15/03/2023
Question brûlante autour du dixième anniversaire
Pourquoi une partie des catholiques français persistent-ils à ignorer l'enseignement social du magistère ? C‘est ma chronique à Radio Présence (Toulouse Midi-Pyrénées) et Radio Fidélité Mayenne :
► Cette semaine, dixième anniversaire de l’élection du pape François. C’est l’occasion de nous interroger : alors que ce pape a signé dès 2015 un document d’une extrême importance théologique et sociale, l’encyclique Laudato Si’ accueillie avec enthousiasme par les catholiques de beaucoup de pays (surtout les pays pauvres), pourquoi une partie des catholiques des pays riches – notamment la France – persistent-ils dans leur indifférence envers les thèmes économiques, sociaux et environnementaux de l’encyclique ? Cette indifférence se manifeste aujourd’hui “sur les réseaux”. Elle se manifestait déjà sous Jean-Paul II et sous Benoît XVI : deux papes pourtant qui critiquaient, chacun dans son style, le système économique et le saccage de la planète comme le fait leur successeur François… L’indifférence d’une partie du public catho ne vise donc pas la personnalité du pape régnant : elle vise bel et bien les préconisations du magistère pontifical en matière économique, sociale et environnementale.
Comme si une partie du public en restait à l’idée fausse, et hétérodoxe, selon laquelle l’Eglise ne devrait s’occuper que de de la morale des familles mais ne pas se mêler des problèmes de la société et de l’économie…
Or ce n’est pas du tout ce que dit l’Eglise dans le sillage de l’Evangile. Ouvrez le Compendium de la doctrine sociale catholique établi en 2004 par un conseil pontifical et dédié à Jean-Paul II : la moitié de ce manuel est consacrée au travail humain, à la vie économique, à la communauté politique, à la vie internationale, à l’environnement et à la paix dans le monde ! L’encyclique Laudato Si s’inscrit exactement dans cette perspective. Elle le fait avec une précision d’information, une clarté et une vigueur dans les préconisations qui ont renouvelé le style pontifical. C’est pourquoi elle a été étudiée et mise en œuvre dans beaucoup de paroisses françaises – mais seulement par une minorité de “christifideles laici”, comme les appelait Jean-Paul II dans l’exhortation apostolique du même nom, soulignant que la doctrine sociale fait partie de la théologie morale et que les fidèles laïcs sont tenus de l’accueillir avec amour et loyauté.
En cet anniversaire de l’élection du pape François, quoi de plus opportun que de relire Laudato Si’ ? Ou de découvrir cette encyclique, pour ceux qui ne l’auraient pas encore lue ? Ceux qui le feront ne le regretteront pas.
10:20 Publié dans Pape François | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : pape françoius
Commentaires
LA VOIE N'EST PAS LA BONNE
> Au-delà de nos frontières, le très catholique Joe Biden serait avisé de relire Laudato Si : "Sleepy Joe" vient en effet d'approuver un projet géant d'extraction pétrolière en Alaska, signe que la réduction de la dépendance états-unienne à l'or noir n'est pas pour demain :
https://www.france24.com/fr/plan%C3%A8te/20230313-projet-p%C3%A9trolier-en-alaska-les-d%C3%A9fenseurs-du-climat-d%C3%A9noncent-l-effroyable-trahison-de-joe-biden
Le Christ nous demande pourtant de ne pas jouer aux hypocrites aux premiers rangs des synagogues : rien n'a changé en deux mille ans, les grands cathos agenouillés à la messe (devant les caméras) n'ont aucun scrupule à autoriser des projets monstrueusement écocides, en adressant par la même occasion un bras d'honneur au magistère pontifical.
Jancovici a raison : c'est bien vers un scénario à +5 voire +6 degrés à la fin du siècle que l'humanité se dirige, scénario apocalyptique où la vie sur Terre relèvera du défi quotidien. Il n'est jamais trop tard, mais la voie actuellement suivie au plan mondial n'est pas la bonne.
______
Écrit par : Philippe de Visieux / | 16/03/2023
TROP D'IGNORANCE
> Je me demande si l'Église catholique n'a pas eu tendance à trop valoriser une "Sainte ignorance" qui se retourne maintenant conte elle. J'anime un groupe de Disciples missionnaires et nous commençons à parler de Laudato si'. Personne ne connaît et personne ne se sent capable de lire le texte. Dans la paroisse de campagne où je me suis installé les fidèles ignorent même parfaitement la Bible. Quand ils écoutent les Lectures, ils sont incapables de les prendre autrement que littéralement ; ou ils attendent l'homélie qui se contente de mêler paraphrase et morale de base. J'ai proposé de contribuer par ma formation d'historien, au travers de conférences, à ouvrir à l'intelligence des Écritures : ça n'a intéressé ni le curé ni l'évêque. On m'explique qu'il faut prendre les gens comme ils sont : ignorants.
Un ami protestant me disait que dans la bourgeoisie réformée on respectait la religion catholique comme "religion des bonnes". Comme au XIXe siècle les athées la trouvaient utile pour tenir les pauvres et les garder dans l'ignorance. Comment notre Église peut-elle accepter de garder cette réputation ?
Albert
[ PP à Albert - Justement, en principe elle ne l'accepte pas ! Je vois en beaucoup de diocèses des cycles de formation biblique, il y a eu dans beaucoup de paroisses des cycles d'étude de Laudato Si, etc... Mais seule une minorité s'y intéresse. Là est le problème : l'absence d'intérêt de trop de catholiques envers l'essentiel dans la religion.]
réponse au commentaire
Écrit par : Albert / | 16/03/2023
MINICROYANTS
> La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux, dit notre chef. Sans doute que ce verset est relevé pour parler des vocations sacerdotales et religieuses. Mais il ne parle pas que de ça.
Je connais une foule de personnes qui se délecteraient de l’Évangile et du Magistère si le pourcentage de catholiques qui se sentent concernés par la mission dépassait les 0,1%. La Bible et les encycliques regorgent de trésors qui répondent pleinement aux attentes de nos contemporains. Et comme nous les taisons, les pierres du matérialisme, de la violence et du désespoir crient. Ça se comprendrait s'il n'existait pas une parole de vie capable de combler ce vide ni un successeur de Pierre pour prophétiser.
Madeleine Delbrêl a raison de dire que la Parole de Dieu ne se porte pas dans une valise mais bien dans les cœurs et dans le témoignage de vie. La plupart des gens se convertissent au contact des saints plus que des livres. Et le désespoir ambiant est à la mesure du désintérêt des catholiques envers le message de leur pape.
Le Seigneur ne nous propose pas mieux que la prière pour que les ouvriers rejoignent la moisson (Lc 10,2). Et aussi une certaine docilité à l'esprit pour que la bonne nouvelle ne reste pas que dans les discours et écrits de François (dont nous passons à côté).
______
Écrit par : Cyril B / | 16/03/2023
à Albert :
> Deux conseils :
- Il est une émission, 'La Foi prise au mot' sur KTO, disponible gratuitement sur internet, qui rassemble depuis vingt ans une superbe collection d'exposés de très haute qualité sur la foi chrétienne ; c'est en l'écoutant et la réécoutant, semaine après semaine, en la ruminant presque, que m'est venu le goût d'en savoir davantage, puisant jour après jour à cette source la nourriture de ma vie spirituelle. Peut-être pourriez-vous proposer cette démarche à vos frères et sœurs en Christ ?
- Comme démarche de Carême et en communion avec l'un de ses auteurs, le feu pape émérite, je lis le 'Catéchisme de l'Église catholique', disponible là encore gratuitement sur internet. C'est du Ratzinger, donc tout y est aussi limpide que profond. Je prévois après cela de lire jour après jour la Règle de saint Benoît. Un paragraphe ou une page par jour, et on nourrit sa vie de foi !
______
Écrit par : Philippe de Visieux / | 17/03/2023
DÉSERT RURAL
> À Paris j'avais en effet toutes les formations que je voulais. Dans les grandes villes on trouve des choses, mais dans les campagnes profondes il n'y a rien, et pas de transport pour rejoindre les villes. D'où l'intérêt qu'il y aurait à laisser la place à des laïcs pour assurer un début de formation. On m'a permis d'animer un groupe de huit personnes seulement, et on me conseillait de ne pas être compliqué, de ne pas chercher à approfondir pour rester au niveau d'une population réputée arriérée. On se méfiait de moi parce que j'étais un Parisien, un horsain, et un intellectuel. J'ai pourtant tenu à toujours développer le contexte historique et la façon d'aborder l'Écriture, et à faire apercevoir la profondeur théologique des textes. Contrairement à ce qu'on m'avait affirmé j'ai intéressé et fidélisé mon groupe depuis cinq ans. Mais on ne veut pas me confier plus.
______
Écrit par : Albert / | 17/03/2023
@ Philippe de Visieux
> Merci pour votre appui. Le problème, c'est que beaucoup n'ont pas internet et la plupart ne lisent pas. En revanche Ils écoutent les prêtres et ceux qui sont introduits par le curé.
______
Écrit par : Albert / | 19/03/2023
TRISTE
> Lisez le testament spirituel du Père Cyril Gordien et vous comprendrez: pas un mot sur le Pape François.
Yves Raoux
[ PP à YR - En effet. Et c'est consternant de la part du défunt. Prions pour lui. Il a souffert et prié dans son cancer, mais mourir hors de la communion avec le successeur de saint Pierre est une triste fin.
(Je n'espère pas vous convaincre, votre faction n'entendant ni n'admettant rien. ]
réponse au commentaire
Écrit par : Yves Raoux / | 21/03/2023
LES COMMENTAIRES
> Merci d'avoir publié mon commentaire et de m'avoir répondu.
______
Écrit par : Yves Raoux / | 22/03/2023
"CONSTERNANT"
> Concernant le testament spirituel de feu "l'abbé" Gordien, le paragraphe consacré à l'écologie est également consternant. Qu'est-ce que "l'écologie érigée en religion" ? En quoi serait-elle un combat qui ne mène à rien ? Ou, pire, une démarche d'inspiration démoniaque ?
L'encyclique 'Laudato Si', à l'évidence absente du testament, serait-elle à comprendre dans le cadre décrit par le défunt prêtre ?
______
Écrit par : Philippe de Visieux / | 23/03/2023
@ Yves Raoux et PP
> Avant de lire diverses publications annonçant son retour à Dieu, j'ignorais l'existence de ce Père Cyril Gordien dont il apparaît qu'il est controversé, comme on dit.
Renseignements recherchés et trouvés, il ne paraît guère significatif qu'il ne mentionne pas le pape François dans la partie de son testament spirituel où il évoque le développement de sa vocation.
Pour les difficultés qu'il a rencontrées, je crains que ce ne soit assez banal: plus une paroisse est de grande taille, plus il y a de risque de voir se multiplier grandes gueules, jalousies, médisances, clans et coteries.comme j'en ai déjà vu dans ma banlieue, alors, dans les grosses paroisses parisiennes, c'est statistiquement plus risqué encore.
D'autre part, il serait surprenant qu'un archevêque ait nommé curé, et son successeur maintenu en place, un prêtre qui ne soit pas en communion avec le successeur de Saint Pierre, et si le testament du P. Gordien manifeste son angoisse face à de bien réelles dérives, on voit mal en quoi il s'oppose au pape François.
PH
[ PP à PH - Cela saute aux yeux : contrepied des orientations du pontifiocat, et silence total sur le pape Frtançois. Le défunt parlait comme son micromilieu social. Prions pour lui]
répônse au commentaire
Écrit par : P. Huet / | 24/03/2023
Les commentaires sont fermés.