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14/03/2022

Le nationalisme en religion déchire l'unité des chrétiens

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Leçon russo-ukrainienne à méditer. Mon éditorial du lundi à RCF :


<< Hélas je m'étais réjoui trop vite : la tête de l’Eglise russe n’a pas su garder une indépendance évangélique devant la guerre d’Ukraine. Cédant à ce réflexe historique que les théologiens orthodoxes appellent élégamment “symphonie des pouvoirs” (mais que les Latins appelleraient plutôt “soumission d’une Eglise”), le patriarche de Moscou, Cyrille, bénit maintenant l’armée d’invasion russe – avec des mots qui ressemblent à ceux des évêques espagnols, en 1936, pour bénir une épouvantable guerre civile qu’ils baptisaient “croisade” : détournement de sens qui scandalisa Bernanos, et ce fut l’origine de son chef-d’œuvre Les grands cimetières sous la lune… 

Quel point commun entre la guerre civile de Franco et l’invasion de l’Ukraine par Poutine ? Aucun sauf celui-là : l’attitude des chefs de l’Eglise catholique d’Espagne en 1936 ressemble à celle du chef de l’Eglise orthodoxe russe en 2022. Dans les deux cas la religion est mise au service d’un pouvoir politique. Ça se comprendrait dans le monde antique, quand chaque peuple avait ses dieux qui le bénissaient quoi qu’il fasse... Mais en 1936 et en 2022 il s’agit du christianisme, religion certes ancrée dans des nations, mais religion universelle par définition, religion de paix en principe, donc religion qu’on ne peut assujettir à un projet politique sans la dénaturer dans son essence même.

Et l’alignement du patriarche de Moscou sur les directives du Kremlin a entraîné aussitôt une fracture dans le patriarcat lui-même, qui s’étendait religieusement jusqu’à l’Ukraine… Outré d’entendre son propre patriarche, Cyrille, placer les Ukrainiens parmi les “forces du mal”, le métropolite de Kiev, Onuphre, primat de l’Eglise orthodoxe, vient de rompre quasiment son obédience :  lui et beaucoup de responsables orthodoxes ukrainiens dépendant du patriarcat de Moscou ont cessé de mentionner Cyrille durant les liturgies. Ainsi le nationalisme religieux déchire l’unité des chrétiens. C’est très triste. C’est un argument pour les adversaires du christianisme. Et c’est un sujet de réflexion, y compris chez nous. >>

 

 

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Commentaires

PARALLÈLE MAINTENU

> Votre mise en parallèle entre l'Eglise catholique espagnole en 1936 et l'attitude du patriarcat de Moscou aujourd'hui dans la guerre en Ukraine est fallacieuse. Dès avant 1936, une persécution religieuse "systémique" (comme on aime dire aujourd'hui) avait commencé contre l'Eglise catholique espagnole ce qui n'est pas le cas des orthodoxes du patriarcat de Moscou aujourd'hui.
Pie XI avait déjà protesté contre les agressions sauvages de personnes et d'institutions catholiques. N'oubliez pas que le slogan de Franco, au début du pronunciamento, était "ni femme, ni messe". C'est poussée par la sauvagerie des républicains que l'Eglise s'est trouvée engagée du côté des franquistes, et cela ne s'est pas fait d'un seul coup: Edmonde Charles-Roux, fille de l'ancien ambassadeur de France près le Saint Siège, tenait de son père que les trois cardinaux espagnols électeurs ne s'adressaient pas la parole entre eux lors du conclave qui a suivi la mort de Pie XI et qui a procédé à l'élection de Pie XII.

BH


[ PP à BH – Vous ne tenez pas compte d'éléments essentiels :
a) la surenchère des évêques espagnols parlant indignement de "croisade" à propos de cette guerre civile, chose que Franco n'attendait nullement de leur part ;
b) l'exil volontaire à Rome de théologiens espagnols et même d'un cardinal, révoltés par l'instrumentalisation de l'Eglise et la dénaturation du catholicisme par Franco à la fin de la guerre civile et ensuite ;
c) le parallèle factuel entre la sujétion politique assumée par les évêques espagnols et par le patriarche de Moscou, aboutissant dans les deux cas à un "national-christianisme" contraire à l'Evangile.]

réponse au commentaire

Écrit par : B.H. / | 14/03/2022

> Si cela pouvait rapprocher de Rome les orthodoxes d'Ukraine!
______

Écrit par : PF Huet / | 15/03/2022

HILARION

> Lettre du métropolite Hilarion
« C’est le cœur brisé que je suis les récents développements en Ukraine et dans ses environs. Depuis 2009, date à laquelle j’ai été nommé président du Département des relations extérieures de l’Église du Patriarcat de Moscou, et surtout depuis 2014, date du début du conflit dans l’est de l’Ukraine, j’ai investi beaucoup d’efforts et d’énergie pour parvenir à la réconciliation et à la paix entre les peuples russe et ukrainien, et j’ai également aidé de nombreux chrétiens d’Ukraine à survivre.
Si l’on veut obtenir de vrais résultats, cela ne se fait généralement pas par des déclarations publiques, mais par un travail quotidien difficile et épuisant, qui se déroule en grande partie à huis clos. Ce travail s’est considérablement intensifié ces derniers jours et se poursuivra jusqu’à la fin du conflit. L’Église à laquelle j’appartiens fait tout son possible pour aider les personnes qui souffrent, pour leur sauver la vie et pour mettre fin au conflit. Et je considère que c’est une bénédiction de Dieu de participer à ce travail. »
Métropolite Hilarion
3 mars 2022
______

Écrit par : Michel de Guibert / | 16/03/2022

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