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22/04/2013

Mgr Romero : assassiné en 1980 par l'extrême droite pendant qu'il célébrait la messe, l'archevêque martyr du Salvador va être béatifié

mgr romero

Annoncée par Mgr Vincenzo Paglia (promoteur de la cause et président du Conseil pontifical de la famille), cette décision est l'un des premiers actes du pape argentin :

 


La béatification de Mgr Óscar Arnulfo Romero y Galdámez, archevêque martyr, sera un symbole éclatant dans le monde du XXIe siècle livré aux fureurs de l'argent.

L'archevêque fut en effet assassiné sur ordre de l'oligarchie armée par la CIA, dans le contexte d'une effroyable guerre civile contre le peuple salvadorien : 75 000 morts en douze ans, dans des carnages comme celui du bourg d'El Mozote (les hommes et les garçons enfermés dans l'église, qu'on incendie ; les femmes et les filles violées puis abattues). Fort classique dans sa foi [1] et hostile au christo-marxisme, Mgr Romero était engagé de toutes ses forces aux côtés des pauvres et résistait au régime salvadorien et à ses Escadrons de la mort, dirigés par le sanguinaire Roberto d'Aubuisson. Conséquences de cette attitude de l'Eglise, expliquées par l'archevêque en 1979 : « En moins de trois ans, plus de cinquante prêtres ont été attaqués, menacés ou calomniés. Six qui ont été assassinés méritent d'être considérés comme martyrs. Certains ont été torturés, d'autres expulsés du pays. Des sœurs ont été également persécutées. La radio de l'archidiocèse, des institution éducatives catholiques ou d'inspiration chrétienne ont été attaquées, menacées, intimidées ou ont subi des attentats à l'explosif. Plusieurs communautés paroissiales ont fait l'objet de "raids". Si tout cela s'est produit à l'encontre des personnes représentantes de l'Église, on peut imaginer ce qui a été fait aux chrétiens ordinaires, aux paysans, aux catéchistes, aux délégués et aux communautés de base… Mais il est important de remarquer pourquoi l'Église est persécutée : ce ne sont pas tous les prêtres ou n'importe lequel. Ce ne sont pas toutes les institutions ou n'importe laquelle. Est attaquée ou persécutée cette partie de l'Église qui s'est mise aux côtés du peuple et se pose en défenseur du peuple. Ici aussi, se trouve la même clé d'explication de la persécution de l'Église : les pauvres. »

Au début de 1980, Mgr Romero écrit au président américain Carter en lui demandant de supprimer l'aide US à l'armée salvadorienne de guerre civile (15 milions de dollars par an), « parce que cette aide sert à réprimer mon peuple ». Le 23 mars 1980, à l'occasion d'un sermon à San Salvador, Mgr Romero appelle l'armée à cesser d'obéir à l'oligarchie : « Un soldat n'est pas pas obligé d'obéir à un ordre qui va contre la loi de Dieu. Une loi immorale, personne ne doit la respecter. Il est temps de revenir à votre conscience et d'obéir à votre conscience plutôt qu'à l'ordre du péché. Au nom de Dieu, au nom de ce peuple souffrant, dont les lamentations montent jusqu'au ciel et sont chaque jour plus fortes, je vous prie, je vous supplie, je vous l'ordonne, au nom de Dieu : arrêtez la répression ! » Le lendemain 24 mars, alors que l'archevêque célèbre la messe dans la chapelle d'un hôpital, il est assassiné d'un coup de fusil. Le tueur est un officier d'aviation membre des Escadrons de la mort.

 << Les funérailles de Mgr Romero sont accompagnées par 350 000 personnes à San Salvador. Trois cents prêtres et trente évêques du monde entier y assistent. Tandis que la messe commence, une bombe éclate et des coups de feu provoquent un début de panique parmi la foule. Une cinquantaine de personnes (dont de nombreux enfants) meurent piétinés, tandis qu'on relève une dizaine de corps tués par balle. Le corps de Mgr Romero est enterré à la hâte dans une tombe située dans le transept droit de la basilique du Sacré-Cœur … >>

Le procès en béatification de Mgr Romero est ouvert au Vatican dans les années qui suivent et confié à Mgr Paglia. Mais il est bloqué par des intrigues politiques. La mauvaise volonté de certains monsignori – agents des salons romains les plus rances – persistera après la chute du régime d'extrême droite salvadorien. En 2007, lorsque Benoît XVI se déclarera « personnellement favorable » à la béatification de Mgr Romero, une révoltante campagne de calomnies contre la mémoire du martyr sera lancée sur le web. Le dossier Romero sera de nouveau mis en dessous de la pile...

Le monde catholique latino-américain comptait fermement que le pape François rende justice au martyr. La décision ne s'est pas fait attendre.

D'autres béatifications devraient suivre : notamment celle de l'évêque argentin de La Rioja, Mgr Angelelli, assassiné par la junte en 1976. Au trentième anniversaire de cette mort, le cardinal Bergoglio est allé à La Rioja prononcer un hommage retentissant à cet évêque et aux prêtres tués avant lui :

« ...Tel est le dialogue d'un pasteur avec son peuple que j'avais découvert ici à La Rioja, un dialogue chaque jour plus persécuté, une Eglise martyrisée, une Eglise répandant son sang comme Wenceslao [Pedernera], Gabriel [Longueville], Carlos [Murias], témoins de la foi qu'ils proclamaient et qui offrirent leur sang pour l'Eglise, pour le peuple de Dieu, pour l'annonce de l'Evangile, et qui finalement s'incarne dans son pasteur. Il fut un témoin de la foi en versant son sang. Ce jour-là, sans doute, quelqu'un [2] fut très heureux, croyant en son triomphe, mais c'était une déroute... Le sang de ces hommes qui offrirent leur vie pour l'annonce de l'Evangile est un véritable triomphe qui, aujourd'hui, plaide pour la vie, la vie de cette Eglise de La Rioja qui en est aujourd'hui dépositaire. La mémoire de Wenceslao, Carlos, Gabriel et de l'évêque Enrique n'est pas un simple souvenir dans une vitrine ; c'est un défi qui nous est lancé aujourd'hui, à regarder le chemin de ces hommes qui n'avaient d'yeux que pour l'Evangile, des hommes qui avaient librement accueilli l'Evangile. C'est ce que la patrie attend de nous aujourd'hui, d'être des hommes et des femmes libres de tout préjugé, de tout compromis, de toute ambition, de toute idéologie, des hommes et des femmes de l'Evangile. Rien que l'Evangile, auquel il n'y a pas d'autre commentaire à ajouter que celui qu'apportèrent Wenceslao, Carlos, Gabriel et l'évêque : le commentaire de leur propre vie. >>

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[1] Il portait un cilice et demandait la canonisation de Josémaria Escriva de Balaguer.

[2] Satan, auquel le pape François fait souvent allusion.


 

Romero.jpg

 Mgr Romero.


Commentaires

Prière pour la béatification de Mgr Óscar Romero

Mon Dieu, Père de tous les hommes, qui nous as donné en Ton Serviteur Oscar Romero un pasteur fidèle et zélé, aimant avec ferveur Ton Église et en elle, de façon particulière, les pauvres et les plus nécessiteux, permets-nous de savoir vivre conformément à l’Évangile de Ton Fils Jésus, daigne glorifier Ton Serviteur Oscar et accorde-moi, par son intercession, la faveur que je Te demande..... Ainsi soit-il.

Notre Père, Je Vous salue Marie, Gloire au Père.

Prière de dévotion privée traduite de l’espagnol.
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Écrit par : churubusco / | 22/04/2013

Oración para la beatificación
de Monseñor Óscar Romero

Dios Padre de todos los hombres,
que nos diste en tu Siervo Oscar Romero,
a un Pastor fiel y celoso,
fervoroso amante de tu iglesia
y en ella de modo especial,
de los pobres y de los más necesitados,
concédenos que nosotros sepamos vivir
conforme al Evangelio de tu Hijo Jesús,
Dígnate glorificar a tu Siervo Oscar
y concédeme por su intercesión
el favor que te pido... Así sea.


Padre Nuestro, Ave María y Gloría.
______

Écrit par : C. | 22/04/2013

JEANNE D'ARC ET Mgr ROMERO

> D'après Aymeric Christensen :
« La question débattue au sein de la Congrégation pour la cause des saints, et qui ralentissait le procès, était de savoir si l'assassinat de Romero en mars 1980 pouvait vraiment être considéré comme un « martyre », ou s'il était d'abord dû à des motifs politiques. » (La Croix, 22/04/2013)
Ce questionnement est absurde à souhait. Les premiers chrétiens ont été persécutés par haine de la foi, mais aussi pour des raisons politiques. Refuser de sacrifier aux divinités païennes relevait inséparablement des deux registres : fidélité à Dieu et mise en cause de l'ordre politique païen. De même, la foi en Dieu impliquait pour Roméro d'entrer en dissidence contre l'oligarchie. Comme il l'exprime si bien : « Un soldat n'est pas obligé d'obéir à un ordre qui va contre la loi de Dieu. »
Il faut avoir une vision bien étriquée de ce qu'est la foi chrétienne pour oser contester la qualité de martyr à Mgr Romero.

Blaise


[ PP à B. :
- Cette fausse question relevait du prétexte plus que d'autre chose...
- On atteint le paradoxe quand on voit, en France, des vénérateurs de Jeanne d'Arc (exécutée pour raison politique) reprocher à Mgr Romero d'avoir été tué "pour raison politique". ]

réponse au commentaire

Écrit par : Blaise / | 22/04/2013

ENFIN

> un seul mot : ENFIN !!!!
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Écrit par : Geneviève / | 23/04/2013

A PEINE CROYABLE

> Les ennemis de Mgr Romero. Il en existe encore, je le lis çà et là. A peine croyable. Ennemis d'un évêque assassiné à l'autel ! Nostalgiques du tueur d'Aubuisson, l'abominable "major Bob", organisateur de massacres genre Oradour !
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Écrit par : Mathias Kop / | 23/04/2013

LA CONGREGATION

> l'Eglise, dans son immense sagesse, a toujours étudié avec une prudence scrupuleuse les dossiers de béatification. Et c'est très bien comme celà. Que Mgr Roméro rejoigne Thomas More sur les autels, ce serait un signe très beau et encourageant mais laissons à la congrégation ad hoc le soin d'en juger.
Ainsi, pour répondre à Blaise, je ne pense pas qu'il y ait de questionnement absurde. Il y a, au contraire, la volonté de rendre une décision au dessus de tout soupçon avec les arguments les plus clairs et les moins contestables. les laïcs et les amis de Mgr Roméro sont dans leur rôle d'aiguillon et la congrégation est dans le sien. c'est bien pour celà qu'existe, il me semble, ce que l'on appelle l'avocat du diable.
En attendant, celà ne nous empêche pas d'admirer les faits et la geste de la vie de cet évêque.
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Écrit par : gdecock / | 23/04/2013

PAS DE CONTRADICTION

> Il faut saisir l'occasion d'expliquer que l'Eglise est UNE, qu'il n'y a pas de contradiction entre la sainteté d'un Romero et celle d'un Balaguer, que le christo-marxisme n'est pas la vraie théologie de la Libération.

@ Blaise et PP
de doctes historiens vous expliquent qu'il n'y a jamais eu de martyrs chrétiens sous l'empire romain car la notion de religion des Romains étant différente de celle des chrétiens (ce qui est vrai), il n'y a donc jamais eu de persécution "religieuse" à proprement parler.
Vous voyez le tour de passe-passe car la conclusion qu'on tire c'est : "donc il n'y pas eu de persécutions religieuses, il ne s'est rien passé. Et l'Eglise raconte donc des salades depuis 2000 ans avec ses histoires de martyrs".
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Écrit par : E Levavasseur / | 23/04/2013

à g decock

> je vois ce que vous voulez dire et je suis bien sûr d'accord. Mais il y a eu un lobbying nord-américain intense pour faire retarder la béatification de l'archevêque qui avait osé mettre
en cause le soutien de Washington à la politique sanglante des d'Aubuisson et compagnie.
Tout Rome le sait. Les Yankees abusent. Ils abusent envers l'Eglise. Parfois même ils abusent un peu "dans" l'Eglise.
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Écrit par : Edmond Campion / | 23/04/2013

BENOIT XVI

> A propos des « blocages » au sein de la Congrégation pour la cause des saints, Benoît XVI déclarait :
« Le problème était qu'un camp politique voulait le prendre à tort comme porte-drapeau, comme figure emblématique. Comment mettre en lumière de façon juste sa figure, en la préservant de ces tentatives d'instrumentalisation? Tel est le problème. » ("Entretien du Pape avec les journalistes pendant le vol vers le Brésil ", 09/05/2007)
La question pertinente n’est donc pas de savoir si Oscar Romero a été tué « par haine de la foi » ou pour des motifs politiques, mais comment le dégager de l’opposition factice entre guérilleros marxistes et atlantistes partisans de la répression. Je reste malgré tout surpris de la lenteur avec laquelle vont les choses : l’archevêque du Salvador, c’est bien connu, était loin de sympathiser avec le marxisme-léninisme et sa variante christo-marxiste. Je crains fort, par conséquent, que les membres de la congrégation n’aient pas tous eu la même lucidité que Benoît XVI ; la polarisation idéologique fait parfois des dégâts considérables dans les esprits.

Blaise


[ PP à B. :
- "Comment mettre en lumière de façon juste sa figure, en la préservant de ces tentatives d'instrumentalisation? Tel est le problème..." Ce problème ne devait pas être si difficile à résoudre, puisque le pape François a trouvé la solution.
- Il y a eu "sabotage" de la cause Romero pendant de longues années; C'était à mettre au compte des dysfonctionnements de services du Vatican, en proie (après la mort de Jean-Paul II) à des luttes de fractions parmi lesquelles un clan d'ultra-droite a sévi. On en a eu une autre preuve avec la campagne d'enfumage autour des pourparlers Rome-Ecône : campagne par laquelle le clan en question a désinformé des journaux français, en relançant continuellement
la rumeur (absurde) selon laquelle Benoît XVI était prêt à toutes les concessions... Ceux qui connaissaient le pape Ratzinger savaient que ce fléchissement était impensable. Donc le clan ultra mentait sur toute la ligne, et les journalistes parisiens auraient mieux fait de ne pas blanchir sa fausse monnaie.
Notre blog et la revue 'Kephas' n'avaient cessé de protester contre l'enfumage - et de souligner que jamais le pape ne braderait Vatican II. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Blaise / | 23/04/2013

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