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17/11/2014

Europe c/ Russie : voici l'ère des bobos belliqueux

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C'est une série télé en tournage,

et ce sera diffusé par Arte (coproductrice) en 2015 : 


 

Ce feuilleton télévisé en dix épisodes, qualifié « d'ambitieuse série d'anticipation géopolitique », s'intitule Occupied* et raconte l'occupation de la Norvège par les Russes. Le plus fort est que, selon le scénario, cette invasion russe se produit « sans résistance de la part de l'UE dont la Norvège ne fait pas partie » ! Manière de dire : si l'UE-OTAN avait déclaré la guerre à la Russie en 2014  pour l'Ukraine (« pays d'Europe ») au lieu de se coucher (« comme à Munich en 1938 »), Adolf Poutine n'aurait pu envahir un « autre » pays d'Europe, selon son plan – bien connu – de conquête du monde.

Le tournage de cette absurdité en Norvège, à grands frais, a commencé au moment où s'ouvrait le G20 de Brisbane : occasion, pour M. Hollande, de s'asseoir devant M. Poutine sans lui serrer la main ; et, pour les médias occidentaux, de continuer leurs éditoriaux de guerre sans tenir compte des avertissements de MM. Gorbatchev et Kissinger.

L'ex-secrétaire d'Etat américain (fin politique) et l'ex-numéro 1 soviétique (pro-occidental à l'origine) sont en effet d'accord : jamais la Russie n'aurait pris l'orientation actuelle si Washington, avec Bruxelles dans son sillage, avait tenu la promesse faite après la chute de l'URSS : ne pas étendre l'OTAN aux pays de l'ex-pacte de Varsovie, puisque « la Russie cessait d'être un adversaire » (dixit « l'acte fondateur » du sommet américano-russe de Paris en 1997)...

subordination-OTAN-UE-300x214.jpgMais Washington a renié sa parole en otanisant dès 1999 la Pologne, la Hongrie et la Tchéquie, et en annonçant le déploiement de missiles dans ces pays. Allaient suivre la Roumanie, la Bulgarie, les pays baltes et les étranges « partenariats » avec d'ex-républiques soviétiques musulmanes... Cette extension de l'OTAN vers les frontières russes ne pouvait qu'être perçue comme une menace par la Russie. Et l'identification de l'UE à l'OTAN (affichée par Washington) ne pouvait que gâcher les relations euro-russes, alors que l'intérêt économique et politique de l'Europe eût été de s'entendre avec Moscou.

Il est de bon ton, chez nos éditorialistes, de rendre rétrospectivement hommage à Boris Eltsine, qui était au Kremlin quand les groupes occidentaux (en accord avec les oligarques locaux) dépeçaient l'économie russe. Nos éditorialistes sont amnésiques. Rappelons-leur ce qu'Eltsine lui-même disait dès 1994, quand les Occidentaux s'apprêtaient à renier leur engagement de paix :

« Notre attitude vis-à-vis des plans d’élargissement de l’OTAN, et notamment de la possibilité que les infrastructures progressent vers l’Est, demeure et demeurera invariablement négative. Les arguments du type: l’élargissement n’est dirigé contre aucun Etat et constitue un pas vers la création d’une Europe unifiée, ne résistent pas à la critique. Il s’agit d’une décision dont les conséquences détermineront la configuration européenne pour les années à venir. Elle peut conduire à un glissement vers la détérioration de la confiance entre la Russie et les pays occidentaux. »***

Ce « glissement vers la détérioration de confiance » s'est produit. Il donne le résultat que nous constatons aujourd'hui. Ayant tout fait depuis 1999 pour encercler la Russie et la pousser à réagir, les Occidentaux sont mal venus de crier à la « menace russe » en 2014.

D'autant que la politique de M. Poutine envers Kiev n'a rien à voir avec une menace envers l'UE, pour deux raisons : 1. Kiev ne fait pas partie de l'UE ; 2. L'importance géopolitique de l'Ukraine pour la Russie (et l'importance économique de la Russie pour l'Ukraine) font de leurs relations un domaine très particulier, d'une autre nature que les relations euro-russes.

L'idée d'une guerre de la Russie contre l'UE ne correspond à aucune réalité. C'est sans doute la raison pour laquelle des bobos de studios tournent une série télé montrant l'invasion d'un pays d'Europe occidentale par les Russes... Ainsi ce qui n'existe pas dans le réel existera dans le virtuel, qui est, dans nos esprits, plus réel que le réel. Comme l'écrivait Jacques Ellul dans Le Bluff technologique** : « la télévision constitue un écran entre le réel et nous, alors que le spectateur croit que la télévision est l'écran sur lequel se projette le réel. »

 

__________

* Titre en anglais : le globish  est de rigueur pour une série germano-franco-norvégienne.

** Hachette 1988. Ellul ajoute : « Cet automatisme produit de l'extérieur exprime le désengagement envers le réel, compensé bien évidemment par l'engagement pour l'irréel, qu'induit la télévision. »

*** Sommet de l'OSCE, Budapest, 5/12/1994.

 

Commentaires

1997 ET 2014

> Donc : en 1997 Washington annonce que la Russie n'est plus un adversaire, tout en organisant une implantation agressive de l'OTAN contre la Russie.
Et en 2014 le même Washington et ses larbins d'UE accusent Poutine de "dire une chose
et en faire une autre" ??????
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Écrit par : A. Ancelin / | 17/11/2014

ELTSINE

-Merci pour le rappel des propos de B. Elstine, on en fera bon usage!

-Euh, au fait, un pays faisant, lui, partie de l'UE et partiellement occupé par un voisin qui y pratique une politique de peuplement, ça ne vous dit rien? Il est vrai que le voisin fait partie de l'OTAN, alors on n'en fait pas un drame.

Le pays c'est Chypre.
Encore de l'objectivité!
______

Écrit par : Pierre Huet / | 17/11/2014

REMEMBER CUBA

> Le parallèle avec Cuba me semble assez éclairant... Les US ne supportaient pas l'idée d'avoir des missiles si proches braqués sur eux. La réaction d'aujourd'hui de la Russie est-elle vraiment si surprenante ?
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Écrit par : Vieil Imbécile / | 17/11/2014

(@PH)

> et merci aussi pour ce rappel sur Chypre.
On pourrait ouvrir le débat sur les questions :
La Turquie est-elle plus européenne que la Russie ?
Les intérêts européens sont-ils de se tourner plus vers la Turquie ou vers la Russie ?
et symétriquement, les intérêts américains sont-ils de se tourner plus vers la Turquie ou vers la Russie ?
et en corollaire, l'UE joue-t-elle pour elle ou pour son "allié" ? Sont-ce les européens ou l'OTAN (et son principal fournisseur d'armes) qui dirigent la politique extérieure de l'UE ?
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Écrit par : franz / | 17/11/2014

@ franz

> On dirait que vous avez une petite idée sur les réponses à ces question. Non?
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Écrit par : Pierre Huet / | 17/11/2014

FICTIONS

> Le voisinage avec la Russie peut parfois être "encombrant" et nécessite de la prudence. Tout le contraire, en somme, des postures agressives adoptées par l'UE (enfin, l'OTAN, on ne voit guère la limite, hélas).
Autant il est compréhensible que les pays baltes ou la Pologne soient parfois inquiets, autant il est absurde de leur part (ou de la part de leurs gouvernements) de pousser des cris belliqueux. Ces pays auraient tout intérêt à travailler à l'apaisement : où l'on voit que les gouvernants, et parfois les opinions, lorsqu'elles sont "travaillées", n'œuvrent pas beaucoup pour les intérêts de leurs pays...
Quant à cette fiction germano-franco-norvégienne, à en croire le résumé, c'est précisément un exemple de "travail" néfaste des opinions.
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Écrit par : Sven Laval / | 17/11/2014

IRONIQUE

> Suite de mon précédent commentaire (esprit de l'escalier, pardon) : la grosse presse joue souvent sur des sentiments nationaux, comme les mauvais souvenirs liés aux relations avec la Russie. Dans ce cas, il est quand même assez ironique de voir des Allemands coproduire une fiction évoquant une occupation de la Norvège...

Sven Laval


[ PP à SL - Il y a autant de bonne conscience amnésique dans le caractère allemand, que de mauvaise conscience hypermnésique dans le caractère français. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Sven Laval / | 17/11/2014

ENCERCLEMENTS

> Alors que le Pacte de Varsovie n'existe plus, on noue des alliances tout autour de la Russie et on s'étonne ensuite de la détérioration des relations internationales.
Cela rappelle autre chose :
en 1890, Guillaume II rejette l'alliance avec la Russie car il cherche à se rapprocher de Londres (avec qui St-Pétersbourg était en rivalité en Asie)
Se retrouvant toute seule, la Russie se rapproche de l'autre pays isolé, la France, et signe avec elle une convention militaire ("l'alliance franco-russe") pendant que le rapprochement de l'Allemagne avec la Grande-Bretagne échoue complètement.
Du coup, l'Allemagne se retrouve entre la France et la Russie et hurle à l'encerclement, au "complot sournois des Welches contre la nation allemande" etc etc
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Écrit par : E Levavasseur / | 18/11/2014

FOLAMOUR

> Incroyable cette nouvelle !
À l'époque des SS 20, je faisais mon service militaire où on nous préparait à la guerre avec l'URSS. Pourtant, on ne tournait pas des sujets aussi grossiers.
L'Occident est devenu fou !
Nous sommes dirigés par le général fou de "Docteur Folamour" !
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Écrit par : Guadet / | 18/11/2014

ARTE

> Arte jette le masque.
J'ai souvent remarqué le caractère biaisé de leurs émissions soi-disant "culturelles", mais je ne pensais pas qu'ils iraient jusque là.
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Écrit par : Guadet / | 18/11/2014

PROPAGANDE

> Cela fait un moment que je considère Arte comme une chaîne pouvant user de propagande... c'est confirmé.
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Écrit par : Xavier / | 18/11/2014

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