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27 novembre 511 : il y a 1500 ans, la mort du roi Clovis – mais pas la ”naissance de la France”... ni la ”christianité g

 clovis.jpg <  Le baptême de Clovis.



 Pour en finir avec les idées reçues :

 


À Clovis et à son fameux baptême, on a coutume d'associer le slogan « France, fille aînée de l'Eglise » [1] ; à partir de là s'enchaînent de fausses perspective religieuses. En effet la foi chrétienne est formelle : on baptise une personne individuelle, non une collectivité. En admettant que Clovis ait fait baptiser avec lui sa garde (sinon « le peuple tout entier »), selon la coutume germanique associant païennement cette garde à la personne du chef, ce serait déjà une aporie théologique : que vaut un baptême d'adulte reçu parce qu'on vous en a donné l'ordre ?

Fausses perspectives aussi sur le terrain historique. Qui était Clovis ? Un chef des Francs saliens de l'actuelle région de Tournai... Mais les sources manquent : en fait de documents, l'historien ne dispose que d'une seule lettre de Clovis, et des chapitres XXVII à à XLIII du second volume de l'Historia Francorum de Grégoire de Tours – texte partiellement hagiographique en mauvais latin, rédigé après les faits.

Quels faits ? Il y a les invérifiables : le vase de Soissons, au chapitre XXVII ; les prêches de Clotilde à Clovis et la guérison du petit Clodomir, au chapitre XXIX ; le voeu de Clovis à la bataille contre les Alamans, au chapitre XXX ; le baptême de Clovis (à une date incertaine) par l'évêque Remi à Reims, au chapitre XXI ; etc. Il y a – tout aussi invérifiable mais contextuellement probable – la façon très mérovingienne dont Clovis liquide ses frères et l'ensemble de ses concurrents :

 « Puis quand il eut tué beaucoup d'autres rois et de proches parents, de qui il se méfiait, parce qu'il craignait qu'ils ne lui enlevassent son royaume, il étendit son royaume à travers toutes les Gaules. Cependant on rapporte qu'ayant réuni une fois les siens, il se serait ainsi exprimé, au sujet des parents dont il avait lui-même causé la perte : ''Malheur à moi qui suis resté comme un pérégrin au milieu d'étrangers et n'ai plus de parents pour pouvoir m'aider si l'adversité venait.'' Mais ce n'est pas par affliction pour leur mort qu'il disait cela, mais par ruse pour savoir si par hasard il pourrait en découvrir d'autres qu'il tuerait. »

 

Car il y a un fait vérifié : le succès politique éphémère de Clovis. En moins de trente ans de règne, il parvient à juguler (par les mêmes méthodes qu'eux) les clans de bandits et d'assassins qui tiennent lieu de pouvoirs publics dans les Gaules ; il conquiert ainsi la future Ile-de-France, puis l'Aquitaine. Est-ce la naissance de « la France » ? Mais non : c'est une éphémère hégémonie territoriale, liée à un seul homme et vouée à la dispersion. Après quoi il y aura la tentative carolingienne, vouée elle aussi à la dispersion. Puis il y aura l'entreprise capétienne, cette toparchie (petite principauté locale) qui s'accroîtra grâce à un instinct de continuité dont ses prédécesseurs avaient manqué.

Constitué au XIIe siècle comme mémoire légendaire de la royauté capétienne, le mythe de Clovis disparaîtra au XIIIe. Puis sera exhumé au XIVe mais pour un tout autre usage, souligne l'historien Laurent Théis :

 « Il faut attendre l'entrée de la France dans sa longue période de crise dynastique et nationale, en gros entre 1340 et 1460, pour voir Clovis réaliser un retour en force, conquérir une seconde jeunesse, dans la littérature et à l'image. Pendant la guerre de Cent Ans, le roi est enrôlé avec vigueur dans le camp Valois, qui s'efforce de s'identifier au parti français. Il y combat, avec ses armes propres, au premier rang, principalement contre les Anglais et leurs alliés. Ces armes sont pour partie […] le saint chrême et la colombe, mais elles sont fourbies et astiquées en vue d'une guerre idéologique nouvelle [la crise radicale ouverte par le traité de Charles VI en faveur d'Henry V]... L'ancienneté de Clovis est, pour une royauté en extrême difficulté, un gage de pérennité. L'invocation de sa figure symbolique et fondatrice fait passer au second plan sa consistance historique, et relègue en particulier dans l'oubli le comportement douteux de la fin du règne, lorsque les royaumes de Chararic et de Ragnacaire furent conquis par de fourbes machinations...» [D'où aussi l'invention de la loi « salique », associée à la figure de Clovis].

Dernier avatar historico-religieux, le mythe de Clovis sera l'étendard du parti gallican dans son hostilité aux papes :

 « Clovis rendit au royaume de France un dernioer service politique : faire respecter les droits et libertés de l'Eglise de france et les responsabilités particulières du roi à son égard face aux ingérences de Rome. C'est ce qu'on appelle, de façon globale, le gallicanisme. Là, c'est le Clovis du concile d'Orléans en 511 qui est mobilisé. Le débat entre le pape et le roi sur leurs compétences respectives à propos de la gestion du temporel des églises du royaume, de la discipline ecclésiastique et de la nomination des évêques, remonte haut... La direction de l'Eglise de France appartient au roi très chrétien, et non pas au pape, comme le précise, dans son Traité des libertés de l'Eglise gallicane paru en 1594, le juriste Pierre Pithou, qui fait largement référence à Clovis et au concile d'Orléans : ''Les évêques de ce temps-là estimèrent le roi, assisté de son conseil d'état, être après Dieu le chef terrien de l'église de son royaume et non pas le pape. » Vingt ans plus tard, Bénigne Milletot, conseiller au parlement de Bourgogne, cite le 6e canon du concile d'Orléans, dont il impute le mérite à Clovis : ''Aucun laïc ne peut accéder à la cléricature, sinon par la volonté du roi.'' » [2]

 

Tout cela sera ignoré des catholiques ultramontains et légitimistes du XIXe siècle lorsqu'ils badigeonneront l'imagerie d'Epinal de la France chrétienne ; légendaire encore en vigueur aujourd'hui dans certains milieux. Ainsi en 1874, dans un pèlerinage, le prédicateur proclamait : « Nous voulons garder le serment de Clovis, vingt fois renouvelé dans le cours de notre existence nationale... Voilà pourquoi nous répétons le cri séculaire de la France : ''Vive le Christ qui aime les Francs !'' »

Voilà de quoi réfléchir en 2011. Les catholiques français sont à un carrefour. Ou bien ils choisissent le passéisme factice, le rêve d'un « peuple faisant bloc autour de son héritage chrétien » : fantasme, irréalisme, voie sans issue et sans pertinence dans le monde nouveau. Ou bien ils choisissent ce que leur demande l'Eglise : la nouvelle évangélisation, qui s'adresse au coeur et à l'intelligence de chaque personne individuelle, d'où qu'elle vienne, quelle que soient ses origines.

Comme dit la Bible : « Choisis la vie ! »


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 [1] Cette formule, devenue réflexe, est une erreur non seulement religieuse mais historique, commise par le cardinal Langénieux lors de la commémoration du baptême de Clovis en 1896. En effet, « fille aînée de l'Eglise » était historiquement une expression qualifiant, non la France en corps, mais l'institution dynastique issue mythiquement de Clovis. Ce qualificatif ne s'appliquait donc pas aux Français à travers les siècles, ce qui reviendrait à imposer une sorte de « naturalité catholique héréditaire » à tout un peuple, que ses membres individuels le veuillent ou non ! (Cf. le slogan des manifestations lefebvristes : « la France est chrétienne et le restera » : propos qui n'a aucun sens et frôle l'hérésie).

 [2] Laurent Théis, op. cit. Cf. la néfaste institution de la « commende » abbatiale, extorquée par François Ier au pape et qui asphyxiera les abbayes françaises – notamment le Mont Saint-Michel que Louis XIV finira par transformer en prison politique. Voir mon enquête Les Romans du Mont Saint-Michel, Le Rocher, 2011.

 

Bibliographie

Grégoire de Tours, Histoire des Francs, Les Belles Lettres, 1995.

Laurent Théis, Clovis, Complexe, 1996.

Michel Rouche, Clovis, Fayard, 1996.

Pierre Chaunu, Eric Mansion-Rigau, Baptême de Clovis, baptême de la France ? De la religion d'Etat à la laïcité d'Etat, Balland, 1996.

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Les catholiques français s'éloignent de Sarkozy

...selon le constat de l'Ifop, dont l'analyse pèche malheureusement par confusion mentale :

 

Dans Le Monde daté d'aujourd'hui, ce titre : « La défiance s'est installée entre les catholiques et Nicolas Sarkozy ». Sous-titre : « Les affaires ou polémiques ont ''choqué'', depuis la rentrée 2009, cet électorat situé plutôt à droite ».

Extraits (en rouge), commentés (en noir) par nous :



<< La part des catholiques pratiquants satisfaits de l'action du président de la République est passée de 61 % en août 2009 à 47 % en juillet 20010 >>

> Par quelle aberration pouvaient-ils se dire, en tant que catholiques pratiquants, satisfaits du système Sarkozy ? Et à un taux supérieur à la moyenne nationale ?



<< Chez les non-pratiquants […], le décrochage est net depuis les régionales. >>

> Qu'est-ce qu'un « catholique non-pratiquant » ? Quelqu'un qui exige un mariage religieux tout en précisant qu'il (elle) ne croit pas en Dieu, qu'il (elle) considère Benoît XVI comme un scandale, et que le film de Quillévéré « pose de vraies questions » ?

 


<< Les raisons [du désaveu des pratiquants] tiennent à une série d'événements et d'affaires symboliques qui auraient « choqué » les catholiques, et en particulier les plus âgés d'entre eux […]  Auprès de cette frange, jusque-là « noyau dur de la Sarkozie », les polémiques liées au passé personnel du ministre de la culture Frédéric Mitterrand, au projet du président de nommer son fils Jean, 23 ans, à la tête de l'EPAD, puis à l'annonce du cumul des fonctions et des rémunérations d'Henri Proglio, le patron de Veolia nommé président d'EDF par l'Elysée, ont laissé des traces. « La France catholique pratiquante qui conserve une vision traditionnelle de la société fait preuve d'une crispation particulière à propos de l'homosexualité comme sur les valeurs du travail et du mérite », relève l'Ifop. >>

> Donc, si l'on suit le raisonnement de l'Ifop, seuls des gens à la fois vieux et « crispés » (donc catholiques) peuvent s'indigner : a) d'un scandale de tourisme sexuel, b) d'un scandale de république bananière, c) d'un scandale de sursalaire capitaliste... Si réellement on pense ainsi à l'Ifop, cet institut est en proie à une dérive idéologique ultralibérale. Rappelons que sa vice-présidente est la présidente du Medef.



<< Cette France-là a aussi, selon l'Ifop, gardé « un rapport particulier à l'argent ». Les récentes révélations des affaires […] comme la rémunération de l'ancienne ministre Christine Boutin, ont amplifié la prise de distance.>>

> Si cette allégation était vérifiée, ce serait réconfortant : l'étiquette catholique de Mme Boutin aurait cessé d'aveugler cette fraction de l'électorat. Mais prenons l'info avec prudence, vu le chaos conceptuel qui semble régner à l'Ifop.



<< Au début du quinquennat, le président de la République avait pourtant multiplié les messages auprès des catholiques, notamment lors de son discours, en mars 2008, sur la laïcité et l'évocation des racines chrétiennes de la France. Mais « il se retrouve handicapé par d'autres aspects de sa politique liée à sa vie personnelle et à l'argent », complète M. Fourquet >> [l'analyste de l'Ifop].

> Dès ce fameux discours, nous avions dit que Nicolas Sarkozy se payait la tête des catholiques. Nous avions aussi souhaité que le catholique français cesse d'être dupe des mots (pour les applaudir ou les craindre), et qu'il fasse un peu plus attention aux actes. Nous avions même commencé à le dire dès la campagne présidentielle, quand Nicolas Sarkozy était allé au Mont Saint-Michel : geste dicté par deux conseillers (catholiques de cour) mais dénué du moindre sens, donc profondément irritant pour les amis du Mont.



<< Le prochain baromètre Ifop-JDD attendu à la fin du mois devrait permettre de vérifier les conséquences auprès de l'opinion de l'affaire Woerth-Bettencourt autant que du contre-feu « sécuritaire » allumé par M. Sarkozy à propos de la déchéance de nationalité et de l'expulsion des Roms. >>

> Le Monde dit : « auprès de l'opinion ». Il ne précise pas : « de l'opinion catholique pratiquante ». Heureusement, car il y aurait insulte... On ne voit pas le rapport entre le catholicisme et les évictions de Roms.

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Embryons humains à la disposition du biotech 

Face à ce plan français, la protestation monte :  ici

 

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À Noël : parlons de l'Unique Nécessaire

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Dans nos familles et très au delà,

que Noël soit l'occasion de parler de Jésus :


 

 

''En cette période de l’année, plus qu’en toute autre, le sacré et le profane se heurtent en permanence pour prendre le plus d’espace possible et finissent généralement par s’accommoder l’un de l’autre. Les croyants ne doivent pas se sentir menacés par les éventuelles origines païennes de Noël. Si l’Eglise a peut-être recyclé d’anciennes fêtes païennes, ce n’était que pour se greffer sur les anciennes cultures existantes à des fins prosélytes...'' C'est ce qu'écrit Andrew Santella, chroniqueur de la New York Times Book Review, dans un article traduit par Slate.fr [1] et qui dit des choses historiquement judicieuses (sinon originales) sur les origines de la fête de Noël dans l'Eglise. Ce journalisme cultivé contraste avec les médias français, toujours recroquevillés sur les platitudes relativistes du rayon spiritualités et bien-être... L'essayiste américain ne prétend pas que des Grecs obscurs auraient inventé le mythe de Jésus-Christ à la fin du IIe siècle ; en historien sérieux, il ne pose que des questions correspondant au contexte et à la perspective de ce qu'il étudie. Par exemple : la date de Noël – élaborée par l'Eglise, tout le monde le sait – a-t-elle été fixée au 25 décembre par volonté d'évangéliser les rites ''païens'' (familiaux) du cycle des Douze Jours ? ou par un comput symbolique issu de la tradition juive ?  

On a vu que, selon Santella, les croyants ''ne doivent pas se sentir menacés'' par cette sorte de questions.

Une foi qui pourrait se sentir ''menacée'' par un débat de ce type ne serait pas la foi chrétienne. Peu importe que le christianisme, en se diffusant, ait emprunté des sites et des rites aux cultures locales [2] : ce n'est pas de cela qu'il vit, mais d'un événement fondateur – qui, lui, n'est emprunté à rien puisque cet événement est la personne même de Jésus. La foi chrétienne tient dans son noyau initial : le témoignage de la résurrection de Jésus et la compréhension qui s'ensuivi(la Pentecôte), événements datés, situés, et sans lesquels le développement avéré de la foi chrétienne n'aurait pas eu lieu. ''Comment pourrait-on croire sérieusement que l'exégèse que l'on fera des livres saints [de la religion judéo-chrétienne] serait 'scientifique' dans la seule mesure où elle ne tiendrait aucun compte de ce qu'en tire la communauté religieuse qui en a fait la source de toute son existence ?'' [3]

Préparons-nous à fêter l'événement Jésus-Christ avec le pape François : en lisant l'exhortation apostolique La joie de l'évangile, qui nous appelle à devenir les évangélisateurs de l'Europe matérialiste mercantile ! Tout chrétien catholique se doit désormais d'être missionnaire, appelé au coeur à coeur avec le prochain pour l'aider à connaître le Christ... Parler de Noël dans un esprit d'évangélisation, c'est aider à découvrir que le christianisme n'est pas simplement ''l'une des religions du monde'', qu'il n'est pas ''une voie spirituelle comme une autre'' (voire ''moins spirituelle que les autres''), slogans du relativisme devenu l'idéologie officielle de l'Europe-hypermarché. Le christianisme n'est comparable à rien d'autre. Il est d'une autre nature, et même d'une sur-nature. Il est le fruit d'une prise de conscience mûrie au fil des siècles et progressant vers l'événement Jésus-Christ : un événement prophétisé avec une précision croissante par la Bible des Hébreux, comme le souligne le talmudiste Daniel Boyarin dans son essai Le Christ juif, paru aux éditions du Cerf en octobre dernier.

Contrairement à ce qu'affirme la sous-culture occidentale, l'événement Jésus-Christ – qui se contemple notamment dans le mystère de Noël – ne dépend pas des mythologies antiques. Noël, c'est Dieu créateur s'unissant à sa créature dans un mystère d'incarnation. C'est Dieu tout-puissant se faisant nouveau-né. C'est Dieu infini naissant dans la finitude humaine, après neuf mois enclos dans le sein de Marie. C'est Dieu éternel venant habiter le temps terrestre pour une trentaine d'années... Donc Noël est le mystère de la venue d'un être humain qui est aussi la Seconde Personne de la Trinité, d'où naît l'univers. Indicible, impensable par nos moyens naturels, le mystère de Noël déborde les civilisations. Comparez-le aux mythologies : elles ne témoignent que du mental humain, alors que l'événement Jésus-Christ (avec ses connexions et ses résonances que l'on n'en finira jamais de scruter) ne peut avoir été inventé par les hommes.

''Allez et faites des disciples parmi les gens de toutes les nations...''  Ne perdons plus de temps. Dans nos familles et au delà, que ces fêtes de fin d'année soient l'occasion de parler de Jésus : l'Unique Nécessaire.


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[1] http://www.slate.fr/story/66311/jesus-est-il-vraiment-ne-un-25-decembre

[2] ''Cette mystique conjonction de l'amour et de la mort, que proclamaient, que prétendaient achever les mystères [païens] en nous transportant jusque dans la consommation tragique de l'union des divinités chtoniennes aux dieux célestes, n'était qu'un pressentiment de ce que la mystique évangélique pouvait seule élucider en le réalisant.'' (Louis Bouyer, Mysterion : du mystère à la mystique, OEIL 1986). J'ai constaté la profondeur de l'analyse de Louis Bouyer en étudiant le cas du culte de l'archange hébreu Michel en Occident : Les romans du Mont Saint-Michel, Le Rocher, 2011.

[3] Louis Bouyer, Gnosis : la connaissance de Dieu dans l'Ecriture, p.179 (Cerf 1988).

 

 

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Du scandale à la réforme : la dimension surnaturelle aussi

Peinture des frères Limbourg, XVe siècle

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Rosaire et prière à l'Archange en octobre. De Vatican News :

 

 

En octobre, le pape souhaite que les catholiques prient pour l'Église

https://www.vaticannews.va/fr/pape/news/2018-09/en-octobr...

 

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 L’intégralité du communiqué

<<  Le pape François a demandé à son réseau mondial de prière d’aider tous les fidèles à prier davantage pendant ce mois d’octobre. Ces dernières années et ces derniers mois, l’Église a vécu des situations difficiles, entre autres la révélation des abus sexuels, de pouvoir et de conscience de la part de clercs, de personnes consacrées et de laïcs, provoquant des divisions internes.

Sans nul doute, elles sont favorisées par le «mauvais esprit» qui trouve complicité en nous : «ennemi mortel de la nature humaine» (Exercices Spirituels de Saint Ignace de Loyola, n° 136). Dans la tradition chrétienne, diverses figures représentent la présence et la manifestation du mal dans le monde, par exemple, celle de «Satan», qui en hébreu signifie «adversaire», ou bien celle du diable, «Diabolos» en grec, c'est-à-dire celui qui divise et sème la discorde. La tradition biblique le nomme aussi le «séducteur du monde», le «père du mensonge», ou «Lucifer», celui qui se présente comme un ange de lumière, mais qui, sous l’apparence du bien, cherche à tromper.

Comme nous l’observons, le mal se manifeste de différentes façons et la mission d’évangélisation de l’Église devient plus difficile, et même discréditée de par nos connivences. Nous portons d’ailleurs une part de responsabilité en nous laissant entraîner par des passions qui n’ouvrent pas à la vraie vie ; parmi elles : la richesse, la vanité et l’orgueil. Ce sont des étapes par lesquelles le mal veut entraîner, et nous séduire. A partir de bonnes pensées et de bonnes intentions il conduit peu à peu les personnes vers ses intentions perverses (discordes, mensonges, etc…)

Le pape François rappelait dans sa Lettre au Peuple de Dieu du 20 août 2018 : « "Si un membre souffre, tous les autres souffrent avec lui"… Lorsque nous faisons l’expérience de la désolation que nous causent ces plaies ecclésiales, avec Marie il nous est bon "de donner plus de temps à la prière" (saint Ignace de Loyola, Exercices Spirituels, 319), cherchant à grandir davantage dans l’amour et la fidélité à l’Église». Durant ce mois d’octobre, le Saint-Père demande à tous les fidèles un plus grand effort dans la prière personnelle et communautaire. Il nous invite à prier le Rosaire chaque jour, pour que la Vierge Marie aide l’Église en ces temps de crise, et à prier l’Archange saint Michel afin qu’il la défende des attaques du démon. Selon la tradition spirituelle, Michel est le chef des armées célestes et le protecteur de l’Église (Apocalypse 12, 7-9)

Le pape François nous invite à conclure le Rosaire avec une des plus anciennes invocations à la sainte Mère de Dieu, Sub Tuum Praesidium, et avec la prière traditionnelle à saint Michel écrite par Léon XIII :

Sub Tuum :  Sous l’abri de ta miséricorde, nous nous réfugions, sainte Mère de Dieu. Ne méprise pas nos prières quand nous sommes dans l’épreuve, mais de tous les dangers délivre-nous toujours, Vierge glorieuse et bénie. Amen

Prière à l’Archange : Saint Michel Archange, défendez-nous dans le combat et soyez notre protecteur contre la méchanceté et les embûches du démon. Que Dieu exerce sur lui son empire, nous vous en supplions ; et vous, Prince de la Milice Céleste, par le pouvoir divin qui vous a été confié, précipitez au fond des enfers Satan et les autres esprits mauvais qui parcourent le monde pour la perte des âmes. AMEN.  >>

 

 

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”L'écologie, de la Bible à nos jours” : une synthèse du livre

par Serge Lellouche :

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Patrice de Plunkett

L'écologie, de la Bible à nos jours :

pour en finir avec les idées reçues

(L'Oeuvre, 2008)

 

  

Né à Paris en 1947, PP est journaliste, blogueur, ami du Mont Saint-Michel et de la casquette irlandaise. Excepté quelques raccords de ma part, les formulations dans cette synthèse reprennent celles du livre...   S.L.

 

 

 

Introduction : «Habemus papam...ecologistum ?» s'interrogeait la revue L'Ecologiste trois semaines après le conclave de 2005, dans un numéro où elle publiait une lettre de Joseph Ratzinger à cette même revue, dans laquelle le cardinal appelait à un dialogue fructueux entre la théologie catholique et « les diverses pensées écologiques ».

De part et d'autre, l'idée de «papes verts» suscita quelque étonnement, chez des personnes qui voyaient plus le catholicisme comme un musée (des préjugés du bon vieux temps) que comme une force de contestation. Nombre d'Européens sont imprégnés du lieu commun selon lequel l'économie qui saccage l'environnement « a été engendrée par la Bible ».

D'où ce livre-enquête, qui regarde le judéo-christianisme du point de vue de l'écologie, et l'écologie du point de vue du judéo-christianisme. Il vise à comprendre ce que la Bible dit du rôle de l'homme dans l'univers, et à décrire le rôle que jouent aujourd'hui les chrétiens vis-à-vis du système qui surexploite la Terre - et quel rôle ils pourraient jouer, s'ils prenaient au sérieux le christianisme.

 

1ère partie - L'écologie, de la Bible à nos jours

 

La Bible a-t-elle pollué le monde?

L'homme extérieur à la Création est une idée fausse, dangereuse, qui est venue d'un peu partout sauf de la Bible. Pourtant, la grande accusée aujourd'hui, la « mère de toutes les pollutions », ce serait l'Ecriture juive : la Bible, qui aurait entraîné une civilisation prédatrice «judéo-chrétienne». Le «multipliez-vous et dominez la terre» a suffi à installer cette idée, lancée par l'universitaire américain Lynn White dans un célèbre article de 1967 (The Historical roots of the Ecological Crisis, dans la revue Science), et répétée ensuite en boucle dans les médias.

L'air du temps accuse la Bible? Ce n'est pas la faute de la Bible : c'est la faute des chrétiens, ou de nombre d'entre eux, qui depuis trois siècles, ont bel et bien imaginé être «au-dessus» du monde naturel. Des générations de chrétiens ont vécu dans l'idée d'une scission entre le corps et l'âme, le corps (mauvais) servant aux nécessités physiques et économiques, du reste profitables, et l'âme restant une tour d'ivoire réservée aux dames : on lui consacrait des livres pieux ornés de roses et de dentelles. On pouvait donc exploiter ici-bas, en comptant bien être excusés là-haut. Cette idée est tout simplement le contraire du christianisme et du vrai message de la Bible.

Les livres de la Bible hébraïque sont la méditation progressive d'une expérience qui court sur deux millénaires. La Bible est la germination d'une expérience initiale : «Le thème de la Création n'est pas posé d'un seul coup. Il traverse l'histoire avec Israël... L'exil de Babylone fut le véritable moment où la Création devint le thème dominant» (Joseph Ratzinger, Au commencement Dieu créa le ciel et la terre, Fayard, 1986). L'idée d'une création du monde en sept jours ne doit pas prêter à une lecture fondamentaliste. Les sept jours sont une image, nécessaire à un message unique en son genre : si notre monde a eu un début, c'est que Dieu l'a créé. Si le monde persiste, c'est que Dieu le crée encore à la minute présente. Il le crée à tout instant : «Dieu dans sa bonté renouvelle chaque jour continuellement l'acte de Création», dit la liturgie juive du matin. Dieu crée le monde, et il crée l'humanité pour être son «associé dans l'oeuvre de la Création», soulignera la Michnah (Traité Chabbat, 10).

Si le récit biblique de la Création fait l'objet d'attaques aujourd'hui, c'est qu'il a une série d'impacts sur le débat moderne. Il dit que l'univers n'est pas né du hasard, mais d'une puissance unique : d'une Personne. La Création ne se confond pas avec son Créateur. Donc la nature n'est pas une déesse, et l'on peut être écologiste sans être adorateur d'une idole.

Le verset 2 de la Genèse («Or la terre était vide et vague...»), se départit de la cosmogonie effrayante de la culture babylonienne, et ouvre une autre vision : à l'origine il n'y a pas deux forces (en lutte) mais une seule, celle du Créateur. Le monde n'est pas maléfique : «Dieu vit que cela était bon», scande la Genèse après la séparation des terres et des mers, la création du foisonnement d'êtres vivants dans les eaux et sur la terre. La Genèse nous dit que le monde n'est pas une «bataille de démons», mais une création de la Raison divine.

Dieu crée l'homme et la femme «à son image et ressemblance» (26, 1). L'humain est doté de la conscience : il n'est donc pas une bête ; mais il a la même origine matérielle que les animaux. Dieu crée cet être de raison à partir du sol : la poussière terrestre, la glèbe, en hébreu haadamah, d'où le nom «Adam». L'homme et ses descendants font indissolublement partie de la Création. Ils en seront toujours solidaires.

Une partie des écologistes imputent le mauvais usage des pouvoirs humains au livre de la Genèse, à cause du verset 26 et des cinq suivants, et des expressions «assujettir», «dominer», «soumettre», qui pourtant dans l'hébreu ancien sont des figures de style qui n'ont pas le sens que leur donne le français. Le procès qui devrait être fait aux cosmogonies païennes est fait à la Bible. Or dans celle-ci, Dieu, ayant créé Adam, lui confie la Création («jardin d'Eden») pour la «cultiver» et la «garder». L'homme était le jardinier de la Terre, son gérant pacifique. Puis la rébellion d'Adam l'a éloigné du Créateur, brisant l'harmonie entre l'homme et la Création... La liberté donnée à l'homme a dégénéré en violence, Dieu en a pris acte, mais ce n'est pas Lui qui a instauré cette violence. Par le péché originel, Adam et Eve se rebellent contre leur condition de créature et l'homme vit désormais dans l'illusion qu'il peut tout faire et sans limites : «Pour celui qui veut être Dieu, l'autre devient à son tour limitation, rival, menace. La relation avec l'autre devient mutuelle accusation, lutte. (…) La relation avec le monde se modifie également, elle devient relation de pilleur à pillé, de piétineur à piétiné.» (J.Ratzinger, op. Cit.).

La prophétie en était faite au chapitre 11 (1,9) de la Genèse à travers le mythe de la Tour de Babel : projet de développement purement matériel, chantier engendré par la technique. Alors, dit la Genèse, Dieu intervient en détruisant le système de Babel par la dispersion des hommes «sur toute la surface de la Terre». Il veut empêcher les hommes de croire qu'«aucun dessein n'est irréalisable».

Le Deutéronome appelle les Hébreux à observer le sabbat prescrit par les Dix Commandements. Il se fonde sur le «repos» de Dieu au Septième Jour, cœur de la Création du monde. Pour célébrer le Créateur en accordant repos à la Création, le livre du Lévitique institue une année «sabbatique» de jachère : tous les sept ans, les récoltes seront considérées comme la propriété de tous, riches, pauvres, étrangers, esclaves, et le surplus sera abandonné aux «bêtes du pays». L'idée aurait de quoi faire rêver les écologistes sociaux du XXIe siècle : non seulement repos à la terre, mais remise de toutes les dettes... Dans la tradition juive, le sabbat est «la fête de toute la Terre» et il «reflète le monde à venir».

De même, Job est interpellé : «Où étais-tu quand Je fondais la Terre ?». Job, le croyant, admet que la raison de l'univers ne vient pas de l'homme : «Je sais que tu es tout-puissant : ce que tu conçois, tu peux le réaliser. J'étais celui qui voile tes plans» (Job 42, 2-3).

Le livre des Psaumes est un sommet de la poésie mystique. La Création connaît son Créateur, dit le psaume 18. Le psaume 71 (72) chante le Roi de Paix qui libérera les pauvres de l'oppresseur. Il chante aussi le cosmos qui fait partie de son Royaume : car le «social», la nature et l'espérance mystique sont inséparables. Même élan cosmique dans le psaume 97 (98). Dans le psaume 64 (65), le monde entier est dans les mains du Créateur ; le psaume 103 (104) est un hymne à Dieu pour la nature, et le psaume 148 offre à Dieu la louange de toutes ses créatures. Il y a une fraternité de la nature et de l'homme, puisqu'elle et lui ont un même père. La nature est chaudement présente aussi dans le Cantique des cantiques.

La grande majorité des croyants juifs ne suivront pas Jésus, à cause de ce que Jésus dit de lui-même. Il se tenait sur la montagne en prenant «la place de la Torah». La conséquence inéluctable fut le drame du Golgotha... Mais selon les Evangiles et le livre des Actes des apôtres, le Golgotha permet la résurrection de Jésus. De cette résurrection du Christ, Paul va déduire une vision du monde sans précédent : «Tous revivront dans le Christ», écrit-il aux Corinthiens, avant d'écrire aux Romains que « la Création entière » est concernée par cette promesse : «La Création attend avec impatience la révélation des enfants de Dieu (…) Nous savons en effet que maintenant encore la Création gémit et souffre les douleurs de l'enfantement» (Romains 8, 19-23). La Création tout entière est solidaire dans l'espérance d'une vie nouvelle dans le Christ : «Dans sa bienveillance, il projetait de saisir l'univers entier, ce qui est au ciel et ce qui est sur terre, en réunissant tout sous un seul chef, le Christ» (Eph. 1, 9-10). «Il est le commencement, le premier-né d'entre les morts, puisqu'il devait avoir en tout la primauté : car Dieu a voulu que dans le Christ toute chose ait son accomplissement total» (Col. 1, 15-20).

Ces textes sont la clé de la foi chrétienne. Ils ont une dimension cosmique sans équivalent. Il ne s'agit plus (comme dans la pensée grecque) de libérer le spirituel du matériel, mais de faire entrer toute la création, en chair et en os, dans le salut divin.

Deux mille ans plus tard, la promesse chrétienne de Paul est toujours une folie : des Occidentaux déclarent croire à la réincarnation hindouiste, plutôt que d'espérer la résurrection «comme ma grand-mère». «L'Incarnation est l'acte supr

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05/03/2014 | Lien permanent

Proposition de lecture spirituelle de la navigation celtique de Sylvain Tesson ('Avec les fées')

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J’aime beaucoup Sylvain Tesson et je ne suis pas le seul. Il méprise notre époque de nombrilistes. Sa quête est au large. C’est l’immense poésie du monde... Et au-delà, encore infiniment plus :

 On a vu Tesson dans l’Himalaya, les steppes d’Asie centrale, les forêts sibériennes, sur les “chemins noirs” gaulois des Cévennes au Mont Saint-Michel ! il cherche “la convergence des sensations, des émotions, des observations” qu’il nomme “croisée des transepts” ou “surgissement des fées”. Son dernier livre (Equateurs littérature) s’intitule : Avec les fées. Cette fois c’est un périple à la voile avec deux amis au long des côtes celtiques de l’Europe, de la Galice au nord de l’Ecosse en passant – bien sûr – par la Bretagne, la Cornouailles, le pays de Galles et l’Irlande : ce “couloir de l’iode et du granit” où les fées, dit-il, “avaient dû se réfugier à la pliure de la terre, de la lumière, de la mer…” “Nous naviguerions vers le nord, passant en revue les promontoires où de vieilles présences attestaient chaque soir les adieux du soleil… Puisque la nuit était tombée sur ce monde de machines et de banquiers, je me donnais trois mois pour essayer d’y voir. Je partais avec les fées.” Il en résulte un livre extraordinaire : par sa beauté d’abord, et par sa sincérité.

Le plus extraordinaire de cette sincérité est sa dimension spirituelle. Tesson hésite profondément. Il hésite entre deux horizons. D’un côté la vision chrétienne (ce qu’il en perçoit). De l’autre la weltanschauung postmoderne, sorte de demi-panthéisme inabouti, avec son grief-réflexe à l’encontre du christianisme. Étranger à la vraie pensée catholique, ce grief est le produit d'une société méprisée par Tesson ; on s'étonne de le voir apparaître dans son livre.

Mais Tesson ne transige pas avec ce qu’il ressent. Dans son périple celtique, quand une atmosphère chrétienne lui convient il le dit. Quitte à se contredire plus loin. Par exemple lors de ses escales bretonnes : “Je marchais vif, le corps fouetté par la lumière. Sur le sentier breton, les chapelles sont semées. Il y avait vingt siècles, un Dieu avait remplacé les antiques présences. Les chapelles avaient conservé les emplacements des vieux sanctuaires. On poussait la porte pour trouver le repos de l’ombre. La religion chrétienne laisse le marcheur s’asseoir un instant, sans obligation de professer un mot… En Bretagne le paysage est une ivresse. La chapelle faisait face au ‘rocher de Morgane’, magicienne et sœur du roi Arthur. Coexistaient sur ce fil de falaise un vaisseau chrétien que couvrait le ciel et un chaos de légende que battait la mer. La croix côtoyait la fée…” Et dans l’aber Wrac’h, au calvaire de Notre-Dame-du-Val : “Toujours s’asseoir au pied des croix. Pourquoi ces bornes antiques procuraient-elles le sentiment de la paix ? …Sous la croix, je révisai mes vues. Ce calvaire n’avait peut-être pas tué le menhir. Peut-être l’avait-il réinventé. Et si le catholicisme celtique, au lieu d’avoir écrasé les paganismes de la bruyère, les avait absorbés pour les repenser ? La fée avait certes reculé devant la croix. Mais son retrait exprimait autre chose qu’un remplacement. C’était peut-être une trajectoire profonde. Elle menait de l’élémentaire au complexe, du mythologique au religieux, de l’unité à la trinité… Le menhir disait : ‘Je suis là, seul debout, pur autel du grand Tout’. Le calvaire répondait : ‘Nous sommes trois qui ne faisons qu’Un’.”

Ailleurs cependant, brièvement, il arrive à Tesson de parler une autre langue étrangement banale : celle d'une christianophobie contemporaine qui lui va mal. Par exemple : “Dans la calcination du désert naissent les dieux uniques. Sur les mers de brisants, les dragons et les fées. Le monothéisme descend du soleil. Les légendes montent de la brume…” Pourtant Tesson a vu à l’extrême Occident les îles-pitons des Skellig, en Irlande, monde de brisants et de brumes où les moines celtes du VIe siècle adoraient fougueusement le Dieu unique !  Autre exemple de bouffée christianophobe : “Pour peu qu’on décrétât qu’il y avait un Dieu, on émettait l’idée que Dieu était plus précieux que le monde, extérieur à lui, et qu’on pouvait donc blesser le monde sans s’en prendre directement à Dieu. Alors, zigouiller les bêtes, égorger les moutons, saloper les marais et cracher sur les combes blessaient la créature mais pas le créateur…” Attribuer la responsabilité de l’abattage industriel et de l’empoisonnement des sols à la Révélation chrétienne est une indéfendable rengaine idéologique. Je ne peux que suggérer à Tesson de lire l’encyclique Laudato Si’ : texte catholique qui fait loi, qui enterre cette fausse idée de la foi chrétienne – et qui restaure la véritable vision christologique et eschatologique du monde.

En effet Laudato Si’ n’invente rien : ce n’est pas un virage opportuniste du catholicisme. Cet enseignement d’un pape du XXIe siècle remet en lumière l’équilibre surnaturel de la pensée catholique, occulté depuis le XIXe siècle au profit du ravage de la planète par le productivisme dont une bourgeoisie dite catholique fait – encore aujourd'hui et malgré le pape – partie intégrante. Refermant la néfaste parenthèse de cette idéologie bourgeoise, Laudato Si’ est la vraie voix du catholicisme : celui qu’exprimait par exemple, une abbesse bénédictine du XIIe siècle, sainte Hildegarde de Bingen. Proclamée docteur de l’Eglise par Benoît XVI en 2012, elle insiste (Livre des œuvres divines) sur l’unité de l’homme et du reste de la création sous l’action permanente du Créateur : “Dieu fit les éléments du monde, et ceux-ci sont en l’homme, et l’homme en est constitué. Il s’agit du feu, de l’air, de l’eau et de la terre ; et ces quatre éléments sont si bien mêlés et unis entre eux que nul d’entre eux ne peut être séparé des autres…”  Dans le même livre, Hildegarde montre que le plan de Dieu sur l’homme est un programme de communion : “Le Créateur de la terre fait de l’âme un véritable atelier, elle est pour l’homme l’instrument de toutes ses œuvres. Dieu la crée en conformité avec Lui-même…” Dans Les causes et les remèdes, elle souligne “l’attachement” entre la créature et Dieu : “Quand Il a fait la lumière, qui peut voler partout, Il avait en même temps l’intention de donner à une vie spirituelle – qui est souffle de vie – une masse corporelle, forme tirée du limon de la terre, si bien attachée à l’esprit qu’elle regarderait vers Dieu avec plus de pénétration…” Le Créateur ne se confond pas avec sa création mais Il ne lui est évidemment pas “extérieur”, et Il n’y a évidemment pas inclus l’homme pour la ravager ni la babéliser mais pour “la cultiver” (livre de la Genèse). Car, dit l’abbesse médiévale, “en l’homme l’âme et le corps sont une œuvre unique de double nature… Lorsque l’homme agit avec justesse, les éléments de l’univers suivent aussi de justes voies ; dans le cas contraire, c’est lui qui est dominé par les éléments” (c’est ce qui se passera huit cents ans après Hildegarde, avec le déréglement climatique). J’aimerais que Sylvain Tesson lise Hildegarde de Bingen.

J’aimerais aussi qu’il lise Louis Bouyer (1913-2004) : surtout Les lieux magiques de la légende du Graal – De Brocéliande en Avalon, paru en 1986 chez ŒIL et encore disponible sur le Net via les sites de librairie. Ce très grand théologien catholique y déploie une science étonnante du cycle arthurien. Au passage, il ouvre des horizons singuliers sur la fusion-transposition spirituelle que la foi au Christ apporta aux aspirations des Celtes préchrétiens, comme Tesson en a eu l’intuition (dans son propre livre) sous le calvaire de Notre-Dame-du-Val. Je cite le Graal de Bouyer : dans le cycle arthurien, le Roi méhaigné et la Plaie douloureuse, “ tous ces traits transposés, transfigurés de la sorte en une évocation de l’Evangile rédempteur, ont leurs attaches premières dans les mythes celtiques et plus définiment irlandais, comme l’a magistralement établi Jean Marx… Le chaudron d’immortalité, qui continue de transparaître sous le revêtement postérieur des reliques de la Passion et de la Cène, en est l’attestation irréfutable… L’essentiel est dans ce roi chrétien (Arthur) devenu le symbole vivant de l’espérance invincible d’un peuple nouvellement converti, le peuple des Bretons, mais pour subir presque aussitôt l’épreuve de l’invasion, de la défaite et de la dispersion, et il va de ce fait précipiter sur lui-même tous les thèmes mythiques de la royauté des anciens Celtes. Réanimés et portés à l’incandescence par le rapprochement du roi et du mage, du sage (Merlin), également celtique et encore plus fabuleux, ces thèmes pourront facilement recevoir un sens chrétien dans la poésie, devenue prophétique, à la manière biblique-évangélique des bardes convertis.”

Cette métamorphose, explique Bouyer, entraînera celle des grands symboles primitifs : la forêt, la source, le lac "en viendront à signifier, non plus les renaissances perpétuelles d’une vie  qui ne se renouvelle dans la mort que pour y tendre à nouveau, mais l’espoir d’une vie déchue dès son origine d’atteindre enfin, à travers cette mort, l’immortalité. Car l’amour divin, christique, immolé, seul plus fort que la mort, se saisit alors de cet autre amour  qui, par la convoitise, ne tendait qu’à la mort, pour le rectifier, le refondre, dans la mort même.”

Bouyer dit aussi, avec Tolkien qu’il a bien connu : “La reprise des figures mythiques, c’est ce que nous voyons par excellence dans la Quête du Graal. S’emparant de personnages humains, de leurs destins jugés exemplaires, dans le roman chrétien le mythe refait surface. Mais ce n’est plus pour figurer l’éternel retour, l’Odyssée de ces dieux naturels, dieux tombés qui ne se relèvent que pour retomber à nouveau. Il narre maintenant notre Enéide spirituelle : la transplantation finale de l’homme déchu en ce foyer surnaturel de la maison céleste, où le Père à jamais l’attend, d’où le Fils est venu le chercher et où l’Esprit, avec le Fils, dans le Fils, le, ramènera… Loin de généraliser les figures (du cycle) en les dépersonnalisant, comme c’était la tendance du mythe originel, il ne leur confère une nouvelle universalité qu’en les douant d’une capacité inépuisable de se personnaliser en chaque destin particulier. D’où la tendance du mythe ainsi renouvelé à s’enraciner au terroir propre de ceux qui le remanient dans un tel esprit. Brocéliande avec Merlin s’implante en l’Argoat, et l’Avalon d’Arthur devient l’île lacustre de Glastonbury...”

Oui : lire Avec les fées peut mener très loin.

 

 

 

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Marche des Veilleurs : la feuille de route

Ce soir : Charron (Charente-Maritime)

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 Jour par jour :

 

 

13 août : Charron, place de l'église

14 août : Luçon, place Sochet des Touches

15 août : La Faute, en face du casino

16 août: La Tranche, base nautique

17 août : Jard, maison de Clemenceau, boulevard de l’Océan à St-Vincent-sur-Jard

18 août : Les Sables d'Olonne, place du Palais de justice

19 août : Brétignolles, La Parée, devant la plage

20 août : Saint-Gilles-Croix-de-Vie, quai du Port Fidèle, au pied de la statue

21 août : Challans

22 août : Bourgneuf, place du Marais

23 août : Pornic, la Ria

24 août : Saint-Michel-Chef-Chef, Tharon-Plage, avenue Ernest Chevrier côté mer

25 août : Saint-Nazaire, devant la préfecture

26 août : Paimboeuf, esplanade des Canons

27 août : Couëron, halle Tréfimétaux, quai Emile Paraf

28 août : Nantes, cour des Cinquante Otages

29 août : Sartrouville, lieu à venir

30 août : Bondy, lieu à venir

31 août : Paris, 17h30 à la Défense / 21h30 place de la Concorde.

 

 

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13/08/2013 | Lien permanent

RCF-Vendée propose cette lecture d'été (historique, écologique et spirituelle)

RCF : "Patrice de Plunkett est l'invité d'Antoine Bellier, il nous présente son livre Les Romans du Mont St Michel aux éditions du Rocher... " http://podcast.rcf.fr/emission/141346/402207


 

 mont saint-michel, histoire, moyen-âge, moines, christianisme, catholiques


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31/07/2012 | Lien permanent

La crise catholique : conférences-débat en septembre

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À propos des tumultes actuels et des manoeuvres analysées par mon livre, je serai en conférence-débat :

► le 20 septembre dans le Nord à l'abbaye du Mont-des-Cats, 15 h

► le 24 septembre à Rennes (Bibliothèque diocésaine), 20h30

Les précisions seront indiquées bientôt.

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01/09/2018 | Lien permanent

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