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16/10/2012

Libéralisme-catholicisme : aux USA, un exemple-type de la confusion mentale

 Justifier au nom du catholicisme la pensée christophobe d'Ayn Rand : c'est la même démarche que le christo-marxisme d'hier, mais à l'envers. Système luciférien, le randisme est-il devenu l'horizon incontournable de la droite américaine ?

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 À Manhattan, manifestation "mariale" (en fait pro-Romney) de catholiques de droite : ils sont rassemblés autour de la statue d'Atlas (emblème notoire de l'idéologie christophobe d'Ayn Rand), bien visible à l'arrière-plan.



De notre correspondant à Washington

<< Think-tank "libéral-conservateur" créé en 1990 et basé à Grand Rapids (Michigan), avec bureau à Rome, l'Acton Institute vient de publier un article destiné à aider les chrétiens à "comprendre" Ayn Rand : 

http://www.acton.org/pub/commentary/2011/05/04/understanding-rand

 « Rand’s atheism, materialism, and reduction of the human being’s value to economic productivity are all severely problematic for a variety of good reasons. But one might compare her political and economic thought to chemotherapy, which is basically a form of poison designed to achieve a positive outcome. You don’t want to take it if you can avoid it. You hope the circumstances in which you would use it don’t arise. However, in an age of statism, it is a message that may need to be heard. Not so much in the hopes that it will prevail as much as to see it arrest movement in a particular direction which will end badly if it continues. » [traduction ci-dessous]

Le fondateur de l'Acton Institute est le P. Robert Sirico, Italien de New York qui a fait ses études en Californie dans les années 1970, où il fut leader étudiant d'extrême gauche (et prêcheur pentecôtiste à ses heures). Après ce qu'il nomme étrangement une "double conversion", à son Eglise d'origine et à l'économie de marché, il est devenu prêtre, et s'est consacré à la promotion du "free market'' confondu avec la « défense des valeurs morales et familiales''.

Son dernier ouvrage, Defending the Free Market: The Moral Case for a Free Economy, est paru en 2012. Lors de sa présentation à la Heritage Foundation (énorme think-tank conservateur*), en juillet, il a mis dans le même sac Al-Qaïda, les nazis, Staline et Occupy Wall Street : "tous ont le même but: détruire la libre-entreprise et le capitalisme." A la question: "Mais le pape a critiqué le libéralisme, didn't he ?", il a répondu: "It is not a canonized position. The Church is not a expert in Economy, that is why I feel totally agree with my Church".  >>**

 

 Mon commentaire

La citation de l'Acton Institute (ci-dessus en bleu) est le symétrique exact de ce que disaient les christo-marxistes à propos du marxisme. Traduction :

« L'athéisme et le matérialisme de Rand, sa réduction de la valeur de l'être humain à la productivité économique, sont gravement problématiques pour diverses bonnes raisons. Mais il faut comparer sa pensée économique à la chimiothérapie, qui est à la base une forme de poison conçue pour obtenir un résultat positif. On ne le prend pas si on peut l'éviter. On souhaite que les circonstances où l'on y recourrait ne surviennent pas. Cependant, dans un âge d'étatisme, c'est un message qu'il peut être nécessaire d'écouter. Non pas tant dans l'espoir qu'il vienne à régner, que pour le voir arrêter le mouvement orienté dans une certaine direction qui finira mal s'il continue. »

À un terme près (étatisme au lieu de classe possédante), cet argument est – à l'envers mais mot pour mot celui des dominicains communisants des années 1960, et celui du christo-marxisme des années 1980 : hypocrisie dans les trois premières lignes, sophisme dans les huit lignes suivantes. On ne peut que lui opposer l'argument décisif de Pie XI (parlant du communisme soviétique) dans l'encyclique Divini redemptoris en 1937 : quand un système doctrinal est « intrinsèquement pervers », « on ne peut admettre sur aucun terrain la collaboration avec lui ». Aussi fondamentalement hostile au christianisme que l'était le communisme stalinien, mais avec (en plus) une haine spéciale envers la personne du Christ, le système d'Ayn Rand est intrinsèquement pervers selon le critère de Pie XI. Aucun chrétien catholique ne peut collaborer à la diffusion intellectuelle de ce système.

_________

* C'est la Heritage Foundation qui fabriqua, à la fin des années 1980, la campagne internationale contre les organismes catholiques d'aide aux pauvres d'Amérique latine : notamment en France contre le CCFD.

** Les catholiques ultralibéraux contredisent l'Eglise de plein fouet tout en s'affirmant les plus fidèles amis du pape.

 

Commentaires

POPCORN

> " il a mis dans le même sac Al-Qaïda, les nazis, Staline et Occupy Wall Street : "tous ont le même but: détruire la libre-entreprise et le capitalisme." "
Comment peut-on être niais au point de ne pas voir que l'islamisme est inséparable du capitalisme ? Ousama ben Laden ? L'émir al-Thani ?
Mais non, les têtes de popcorn sont persuadés du contraire. Et ça anime des "instituts", et ça pond des "notes" ! et les salons bien pensants lisent ça religieusement.
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Écrit par : LBH / | 16/10/2012

ETATISME

> "Un âge d'étatisme" ! en 2012 ! après la dérégulation de tout ! mais ce sont des dingues ?
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Écrit par : reymondon / | 16/10/2012

POURQUOI DIABLE

> Pas cliniquement dingues, idéologues, et, en tant que tels, refusant de regarder la réalité.
Mais pourquoi diable faut-il qu'à chaque génération on trouve des chrétiens recherchant leurs outils intellectuels chez les ennemis de la foi en Jésus Christ?
On dira ce qu'on voudra, mais les "réacs" à l'ancienne, qui dénonçaient les méfaits de la loi Le Chapelier, destructrice des corporations, réfléchissaient davantage.

PH


[ De PP à PH - Précurseurs du catholicisme social, les "réacs à l'ancienne" eurent - dès le début, sous Louis-Philippe - les libéraux de droite comme ennemis intellectuels, moraux, spirituels et politiques. Rappelons que le premier acte symbolique de la Monarchie de Juillet fut le massacre des canuts lyonnais au nom de la rentabilité par compression salariale ! (On ne disait pas encore "gain de productivité"). Je me souviens d'avoir appris ça au "cours d'histoire du mouvement ouvrier" quand j'étais élève de première chez les jésuites, en 1963. A cette époque personne n'imaginait une copulation contre-nature entre catholicisme et capitalisme sauvage ! ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Huet / | 16/10/2012

TRICOLORE ET POLYCHROME

> et allez donc !
C'est bien pour ça qu'il ne faut pas abandonner plus longtemps** tout ce qui est patrie, nation, prière pour le pays etc mais en parler ds le sens de ce que dit l'Eglise
En elles-mêmes et à leur niveau, ces choses sont bonnes et constitutives de l'identité de la personne et donc on peut faire du bon travail en s'en servant comme outils pour l'Evangile

** abandonné ds les faits par les chrétiens par peur de se voir reprocher d'être nationalistes (comme si la peur devait diriger le chrétien) mais pas théologiquement car Jean Paul II a bcp parlé de la valeurs chrétienne des peuples, des nations, de la patrie (le caté aussi : "l'amour et le service de la patrie relèvent du devoir de reconnaisance et de la charité article 2239 du caté de l'Eglise catholique) même si c'est moins connu que ce J-P II a écrit sur la famille et donc la personne/la personne donc la famille.
Ce qu'il écrivait sur les nations et ds la continuité de ce qu'il écrivait sur le personne et la famille ; on ne peut pas adhérer à l'un et rejeter ou être indifférent à l'autre "la nation est le prolongement de la famille".
La personne ne peut rien sans la famille (elle n'existerait même pas), que peut la famille sans la nation qui est le terrain où s'exercent ses valeurs à grande échelle au lieu d'être recroquevillée sur elle même (car il peut exister un égoisme familial : "nous, ça va pourquoi ?")
la nation n'existerait même pas sans la famille
idem pour l'humanité qui n'existerait pas sans les nations
le snations sans les familles, les famille sans les personnes
les personnes sans Dieu
Le mot "patrie" porte en lui-même la marque de son origine : le Père
De même que l'écologie n'existe pas sans Dieu, la patrie non plus, la famille non plus, la personne non plus
sans Dieu nous ne sommes pas des personnes mais le fruit du hasard
Engagez-vous, rengagez-vous dans le "pélé pour la France" !
un mouvement tricolore et polychrome, ecclesial pur eau bénite, catholique apostolique romain et on l'espère, saint.
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Écrit par : zorglub / | 16/10/2012

@ LBH

> Le capitalisme aurait beaucoup à apprendre de l'islam. J'ai beaucoup de choses à reprocher au Coran mais ce ne sont pas les préceptes contenus dans le lien ci-dessous qui suscitent le plus mon indignation.
Si vous avez déjà entendu parler des cinq piliers de la finance islamique.
http://www.labanqueislamique.fr/Fonctionnement%20de%20la%20banque%20islamique.htm
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Écrit par : CB / | 16/10/2012

UN PEU LEGER, LE P. SIRICO

> On ne peut que rester bouche-bé devant l’aplomb du P. Robert Sirico. Balayer d’un revers de main toute la réflexion doctrinale élaborée par les papes depuis le XIXe siècle, en réponse aux ravages de la société industrielle, c’est un peu léger ; sans compter que la dénonciation, incessamment répétée par ces mêmes papes, de la liberté et de la finalité humaines telles que la comprennent les libéraux, engage nécessairement le magistère de l’Eglise.
Et que fait-il de ces nombreux chrétiens, dont l’action a été si prégnante dans la vie de l’Eglise, et qui ont combattu le libéralisme par la pensée et par les actes ? Les libéraux catholiques ont toujours été des minoritaires, sans ancrage solide dans une tradition légitime, et en guerre plus ou moins franche avec l’Eglise enseignante. A la prose hallucinée du P. Sirico je préfère de loin relire 'Le Seigneur des Anneaux' du très-catholique Tolkien, au chapitre VIII, Livre VI de la dernière partie significativement intitulée « Le nettoyage de la Comté » : où l’on voit comment les hobbits parviennent à se débarrasser d’un système industriel destructeur de la création.
Et pour aller plus loin que le XIXe siècle, que fait Robert Sirico des Pères de l’Eglise, des Conciles et des papes, dont l’enseignement est difficilement conciliable avec une apologie du capitalisme ?
Enfin, a-t-il oublié qu’à la source de toutes ces positions réitérées, enrichies et même actualisées lorsque surgissaient des questionnements nouveaux, se trouve l’Evangile ? Le Christ n’est pas un expert en économie, sans doute, mais il est une règle vivante que même les libéraux ne peuvent ignorer. Aucune activité humaine n'échappe à l'évaluation morale et au Jugement de Dieu.
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 16/10/2012

SERVITEUR, JAMAIS PREDATEUR

> Ce XXIe siècle ressemble aux siècles précédents. On cherche à changer l’homme, agressé tant dans sa culture que dans sa nature, pour en faire un « homme nouveau ». Nous eûmes le marxisme, le fascisme… Voici le « randisme », à mes yeux avatar post-moderne et rétro-païen du « WASP-riche-donc-béni-de-Dieu/et-que-crève-le-maudit-pauvre ». Voilà la théorie du genre (« gender », le « gendrisme » ?), autre avatar post-moderne et rétro-païen du chaos originel (et enfer éternel ?) : « tous-contre-tous-indifférenciés-et-chacun-pour-sa-pomme (d’Adam) ». Il est évident que ces doctrines sont profondément antichrétiennes. Le christianisme, à la différence de ces monstrueuses idéologies, nous demande d’être serviteur – jamais prédateur – de nos frères et sœurs humains.
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Écrit par : Denis / | 16/10/2012

@ LBH

> L’islamisme, en fin de compte, désigne, dans la mouvance de la Nahda, une tentative de renouvellement de la tradition islamique de la part de certains musulmans, face au défi lancé par le rouleau-compresseur libéral ; mais qui, contrairement à la tendance moderniste au sein de la Nahda, refuse de transiger avec le libéralisme. A part ça, l’islamisme est un mot commode qui recouvre des réalités très diverses.
Pour des yeux extérieurs, avouons-le, l’islamisme est largement un échec : ils se sont embourbés dans le pur et simple antagonisme avec la tradition libérale, sans parvenir à faire droit par exemple, à la liberté religieuse (que les libéraux méconnaissent aussi pour des raisons symétriquement inverses). Leur situation fait furieusement penser à l’intégrisme para-catholique (lefebvristes, sédévacantistes…).
Et le pire c’est que ces mêmes islamistes n’hésitent pas à prendre des positions ouvertement libérales dès qu’il s’agit d’économie et de finance. La contradiction est patente ! comment pourraient-ils être durablement pris au sérieux ?
Je pense que les musulmans gagneraient à s'inspirer de l'expérience de l'Eglise, experte en humanité, qui a su prendre en compte les exigences légitimes de la modernité, sans pour autant céder à l'idéologie libérale, et en restant fidèle à sa propre tradition. Dans cette perspective, une lecture des textes du dernier concile, en particulier les déclarations Dignitatis humanae et Nostra Aetate, serait très profitable aux musulmans eux-mêmes.
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 16/10/2012

LA PHOTO

> Votre photo montre des membres de la [...] , organisation d'origine brésilienne et véritable secte qui parvient à séduire les catholiques de droite, notamment aux Etats-Unis. La [...] a été créée dans les années soixante par des grands propriétaires de latifundia brésiliennes et a rapidement noué des liens avec des réseaux ultralibéraux américains, tout cela au nom de l'anticommunisme.

S.


[ De PP à S. - Je les avais identifiés, bien entendu : mais (connaissant les habitudes de ce type de groupes) je ne publie pas leur nom. Merci en tout cas de confirmer l'inféodation de ces gens à l'ultralibéralisme. Le problème est que ces mêmes gens ne cessent de grenouiller auprès du milieu catholique "traditionnel", lequel cite volontiers leur chef de file intellectuel (je ne le nommerai pas non plus) comme si c'était une référence en ecclésiologie. Ce groupe partage le point de vue du P. Sirico dans le domaine économique. C'est donc l'un des vecteurs - les autres étant hélas nombreux et moins voyants - de la métastase ultralibérale en direction des catholiques. ]

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Écrit par : Sureau / | 16/10/2012

AU VATICAN

> Le personnage auquel PP semble faire allusion "grenouille" aussi auprès du Vatican, et n'est pas sans contacts avec tels monsignori voire prélats de rang plus élevé. Je me suis retrouvé il y a des années à un déjeuner de dix personnes dans un cabinet particulier du Columbus où il figurait, insigne de son groupuscule à la boutonnière, entre deux pères abbés et un cardinal. Il n'a rien dit, mais il était là. Sans doute est-il moins introduit sous Benoît XVI. Et le "moment de grâce" des intégristes au Vatican est bien fini aujourd'hui.
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Écrit par : portapia / | 16/10/2012

@ PP

> En effet, c'est dans le carnet de chants d'un mouvement tradi et monarchiste que j'ai découvert le chant des Canuts !
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Écrit par : Pierre Huet / | 16/10/2012

> http://www.zenit.org/article-32281?l=french
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Écrit par : spooner / | 20/10/2012

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