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28/08/2007

Le problème turc est-il soluble dans le vocabulaire ?

Une nouvelle locution à la radio française :


 

 

Ce matin à 7 h  30, France Inter a déclaré que le ministre turc Abdullah Gül, président élu à Ankara (et membre du parti islamiste AKP), n’est plus un islamiste. La journaliste a dit en effet, d’une voix neutre : « L’ancien islamiste Abdullah Gül… » Or la femme de M. Gül est ostensiblement voilée, jusque sur la tribune des grands meetings populaires. Il n’hésite jamais à évoquer les conflits Europe-Islam d’autrefois. Et il est l’une des bêtes noires des nationalistes kémalistes :  d’après eux, l’AKP joue la carte Bruxelles-Washington mais reste le fer de lance de l’islam turc profond. En affirmant que Gül et Erdogan sont d’ « anciens » islamistes, la radio française plaide donc en leur faveur. Pour quelle raison ? Ne sur-interprétons pas. Mais constatons.

 

(Les mêmes radios commentent  le  discours de politique internationale prononcé hier par Nicolas Sarkozy :  à   leur avis,  il « entrouvre  la porte »  à la candidature européenne de la Turquie. Nos médias s’en réjouissent. En fait, le propos de Sarkozy est nuancé.  Il ne s’oppose pas à la poursuite des négociations euro-turques, mais souhaite que ce soit  sur les dossiers qui pourraient aussi déboucher sur une simple association... Et il rappelle que le statut d'association aurait sa préférence ainsi que celle des Français. Il s’agit donc, de sa part, d’une posture  diplomatique compliquée. Elle ne sera pas tenable longtemps, compte tenu de la pression de Bruxelles et de la Maison Blanche pour « la Turquie dans l’Europe ».

En tout cas,  Sarkozy n'a pas qualifié d’ « ancienne islamiste » l’épouse voilée d'Abdallah Gül.

 

PS –  Un atlantiste m’accuserait de faire du « Turk bashing » (de l’anti-turquisme). Ce n’est pas le cas.  J’essaie de décrire les choses dans leur réalité nette, au lieu de les noyer dans le « souhaitable » comme tant de journalistes parisiens. Ce blog n'a d'ailleurs aucune ligne politique, comme on peut s'en apercevoir au jour le jour.

 

Commentaires

Le mot "islamiste" recouvre bien des choses...

> J'avais lu sous la plume de je ne sais plus quel commentateur que le Parti pour la justice et le développement ou AKP (Adalet ve Kalkınma Partisi) n'était pas une organisation extrémiste, mais un parti réformiste modéré, sorte de parti démocrate-musulman pouvant être comparé à la démocratie chrétienne.
Mais les partis et institutions "laïques" (dont l'armée)craignent que ce ne soit qu'une façade...
Difficile d'y voir clair sans bien connaître la complexité de la vie politique turque, mais il faut sûrement se méfier des mots et des simplifications abusives !

Écrit par : Michel de Guibert | 28/08/2007

L'Europe a trouvé sa tête de Turc.

> Mais ne serait-il pas préférable de connaître clairement la position du président français avant de partir dans des supputations ou des conjectures diverses quant à la nature "islamiste" du pouvoir turc ou son degré d'islamisme.
Le discours de N. Sarkozy semble s'infléchir. Il est difficile d'être à la fois contre l'entrée de la Turquie et pour un rapprochement avec les USA. Cet infléchissement est le prix à payer.
La religion fait-elle obstacle à l'entrée de la Turquie ? N'est-ce pas tout simplement qu'une question de géographie et de culture ? L'islam apparaît surtout dans ce débat comme le prétexte très opportun, le refouloir tout trouvé pour entretenir l'angoisse et le refus.

Écrit par : Qwyzyx | 28/08/2007

LES CRÊPES DE LA CHANDELEUR

> Bonsoir,

Tout d'abord, j'aimerais savoir si le terme "islamiste" est l'équivalent moderne de "musulman" dans le langage médiatique ou bien s'il y a une nuance ?
Par ailleurs, je crois me souvenir qu'une collaboration entre la Turquie et l'Europe faisait partie des projets que N. Sarkozy énonçait lors de la campagne électorale, si je ne me trompe ? Donc tout est normal...et logique aussi si Bruxelles et Washington s'y intéressent un peu...
Je pense que la question religieuse est importante mais pèse certainement moins dans la balance des négociations de ce qui me semble signifier davantage un partenariat économique, qu'elle ne le ferait dans le cas d'une alliance politique que supposerait l'intégration de la Turquie en Europe, hypothèse somme toute peu probable... Je regrette beaucoup que l'on ne débatte pas davantage sur la question de l'Islam, car sa réalité habite la vie politique et culturelle de la Turquie et habiterait la vie politique de l'Europe si entrée il y avait.
"Angoisse" et "refus" comme le suggère "Qwyzyx" naissent du refoulement; et pour bien choisir, il faut connaître !
Ayant des amis musulmans modérés, je peux affirmer à Michel de Guibert qu'un parti musulman ne peut pas être comparé à une démocratie chrétienne, ils n'ont pas les mêmes références de vie. Nous ne pouvons pas vivre ensemble si nous ne comprenons nos différences et si nous ne les acceptons pas, alors je ne vois pas au nom de quelle idée neuve, prétexte peut-être à un sujet tabou, il serait interdit de se poser la question.
Pour ma part, ce qui change par exemple dans mon quotidien lorsque je suis avec l'une ou l'autre de mes amies : les crêpes de la Chandeleur... pas de crêpes à la Chandeleur, "parce que c'est chrétien"... eh oui...

Écrit par : Lunette | 29/08/2007

MEFIANCE

> Concernant la Turquie, il faut se montrer méfiant vis-à-vis de ce que racontent nos médias qui sombrent souvent dans la "géopolitique de la petite culotte", consistant à définir les bons et les méchants en fonction des modes vestimentaires chez les femmes (voile, string, ...).

Il est important de rappeller ce qu'est la "laïcité" turque : c'est un système de domination totale du politique sur le religieux où les prêches des imams sont écrits au ministère de l'intérieur. C'est à dire l'inverse de la laïcité vue comme une séparation des pouvoirs politiques et religieux.

Le problème fondamental que pose M. Gül aux chancelleries européennes : non pas le voile de son épouse, mais le risque d'un coup d'état de l'armée auto-proclamée garante de la laïcité ... et de la démocratie.

Il ne faut certainement pas idéaliser l'AKP qui a bien des défauts, mais il ne faut pas sombrer dans sa diabolisation et par ricochet à l'idéalisation d'un mouvement laïc-nationaliste militaire dont l'un de ses adeptes les plus turbulents a bien failli nous faire bien du mal un certain 13 Mai 81.

Écrit par : Fab | 29/08/2007

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