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23/01/2023

Les luttes sociales et le souci du bien commun

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Une lutte sociale peut-elle affronter efficacement l'Etat – et/ou l'employeur – sans nuire au simple citoyen ?  Ma chronique de ce lundi matin à Radio Espérance (Auvergne Rhône-Alpes) :


Bataille de la réforme des retraites, grèves et manifestations... N’entrons pas dans la discussion du contenu de cette réforme et du bien-fondé (ou non) de ces grèves ; ce sur quoi il faudrait réfléchir, c’est sur la forme des grèves par rapport au bien commun de tous les membres de la société.

Dans le Compendium de la doctrine sociale de l’Eglise publié sous Jean-Paul II, le paragraphe sur le droit de grève déclare : “La doctrine sociale reconnaît la légitimité de la grève quand elle se présente comme un recours inévitable, sinon nécessaire, en vue d'un bénéfice proportionné, après que toutes les autres modalités de dépassement du conflit se soient révélées inefficaces. La grève, pour autant qu'elle apparaisse comme une sorte d'ultimatum, doit toujours être une méthode pacifique de revendication et de lutte pour ses droits. Elle devient moralement inacceptable lorsqu'elle s'accompagne de violences ou encore si on lui assigne des objectifs non directement liés aux conditions de travail, ou contraires au bien commun”.

Dans un document de 1986, le cardinal Ratzinger, au nom de la congrégation pour la Doctrine de la foi, ajoute ceci : “La priorité reconnue à la conversion du cœur n’élimine nullement la nécessité d’un changement des structures quand elles sont injustes. Il est donc pleinement légitime que ceux qui souffrent agissent, par des moyens moralement licites, pour obtenir des structures et des institutions dans lesquelles leurs droits soient vraiment respectés.”

Mais pour qu’une forme de grève reste légitime, selon la doctrine sociale, elle ne doit pas nuire au bien commun. C’est ce que pensent les organisations de salariés de certains pays européens : pour se faire entendre de leur gouvernement, ils laissent les voyageurs monter sans ticket dans le train, le bus ou le métro – mais ils ne suspendent pas le fonctionnement des transports ; de cette façon ils ne font aucune violence aux usagers ; la grève ne vise que l’employeur et/ou l’Etat. Cette forme d’action paraît proportionnée à la nature des conflits sociaux, quelque jugement que l’on puisse porter sur le bien-fondé ou non de ce conflit.

Force est de constater que ce respect d’autrui semble étranger aux habitudes de la société française actuelle, où la brutalité aveugle progresse de façon alarmante. Et que la brutalisation des mœurs, favorisée par des groupes aussi actifs que minoritaires, semble surtout liée au règne des réseaux sociaux où des ligues d’anonymes débordent de plus en plus souvent les syndicats traditionnels. Voilà en effet de quoi réfléchir… 

 

 

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08:20 Publié dans Social, Société | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : grèves

Commentaires

RETRAITE ÉTERNELLE ?

> Je me demande si la retraite n'est pas, pour beaucoup, la sécularisation de la vie éternelle à laquelle ils ne croient plus. C'est probablement ce qui rend les débats autour de cette question si compliqués. La retraite serait la dernière en date des idées chrétiennes devenus folles, pour reprendre et poursuivre la typologie du polémiste anglais Chesterton.
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Écrit par : B.H. / | 23/01/2023

EFFICACE, MAIS...

> Le genre de grève que vous décrivez (laisser monter gratuitement les passagers des transports en commun), outre qu'il ne nuit pas au bien commun, pourrait être assez efficace, en acquérant auprès des usagers une certaine popularité. Malheureusement, lorsque certains syndicalistes se nourrissent d'un imaginaire "révolutionnaire", des postures épiques seront préférées.
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Écrit par : Sven Laval / | 23/01/2023

ILLÉGAL

> On a proposé aux cheminots de laisser les transports gratuits plutôt que de les bloquer.
Sauf que contrairement à l'arrêt du travail... c'est illégal. Et la SNCF ne se privera pas de licencier le salarié qui se prendra à ce petit jeu. Les syndicats le savent bien.
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Écrit par : Cyril B / | 23/01/2023

EFFET NUL ?

> Bien entendu je suis parfaitement en phase avec cette vision : ne pas nuire au bien commun. Cela étant, laisser monter les usagers (vous noterez que j'évite le mot client) dans les rames de métro, de trains ou de TGV n'aurait qu'un effet très relatif voir proche de nul. En effet, en règle général les titres de transports sont payés "à l'avance" au travers des cartes d'abonnement, comme la carte navigo. Idem pour de nombreux déplacement en trains, où bien souvent les gens prennent les tickets bien à l'avance pour bénéficier de tarifs plus attractifs. Du coup ce serait "même pas mal", ou pas loin. Il faut donc réfléchir à d'autres format de grève, même si laisser les usagers monter gratuitement puisse venir en complément d'autres formes d'actions.
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Écrit par : Pierre O. / | 24/01/2023

D'UN ENNEMI DES "PARTAGEUX" ?

> Je dois dire que, depuis quelque temps, vous me décevez, M de Plunkett. Ce billet est d'une intelligence intellectuelle à laquelle votre blog - que je suis depuis des années, et qui m'a beaucoup nourri sur les questions écologiques, et sur la tentation identitaire, ne m'avait pas habitué.
Peut-être parce que, prenant le travers de beaucoup éditorialistes, vous parlez d'un sujet que vous maitrisez mal avec la même autorité que sur les sujets que vous maitrisez mieux ?
Votre argumentation est fondée sur un contresens. Prenant la doctrine sociale de l'Eglise, qui prohibe justement la violence dans les mouvements sociaux, vous préconisez... une opération de vol organisé.
Rappelons quelques fait. Le fait de ne pas avoir de transport n'est pas une violence. C'est un désagrément, cela peut avoir des conséquences néfastes sur la vie de ceux qui comptaient sur ces transports, mais être transporté n'est pas un droit : c'est un service rendu. Et lorsque ce service est suspendu, on se rappelle, et c'est très bien, pourquoi la vie est meilleure avec ce service que sans lui.
En revanche, ne pas payer ce service, cela, c'est une violence.
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Écrit par : Renard / | 31/01/2023

LA RÉFORME

> Pour bien comprendre la réforme des retraites :
https://www.youtube.com/watch?v=Wxp__MZgwAI
C'est vraiment très bien fait, didactique, compréhensible.
Et surtout cela permet à chacun de mieux se positionner.
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Écrit par : Pierre O./ | 01/02/2023

LE DROIT ET LES TRANSPORTS

> "Etre transporté n'est pas un droit". A partir du moment où les pouvoirs publics les garantissent juridiquement - c'est le sens même d'un service public - c'est que le transport des particuliers est considéré comme un droit à garantir et que cette conception fait consensus autant auprès des autorités politiques, des syndicats de transports et des usagers.
J'ajouterai que suspendre délibérément des transports publics parce que l'on sait que l'on espère maximiser l'effet de nuisance c'est une violence.
Dire que supprimer les transports publics n'est pas une violence est un raisonnement fallacieux.
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Écrit par : Louis Charles / | 01/02/2023

Les commentaires sont fermés.