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20/10/2022

Imposture commerciale : le Halloween importé des USA n’est pas une “vieille fête celtique”

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"Tradition" d'un monde sans traditions, produit bas de gamme de la sous-culture US, le pseudo-Halloween est une absurdité gore imposée par le marketing. C'est indûment que ses promoteurs le parent d'origines mythologiques remontant aux Celtes : 


Revoilà Halloween, cette ineptie morbide venue des Etats-Unis. Dans nos hypermarchés s’étalent de nouveau des suaires, des crocs de vampire et des moignons sanglants. Au rayon traiteur du Super U de ma “petite cité de caractère”, on a même mis des têtes de mort entre les vol-au-vent et les pâtés en croûte : peu importe que ça rebute le client, l’important est de vivre le 1er novembre (comme tout le reste) à l’heure américaine. Être à l’heure américaine est en effet la seule raison de cette fausse fête importée qui amène de petites mamans à grimer leur gamin en cadavre : idée qui leur répugnerait instinctivement, si elles n’étaient soumises à un surmoi dicté par la grande distribution…

Selon la sous-culture médiatique, cet Halloween actuel viendrait du Halloween médiéval anglais, lui-même dérivé de célébrations celtiques du début novembre : Samain (1) en Irlande, Samonios en Gaule, etc. Mais cette filiation est une imposture. D’une part, le Halloween médiéval anglais était déjà très éloigné de ce qu’avait été le Samain des Celtes. D’autre part, le Halloween actuel est exclusivement issu des horror movies étatsuniens, lugubres, hystériques et dépourvus de sens. Il est donc absurde : ce que n’étaient ni le Halloween médiéval (fête chrétienne teintée de magie paysanne), ni son prédécesseur le Samain antique, célébration de la communauté et de ses dieux dans un univers mental non-chrétien.

D’après les spécialistes universitaires du monde celtique, Samain se présentait comme “une belle fête ruisselante de joie et de lumière”, pour préparer à “la rude épreuve des ténèbres hivernales” (2). Dans les largesses et la musique, il s’agissait d’une “agréable réunion condensant et récapitulant l’été” (saison à la fois des récoltes et des guerres) pour clore l’année écoulée et ouvrir l’année future, sous la présidence du roi chargé de la prospérité de tous. Fête de la communauté organisée, Samain durait plusieurs jours au début du mois de novembre et s’articulait en trois éléments : une célébration religieuse par les druides (3) au nom de toute la société ; une série d’assemblées légales où les druides, le roi et les nobles mettaient à jour la justice et les annales ; et le festin proprement dit, obligatoire pour tous mais hiérarchisé socialement (4).  Tout cela sous-tendu, expliquent les linguistes, par une “pensée élaborée” (5) qui donnait une cohérence à ces rites d’un monde aujourd’hui disparu et sans commune mesure avec nos imaginations. Il est donc absurde de prétendre relier au Samain celtique le faux Halloween actuel, limité au folkore gore des films d’horreur US.

Dans les célébrations de Samain, l’Autre Monde, contigu et plus parfait, était censé entrer en contact avec notre monde et suspendre le temps humain ; des messagers et messagères du Sid (l’Autre Monde) venaient y inviter des élus, qui pouvaient y aller et en revenir... “Rien de lugubre” (6) ! Cette représentation du surnaturel n’avait donc aucun rapport avec les fantasmes nécrophiles du cinéma américain qui ont engendré le Halloween actuel, imprégné d’une obsession névrotique de la mort – alors que les mythes celtiques voient celle-ci comme un passage : le milieu d’une vie appelée à continuer glorieusement “ailleurs”.

Que les gérants du Halloween actuel cessent donc de le parer du patronage d’une mythologie antique, et qu’ils lui laissent sa vraie nature : celle d’un produit marketing de très bas étage. Cuchullain (7) ne sera pas chef de rayon.

 _________ 

(1) Prononciation : Saa-win.

(2) Les fêtes celtiques, C.J. Guyonvarc’h (professeur de celtique à Rennes-2), Ouest-France 1995.

(3) Personnages-clé d’une société très ritualisée, les druides de l’Antiquité celtique jouaient un rôle magico-politique. Rien à voir avec le pseudo-druidisme des émissions télévisées, banale persistance du NewAge des années 1970-1980.

(4) Par ailleurs, hommes et femmes banquetaient dans des salles différentes.

(5) C.J. Guyonvarc’h, op. cit.

(6) C.J. Guyonvarc’h, op. cit.

(7) L'un des principaux héros de la mythologie irlandaise.

 

 

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17:21 Publié dans Idées, USA | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : hallowen

Commentaires

SAMAIN

> Merci pour ces précisions sur ce qu'était réellement Samain. J'avais fini par croire ce qui se disait. Il est vrai que lorsqu'on entend qu'une société pratiquait à certaines occasions des sacrifices humains, on est prêt à entendre pis que pendre à son sujet. Mais si on y réfléchit bien, notre société aussi pratique les sacrifices humains. Juste que cela se fait de façon dissimulée.
______

Écrit par : Bernadette / | 21/10/2022

LES ENFANTS

> Merci pour ces éléments très intéressants !
Pour contextualiser :
Si les enfants sont attirés par Halloween, ne serait-ce pas aussi parce qu'on ne leur propose rien d'autre, de mieux ?
Qu'ils sont prisonniers d'un vide spirituel et civilisationnel inhumain, donc ils prennent ce qu'ils trouvent ?
______

Écrit par : Isabelle Meyer / | 25/10/2022

Les commentaires sont fermés.