15/05/2008
OGM : une généticienne agronome nous écrit d’Afrique
Message de CM, sur le transgénique, le système global et l’ultralibéralisme :
<< A propos de l'écologie, je veux juste apporter mon témoignage. Je vis actuellement en Afrique, dans le "bush profond". Moi qui ai un diplôme de génie génétique des plantes, je suis en train de revoir mes idées reçues ! D'abord, il me parait aujourd'hui indéniable que les OGM, porteurs de beaucoup de promesses (comme n'importe quel progrès technique) ne vont pas réaliser ces promesses car ils sont gérés dans une logique de profit et de pouvoir. Ensuite, en exportant notre mode de production dans le monde entier (et souvent les productions aussi !), on affaiblit les productions et les techniques locales. Or, s'il y a un jour une crise ou un souci quelconque dans le fonctionnement de notre belle économie mondiale, devinez qui va payer en premier... Ce qui n'est pas un souci, au fond, puisque ce sont souvent les mêmes qui prônent l'ultralibéralisme actuel et l'arrêt des aides pour le traitement du sida ou les stérilisations systématiques, en tout cas là où je suis. Enfin, la mondialisation, c'est comme tout le reste : on veut bien des droits qui vont avec, mais pas des devoirs.
C.M. >>
m09:33 Publié dans Ecologie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : ogm, écologie, afrique, ultralibéralisme
Commentaires
AGRONOMES
> Agronome de formation moi aussi, merci à CM de ce témoignage. Effectivement, les OGM sont (étaient?) porteurs de beaucoup de promesses (notamment la lutte contre la malnutrition avec du riz enrichi en Vitamine D3 si mes souvenirs sont bons). En revanche, il est certain que la biodiversité est une richesse et une certaine forme d'assurance pour le futur, reprenant l'adage "ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier" (pour schematiser mon propos, avec une seule culture (ex blé OGM), si une maladie apparait, toute la production mondiale peut chuter du jour au lendemain, avec des variétés de blé différentes, on a plus de chances de trouver une variété résistante à la maladie) .
Ma réflexion actuelle me fait me poser la question: sont ce les OGM qui sont à éviter, ou bien leur utilisation mercantile? Peut on envisager l'utilisation d'OGM pas seulement dans un objectif mercantile et en conservant une certaine biodiversité? Je suis preneur de vos réflexions...
Écrit par : Alexandre | 15/05/2008
LIRE SCHOOYANS
> Sur toutes ces questions de mondialisation et de désordre mondial, d'ultra-libéralisme, de malthusianisme démographique, il faut lire les ouvrages de Michel Schooyans, qui a été prêtre Fidei Donum pendant 10 ans au Brésil et professeur à l'Université de Sao Paulo, puis pendant 25 ans à l'Université de Louvain, et qui est membre de l’Académie pontificale des sciences sociales et consulteur du Conseil pontifical pour la famille :
- L'Évangile face au désordre mondial, Fayard (1997), préfacé par le cardinal Ratzinger
- La dérive totalitaire du libéralisme, Mame (1999), préfacé par le pape Jean-Paul II
- Le Crash démographique : De la fatalité à l'espérance, Le Sarment-Fayard (2000)
- Droits de l'homme et technocratie, CLD (2000)
- La face cachée de l'O.N.U., Fayard - le Sarment (2000)
- Pour relever les défis du monde moderne : L'enseignement social de l'Eglise, Presses de la Renaissance (2004)
- Le terrorisme à visage humain, François-Xavier de Guibert (2006), préfacé par le cardinal López Trujillo
Pour vous donner une idée, citons-le dans "La dérive totalitaire du libéralisme" (1999) :
"Le libéralisme, dont le nom « semble faire hommage à la liberté, est une imposture qui ne fait que masquer une fumisterie. Le but de celle-ci, comme le but de toute idéologie, c'est de ‘justifier' et de ‘légitimer' l'injustice par un appel perfide à la liberté et par une annexion des instruments (politiques, économiques, financiers, sociaux, démographiques) dont la liberté authentique se réserve normalement l'usage »
« Dans bien des milieux du Tiers-Monde et des pays développés subsiste, et parfois se renforce, la tentation de considérer le sous-développement comme un phénomène fatal, définitif et irréversible. Cette conviction engendre le désespoir chez les peuples pauvres et le cynisme chez les riches. Il est urgent de dénoncer ce déterminisme paralysant, ce fatalisme démobilisateur et nullement fondé. Il faut réaffirmer la prise que l'homme a sur son histoire, sur la société et la nature, grâce à son intelligence, sa volonté libre, son imagination créatrice, sa sociabilité »
Écrit par : Michel de Guibert | 15/05/2008
PRODUCTIFS ?
> Bonjour.
Je connais bien l'Afrique , j'y ai passé la moitié de ma vie professionnelle et j'y retourne encore. Les réflexions d'Alexandre me semblent très pertinentes. Les OGM ont sans doute leur place dans des systèmes d'agriculture modernisés. On peut ne pas aimer Monsanto mais apprécier les travaux du CIRAD ou d'autres organismes de recherche qui ont déjà permis à l'Asie de faire d'énormes progrès. Oui, il est certainement possible d'utiliser les OGM de façon non exclusive.L'agriculture africaine a besoin des moyens d'une productivité à la mesure de sa croissance démographique. Les OGM sont un des moyens à mettre en oeuvre.
Flouriot
[ De PP à F. - À un détail près : la productivité supérieure des OGM est un mythe... ]
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Écrit par : Flouriot | 15/05/2008
@ FLOURIOT et @ PP
... et à un autre détail près : même avec une forte croissance démographique, l'Afrique est un continent sous-peuplé qui pourrait largement nourrir une population bien plus nombreuse...
Écrit par : Michel de Guibert | 15/05/2008
OGM ET RAVAGEURS
> à Michel de Guibert
L'Afrique est globalement sous-peuplée mais connait de vastes zones à très haute densité de population . Notons cependant que la population rurale a presque partout doublé au cours des 30 dernières années mais que la productivité de l'agriculture vivrière reste la même.
> à PP
Une grande partie des récoltes est perdue en raison des innombrables insectes, champignons et prédateurs en tout genre qui s'en régalent : c'est là que les OGM ont leur mot à dire.
Flouriot
[ De PP à F. - Oui, en théorie. Mais en pratique, ça ne fonctionne pas et les insectes ravageurs mutent pour devenir résistants au Bt ! Il faut donc ajouter des pesticides... Tout ceci est consternant. J'étudie la question (pardon) dans mon livre "L'écologie de la Bible à nos jours", qui sort le 22 mai. ]
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Écrit par : Flouriot | 16/05/2008
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