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27/09/2011

Le catholicisme est forcément social (et au sens fort)

http://www.radionotredame.net/programmes/2011-09-27

Mes invités à Radio Notre-Dame ce matin : le P. Bernard-Marie Geffroy (curé de St Leu - St Gilles à Paris) et Jacques de Guillebon, auteur de Frédéric Ozanam, la cause des pauvres...


 

L'effondrement du capitalisme financier provoquera celui de notre modèle social : issu naguère du boom industriel, il est devenu dépendance du casino mondial. Hier, à Paris, les ministres du Travail du G20 constataient que la disparition de la croissance rendait irréversible celle des vingt millions d'emplois détruits par la crise du capitalisme financier. Ce n'est qu'un début.

Cet effondrement fera d'innombrables victimes.

Face à cela, deux choses à faire : a) y voir clair ; b) aider les victimes, dont nous ferons d'ailleurs tous partie.

Y voir clair, c'est brûler (au bûcher des vanités) l'imbécile idéologie libérale. Et constater qiue le catholicisme – malgré sa bienveillance universelle – n'a pu doter le libéralisme de fondements chrétiens ; la greffe n'a pas pris, le terrain était trop hostile. Il est temps de se tourner vers les économistes non-conformistes : par exemple Schumacher (Small is beautiful), non-conformiste parce que converti au catholicisme par les encycliques sociales !

Être solidaires entre victimes (actuelles ou futures) de l'effondrement du système : c'est là qu'on redécouvre le catholicisme social, sur le terrain et dans les esprits. Je réunissais ce matin à RND le P. Bernard-Marie  Geffroy, curé de St Leu - St Gilles à Paris, et Jacques de Guillebon, auteur de Frédéric Ozanam, la cause des pauvres (L'Oeuvre). Ecoutez le podcast : le P. Geffroy et son équipe font en 2011 ce qu'Ozanam et les siens faisaient en 1840. Remarquons en passant qu'Ozanam dut surmonter l'animosité des bien-pensants libéraux de l'époque, âge d'or du libéralisme où le roi Orléans fusillait les canuts... Est-ce si différent en 2011, où l'on voit les bien-pensants se féliciter de la destruction du budget européen d'aide alimentaire aux pauvres ?  Les libéraux sont incorrigibles. [*]

Ecoutons enfin ce que le P. Geffroy dit du discours du pape au Bundestag. C'est le vrai langage du catholicisme.


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[*] Motif de leur satisfaction en  l'occurrence : toute intervention de pouvoirs publics (fussent-ils européens) est mal vue des écoles de commerce, que les bien-pensants confondent avec le Vatican. Mieux vaut ne pas aider les pauvres, que de les aider en violation du dogme libéral.

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Commentaires

OZANAM "LIBERAL" ?

> Jusqu'à quel point Ozanam était-il imperméable au libéralisme de son temps?
Dans le journal "L’Ere nouvelle ", Ozanam a publié en octobre 1818 un article intitulé « Les causes de la misère ». Pour lui, la misère du peuple travailleur est principalement due à « […] ces trois passions qui sont la ruine des moeurs populaires, le jeu, le vin et les femmes […]. » Pour résumer sa pensée, qu’il qualifie de "spiritualiste",
« […] C'est la liberté humaine qui fait les pauvres. c'est elle qui tarit ces deux sources primitives de toute richesse, l'intelligence et la volonté, en laissant l'intelligence s'éteindre dans l'ignorance; la volonté s'affaiblir par l'inconduite. […] »
Comme il le dit lui-même, Ozanam se positionne ainsi à égale distance des « économistes », autrement dit les libéraux de son temps, et des « socialistes ». Ces deux « écoles » antagonistes pèchent, selon lui par leur matérialisme : un meilleur gouvernement des choses serait d’après eux l’unique solution pour apporter la prospérité à la masse du peuple. Au choix : ou la « concurrence illimitée » ou « l’organisation du travail ». Mais Ozanam voit dans ces deux remèdes le chemin le plus direct vers l’esclavage pour l’un ; vers la prison pour l’autre.
Ozanam, quant à lui, rejette les causes de la misère et leur résolution telles que les présentent libéraux et socialistes : ce qu’il faut, affirme-t-il, c’est venir en aide, éduquer et moraliser le travailleur. L’effondrement moral dans les classes modestes est selon lui la raison principale du paupérisme. Il rejoint ainsi, malgré ses dénégations, le discours de nombreux libéraux, mais plus généralement des bourgeois d’alors. Guizot pensait de même.
La différence, c’est qu’Ozanam n’en conclut pas à l’abandon du prolétariat à son triste sort, mais à la nécessaire intervention de l’Etat pour lutter contre les vecteurs du vice ; soutenir les familles ; assurer le repos du 7e jour ; permettre l’éducation des enfants et des jeunes.
Néanmoins, Ozanam était bien la victime de son temps et de sa classe sociale, lorsqu’il postulait que les pauvres étaient forcément plus vicieux que les riches.

BJP


[ De PP à BJP - ne faisons pas dire à sept lignes d'Ozanam, décontextualisées, ce qu'elles ne peuvent vouloir dire : qu'à son avis les pauvres seraient plus vicieux que les riches, et que cela (et non le système d'exploitation économique) expliquerait tout. On aurait beau jeu de vous opposer des textes d'Ozanam comme celui-ci : "L'exploitation de l'homme par l'homme c'est l'esclavage. L'ouvrier-machine n'est plus qu'une partie du capital, comme l'esclave des Anciens ; le service devient servitude... Conséquences : faire pour l'ouvrier ce qui se fait pour une machine - l'entretien le plus économique ; réduction des besoins physiques - à la place du pain des pommes de terre, la nourriture des animaux ; travail des enfants dans les manufactures ; élimination de tous les besoins moraux et intellectuels, suppression de la liberté religieuse, suppression de la famille, doctrine de Malthus, économistes à la solde..." - Ozanam était tout sauf un imbécile. ]
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 27/09/2011

LE LIBERALISME EST UNE RELIGION

> L'erreur qu'on fait souvent, c'est de croire que le libéralisme est simplement un régime économique, plus ou moins neutre. En fait, le capitalisme est une religion (William Cavanaugh le montre bien dans ses livres) à vocation universelle : métaphysique (le relativisme), économique / politique (le libéralisme), morale (consumérisme, libertarisme). En l’occurrence pour les catholiques, une hérésie : penser que la somme des vices concourt au bien général, c'est croire que le péché pourrait avoir un effet bénéfique au niveau social. Absurde.
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Écrit par : Gilles Texier / | 27/09/2011

UNE RELIGION... INTERESSEE

> Sauf une poignée d'universitaires lunatiques, les doctrinaires du (néo)libéralisme sont presque toujours des gens professionnellement intéressés au système. Quand l'un d'eux tient de grandes théories (néo)libérales sous pseudonyme, il faut se demander ce qu'il fait dans la vie réelle : ce qu'il vend, à qui, et et dans quelles conditions. Si on le découvre, on se dit : "évidemment !", et on est pris d'un rire nerveux.
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Écrit par : bernard gui / | 27/09/2011

BIEN SÛR QUE NON

> Ozanam pensait que les pauvres étaient plus vicieux que les riches ?
Bien sur que non. Sinon pourquoi aurait-il fondé les conférences de charité ? Pourquoi aurait-il innové en demandant à ce que ce soit le vincentien (membre d'une conférence de charité) qui visite le pauvre et non le pauvre qui viennent chercher sa pitance dans la belle demeure du riche ?
On ne visite pas un vicieux. Ozanam n'a jamais eu de mépris pour les plus malheureux, bien au contraire !
Quand il parle des fléaux du jeu, du vin et des femmes, il a un discours réaliste. Les addictions aux loteries, à l'alcool et au sexe (voir DSK...) ont toujours été des calamités qui écrasent littéralement ceux qui sont les plus vulnérable. Chez les ouvriers des faubourgs de Paris, ces "vices" (au sens de mauvaises habitudes) ont ravagé des familles entières, et ils étaient dûs en grande partie aux conditions de travail épouvantables. Quand on est au bout du rouleau, on se réfugie hélas trop souvent dans certains plaisirs... cela ne fait pas d'eux des vicieux, mais des victimes. C'est toute la pensée d'Ozanam, et ce constat est le fruit de son contact avec ces gens qu'il a aidé et aimé.
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Écrit par : Charles Vaugirard / | 27/09/2011

PAS UNE CARICATURE

> Je n’ai pas dit qu’Ozanam était libéral, mais qu’il n’était pas entièrement indemne du climat de son temps et de son milieu.
J'ai pris soin d'éviter toute décontextualisation, en soulignant en quoi il s'opposait au libéralisme (et au socialisme). J'ai ainsi fait allusion à sa dénonciation du libéralisme comme esclavage de l'homme par l'homme; et à son engagement pour redonner à l'ouvrier une vie spirituelle et morale dont l'avaient privé la faiblesse de l'Etat et l'avidité des patrons.
Personnellement, je suis trop attaché à Ozanam pour vouloir dresser de lui une caricature.
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 27/09/2011

C'EST LE LIBERALISME QUI EST EN CAUSE

> Pauvre Ozanam ! il se retourne ds sa tombe de voir la pensée qu'on lui prête.
Aucune classe sociale n'a la sainteté intrinsèque ou chevillée au corps.
si la pauvreté "condamne à la sainteté " on se demande pourquoi l'Eglise lutte contre !
Quant à la richesse, cela n'a pas d'intérêt intrinsèque. La richesse c'est comme la propriété, ça n'a d'intêrêt que pour le commun profit (DSE).
Dès qu'on ne l'utilise pas ainsi, on pourrit.
Celui ne fait pas fructifier son bien pour le bien commun n'est pas digne de le posséder.
le problème c'est de vouloir plus sans même faire déjà qqchose de bien pr tout le monde de ce qu'on a déjà. Et nous sommes déjà tous les riches de quelqu'un.


@ G Texier :
> c'est le libéralisme qui est en cause et pas seulement ds son application économique
L'économie de marché, la libre entreprise intelligents c'est-à-dire ds la dignité de l'homme et dans son intérêt à long terme ne sont pas antichrétiens, contrairement à une économie où la seule morale est dictée par des règles matérialistes comme c'est le cas ds l'enfantin autant que dangereux casino mondial actuel : par exemple, censée nous protéger, l'Union Européenne sauce Barroso-Maastricht nous a vendu au ballotements financiers mondiaux, fruits de calculs à courte vue car sans perspective métaphysique, morale ni mêmr tout simplement .... politique ! (ils ont foutu en l'air les Etats et ces gros malins se demandent qui va réguler maintenant !)

Exemple bateau et cynique : je vends de la drogue je gagne plein d'argent jusqu'à ce que tout le monde soit mort et alors à ce moment-là, à quoi ça m'a servi ?

Je note que le matérialisme est la cause des désastres matériels/naturels :
l'économie soviétique et la Mer d'Aral par exemple
le casino actuel et ...
Des désastres humains : l'homme-machine, le productivisme, le consumérisme
l'homo sovieticus se donne au système, l'homo maastrichianus/homo barrosicus est prié de se donner à l'Euro qui doit être fort :
les chômeurs sont autant d'agneaux du sacrifice sur l'autel du dieu euro
relisez V Georghiu : il renvoie dos à dos le matérialisme qu'il a fui à l'est et le matérialisme qu'il a été consterné de trouver à l'ouest
idem pr Soljenitsyne.
Nous vivons sur une planète qui fonctionne avec ses règles que nous le voulions ou non.
Nous faisons un ensemble avec elle, on ne peut vouloir le bien de l'un et négliger celui de l'autre et ds le temps, on ne peut chercher le bien commun uniquement à l'instant présent mais à le long terme.
Le déni actuel de la réalité sur l'humanité qui s'illustre notamment par le délire du gender , c'est l'application à l'homme des mêmes délires qu'on a appliqué à l'économie, au monde, à la politique.
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Écrit par : zorglub / | 27/09/2011

A CJB :

> je me demande si vous n'êtes pas induit en erreur par une citation tronquée d'Ozanam. Malheureusement, je n'arrive plus à mettre la main sur ses 'Causes de la misère' - les articles de 'L'Ere nouvelle' étant ce qu'il y a de plus difficile à se procurer parmi la littérature d'Ozanam - mais il me semble absurde qu'il ait écrit un article entier pour arriver à une telle conclusion. D'autant plus que tout le reste de son oeuvre dément une telle assertion. Ceci, par exemple, qu'il adresse aux "vincentiens" :

« Nous trouverons quelque instruction, messieurs, et quelque utilité à visiter des hommes autrefois nos égaux ; nous apprendrons par là quel fond il faut faire sur les espérances du monde. Nous apprendrons surtout à porter dans le bienfait cette délicatesse qui fait oublier à l’assisté son infériorité apparente. Nous nous déferons de ces habitudes d’ascendant, de patronage, de domination peut-être, que nous contractons dans le commerce ordinaire des indigents, qui s’excusent par la différence d’éducation et de lumières, mais qui n’en coulent pas moins d’un secret amour-propre, principe corrupteur de toutes les bonnes œuvres ».

Et surtout ceci :

"Et en disant passons aux barbares, je demande que nous fassions
comme lui, (Pie IX) qu’au lieu d’épouser les intérêts d’un ministère doctrinaire (Guizot) ou d’une pairie effrayée, ou d’une bourgeoisie égoïste, nous nous occupions du peuple qui a trop de besoins et pas assez de droits, qui réclame avec raison, une part
plus complète aux affaires publiques, des garanties pour le travail et contre la misère, qui a de mauvais chefs, mais faute d’en trouver de bons, et qu’il ne faut pas rendre responsable ni de « l’histoire des Girondins » (Lamartine), qu’il ne lit
pas, ni des banquets, où il ne dîne pas. C’est dans le peuple que je vois assez de restes de foi et de moralité pour sauver une société dont les hautes classes sont perdues."

Ce me paraît assez aller contre le morceau de phrase que vous citez.
Par ailleurs, Ozanam, s'il a subi une influence économique à sa maturité, c'est celle de Charles de Coux qui n'est pas proprement un libéral dans le sens actuel.
Par ailleurs, à cette époque, le socialisme étant encore pré-marxiste, et même très chrétien (avec Buchez et Leroux) et le libéralisme économique n'ayant pas encore été poussé entièrement à sa fin, il est délicat de savoir qui est socialiste et qui est libéral. Les frontières ne sont pas les nôtres. Mais il est évident que la tournure d'esprit d'Ozanam ferait de lui, aujourd'hui, un antilibéral complet. Ce qui ne veut pas dire étatiste, précisons-le.
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Écrit par : Jacques de Guillebon / | 27/09/2011

1848

> Pour l’article cité, je vous renvoie aux Œuvres complètes de A.-F. Ozanam, t. 7, Mélanges I, Paris, éd. J. Lecoffre et Cie, 1859, p. 261-272 :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54476699/f252.image
J’en profite pour corriger une erreur dans la date : l’article remonte bien évidemment à 1848. Déjà l’euphorie des débuts de la révolution est retombée.
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 27/09/2011

> Question pratique: ce soir 22h20, toujours pas de podcast!

PH


[ De PP à PH - J'ai été averti d'un problème technique. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Huet / | 27/09/2011

REFORMATEUR SPIRITUEL

> Dernière erreur qui s’était glissée dans ma version microsoft word de l’article : il faut aller aux pages 245-255, et non pas 261-272. De toute façon, le lien que j’ai fourni renvoie en début d’article:
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54476699/f252.image
Venons-en au contenu lui-même.
A la différence des libéraux, si Ozanam met l’accent sur le désordre moral qui menace particulièrement les classes laborieuses, ce n’est pas pour justifier leur situation présente, et y voir en quelque sorte une juste rétribution de la Providence. Il est au contraire, comme je l’ai déjà dit, partisan de réformes.
C’est l’esprit d’un réformateur qui écrit cette phrase :
« Nous estimons la société perfectible ; nous en poursuivons, non le renversement, mais le progrès. Et cependant nous déclarons qu'on n'aura rien fait tant qu'on ne sera pas allé chercher, non au dehors, mais au dedans, les causes de la félicité de l'homme et les principes ennemis de son repos, tant qu'on n'aura pas porté la lumière et la réforme dans ces désordres intérieurs que le temps ne répare pas, plus incurables que les maladies, plus durables que les chômages, et qui multiplieront encore les indigents longtemps après que l'herbe des cimetières aura couvert les dernières traces de la guerre civile. » (p. 247)
Ceux qu’il met en cause, ce sont les hommes politiques, « Habitués jusqu’ici à ne considérer que l’intérêt temporel dans le gouvernement des hommes », qui « n’ont cherché les causes de la misère que dans un désordre matériel […] ». (p. 246)
Ozanam, lui, insiste sur la possibilité pour un homme modeste de progresser dans la société, car « C’est la liberté humaine qui fait les pauvres ; c’est elle qui tarit ces deux sources primitives de toute richesse, l’intelligence et la volonté, en laissant l’intelligence s’éteindre dans l’ignorance ; la volonté s’affaiblir par l’inconduite. » (p. 249) Mais il dénonce également les obstacles que mettent les législateurs et les patrons à cet épanouissement de l’intelligence et des mœurs, et appelle à entreprendre des réformes dans ce domaine : éducation, aide financière de l’Etat pour les familles, interdiction de certaines activités corruptrices, reconnaissance du repos le 7e jour…
Pour conclure, Ozanam ne justifie pas l’inégalité entre les hommes ; il considère simplement que la véritable priorité concerne les désordres intérieurs des ouvriers et leur destinée spirituelle. Il ne se veut pas un réformateur de la société en tant que telle, – mais de l’homme. Au fond, il est dans la même lignée que saint Vincent de Paul : en soulageant la misère des plus démunis, ce dernier cherchait surtout à assurer leur salut personnel. Il craignait plus pour eux les peines de l'enfer que les famines et autres joyeusetés du XVIIe siècle.
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Écrit par : Blaise Join-Lambert / | 28/09/2011

LIBRE ECHANGE

> La fête de Monsieur Vincent, date parfaite pour ces Grands Témoins !
Réveiller les cathos libéraux, c’est bien, mais il faut peut-être davantage comprendre et faire savoir pourquoi ils le sont, avant de les mépriser ostensiblement comme on le voit trop souvent. Pourquoi d’autres routes se sont-elles si souvent fermées devant eux ?
Cela tombe bien que vous nous ayez recommandé le livre de F. Huguenin sur l’AF : il nous remémore qu’une ou deux générations après le conflit entre Veuillot et le Bx Ozanam bon nombre des catholiques sociaux qui entreprirent le dialogue et l’action avec le syndicalisme étaient des contre-révolutionnaires anticapitalistes. Cette convergence redevient actuelle sous d’autres formes. Mais alors l’option démocratique de plus en plus affirmée par le magistère a progressivement barré cette voie. Certains furent alors fascinés (jeu de mots involontaire) par les régimes autoritaires, d’autre par le modèle marxiste. Les dérives et les chutes des uns puis des autres firent repoussoirs et ont ouvert une voie royale au libéralisme par un discrédit abusivement généralisé à toute action de l’Etat. L’américanisation du monde, à commencer par celle des intellectuels qui sont aux côtés des plus forts et des plus riches, comme le rappelle aussi Huguenin avec Maurras, a fait le reste.
Mais voilà, la chute du communisme n’a pas détruit le mythe de l’internationalisme qui a changé de camp, donnant au capitalisme une extension et une force sans précédent.
Car un mythe est un redoutable bouclier ! Bien sur, le Magistère et nos évêques, particulièrement ces dernières années, multiplient des mises en garde. Pourquoi ne sont-elles pas efficaces ? Et si c’était parce qu’elles ne sont pas concrétisées par une ferme critique des instruments de pouvoir du mondialisme libéral ? Certes le FMI est épinglé, mais ce n’est que le plus technique. Il nous manque des textes forts sur sur les dysfonctionnements de l’ONU, sur l’OMC, l’OTAN et ses guerres droit-de-l’-hommistes, et l’Union Européenne, relais régional des précédentes.
Il n’y a pas d’altermondialisme. Au pouvoir, il s’altère en mondialisme libéral (Brésil) ou revient au nationalisme (Venezuela), éventuellement néo-païen (Bolivie). Il n’y a que deux mondialisations possibles : celle de la Conversion, et celle de l’Argent.
Si moult cathos de base, dont beaucoup sont remarquablement dévoués -n’oublions pas qu’on en trouve plus d’un dans les « Conférences » ou aux « Captifs »- croient qu’on peut atteindre la première via la seconde, mieux évangéliser grâce au libre-échange qui met les gens à la rue, c’est parce que nos têtes pensantes ne combattent pas nettement cette idée.

PH

[ De PP à PH :
- En gros oui. Avec une nuance sur les contre-révolutionnaires et le maurrassisme : cette mouvance fonctionne comme un éteignoir sur le plan social. Il suffit de voir comment l'AF s'est fourvoyée, en très peu d'années (moins de vingt ans), sans que l'évolution politique du Vatican y soit pour quoi que ce soit comme on l'a vu en 1926...
- Maurras ne dit pas qu'il y a un tropisme des intellectuels en faveur de l'argent ; 'L'avenir de l'intelligence' prédit l'inverse, et à tort. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Pierre Huet / | 28/09/2011

TERRIBLEMENT CHIC

> Comment apporter sa complaisante caution morale au culte de Mammon et à ses grands prêtres sans en avoir l'air ?
En s'emmitouflant dans les nobles vêtements de la mission évangélisatrice monsieur !
Comment en appeler au « parler vrai » dans un « dialogue avec le monde de l'entreprise », sans surtout ne jamais fâcher personne et en tournant autour du pot pourri de la nature intrinsèquement perverse de la logique du profit ?
En se drapant de toutes les vertus de la Doctrine Sociale de l'Eglise madame !
Les 10 ème Entretiens de Valpré se déroulent ce mardi 4 octobre : http://www.entretiensdevalpre.org/rubriques/gauche/le-programme-complet/1valpre-programme-bat.pdf
Souhaitons à l'avance une belle et agréable journée à tous les participants, dans le cadre verdoyant d'un centre de congrès et de séminaires, spécialisé dans l'accueil des clientèles d'affaires et institutionnelles. Avec possibilité de se ressourcer spirituellement dans la petite chapelle qui jouxte le centre.
Calme et sérénité assurés lors de cette journée : que du beau monde, que des gens polis et convenables, biens sous tout rapport, propres sur eux, des décideurs, des chefs d'entreprises, des présidents de ceci, des présidents de cela, des sénateurs UMP, des grands artistes et même des religieux hauts placés.
A l'occasion de ce 10ème festival du vœux pieux (oups!), il s'agira d'insister sur la nécessaire prise en compte des valeurs spirituelles en entreprise. Vigueur des débats assurée : Ghislain Lafont, président de Valpré, assure que tous les participants « ont accepté de se soumettre à la règle d'or (sic) qui préside à ces Entretiens depuis leur création : parler vrai ». Il y a de l'étincelle dans l'air !
Plusieurs tables rondes, réunissant un panel de personnalités de tous horizons, permettront de s'interroger : comment concilier l'individuel et le collectif dans l'entreprise ? La mondialisation étant un fait historique désormais acquis, comment préparer les futurs responsables dans un monde sans frontières ?
Dans le secteur culturel, on s'interrogera : quels sont les paradigmes à mettre en œuvre pour que ce secteur parvienne à transformer ses bénéfices d'ordre esthétique, humain et spirituel, en avantages concurrentiels ?
On soulignera l'indéniable apport de l'économie sociale et solidaire mais on s'interrogera tout de même : celle-ci a-t-elle vraiment les reins suffisamment solides pour drainer de la croissance mondiale ? On n'hésitera pas, sans fausse pudeur, à aborder le rôle de la foi dans l'entreprise, juste après le déjeuner, pendant la difficile phase de digestion. Des jeunes étudiants des écoles de commerce de Lyon, avec toute leur fougue, viendront ensuite faire part de la dynamique entrepreneuriale de la jeune génération.
On évoquera ensuite tout ce que l'Entreprise peut apporter à l'église en matière d'annonce de l'évangile. Evangéliser, une véritable entreprise ? Sûrement, mais comment ?
La liste des membres du comité d'honneur des Entretiens de Valpré parle d'elle-même. Après l'avoir scruté, ce serait franchement faire preuve de mauvais esprit que de douter de la probité morale d'une telle entreprise. Un petit coucou au passage à monsieur Ernest-Antoine Seillière, membre de ce digne comité des sages.
Avec des mécènes tels que BNP-Paribas, LCL, ou le CIC, peut-être sera-ce l'occasion pour les invités d'évoquer pendant les pauses pipi la situation bancaire mondiale, et de nourrir des discussions fructueuses sur le plan qui vient d'être rédigé par les banquiers en vue du renflouement des banques grâce à l'argent du contribuable. Qui sait ?
Par ailleurs, ce serait être franchement rabat-joie que d'imaginer que l'empreinte de ces mécènes désintéressés sur ces rencontres, ne restreigne de quelque façon que ce soit la liberté de parole des intervenants. Coupons court à ce type d'affabulations...
Enfin, avec le soutien de médias tels que LCI, La Croix, KTO ou encore ENOV Research (agence de marketing), ces rencontres, comme il se doit, bénéficieront d'une couverture médiatique plus que favorable où il s'agira de souligner l'urgence de réconcilier (enfin!) la foi catholique et le monde de l'argent, parce que en France l'argent, c'est tabou ! Seuls les esprits chagrins opposent encore esprit de charité et esprit de concurrence.
Lorsque cette belle et conviviale journée s'achèvera, s'il reste un peu de foie gras, de homard, des petits fours et du champagne, s'il vous plaît, un petit geste pour les plus démunis, qui n'ont pas été invité, serait le bienvenue. L'association humanitaire des étudiants de l'ESDES se chargera de la distribution auprès des sans-abri de la ville de Lyon. Merci pour eux !
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Écrit par : serge lellouche / | 03/10/2011

Cher Serge,

> je vous suggère une farce inspirée de Monsieur Vincent: allez-y pour mettre, au sens propre du terme, votre grain de sel, avec la salière du saint qu'il utilisait dans les repas mondains....
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Écrit par : Anne Josnin / | 03/10/2011

RADIO WALL STREET

> Ces entretiens de Valpré font en effet un peu "Ici Radio Wall Street : La bourgeoisie parle à la bourgeoisie"...

JG

[ De PP à JG - Mais cette année il y aura JP Delevoye (en duplex aux Bernardins), qui dit des choses intéressantes et assez non-conformes. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Jacques de Guillebon / | 03/10/2011

PAR CONTRE

> Oh chère Anne, vous me poussez là au crime de lèse catholigarchie ! C'est ô combien tentant, malheureusement, je suis totalement inapte à la farce programmée, genre grand conseil de guerre entre amis la veille au soir pour les derniers préparatifs avant le passage à l'acte. Je suis beaucoup trop timide pour cela.
Par contre, la farce irruptive, qui surgit des profondeurs, qui s'invite sans prévenir, qui ne vous demande pas votre autorisation pour sortir, ça j'adore ! On la remercie après son son passage, malgré le trac terrible qui vous saisit quand elle franchit la barrière...
Après, la récompense suprême, c'est quand même la tête médusée de tata Agathe, de tonton Léon et de toute la tablée réunie pour les 18 ans de la cousine Bérangère, peu habituée à un tel feu d'artifice. En général, le passage de l'éclair laisse des taches de vin rouge sur la nappe blanche ! Mais avec un peu de sel, ça part...
Alors, la même irruption volcanique au milieu d'une tablée réunissant les plus hauts dignitaires du comité du beurre des Entretiens de Valpré, on n'ose même pas en rêver, on ne vit ça qu'une fois dans sa vie, c'est vraiment le cadeau du ciel...
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Écrit par : serge lellouche / | 03/10/2011

WASHING

> A même titre qu'il y a le "green washing", il y a le "catho washing"...:-)
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Écrit par : J. Warren / | 04/10/2011

A LA CRÈME

> Cher Serge, sans gâcher un bon bordeaux ou autre cahors, il y a la célèbre tarte à la crème.
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Écrit par : VF / | 04/10/2011

à VF,

> Cadeau :
http://www.dailymotion.com/video/x40tl5_noel-godin-l-entarteur-georges-le-g_people
http://www.youtube.com/watch?v=-d7I5xNIYsA&feature=related
Rions enfants de la patrie...
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Écrit par : serge lellouche / | 05/10/2011

> Excellent. Merci Serge, je vous paierai un coup un de ces jours :-)
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Écrit par : VF / | 05/10/2011

AUX SOMNAMBULES

> Au delà de BHL, de Bill Gates et des catholigarques, je nous propose cet air vif et frais, en lien avec les farces de monsieur Vincent dont nous parle Anne.
Je dédie ce lien aux somnambules des entretiens de Valpré :
http://www.youtube.com/watch?v=cDFen8kMtRw&feature=related
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Écrit par : serge lellouche / | 05/10/2011

PLUS DE D.S.E. CHEZ J. GENEREUX QUE DANS DES COLLOQUES CATHOS

J'ai commencé "Nous on peut !" de Jacques Généreux ("Pourquoi et comment un pays peut toujours faire ce qu'il veut face aux marchés, face aux banques, face aux crises, face à la BCE, face au FMI..."). Clair, net et précis. Beaucoup de plaisir à lire cet ouvrage, simple et bien écrit. Et, en même temps, une immense douleur : me dire qu'il y a là plus de DSE que dans beaucoup de colloques, articles, ...de "catho-washing"(merci J. Warren, je la replacerai). Plutôt bien, me direz-vous ? Des gens avec qui discuter. OK, mais je crois qu'en France, tout ce qui "sent la sacristie" est suspect (le terme est faible) au regard d'une certaine gauche (même pas seulement l'ultra senestre).
ex (cas un peu particulier, certes) : http://www.libertepolitique.com/politique-et-bien-commun/7063-manifestation-des-enseignants-la-liberte-de-christine-boutin
Et tout ce qui est "sorti de la sacristie" pour avancer au large n'est plus reconnu par les siens, car il faut croire que l'odeur de la "porcherie" a couvert celle de la sacristie. Désespérant.
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Écrit par : Feld / | 06/10/2011

@ Serge Lellouche

> Je vois que les entretiens de Valpré vous ont inspiré ! « Comment apporter sa complaisante caution morale au culte de Mammon et à ses grands prêtres sans en avoir l'air ? », demandez-vous… C’est une question proprement iconoclaste. Ce que vous semblez vouloir, Serge, ce sont des catholiques rebelles, qui s’opposent aux mœurs dominantes, notamment économiques. D’une certaine manière, sur ce blog, il y en a un certain nombre, dont vous et moi. Mais cela reste une poignée de personnes dans le paysage catholique.
Je vais vous provoquer un peu, Serge. Voyez-vous, je me demande si on peut avoir "le beurre et l’argent du beurre" : à la fois une Eglise ouverte sur le monde et en dialogue avec lui (donc avec le Medef aussi) et des catholiques rebelles qui refusent tout compromis.
Pendant un siècle et demi, l’Eglise a été en confrontation avec le monde, avec la modernité. Elle s’est bien aperçue que cela posait un problème pastoral de sembler toujours « contre tout » alors qu’elle a une Bonne nouvelle à annoncer. Et la sécularisation gagnait le monde occidental malgré les résistances acharnées de l’Eglise, qui ne cédait pas un pouce au monde nouveau. C’est donc très naturellement qu’il y a eu le concile Vatican II. Contrairement à la légende, le concile n’est pas soudainement tombé du ciel comme une inspiration foudroyante de l’Esprit-Saint sur l’âme en extase du bienheureux pape Jean XXIII. Il était dans l’air déjà sous Pie XI, puis sous Pie XII qui est mort alors qu’il pesait encore le pour et le contre. Pie XII savait qu’il fallait faire évoluer les choses (y compris la liturgie, soit dit en passant) et la décision de Jean XXIII de convoquer un concile n’a pas surpris les cardinaux qui en avaient parlé pendant le conclave (ce qui a surpris, c’est la rapidité de décision du pape). Il ne faudrait peut-être pas oublier qu’il y a eu Vatican II, et pourquoi il y a eu Vatican II : s’adapter à un monde nouveau, être en sympathie avec lui et non en confrontation, lui présenter la foi et l’Eglise d’une manière qu’il puisse comprendre. Le pape l’a répété récemment : Vatican II est notre « boussole ». Alors, qu’est-ce qu’on fait Serge ?
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 06/10/2011

La révolution cher Guillaume !

> Non, euh moins sérieusement, j'ai 39.5 de fièvre, et votre propos étant à la fois stimulant, piquant et un brin caricatural, pour éviter de dépasser la barre des 40, je me donne un peu de temps pour vous répondre, autant que je le puisse. Je veux aussi vous relire et être sûr de bien vous comprendre.
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Écrit par : serge lellouche / | 06/10/2011

DAME PAUVRETE FRAPPE A NOS PORTES

> Pour répondre à l’inquiétude de Guillaume de Prémare vis-à-vis de Serge Lellouche (en attendant que l’aspirine agisse).
Inutile de s’inquiéter « du beurre et de l’argent du beurre » (l’Eglise ouverte et le catholique rebelle), car l’Eglise devrait bientôt être magnifiquement au diapason d’un monde appelé à tester son option préférentielle pour les pauvres sur une grande échelle. Fidèles ou non à sa Bonne Nouvelle, pauvres ou (ex-)riches, nous serons appelés à vivre comme des frères et des sœurs mineurs. Pauvres, petits, tout-petits, et ayant épousé, non la révolution, mais dame pauvreté.
« Dame pauvreté »… Belle enseigne, heureuse « boussole » pour de futurs rassemblements. Chacun, à l’invitation de son réseau social, viendrait avec un bout de pain à bénir et à partager. Naturellement les quelques sommités invitées aux Entretiens de Valpré seraient conviées à casser la croûte, et à s’inspirer du même coup de ce bel esprit d’entreprise.
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Écrit par : Denis / | 06/10/2011

Denis,

> je vous aime fraternellement! Je viens de repasser sous les 38 grâce à ce que vous venez d'écrire, et sans aspirine. Qu'ajouter à cela, vous avez tout dit...
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Écrit par : serge lellouche / | 06/10/2011

J’espère, cher Serge,

> ...que ma provocation « un brin caricaturale » n’est pas la cause de votre fièvre ! Il n’y a aucune urgence, mais il est vrai que j’attends votre réponse, car il me semble que j’ai, comme vous, un tempérament plutôt “révolutionnaire” : depuis mon plus jeune âge, je veux radicalement autre chose que ce qui est en place. Un tel désir est si minoritaire et incompris qu’il me semble mériter un discernement, notamment à la lumière de la manière dont l’Eglise envisage désormais le rapport avec le monde moderne.
Guérissez et revenez-nous vite !
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 06/10/2011

@ Denis

> Ce que vous dites semble signifier que vous prévoyez un grand malheur...
Je dois dire que c'est un peu mon intuition aussi : l'idée que nous aurons bientôt à choisir entre la violence et le partage... Mais si vous dites ça à nos contemporains, ils vont se rendre immédiatement chez un concessionnaire agréé en poutres et en cordes... Récemment, ma femme m'a dit qu'à m'écouter, il ne restait plus qu'à se pendre, mon frère m'a dit que je prévoyais "la fin du monde"...
Il est où notre bel optimisme chrétien ? Ne sommes-nous pas de ces "prophètes de malheur qui annoncent toujours des catastrophes" comme disait le bon pape Jean ? Et Aristote ne disait-il pas (en gros) qu'il n'y a pas de vérité concernant l'avenir contingent ? Alors, qui sait ?
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 06/10/2011

Merci à Serge

> ...pour cet élan de tendresse fraternelle. Quant à l’aspirine, je vous assure, c’est un bon remède. Mon père, Pierre, excellent médecin décédé le 2 juin dernier (le jour de l’Ascension, prions pour lui), avait signé chez Hachette un excellent ouvrage : « Merveilleuse aspirine ». Je vous le recommande.

@ Guillaume
> Je suis comme vous. Vaguement inquiet de ce qui arrive. Ma préoccupation serait plutôt de savoir quelle est la boussole de l’Eglise. Il est vrai que ces « Entretiens de Valpré », qui ont si bien fait réagir Serge, auraient pu nous induire en erreur. J’ai par exemple admiré la vaine insistance de l’animateur à obtenir une repentance du cardinal Vingt-Trois sur l’attitude de l’Eglise catholique par rapport à l’argent. Mais il a tout de même obtenu un silence poli.
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Écrit par : Denis / | 06/10/2011

DEVANT LA CATASTROPHE, PREPARER L'AVENIR

> "Ce que vous dites semble signifier que vous prévoyez un grand malheur...
Je dois dire que c'est un peu mon intuition aussi : l'idée que nous aurons bientôt à choisir entre la violence et le partage... Mais si vous dites ça à nos contemporains, ils vont se rendre immédiatement chez un concessionnaire agréé en poutres et en cordes... Récemment, ma femme m'a dit qu'à m'écouter, il ne restait plus qu'à se pendre, mon frère m'a dit que je prévoyais "la fin du monde"...
Il est où notre bel optimisme chrétien ?"
Se pendre ??? Pour moi, c'est tout le contraire : face à ce "grand malheur", cette "fin [d'un] monde", je me suis senti pousser des ailes ! C'est ça mon moteur : face à la catastrophe annoncée, préparons l'avenir ! C'est urgent !
C'est ce qui me stimule au quotidien ; quand je trouve ma vie bien difficile, quand je doute sur le bien fondé de la direction que j'ai choisie, j'allume France Info 15 minutes, et tout me confirme dans ma voie : tout plaquer, épouser Dame Pauvreté, et mendier ma pitance et mon repos contre du travail de la terre.
Cela fait ainsi plus de deux ans que je suis dans la même ferme. Mais l'heure du départ approche. Priez pour moi, l'arrachement à cette terre que j'ai appris à aimer sera difficile, je reprends mon baluchon et la route bientôt, normalement d'ici Noël. L'inconnu s'ouvre de nouveau devant moi, que Dieu guide mes pas.
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Écrit par : PMalo / | 06/10/2011

OPTIMISTE

> Etant d'un naturel optimiste, chers amis chevaliers servants de Dame Pauvreté, je dis à mes élèves (mon statut de prof de philo me donnant toute latitude pour dire toutes les énormités que je veux)que ce sera bientôt l'occasion unique de découvrir la joie de ceux qui, mieux que de compter sur leurs assurances et banques, sauront qu'ils peuvent compter sur leurs voisins. Et le goût du pain, c'est tellement bon le pain,et un bol de lait chaud entre les mains... et retrouver les joies du vent, du soleil et de la pluie qui fouette... (sur la carte intime des errances de ma vie, mon île c'est Assise;... il y a tellement de bonheurs simples à retrouver...
Je sais par expérience que, quel que soit l'avenir, la Providence nous y prépare déjà, chacun, depuis longtemps, pour que nous ne soyions pas pris au dépourvu,.... so don't worry! Soignez-vous bien cher Serge.
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Écrit par : Anne Josnin / | 06/10/2011

@ Denis

> Quelle est la boussole de l'Eglise sur toutes ces questions ?
Il y a une réponse dans votre commentaire et dans la présente note de Patrice : l'Eglise est présente, active et organisée sur le terrain de la charité, prête à faire face. Un catholicisme social de terrain.
Deux enseignements de Jean Rodhain qui éclairent peut-être notre futur plus ou moins proche :
- "La charité d'aujourd'hui construit la justice sociale de demain."
- "La charité n'est pas le résultat d'un labeur humain, c'est un travail de Dieu dans l'âme."
Donc, charité d'abord ; et primauté du spirituel au coeur de l'action sociale.
Après ce bref échange avec vous, j'ai l'impression d'y voir plus clair et d'être tout d'un coup plus optimiste. Merci Denis !
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 06/10/2011

@ GdP

> "nous aurons bientôt à choisir entre la violence et le partage... Mais si vous dites ça à nos contemporains, ils vont se rendre immédiatement chez un concessionnaire agréé en poutres et en cordes... "
Si vous dites ça à un libéral, il va aussitôt :
-créer une entreprise en poutre et en corde
-passer un contrat avec des pays du Tiers Monde pr y fabriquer de la corde à pas cher
-faire de la pub pour la meilleure corde qui étrangle en 3 secondes chrono
-créer un site internet où l'on peut revendre d'occasion la corde du pendu
- créer un kit : "pendez-vous vous-même"

Le tout avec l'aide du socialo-libertaire du coin qui quant à lui, créera :
- une association "d'aide à la pendaison" qui aidera les gens ds leurs démarches pr trouver la bonne poutre
- organisera des manifs "pour le droit à la corde" (car "c'est un z'acquis social!")
- le suicide remboursé par la sécu

etc etc

si c'est le partage qui l'emporte ?
Alors le libéral créera une entreprise -intermédiaire pr faire se rencontrer ceux qui veulent partager et prendre 75% de commission
le socialo-libertaire quant à lui ...
etc etc


Et vous savez le pire ? ce n'est même pas cynique, c'est de la pure observation-déduction !
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Écrit par : zorglub / | 07/10/2011

A Guillaume de Prémare,

> Du dialogue avec le monde économique dominant (sans tabou aucun!) à la connivence non-dite avec ses injonctions compétitives destructrices, il n'y a qu'un pas, si vite franchi. Parlons vrai, comme nous y invite Ghislain Lafont !
Un souffle évangélisateur à Valpré, bousculant et illuminant des dirigeants d'entreprise retournés? Non, un cours d'entrepreneuriat et de réalisme économique gracieusement offert à l'Eglise, invitée à faire siennes les modalités gestionnaires de l'entreprise moderne et les principes éternels de la mondialisation de l'économie.
Au plus loin des «catholiques rebelles qui sont contre tout», l'avez vous senti vibrer le vent joyeux de la Bonne Nouvelle dans les travées du congrès d'affaire de Valpré ? Moi non.
Ne les entendez vous pas rigoler entre eux les cadres du Medef lorsqu'ils se voient suggérer d'introduire au sein du monde de l'entreprise les recommandations de la Doctrine Sociale de l'Eglise relatives à l'humanisme intégral et solidaire ? Moi si.
Ne nous leurrons pas sur ce que risque de signifier une « Eglise ouverte sur le monde », loin du sens que Vatican II a donné à cette ouverture.
Où est l'ouverture ? Où est la fermeture ? Où est le dialogue ? Où est la connivence ? Où est l' optimisme de façade? Où est la vivante espérance ?
Je crois que l'on induit en erreur en opposant l'« Eglise ouverte » (tout comme l'économie mondialisée, c'est bien connu, est « ouverte ») aux catholiques « rebelles et contre-tout » (tout comme les écologistes radicaux, c'est tout aussi connu, sont sectaires et pessimistes).
L'Eglise ouverte, certes, mais ouverte à quoi et à qui ? Aux sages, aux compétents, aux officiels, aux gens sérieux qui n'ont rien à apprendre et tout à enseigner des grands desseins suicidaires vers lesquels il s'agit d'orienter le monde, ou aux pêcheurs qui puent et qui rôtent, aux victimes de la compétitivité darwinienne, aux brisés de la vie qui dépriment devant leur télé ou qui jonchent les rues, écrasés sous le poids de leur déséspoir, ou criant dans le désert les prophéties dont ils sont bien souvent porteurs, et auxquelles si peu d'oreilles prètent attention ? S'il m'en donne l'autorisation, je raconterai un jour sur ce blog les rêves prophétiques qu'a fait et que m'a raconté un homme de la rue...
Eglise ouverte/catholiques rebelles. Je crains que voilà un subtile camouflage rhétorique de ce qui ressemble fort à nos complaisantes infléxions face aux redoutables manœuvres du démon, suggèrant en nos oreilles : « si tu aimes le monde et ton prochain, sois en phase avec lui », avant d'ajouter : « vends moi ton âme et je te donnerai la richesse ».
Imperceptibles glissements de la vocation chrétienne aspirée en une diabolique imposture, rendue douce en apparence par les appels incantatoires à la nouvelle évangélisation.
La « nouvelle évangélisation » ! elle a bon dos dans tout ça : http://nouvl.evangelisation.free.fr/index.htm.
Que ne s'en gargarise-t-on pas chez les paroissiens des beaux quartiers pour qui la vie semble être un fleuve aussi morne que tranquille.
Que n'en fait-on pas une  entreprise  jeune et conviviale, menée selon les codes du marketing ambiant, étouffant la profondeur d'un mystère de vie sous la couche de bien tristes et répétitives injonctions : être efficace, dynamique et attrayant, en un mot : plaire au plus grand nombre.
Ah ça la Bonne Nouvelle, on l'annonce, en veux-tu, en voilà : sur facebook, sur l'ipad, que des good news. Quel ennuie.
Tant d'aspects de la violence du monde, dont on ne reconnaît même plus qu'elle est violence, qu'on a subrepticement intégré en nos coeurs, refoulée derrière les sourires polis du masque évangélisateur.
Quelle terrifiante violence que celle enfouie et dissimulée sous les blancs manteaux de la respectabilité et sous l'inoffensive parure des bonnes intentions marquées du sceau du dynamisme et de l'enthousiasme.
Ce masque évangélisateur ne tiendra pas. Il ne résistera pas à la mise en lumière de ce qu'il est : le tampon de la moralité aposé sur le front de la Bête.
Alors, qu'est-ce qu'on fait Guillaume ?
Peut-être sommes nous plus que jamais appelés à écouter la réponse ferme apportée par Jésus au désert, face au tentateur. Ce dernier n'a qu'une obsession : faire miroiter à Jésus le mirage de l'opulence, l'entraîner vers les hauteurs afin qu'il contemple l'étendue et la splendeur des pouvoirs qu'il lui propose d'acquérir.
Dans notre monde malade de son esprit de séduction, l'attitude intransigeante de Jésus est pour nous tous un rempart. Il oppose à la tentation de son bien-être, de sa réussite et de sa splendeur, le choix de son rabaissement dans la pauvreté et l'humilité. « Alors, le démon le quitte. Voici que des anges s'approchèrent de lui, et ils le servaient» (Mt 4,11). En assumant cette pauvreté du manque, Jésus s'attire immédiatement à lui la grâce du recours providentiel.
Jésus est « contre » cette poudre aux yeux qu'on lui propose, au nom des promesses de la joie humble des béatitudes dont le discours suit le réçit des tentations. Refusant tout compromis avec le tentateur, Jésus imprime déjà en notre cœur l'horizon de la pauvreté évangélique.
Plutôt que les attraits des Palais reservés aux bien portants et les somptueux repas qui l'y attendent, Jésus fait le choix radical de s'asseoir dans la poussière au milieu des petits et de partager avec eux le pain fraternel.
Jésus annonce la Bonne Nouvelle du Royaume à tous les brisés qui l'entourent. Il promet la joie du ciel aux cœurs qui n'ont plus rien à perdre, plus aucune réputation à défendre, plus aucun bien à protéger. Il est la seule vraie richesse qui leur est donnée dans leur nudité.
En se faisant le plus petit parmi les petits, en s'écartant de la tentation de l'avoir, du savoir et du pouvoir, Jésus a désamorcé la violence du monde.
Le positionnement de Jésus face au tentateur et le mystère des Béatitudes qu'il révèle aux plus pauvres sont la grande boussole évangélique pour notre temps.
En Eglise, nous sommes placés face à ce choix et cet appel. Notre Eglise, elle l'annonce elle même, suivra son Seigneur dans son rabaissement salvateur. Non seulement il est vain de résister à son affaiblissement, mais il faut se convaincre avec toute notre foi que la bienheureuse pente de son déclin est celle de son salut.
Dans le monde qui est le notre, l'évangélisation à laquelle nous sommes appellés, n'est-elle pas avant tout annonce de la pauvreté qui vient, non pas tel un sombre horizon décrit par des prophètes de malheur, mais comme un fructueux terreau de vie et de partage? Je rejoins bien sûr ce qu'écrit fort bien Denis à ce sujet.
Je crois profondément que sous le grand fracas de l'effondrement civilisationnel qui vient, grand signe eschtatologique s'il en est, le grand souffle évangélisateur se déploiera dans le secret de nos cœurs brisés et appauvris.
Comme vous Guillaume, j'attends depuis bien longtemps l'accouchement à un monde nouveau, et je comprends et partage cette forme de solitude que vous décrivez face à la réaction de proches qui effrayés par cette perspective, ne peuvent faire autrement que de la nier.
Je le vis comme tout le monde, aussi dans l'inquiétude, pour mes proches, pour nous tous, de ce que nous réserve l'inconnu d'un monde de rareté et de violence archaïque, mais par dessus tout dans la foi vibrante que d'inimaginables grâces nous y sont promises...
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Écrit par : serge lellouche / | 08/10/2011

LA SEDUCTION ET LA COM'

> A propos de ce que dit Serge de « notre monde malade de son esprit de séduction », une chose me frappe. Cette séduction s’illustre précisément par ces rencontres, type Valpré, où les intervenants ne sont pas dans la relation mais dans la communication. Chacun s’efforce de séduire avec son message, mais de là à le partager dans un dialogue en vérité, exigeant, allant au bout des choses… il faut bien le reconnaître, la « relation », ça arrive de moins en moins souvent, surtout à l’heure du Net. Et je reconnais qu’il m’arrive moi aussi de désirer égoïstement faire passer mon message chez PP plutôt que d’entrer humblement dans le débat…
Aussi je goûte le sens de la relation de certains des acteurs de votre blog, cher PP. Merci à vous, Patrice, merci à Serge, à Guillaume, à Anne et à tant d'autres d’entretenir si vivement la relation… qui nous conduira avec sûreté au partage. Comme dit Anne : « c'est tellement bon le pain, et un bol de lait chaud entre les mains… »
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Écrit par : Denis / | 10/10/2011

JOIE LUCIDE

> Voir les problèmes du monde et le nuages s'amonceler veut simplement dire que nous sommes lucides, pas dépressifs. Mais comme chrétiens, nourris par l'amour du Christ nous devons être porteur d'espérance et de joie. Se regarder le nombril et pleurer, ce n'est pas chrétien (oui, je sais, facile à dire, non?). Le Christ pleurait sur Jérusalem, pas sur Lui. Cela ne sert à rien à s'acharner face à des aveugles par choix. N'est-il pas écrit:"si l'on ne vous écoute pas, détournez-vous, secouez a poussière de vos sandales et partez"? (ou quelque chose d'approchant, j'ai un trou:-) ). Je crois qu'à notre époque, l'importance des priorités sont le Christ tout le temps, ostensiblement et intimement, les pauvres et l'Eglise. Quand j'ai un gros coup de blues, je n'ai rien trouvé de mieux que l'adoration du Saint Sacrement. Mais il faut se donner, se laisser fouiller et là, c'est moins évident. Je résiste, j'ai mon orgueil ou simplement peur du chemin où cela peut m'entraîner. Je rejoins Anne et son image d'Assise. Dame pauvreté,oh oui, se dépouiller de nos biens mais aussi de nos "richesses" intellectuelles, rejoindre les "petits", les humbles. L'avantage d'être prof, c'est que l'on peut expérimenter cela tous les jours. Je peux exacerber mon orgueil face à des élèves ignorants tandis que Moi, je Sais, comme je peux descendre à leur niveau, me faire petit pour les aider, eux, à croître. Servir ceux à qui l'on doit ressembler si l'on veut avoir accès au royaume, voilà le chemin. Finalement, je crois que notre époque souffre d'avoir perdu la notion de service et de serviteur. Vos patrons de Valpré sont des "leader", si j'ai bien compris l'article de FC. Ils dominent, dirigent mais ne servent pas.
Allez, courage Guillaume, témoignons de l'Amour du Christ et laissons-nous guider par Lui; Il a les clefs et la boussole.
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Écrit par : VF / | 10/10/2011

Cher PMalo,

> soyez assurés de mes prières fraternelles.
Que les chemins de l'inconnu qui s'ouvrent de nouveau pour vous soient jalonnés des signes de la bienveillante providence.
Je suis plus qu'admiratif devant vos choix !
Courage à vous et au plaisir de vous rencontrer si vous passez par Paris.
Amitiés.
Serge
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Écrit par : serge lellouche / | 11/10/2011

A PMalo

> si vous êtes prêt à monter dans notre Pas-de-Calais,
j'ai quelques amis agriculteurs,sait-on jamais? je suis dans les pages blanches à Lumbres, n'hésitez pas! Je vous confie à notre vagabond bien-aimé, Benoît-Joseph Labre.
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Écrit par : Anne Josnin / | 12/10/2011

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