16/07/2010
La crise est-elle soluble dans la com' ?
En 2011-2012, L'Elysée va dépenser 120 millions d'euros en prestations de marketing psychologique :
Selon le cahier des clauses techniques de ce contrat (révélé dans la presse de ce matin), il s'agit de « produire» des «contenus » créant « une perception différente du message par le public qui ne le considère pas alors comme de la publicité ». Autrement dit : de fabriquer du storytelling, truc ainsi défini par les spécialistes : « ensemble de techniques de narration et de mise en scène conférant à un message politique les apparences d'une information objective ». Le politique se résorbe définitivement dans le marketing commercial : « L'enjeu pour les politiques est de mieux cibler les publics, et donc les électeurs, en quelque sorte de cliver les citoyens sans le dire, c'est-à-dire de s'adresser à chaque citoyen, à chaque audience, en lui faisant entendre ce qu'elle veut entendre », dit Cynthia Fleury, auteur de l'essai La Fin du courage (Fayard). Pur marketing : d'abord créer une impression de familiarité intime, ensuite jouer sur la sensibilité de l'auditeur, enfin le persuader qu'on peut venir compassionnellement à son secours .... « Comme si l'époque invitait les pouvoirs politiques à bâtir des flux d'informations construits sur des fictions », commente Guillaume Dasquié (Libération, 16 juillet).
On ne s'étonnera pas de cette dissolution du politique, qui n'était depuis longtemps qu'une annexe de la société marchande. Mais on soulignera deux points :
a) cette dissolution fait disparaître la notion de bien commun, et montre l'incompatibilité entre l'ère néolibérale et la pensée sociale catholique ; on mesure l'inanité de la présence de « catholiques en politique » dans ce paysage de cynisme virtualiste et manipulateur. L'action des chrétiens dans la cité ne peut être que de rupture avec ce système.
b) La crise n'est pas soluble dans la communication. « La meilleure com' du monde finira toujours par se heurter à la réalité. C'est tout le problème aujourd'hui de Nicolas Sarkozy : il existe un fossé entre le contenu de ses discours et la perception par les Français des résultats de sa politique, notamment économique et sociale. » (Paul Quinio, Libération, 16 juillet). Tout ça étant voué à l'effondrement, la prudence élémentaire consiste à ne pas y entrer ; ou à en sortir.
11:44 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : politique
Commentaires
ADMIRABLE
> En d'autres termes, quelque chose qui se situe à mi-chemin entre propagande et manipulation... Et ce sont les victimes de cette manipulation qui la financent, c'est admirable...
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Écrit par : Hubert Houliez / | 16/07/2010
CONTRECULTURE ET SUBVERSION
PP dixit : "L'action des chrétiens dans la cité ne peut être que de rupture avec ce système." En 2 mots : contreculture, subversion.
B.XVI dixit (aux jeunes de Malte) : « Les valeurs évangéliques, encore une fois, deviennent une contre-culture.»
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Écrit par : Guillaume de Prémare / | 16/07/2010
LE VRAI POUVOIR
> C'est extraordinaire et fascinant ce pouvoir pris par les conseillers en communication et les psys. Est-ce un héritage des régimes totalitaires du XXe et de leur capacité à manipuler les masses? En tout cas, oui, il est urgent de quitter le monde politique actuel et ses compromissions. Mais il faut bien comprendre que critiquer le système actuel, ses partis, ses membres, ses mensonges, ne veut pas dire condamner la démocratie et la chose publique. Mais on ne pourra y participer qu'après la chute de système corrompu et corrupteur.
vf
[ De PP à VF - La manipulation psychologique de masse est aujourd'hui le vrai pouvoir. Il est détenu par l'argent. D'où l'anachronisme de ceux qui s'obstinent à dénoncer le "pouvoir de l'Eglise" (!). Et que reprochent-ils à ce "pouvoir clérical" qu'ils dénoncent ? De contredire les diktats de la psychologie manipulatrice de masse. CQFD. ]
cette réponse s'adresse au commentaire ]
Écrit par : vf / | 16/07/2010
PAS PEUR
> Encore faut-il ne pas avoir peur. Christ Hope est l'anagramme de christophe, alors n'ayons pas peur d'avancer en eaux profondes !
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Écrit par : Christ Hope / | 16/07/2010
UGLY KARL
> Georges W Bush avait un excellent communicateur dans ce genre: Karl Rove (http://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_Rove) Il était allé jusqu'à mettre des micros dans son propre bureau pour accuser les démocrates de les y avoir placés. Et il me souvient de succulents articles du 'Monde' où l'on nous expliquait qu'il était spécialiste dans la technique de créer un discours politique ciblé sur chaque type d'électorat de telle façon à le flatter. Au risque qu'en regardant la télévision on s'aperçoive que Georges W Bush se contredisait...
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Écrit par : ND / | 16/07/2010
PAS SI NOUVEAU
> La conclusion de Ugly Karl est valable mot pour mot en France en remplaçant le nom de Bush par celui de Sarkozy.
Mais est-ce vraiment si nouveau?
Un certain "je vous ai compris" n'était-il prononcé pour faire entendre ce que le Pied-Noir voulait entendre? et le faux attentat de l'av. de l'Observatoire ne valait-il pas du faux espionnage?
Peut-être est-ce la dynamique propre de nos système démocratiques de donner le pouvoir à qui sait manipuler ce type de com'.
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Écrit par : Pierre Huet / | 18/07/2010
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