La presse donne des ordres au conclave

 

Dérisoires injonctions :

"Le successeur de Benoît XVI devra tenter de convaincre, au-delà du coeur des fidèles, les croyants qui se sont éloignés de l'Eglise. Autrement dit, savoir se mettre au diapason des sociétés contemporaines, répondre au désir croissant d'autonomie et d'individualisation, affronter la sécularisation, trouver des réponses plus attentives aux évolutions de la morale familiale et sexuelle..." (éditorial du Monde, 1er mars). Autrement dit : les religions ne sont pas une question religieuse, mais une question de conformité à l'idéologie de la société occidentale.

On ne peut pas mieux se tromper ni d'une façon plus péremptoire. En effet, le problème de la religion catholique en Europe n'est pas une question d'ajustement à la société ambiante. C'est une question... de foi.

Si des fidèles se sont éloignés de l'Eglise, ce n'est pas parce que ses positions contredisaient le climat de la société : c'est parce qu'ils ne partageaient plus la foi qui inspire les positions de l'Eglise.

Si Le Monde avait raison, on ne verrait pas des femmes et des hommes rester lucidement (voire douloureusement) dans l'Eglise bien que les circonstances de leur vie personnelle, approuvées par la société ambiante, ne réalisent pas les souhaits de la morale catholique.

Ou comment Le Monde expliquerait-il la progression – chez de jeunes adultes français – d'un protestantisme évangélique qui partage nombre de positions catholiques envers la "sécularisation" et les "évolutions de la morale familiale et sexuelle" ? Parce que le protestantisme correspondrait mieux au "désir croissant d'autonomie et d'individualisation" ? Fausse impression ! Certes les communautés évangéliques fonctionnent hors du climat hiérarchique qui est celui de l'Eglise romaine ; cependant l'un de mes amis évangéliques disait il y a peu : "tous nos responsables sont élus, mais nous ne nous prenons pas pour une démocratie." Pourquoi ? Parce que la foi transcende les individus : la référence objective en dernière instance est la Parole de Dieu, alors que la démocratie rejette tout ce qui ne vient pas du suffrage.

Attendons-nous à lire et entendre un peu partout, d'ici à la fin du conclave, des oukazes comme ceux du Monde. ils n'ont rien à voir avec la finalité de l'Eglise, qui n'est pas l'opportunisme sociologique mais la foi. La panne du catholicisme en Europe s'explique par le collapsus de la foi (celui-ci a de nombreuses causes, qui ne sont pas ce que prétend Le Monde ni ce que prétend Mgr Fellay). L'avenir du catholicisme en Europe est dans l'évangélisation, c'est-à-dire la diffusion de la foi par le corps vivant de la communauté des croyants – au rebours de cet individualisme ultralibéral qui fait encore saliver les journalistes, malgré les résultats catastrophiques de l'ultralibéralisme.