27/03/2012
Comment ne rien comprendre (du tout) à un voyage papal
Un magazine parisien croit avoir "décrypté" la visite de Benoît XVI à Cuba. Et voici ce que ça donne :
<< ...Pour le clergé catholique, il s'agit de retrouver la place institutionnelle qui était la sienne avant la révolution cubaine de 1959. Et la faiblesse économique actuelle du pays le lui permettrait. "Les Cubains se sont résolus à abandonner les dogmes de l'économie centralisée afin de préserver la survie du parti unique", note Jean-Jacques Kourliandsky. "Le contexte à Cuba est celui d'une ouverture économique à la chinoise, accompagnée d'une fermeté politique". Dans ce cadre, qui mieux que Benoit XVI pour jouer le rôle d'intermédiaire entre l'île communiste et le reste du monde, sans pour autant remettre en cause le parti unique ? La perche tendue par La Havane semble avoir été saisie. >>
Fruit (revendiqué) d'entretiens du journaliste avec deux vaticanologues, ce résumé met totalement à côté de la plaque. Aucun voyage papal n'a jamais eu pour but de faire « retrouver » au clergé une place « institutionnelle », surtout pas en profitant de la « faiblesse économique » du pays. Quant à l'idée que Benoît XVI « joue les VRP » (titre du magazine) en faveur de l'économie de marché, elle manifeste une profonde ignorance des encycliques sociales et des positions de l'Eglise face à la crise actuelle. Qu'il faille aider Cuba à sortir de son impasse, Benoît XVI l'a dit clairement. Mais il a souligné que cette sortie devait se faire dans une direction nouvelle : vers un modèle économique et social qui mette la personne humaine au centre. Chose très étrangère à la société de marché occidentale...
Voilà le problème avec les journalistes français contraints par l'actualité : ils ne peuvent admettre qu'en dernière instance un événement de religion soit... religieux. (Cf. ma note de ce matin chez Atlantico : http://www.atlantico.fr/decryptage/eglise-catholique-beno...). Et ils ramènent tout à des histoires de libéralisation, de marchés et de libre-échange, ce qui appauvrit de façon pathétique leur vision de la marche du monde.
17:47 Publié dans Eglises, Idées, Planète chrétienne, Société, Témoignage évangélique | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : christianisme, catholiques, benoit xvi, cuba
Commentaires
JOURNALISME
> Et pourquoi pas demander une réforme du journalisme à Benoît XVI pendant qu'on y est !
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Écrit par : Arnaud Le Bour / | 27/03/2012
LES CALCULS DES CUBAINS
> J'ai beaucoup aimé votre analyse sur Atlantico. Le pape vient en pèlerin et en pasteur, non en VRP ou en croisé maniant la hache...
Cependant, il faut également être conscient des calculs qui se font à Cuba, comparables avec les manoeuvres de l'URSS moribonde entre un Gorbatchev souhaitant s'appuyer sur l'Eglise orthodoxe pour donner une caution morale à la Perestroïka, et un Alexis II convaincu que l'avenir était du côté du christianisme. Ce qui est heureux, c'est que c'est lui qui a gagné à la fin.
http://www.lerougeetlenoir.org/les-contemplatives/benoit-xvi-en-terre-latine
PJ
[ De PP à PJ - Vous avez raison, mais les calculs de Raul Castro pour sortir de son impasse ne changent rien à la marche du monde... ]
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Écrit par : Pierre Jovanovic / | 28/03/2012
PAS D'ACCORD
> Affirmer qu'« un événement de religion » doive être « religieux », c'est vague, terriblement vague... Qu'est-ce qui est religieux? qu'est-ce qui ne l'est pas? et qu'est-ce qu'une religion ?
Il s'agit en fait, plus sobrement, d'un voyage à visée pastorale, qu'effectue le pape, évêque de Rome, auprès de l'Eglise cubaine.
L'usage du terme « religion » et son champ sémantique est trop lié aux politiques sécularistes des libéraux de tous poils pour pouvoir l'employer tranquillement: La religion « pure » d'un côté, réduite au culte et à la foi « privée » des fidèles; les affaires séculières de l'autre, politiques, économiques.
Je ne comprends pas cette timidité excessive, qui évite de parler d'un « événement d'Eglise ».
BJL
[ De PP à BJL – Ne soyez pas agressif à tort. M'accuser de séparer (« la religion ''pure'' d'un côté, réduite au culte et à la foi ''privée'' des fidèles; les affaires séculières de l'autre, politiques, économiques ») est absurde :
1. j'écris juste le contraire dans cette note : « l'idée que Benoît XVI ''joue les VRP'' (titre du magazine) en faveur de l'économie de marché, manifeste une profonde ignorance des encycliques sociales et des positions de l'Eglise face à la crise actuelle. Qu'il faille aider Cuba à sortir de son impasse, Benoît XVI l'a dit clairement. Mais il a souligné que cette sortie devait se faire dans une direction nouvelle : vers un modèle économique et social qui mette la personne humaine au centre. Chose très étrangère à la société de marché occidentale... ».
2. Et dans la note d'Atlantico (en lien hier sur ma page d'accueil) : « Le spirituel et le temporel sont distincts mais indissociables ».
3. Dans cette même note d'Atlantico j'écris : « La logique de l'Eglise catholique est spéciale. Ce qu'elle prône pour la société (la politique, l'économie et même l'écologie : Jean-Paul II et Benoît XVI, papes ''verts '' !) serait une révolution, mais c'est aux laïcs de la faire, et ils ne la feront que s'ils ont une foi surnaturelle. » Ranimer cette foi est le but des voyages des papes. Ils ne voyagent pas pour faire de la politique, ni jouer les petits télégraphistes des intérêts économiques.
4. Sur le mot « religion » (qui vous déplaît, comme aux progressistes old fashion !) : il est exactement à sa place dans l'analyse. En effet le milieu médiatique, centre nerveux de la société actuelle, en condense l'état d'esprit – notamment l'incompréhension du fait religieux. Je dis bien : « religieux ». Il s'agit des « religions » en tant que telles. Pas de la religion chrétienne exclusivement ! (Ne ramenons pas tout à nous-mêmes). Les médias peuvent avoir une préférence instinctive envers les musulmans comme immigrés, mais ce réflexe politiquement correct s'accompagne d'une incompréhension de l'islam comme piété : la notion de piété est incomprise de notre société. ]
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 28/03/2012
SYMPTOMATIQUE
> Ca pourrait être drôle de voir des experts auto-proclamés se tromper à ce point si ce n'était si pitoyable et symptomatique d'une vision du monde à faire frémir.
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Écrit par : Barbara / | 28/03/2012
COMMENT LA FOI AGIT DANS LA SOCIETE
> Dans les processus de chute des régimes communistes, ce qu'il faut admirer, c'est qu'ils ont été non sanglants sauf lorsque l'OTAN s'en est, hélas, mêlé (Yougoslavie). Et pourquoi une révolution aussi immense fut-elle pacifique? pas seulement en raison de l'épuisement du système, mais parce que ses inspirateurs profonds, de Soljenitsyne à Walesa, furent le plus souvent chrétiens, et que des dirigeants communistes étaient environnés de chrétiens et influencés par eux: qu'on pense au général Jaruzelski, mal aimé mais qui sut éviter aux moindres frais une reprise en main par Brejnev (reçu Jean-Paul II, il "nettoya" sa police après la mort du P. Popieluszko) ; à Gorbatchev lui même, pris entre Jakovlev et sa propre femme (cf la stupéfiante interview de Vladimir Fédorovski à Radio Notre-Dame).
Alors bien sûr, le voyage de Benoît XVI n'est pas une manoeuvre politicienne, mais nul doute qu'il aura des retentissements dans la société cubaine et dans l'évolution le l'état cubain, et que Raul Castro le sait bien.
PH
[ De PP à PH - Exactement. Et ces "retentissements" ne seront pas l'oeuvre du clergé mais des croyants catholiques cubains, pour peu nombreux qu'ils soient. ]
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Écrit par : Pierre Huet / | 28/03/2012
LES PAUVRES
> "le sacrement est un signe visible d'une réalité efficace invisible", voilà ce qu'est l'Eglise et finalement ce que résume dans sa personne le pape pour notre Eglise catholique romaine. Donc la pensée de ces deux journaleux, est plutôt la partie visible de leur capacité à raisonner sur quelque chose qu'ils ignorent totalement : la vue spirituelle et religieuse des hommes, d'une nation, d'un peuple!
Que d’intelligence dans ces deux journalistes, pour parler avec autant de nullité du choix affiché de la charité prônée par Benoit XVI, en tant que simple pèlerin!
Comme disait Coluche, "quand un journaliste à si peu de chose à dire il devrait fermer sa gueule, et même si ce journaliste n'était pas venu, on ne lui en aurait pas voulu".
Mais voilà, le monde de la pensée journalistique est souvent bien remplie d'un vide sidéral de contenu, surtout quand il s'agit de la foi, catholique entre autre priorité d'ailleurs!
Pitoyable, si on en rigolait pas nous même en les lisant !!! pouah !!!! c'est poilant franchement, totalement pitoyable et rigolo en même temps; heureusement le ridicule ne tue pas encore, sinon ils ne seraient déjà plus de notre monde,... les pauvres, prions pour eux.
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Écrit par : Jean-Christian / | 28/03/2012
A MOITIE PAS D'ACCORD
> Par « Les "religions" en tant que telles », je ne sais pas trop ce dont vous parlez, puisque vous rejetez l’opposition promue par les libéraux entre une sphère « religieuse » et une sphère « séculière ». En tout cas, ce dualisme spatial ne recoupe pas la distinction proprement chrétienne du spirituel et du temporel. Je voulais justement souligner ce qui dans vos propos m’apparaît comme contradictoire. Puisque « le surnaturel est lui-même charnel », il ne peut être ghettoïsé.
Mais je vous rejoins entièrement lorsque vous déclarez : « Les médias peuvent avoir une préférence instinctive envers les musulmans comme immigrés, mais ce réflexe politiquement correct s'accompagne d'une incompréhension de l'islam comme piété : la notion de piété est incomprise de notre société. » La « piété », et non pas la « religion ». Il y a une perte du sens de la piété dans nos mondes contemporains ; on le voit par exemple par le dépérissement des liturgies civiques, ou le détournement des rites chrétiens de la part d’individus modelés par le consumérisme. Avec parfois des irruptions sauvages et désordonnées de vénération, apparemment absurdes, comme à l’occasion de la mort de Steve Jobs. Nos sociétés aliturgiques produisent d’étonnantes aberrations.
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 28/03/2012
à BJL
> Mais où prenez-vous qu'on veuille "ghettoïser" quoi que ce soit dans ce blog ?
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Écrit par : Nati / | 28/03/2012
ILS NE PEUVENT RIEN IMAGINER D'AUTRE
> Cet article est sans doute à rattacher au poncif à la mode : l'Eglise catholique (tentaculaire et totalitaire, bien entendu) n'aurait qu'une obsession : restaurer sa mainmise perdue sur l'ensemble du monde, appliquer ses ténébreuses ventouses sur les plus fragiles pour les empoigner (schlorb), à la manière d'une vulgaire secte, et ainsi reconstruire pas à pas l'édifice d'une Eglise "à l'ancienne", organe de domination universelle et de contrôle transnational tyrannique.
Ben oui, voyons : autrefois l'Eglise était une superpuissance, elle ne l'est plus, donc elle - et chaque catholique - ne peut QUE vouloir faire renaître ce "passé glorieux" !
Tel est le drame : dans un univers où la quête d'argent et de pouvoir forme l'alpha et l'oméga des idées, il est impossible de convaincre quiconque, a fortiori un "analyste très sérieux", qu'un homme ou une organisation ne partagent pas la même cupidité obsessionnelle. Ils ne peuvent pas y croire, pas même l'imaginer, et chaque acte de l'autre sera invariablement "décrypté" selon ce seul et unique code : "Dénonçons la volonté de toute-puissance qui est forcément cachée là-derrière". Un journal ci-devant tendre et grinçant n'a pas procédé autrement, il y a peu...
P.
[ De PP à P. - Quand on la tête en forme de marteau, on voit tous les problèmes sous la forme de clous. ]
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Écrit par : Phylloscopus / | 28/03/2012
SCHLURP
> Cher Phyloscopus, c'est "schlurp" et pas "schlorb" que font les ventouses ténébreuses, enfin...
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Écrit par : VF / | 28/03/2012
@PP
> Comptez-vous chanceux. Ici au Québec il s’écrit des choses encore plus ''douteuses'' (je suis gentil). Ainsi, un chroniqueur de la page ’’Éthique et religions’’ d’un important quotidien de Montréal, dans un article portant sur la nomination du nouvel archevêque de Montréal la semaine passée, nous explique ceci :
’’[…] Et ces jours-ci, Benoît XVI allait au Mexique et à Cuba réclamer pour l’Église catholique la liberté d’avoir ses écoles et ses médias et, sans doute aussi, la liberté d’y redresser les errances sexuelles de ses contemporains.
Bien sûr, le pape n’allait pas ignorer au Mexique la ‘’guerre de la drogue’’ qui y ravage des régions entières. Des évêques mexicains peuvent également attribuer ce fléau à la déchristianisation du pays. Mais les clients principaux de ces cartels meurtriers sont des consommateurs américains, et les armes à la disposition de leurs fournisseurs proviennent aussi des États-Unis, un grand pays toujours chrétien, où l’Église catholique fait surtout la lutte aux… homosexuels et aux politiciens qui leur accordent des droits.[…]’’
FS
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Écrit par : François S. / | 29/03/2012
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