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15/06/2011

"Les Romans du Mont Saint-Michel" et les radios : entretien avec Virginie Marze (RCF)

  mont saint-michel

 

  

        Aujourd'hui aux Matinales :


 

                                        http://podcast.rcf.fr/emission/142231/162015

 

 

V.M. - On est accueilli dans ce livre par une fée… une fée de 88 ans, menue, « capable d’ouvrir la porte du cellier d’un coup de pied à l’horizontale… les fées ont de ces pouvoirs » ! cette femme existe-elle vraiment ou bien dès lors que vous mettez le pied sur le Mont, vous entrez dans une autre dimension ?

 

P.P. - Les deux à la fois. La première fois, en 1997, j'étais au Mont pour écrire un scénario, mais je suis tombé sur cette dame extraordinaire. Elle s'appelait Hélène Lebrec, elle avait la seule maison privée en haut de la ruelle commerçante, une maison du XIVe siècle avec une vue inouïe sur les grèves, et elle était la mémoire du Mont. Elle m'a invité dans cette maison pour me raconter les mystères du Mont. Elle m'emmenait courir les grèves (elle marchait plus vite que moi), et le soir elle m'emmenait dans le labyrinthe des énigmes et des étrangetés du Mont depuis des siècles, un trésor d'histoires authentiques qui est, oui, une sorte d'Autre Dimension. Ce fut le point de départ de mon livre. Mme Lebrec a rendu l'âme il y a six mois, et je lui ai dédié mon livre qui est sorti il y a huit jours : « à Hélène Lebrec, concitoyenne de l'archange ». Pendant sa vie terrestre elle était concitoyenne de saint Michel en tant que citoyenne du Mont. Aujourd'hui elle l'est en tant que citoyenne du Ciel. Finalement c'est le coeur du mystère du Mont Saint-Michel : le sanctuaire du Grand Passage vers l'éternité.

 

Vous avez intitulé ce livre les « Romans du Mont St Michel »   ce qui n’empêche qu’on y ouvre de nombreuses pages de l’Histoire  : Est-ce que vous auriez pu, avec un tel lieu, écrire un livre qui ne serait qu’historique ?


Le livre est formé par huit chapitres, que j'appelle « romans » mais ce sont des faits authentiques, qui concernent les gens : les aventures des gens de toutes sortes, hommes et femmes, qui ont eu affaire au Mont Saint-Michel depuis dix siècles. Ce sont des histoires souvent dignes d'Alexandre Dumas. Mais le Mont Saint-Michel n'existerait pas sans la mystique qui a construit ce sanctuaire invraisemblable, en haut d'un rocher, au milieu d'un désert marin unique au monde. C'est ce rayonnement spirituel qui fascine les foules depuis plus d'un millénaire. Et aujourd'hui 3 millions de touristes venus de la terre entière et en majorité non chrétiens, mais toujours fascinés. D'où vient de rayonnement sur des foules séparées par l'abîme du temps et par des cultures et des mentalités aussi différentes ? C'est le sujet de mon enquête.


Le Mont St Michel, dites-vous, est « un sanctuaire où se déchaînent toutes les forces humaines : la guerre, l’argent, le pouvoir… Et par ailleurs, le Mont attire la poésie, les puissances du rêve inspirées par le ciel, la mer et les vents » Est-ce que c’est la lutte permanente entre le spirituel et le matériel que vous voulez mettre en évidence ?

 

Dès sa fondation, le Mont Saint-Michel, c'est la mystique qui doit résister au politique. Ca commence avec les Mérovingiens et ça continue encore aujourd'hui, en passant par les ducs de Normandie, les rois de France, Napoléon, Louis-Philippe... Je raconte ces histoires fracassantes et pleines de surprises. Mais attention, ce combat contre le politique, ce n'est pas l'esprit contre la matière ! La mystique chrétienne ne combat pas la matière, elle la transfigure, c'est le mystère de l'Incarnation. Le Mont Saint-Michel est un monument de granit, mais un granit spirituel, avec pour coeur la présence mystérieuse de l'archange qui appelle à se tourner vers Dieu. A l'aube, au mois de juin, quand le soleil se lève sur Avranches, toute la façade orientale du Mont devient rose comme de la chair vivante, et toutes les fenêtres étincellent comme des regards.

 

En quatrième de couverture, on annonce un « livre-enquête ». Qui dit  enquête dit  postulat : quel a été le vôtre ?

 

Enquête ne veut pas dire postulat mais curiosité, et même passion si on veut... Je suis tombé amoureux du Mont Saint-Michel à l'aube d'un matin de juin. La fée du Mont, Hélène Lebrec, m'a donné la première clé du labyrinthe. Je me suis lancé dans cette exploration à travers le temps. Mon seul postulat était de rester ouvert à toutes les surprises sans vouloir imposer mon point de vue, et je peux vous dire que je n'ai pas été déçu.

 

Le Mont est un des lieux les plus visités au monde : qu’est-ce qui y attire autant les hommes et les femmes ?

 

Le monument incroyable dans son désert marin, 500 km2 de grèves envahies par les marées : « Saint Michel au péril de la mer », comme on disait à l'époque de la Chanson de Roland. Le Mont est un écosystème matériel et spirituel à la fois. Il faut traverser la mer à pied sec pour monter vers l'ouest en haut du rocher, jusqu'à l'abbatiale, et là on fait demi-tour vers l'est, le soleil levant, en entrant dans l'église abbatiale : c'est une démarche initiatique, une répétition du grand passage vers l'éternité. La plupart des visiteurs d'aujourd'hui ne le savent pas mais ils sentent quelque chose, de profond et de mystérieux, et c'est cette sensation, ce sentiment, qu'ils gardent de leur visite. Un sentiment qui transperce toutes les différences culturelles, parce qu'il est commun à toute l'humanité.

 

Qui garde les clés du Mont St Michel ?

 

Les clés du Mont sont en plusieurs mains : celles des Monuments nationaux, en la personne de l'administrateur. Celles de la foi, en la personne des moines et des moniales des Fraternités de Jérusalem au Mont. Celles des conférenciers animateurs et des guides de l'abbaye, qui instruisent des centaines de milliers de touristes. Et peut-être un peu dans les miennes, à travers mon livre qui donne les clés aux lecteurs. Le Mont appartient à toute l'humanité.