Sainte Ségolène, vraiment ?

Personne n'a encore demandé (en direct) à Ségolène Royal ce qu'elle pense de la religion, comme nous le suggérions dans la note du 21. Mais un article grinçant et drôle, dans Le Monde, s'interroge sur le ton de la candidate : 

Dans Le Monde du 22 novembre, Dominique Dhombres ironise sur le ton (étrange, c'est vrai) des professions de foi électorales de Ségolène Royal :

"Nous allons implorer tous ensemble, si vous voulez bien maintenant vous agenouiller, la madone absolue, 'celle qui est venue', comme Jeanne d'Arc, bouter la morosité et le désespoir social hors du royaume de France... Lundi soir, face à PPDA légèrement incrédule mais respectueux du phénomène, en excellent professionnel de la communication qu'il est lui-même, elle a dit qu'elle était 'habitée'. Elle a aussi défini la fonction qu'elle brigue. Etre présidente de la République, 'c'est d'abord aimer la France pour que les Français s'aiment en elle'. Vous en voulez plus ? Marie, patronne primaire de la France, et Jeanne d'Arc, patronne secondaire, se présentent ensemble à l'Elysée..."

D'accord, la comparaison entre Mme Royal et Jeanne d'Arc (a fortiori la Vierge Marie) est assez lourde : elle sent l'anticléricalisme version 1930   - époque où les anticléricaux savaient que la France avait deux saintes patronnes.

D'accord aussi, une partie des Français (combien ?) doit partager l'irritation de Dominique Dhombres devant le ton extatique de Ségolène Royal, et soupçonner que ce ton doit plus aux spin doctors* - comme on dit à Londres - qu'à la fréquentation des sanctuaires.

Reste un troisième aspect de la question : la popularité apparente de la candidate socialiste auprès de l'électorat. Tant que les sondages seront aussi massifs, cette popularité voudra dire quelque chose ; contrairement à divers personnages qui règnent dans les enquêtes mais s'effondrent dans les urnes, Ségolène Royal paraît exercer un attrait réel. Cet attrait a-t-il un lien avec le ton bizarre qu'elle emploie ?

Un fait est là : les Français ont l'air (pour l'instant) de négliger l'inconsistance du fond du discours Royal. A en croire les sondages,  ils apprécient sa forme.  Cette forme est extatique. Mme Royal nous parle très peu de la politique et énormément de notre moral. Elle fait de la psychologie collective. Elle se pose, comme dit Dhombres, en "mère de l'humanité souffrante". C'est gros, mais ça a l'air de marcher. Faut-il y voir l'effet d'une lassitude des Français envers ce qui s'est pratiqué depuis trente ans sur la scène publique ?

 

ps/  Personne n'a encore demandé à Ségolène Royal ce qu'elle pense de la foi chrétienne et du catholicisme. Les ironistes parient qu'elle répondra : " J'en pense ce que les Françaises et les Français en penseront".

 

--------

(*)  stratèges en communication, en image et en coups tordus.