28/04/2011
Renault délocalise même sa recherche-développement !
...révèle Le Canard enchaîné (27 avril) :
Qui dira encore que les multinationales « françaises » « créent de la richesse en France » ? Selon les révélations du Canard, Renault – dont la « stratégie » consistait (officiellement) à localiser en France sa recherche-développement – délocalise ce secteur aussi : vers la Roumanie, l'Inde et l'Argentine.
C'est en 2005 que Patrick Pelata proclamait sa pseudo « stratégie ». Résultat : en 2011, 35 % des salariés de Renault travaillant sur les nouvelles productions ont été installés hors de France. Prenant l'exemple de la boîte de vitesse des futurs modèles Renault-Nissan, le Canard indique que cette boîte sera fabriquée par Getrag Ford : « des pièces Renault conçues à l'étranger et fabriquées par un sous-traitant américano-anglais ! »
La firme automobile imite en cela le comportement de toutes les multinationales. Celles-ci n'ont plus aucune attache avec leur pays d'origine, et ce phénomène de désertion n'est compensé par rien.
C'est le système global qui veut ça ? Oui. Raison pour laquelle les grandes encycliques sociales demandent que l'on change ce système !
Suggestion aux organisateurs de dîners-débats cathos pour élèves des grandes écoles : et si vous invitiez des économistes indépendants qui leur expliqueraient tout ça, au lieu de vous en tenir aux membres du gouvernement et aux managers du CAC40 ?
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12:25 Publié dans La crise, Social | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : capitazlisme, christianisme, catholicisme, canard enchaîné, renault, nissan, roumanie
Commentaires
LE MODÈLE IMPLICITE
> Tout à fait d'accord avec vous.
Ce que je constate pour ce que je vois des multinationales, le modèle implicite dans la têtes des dirigeants est le suivant:
-une équipe de direction de haut niveau dans un hôtel particulier à Paris et très bien payés
-les salariés peu payés dociles, au mieux dans une banlieue en France mais plutôt en Europe de l'Est ou en Asie.
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Écrit par : ludovic / | 28/04/2011
LA NOUVELLE ETAPE
> C'est la nouvelle étape de la mondialisation : après avoir délocalisé la production, la plupart des grosses boîtes commence à délocaliser la conception et le marketing. En effet, il n'est pas difficile de trouver des ingénieurs bons marché et compétents si on les cherche dans les pays émergents. Et de toutes façon, même en France, l'externalisation fait que dans les boîtes d'ingénierie, la part des prestataires peut atteindre le tiers des effectifs en période de surcharge (à ce que je vois en tant que prestataire dans le monde de l'ingénierie pétrolière). Des personnes qui coûtent plus cher, mais qu'on peut faire partir en période de creux sans qu'on parle de plan social dans les médias. Bref, à un niveau différent bien sûr (il serait indécent de mettre sur le même plan la détresse ouvrière), la précarisation a commencé à toucher même les couches supérieures. Il n'y a vraiment que les ultra-riches qui ont quelque chose à gagner de la mondialisation.
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Écrit par : Gilles Texier / | 28/04/2011
DANS LE MUR
> Entièrement d'accord avec votre article. Nous allons vraiment dans le mur. Ces situations sont hallucinantes. Et le pouvoir politique, et pas qu'en France, est incapable de proposer des alternatives. Le silence des responsables politiques est à noter, comme toujours. Leur arrive-t-il de penser vraiment, ne serait-ce qu'un peu, au bien commun de la nation ? A désespérer. En tout cas ma décision de voter nul aux prochaines élections prend tout son sens de jour en jour.
BCM
[ De PP à BCM - Des grandes entreprises apatrides aux "marchés" destructeurs de la société, nous sommes dans la guerre de l'Argent contre les peuples. On n'en sortira (si l'on en sort) que par une révolution anticapitaliste. ]
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Écrit par : BCM / | 28/04/2011
GHOSN
> Colette Neuville (Association de défense des actionnaires minoritaires) : " C'est agaçant d'entendre que Carlos Ghosn est formidable. Sur le plan du développement commercial et industriel, c'est loin d'être fameux et sur le plan de la gouvernance, c'est un échec cuisant."
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Écrit par : Madeleine D. / | 29/04/2011
LEUR INACTION
> Ce n'est pas le silence des responsables politiques qui est choquant (on en trouve toujours pour pleurer sur les délocalisation), c'est leur inaction.
Lisons l'oeuvre de M. Allais, seul français prix Nobel d'économie, qui rappelait certaines choses de bons sens, comme le fait que le libéralisme n'avait de sens qu'au sein de zones homogènes.
A cet égard, la suppression des barrières douanières avec les pays à faible coût de main d'oeuvre est une des décisions les plus dramatiques de l'idéologie de l'union européenne.
C'est sur ce genre d'action que l'on attend nos hommes politiques. Mais cela nécessite de s'opposer au diktat de la pensée unique. Le pire c'est que je pense que c'est pas seulement par intérêt (collusion avec les milieux d'affaires) mais c'est par idéologie, crainte de passer "ringard", "frileux".
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Écrit par : ludovic / | 29/04/2011
PAS DE PROPAGANDE
> De PP à tous : je rappelle que ce blog ne met pas en ligne les argumentaires de partis politiques.
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Écrit par : PP | 29/04/2011
> mais alors, pourquoi parler de politique ?
BG
[ De PP à BG - Le destin collectif est une chose, les boutiques partisanes (ces syndicats d'appétits) en sont une autre... J'ai assez fréquenté les partis en trente ans de journalisme, pour savoir ce qu'ils valent - quels qu'ils soient ! ]
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Écrit par : Benoit Girard / | 29/04/2011
PESSIMISME ?
> Votre pessimisme se comprend, mais
1) La gestion des appétits n'est-elle pas, dans une certaine mesure, l'objet même de la politique (rendez à César...)?
2) Comment faire autrement, si l'on souhaite rester dans la légalité, que de passer par les partis même si cela nous répugne ?
BG
[ De PP à BG :
- Si l'on veut participer (à ses frais) à l'installation de nouveaux notables, grands et petits, sur des strapontins officiels, on peut militer dans un parti. Déception et frustration seront au rendez-vous.
- Si l'on veut évangéliser tout en servant le bien commun de la société, la politique locale est une possibilité aléatoire, mais la vraie formule est de monter des structures indépendantes, sociales et non électorales, capables de diffuser la vision chrétienne de la vie en société et d'en faire partager les mobiles (seule chose qui compte finalement).
- Tout le reste est combat de retardement envers l'inévitable, donc temps perdu.
- Le pessimisme serait de broyer du noir en pensant à "tout ce qu'on va perdre". Mais qu'avons-nous à perdre ? Sommes-nous liés à cette société factice, condamnée d'avance ?
Sa chute est inévitable.
- Savoir que l'inévitable existe n'est pas du pessimisme mais du simple réalisme, à base démographique notamment. Militer contre la chute de l'empire romain ne sert à rien si l'on est en l'an 411. Soutenir ceux qui se prétendent capables de l'empêcher de tomber, est une naïveté qui ne servirait qu'eux (et encore : à très court terme).
- Prévoir la suite et se mettre en mesure de la vivre est la seule attitude raisonnable : et c'est l'attitude chrétienne. ]
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Écrit par : Benoît Girard / | 29/04/2011
METISSER UN PEU LE CASTING
> Si les fameux "réseaux cathos" (?) voulaient bien métisser un peu le casting de leurs rencontres-débats (avec autre chose que l'extrême droite pour les uns, le gouvernement et le Medef pour les autres), ça pourrait commencer à présenter de l'intérêt. Pour l'instant c'est pathétique de conformisme.
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Écrit par : campion / | 29/04/2011
PROFONDEURS
> Je partage pour l'essentiel votre analyse, y compris lorsque vous dites qu'il eût été absurde, en 411, de défendre l'Empire romain.
Il y a toutefois une différence essentielle entre 411 et 2011.
En 411, miné de l'intérieur par la révélation chrétienne, un système politique se fissure et s'apprête à s'effacer devant l'influence vivifiante de l'Église.
Aujourd'hui, c'est la dynamique inverse : nourri de ces mêmes idées chrétiennes "devenues folles", le système politique mondial est en train de se muer en néo-religion totalitaire, s'arrogeant la prétention de dire le bien et le mal.
Jamais la notion de "fin des temps" n'a paru si proche. Toutefois, nul ne sait combien d'années, de décennies ou de siècles nous séparent de l'apocalypse. Dans l'intervalle, il faut bien tenter de desserrer l'étau, de sauver notre liberté un peu comme le naufragé qui tente désespérément de remonter à la surface même si l'eau est à 1° et qu'il n'a aucune chance de survivre. Un peu comme les Vendéens en 1793. Cela n'a servi à rien, me direz-vous? Mais il y a des moments où l'insurrection relève de l'impératif vital, indépendamment de ses chances de succès.
Vous me direz que ce que je viens de décrire a peu à voir avec l'engagement au sein d'un parti politique. Je précise que de mon point de vue, tel ou tel parti ne détient pas LA solution AU problème. En revanche, il me semble que tel parti est mieux capable que d'autres, non de "sauver ce qui peut l'être", mais de s'insinuer dans les interstices du système, de le mettre devant ses contradictions et de faire exploser "ce qui en reste".
BG
[ De PP à BG - Eh oui, c'est qui nous sépare : je ne crois pas une minute que le parti en question soit capable de ce dont vous le créditez. Ni lui ni aucun autre, d'ailleurs, le problème étant bien trop profond... ]
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Écrit par : Benoît Girard / | 29/04/2011
CE PARTI
> Je ne cherche pas à créditer ce parti de quoique ce soit a priori. Il s'agit simplement de constater le positionnement qu'il occupe sur l'échiquier politique et d'en déduire qu'il peut éventuellement jouer un certain rôle dans le déblocage de la situation, indépendamment des qualités (il y en a) ou des défauts (ils sont réels...) de ceux qui le composent. La suite... Dieu seul la connaît ! Elle dépendra en grande partie de ceux à qui reviendra la lourde responsabilité de gérer le désastre.
Merci en tous cas pour cet intéressant débat qui me passionne d'autant plus que je le porte en moi-même depuis longtemps.
Et merci pour votre travail d'information et de mise en perspective !
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Écrit par : Benoît Girard / | 29/04/2011
@ Benoît
> Vous dites à propos de la chute de l'empire romain : "En 411, miné de l'intérieur par la révélation chrétienne, un système politique se fissure et s'apprête à s'effacer devant l'influence vivifiante de l'Église."
Rome n'a pas eu besoin du christianisme pour assurer sa décadence : paresse, plaisirs, faiblesse démographique de Rome, on mise sur l'héritage, on croit que le prestige est un rempart, perte des vertus militaires, on fait assurer la défense de l'empire par des barbares etc. Et si l'empire s'est effondré, le meilleur de la civilisation romaine ne s'est pas perdu. Idem pour la Grèce antique. Et idem, je pense, pour la chrétienté. Le meilleur de ces 3 civilisations, leur génie, n'est pas perdu : la capacité d'ordre politique, administratif et juridique de Rome, les merveilles philosophiques et littéraires de la Grèce, le trésor spirituel de la chrétienté. Ces atouts sont entre nos mains pour reconstruire après l'effondrement qui vient, car ils sont une connaissance, une connaissance qui se transmet.
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 30/04/2011
EXPLICATION
> Je ne cherche pas à défendre Renault, mais voici l'explication officielle: bénéficier du décalage horaire pour faire travailler une équipe mondiale sur un projet de developpement en 24/24. Les Indiens commencent puis passent le dossier aux Francais qui le transmettront aux Argentins qui à la fin de leur journée le rendent aux Indiens et la boucle est bouclée ! Cela permet (sur les belles présentations aux assemblées générales) de réduire les délais de développement et de sortir des nouveaux véhicules plus fréquemment. (Nouveaux véhicules = plus de vente = plus de marge)
Autre point dans R&D il y a Développement, soit soutien aux usines qui produisent (modification de ligne, amélioration continue, cost reduction), le Développement ne fait malheureusement que suivre le mouvement d'exil des usines et des ventes de voitures.
Dernier point l'Etat est quand même un très mauvais actionnaire car il pourrait très facilement infléchir la politique de Renault mais au risque de diminuer les dividendes qu'il perçoit...(Ah Bercy...)
En aparté l'Etat actionnaire a été plus que nul dans l'affaire bidon d'espionnage où la hiérarchie de Renault n'a pas été réellement sanctionnée.
Merci pour ce blog très lumineux.
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Écrit par : SL / | 30/04/2011
FUMEUX
> "...bénéficier du décalage horaire pour faire travailler une équipe mondiale sur un projet de développement en 24/24. Les Indiens commencent puis passent le dossier aux Français qui le transmettront aux Argentins qui à la fin de leur journée le rendent aux Indiens et la boucle est bouclée !"
Euh... avez-vous déjà travaillé en R&D ?
Cela me paraît totalement fumeux, comme explication "officielle"... Ce qui serait possible en production (les 3x8) n'est bien évidemment pas possible en R&D ; qu'est l'homme dans un tel système ? Moins qu'une machine ? Or la R&D repose sur la créativité humaine, et cette créativité personnelle ne circule pas sur fibre optique.
Si quelqu'un en sait plus, merci de partager !
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Écrit par : PMalo / | 30/04/2011
JE NE VOIS PAS
> Après 40 ans passé dans l'industrie automobile, je ne vois pas comment on peut se passer un dossier de R&D en 3x8 à travers le monde. Il vaut mieux considérer la différence de salaire entre la France et l'Inde pour expliquer ces délocalisations...
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Écrit par : Pierre Huet / | 02/05/2011
> Merci P. Huet pour votre confirmation. C'est abracadabrantesque.
SL, d'où tenez-vous cette "explication officielle" ?
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Écrit par : PMalo / | 03/05/2011
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