Pourquoi l'Eglise avait-elle besoin de Benoît XVI ?

Interview de l'agence Zenit (Rome) sur le livre Benoît XVI et le plan de Dieu...

Zenit – Comment définissez-vous votre ouvrage ?
Patrice de Plunkett – Ce n’est pas une biographie : c’est une enquête de journaliste sur la foi chrétienne et la société d’aujourd’hui, à la lumière des analyses de Josef Ratzinger devenu Benoît XVI. Aujourd’hui, dans les pays riches et surtout en Europe occidentale, un fossé sépare l’opinion publique de la foi chrétienne. L’urgence est de combler ce fossé, de dissiper les quiproquos, de faire découvrir autour de nous le véritable message catholique. Voilà le chantier auquel nous appelle Benoît XVI… Josef Ratzinger est l’homme qui a le plus fortement et le plus finement analysé ces questions ; il a ouvert toutes les pistes de réflexion. Et c’est lui, cet intellectuel européen, qui a été élu par le conclave le moins « européen » de toute l’histoire de l’Eglise ! Le  plan de Dieu s’exerce par tous les papes successifs – et pour notre temps il a suscité Benoît XVI : à nous de comprendre cela, et de répondre à l’appel que le successeur de Jean-Paul II lance à toute la planète catholique.
Votre enquête porte à la fois sur la pensée « ratzingérienne » et sur la société actuelle ?
Ce livre essaie de montrer comment Josef Ratzinger, par son expérience profonde du XXe siècle et sa vision très lucide du XXIe, est exactement le pape dont notre temps a besoin. Benoît XVI va nous aider à faire le tri entre les vrais et les faux « problèmes de l’Eglise » (les faux problèmes étant fabriqués par la pression médiatique, dont j’étudie les origines et les motifs dans mon enquête). Il va nous aider à nous centrer sur l’essentiel. Et il va nous aider à trouver le langage qui rendra la foi chrétienne accessible aux gens d’aujourd’hui : cette foule immense d’individus qui ne savent pas du tout ce qu’est le christianisme, ou qui s’en font une idée très inexacte... Les chrétiens croyants deviennent minoritaires en Europe, donc (paradoxalement) plus « visibles » qu’autrefois : il vont devoir donner les raisons de leur foi à tous ceux qui les leur demanderont. L’urgence est de réussir à faire comprendre, autour de nous, que la Révélation et le Salut apportent une promesse de bonheur infini à chaque individu. Image très éloignée des caricatures de la religion qui prévalent en ce moment dans notre société…
Pourquoi ces caricatures ? Que faire pour changer la situation ?
C’est l’un des phénomènes que mon livre étudie. A l’origine de ces caricatures il y a des causes multiples (que nous devons comprendre pour soutenir la Nouvelle Evangélisation) : mais si elles existent, nous n’en sommes pas tout à fait innocents ; la sinistrose des chrétiens européens persuade l’opinion que l’Eglise est sur la mauvaise pente. Au lieu de pointer toujours les torts  - réels - des médias, demandons-nous d’abord quelle image nous donnons de la foi… et quelle autre image nous pourrions donner. « La Nouvelle Evangélisation part de la conversion des catholiques », dit Benoît XVI. Nous avons à nous convertir à chaque instant pour accueillir le Christ dans nos vies : sinon de qui, ou de quoi, serions-nous témoins ? Nous devons aussi (c’est particulier aux Européens de notre époque) nous convertir à l’espérance : c’est-à-dire cesser de déprimer, enfermés dans les impasses de notre petite Europe ! La « panne de la foi », la « panne des vocations », la « panne de la pratique religieuse » n’existent que dans nos pays riches et vieillissants où tout est en panne dans tous les domaines : mais il y a un milliard de catholiques sur la surface de la Terre, et ce sera une source d’énergies et de renouveau pour nous, les Européens, dès que nous en prendrons conscience. Ouvrons nos portes et nos fenêtres sur cette communauté eucharistique planétaire, et nous cesserons de croire que tout décline ! Je consacre la seconde partie de mon livre aux pistes que nous ouvre Benoît XVI et que nous pouvons suivre avec lui, nous les laïcs.
A quel titre intervenez-vous ainsi ?
Vatican II, que l’on n’étudie pas assez, a appelé les laïcs à prendre la parole. A l’intérieur de l’Eglise, tous les baptisés doivent participer à la vie de la communauté ; envers nos  contemporains, le concile nous fait un devoir de témoigner, chacun à sa façon et selon son état. Mon métier à moi est d’écrire et d’enquêter sur la société actuelle : donc j’ai fait ce livre. C’est un livre engagé. Mais c’est le contraire d’un livre polémique : c’est un travail de laïc journaliste parlant à tous les autres laïcs, pour partager avec eux les raisons d’espérer et de témoigner, et pour parler de la société, totalement inédite et nouvelle, que le XXIe siècle nous donne à évangéliser.