etc.

Alors que la crise commence à peine à ravager l’économie réelle et à ruiner les gens, les fauteurs de cette crise rouvrent déjà leur casino. Pour préparer la prochaine catastrophe,  comme si  l'actuelle ne suffisait pas  !

Parmi ces professionnels, seuls disent aujourd’hui la vérité ceux que leur âge ou leurs fautes trop flagrantes ont mis à la retraite. Alan Greenspan : « J’ai fait une erreur en comptant sur l’intérêt privé des organisations, particulièrement des banques. » Jack Welch, ex-patron de General Electric : « Si l’on regarde les choses en face, la valeur actionnariale était l’idée la plus stupide du monde. » Daniel Bouton : « Nous n’avons pas vu cette béance dans le système et dans sa régulation, qui était la capacité offerte à n’importe quel établissement aux Etats-Unis de distribuer des crédits hypothécaires à n’importe qui… »

Mais il y a des señoritos, en France, pour bombarder la Toile de messages obtus. Selon eux, quiconque  imputerait  à  la  finance  la  crise  financière, serait un ignorant : en fait le coupable serait... « l'étatisme » [1] ! Car il y aurait « encore trop d’Etat », et ce serait « contraire au Principe de Subsidiarité » ! En vertu de ce Principe, l’Etat devrait achever de se saborder, laissant tout le pouvoir aux soviets de banquiers !

Le pire est que les auteurs de ce genre de messages se réclament parfois du catholicisme, qui enseigne pourtant le contraire ; on aurait presque envie de leur dire, avec Dante, qu’il y a un degré de bêtise auquel on ne peut répondre que col coltello  (« à coups de couteau »). Mais ne cédons pas à cette tentation. La vraie réponse va venir avec l’encyclique de Benoît XVI sur la crise et ses causes. Les médias [2] vont devoir prendre au sérieux la doctrine sociale de l’Eglise, et admettre qu’elle ne concerne pas seulement la morale sexuelle. Le chrétien ne vit pas simultanément dans  deux univers mentaux parallèles, l’un (gentillet) régi par la morale des familles, et l’autre (plus sérieux) régi par la « compétitivité financière ». Arranger ainsi les choses est sans doute confortable, mais ce n'est pas catholique.

 

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[1]  Reproche inouï : l’Etat serait coupable d’étatisme… alors que sa faute est d’avoir laissé faire le délire du privé !

[2]  et pas seulement les médias.

 

 

Commentaires

CELA PROMET

> Je m'en étais doutée, mais je n'avais pas pensé qu'ils iraient aussi vite.
Ils sont prodigieux de bêtise.
Vous relèverez que le cycle des crises diminue alors que leur amplitude croit de façon exponentielle. Cela promet pour la prochaine, qui ne devrait pas tarder...
Il devient nécessaire de réfléchir à l'opportunité de s'acheter un cabanon avec un poulailler et un jardin (et du bois pour le feu) pour survivre à la prochaine...

Écrit par : Annie | 05/05/2009

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