26/10/2021
Le message du pape aux mouvements populaires (5)
Dernière tranche du message, "Le temps d'agir" :
<< ...On me dit souvent : « D’accord, mais en pratique que doit-on faire ? » Je n’ai pas la réponse. Nous devons la rêver et la trouver ensemble. Il y a tout de même certaines mesures concrètes qui peuvent introduire à des changements significatifs : elles sont déjà dans vos documents et vos paroles, et je les prends sérieusement en compte. J’ai réfléchi sur elles et consulté des spécialistes. Nous avons déjà discuté de l’intégration urbaine, des fermes familiales et de l’économie populaire ; il reste à travailler pour en faire des réalités. Je voudrais ajouter deux autres points, le salaire universel et le raccourcissement de la journée de travail :
– le revenu (ou salaire) de base viserait à ce que chacun dans le monde puisse accéder aux ressources répondant aux nécessités élémentaires de la vie. Il est juste de lutter pour une distribution humaine de ces ressources, et il revient aux gouvernements d’établir une fiscalité redistributive pour que la richesse d’une part de la société soit partagée équitablement – mais sans imposer un insoutenable fardeau aux classes moyennes, qui souffrent le plus quand un conflit éclate dans ce domaine… N’oublions pas qu’aujourd’hui les fortunes énormes sont le fruit du travail, de la recherche scientifique et des innovations techniques de milliers d’hommes et de femmes au fil des générations.
– Abréger la journée de travail est une autre possibilité qui mérite d’être réellement explorée. Au XIXe siècle, les ouvriers faisaient des journées de douze, quatorze, seize heures ; quand on a établi la journée de huit heures rien ne s’est effondré, contrairement à ce que prédisaient certains milieux. On peut donc explorer l’idée de travailler un peu moins d’heures pour que plus de gens aient accès au marché du travail. Il ne devrait pas y avoir tant de gens exténués de surtravail, et tant d’autres exténués de manquer de travail…
Ces mesures, nécessaires mais bien sûr insuffisantes, ne résoudront pas le problème à la racine, et ne garantiront pas l’accès à la terre, au logement et au travail dans la mesure de quantité et de qualité que méritent les paysans sans terre, les familles sans abri sûr et les travailleurs précaires. Pas plus qu’elles ne résoudront les immenses défis environnementaux auxquels nous sommes confrontés. Mais je voulais les mentionner parce qu’elles sont possibles et nous montrent la bonne direction.
Frères et sœurs, je suis convaincu que « le monde se voit plus clairement depuis les périphéries ». Nous devons écouter les périphéries, leur ouvrir les portes et leur permettre de participer. La souffrance du monde se comprend mieux côte à côte avec ceux qui souffrent. Selon mon expérience, quand des hommes et des femmes ont souffert dans leur propre chair l’injustice, l’inégalité, les abus de pouvoir, le dénuement et la xénophobie, ils comprennent bien mieux ce que d’autres subissent, et peuvent les aider avec réalisme à s’ouvrir des chemins d’espoir. Il est très important que votre voix soit entendue dans tous les lieux où les décisions se prennent. Proposez-la dans un esprit de coopération ; parlez avec certitude de ce qui doit être fait. Faites en sorte que votre voix s’entende. Mais s’il vous plaît : en ces lieux, ne vous laissez pas contraindre ni corrompre, deux mots lourds de sens dont je ne vais pas parler maintenant.
Réaffirmons l’engagement que nous avons pris en Bolivie : mettre l’économie au service du peuple, pour bâtir une paix durable fondée sur la justice sociale et le soin de notre maison commune. Continuez à pousser votre action pour la terre, le travail et le logement. Continuez à rêver ensemble. Et merci, merci beaucoup de me laisser rêver avec vous.
Demandons à Dieu de répandre ses bénédictions sur nos rêves. Ne perdons pas notre espoir. Souvenons-nous de la promesse de Jésus à ses disciples : « Je serai toujours avec vous ». Je le serai aussi ; mais la chose importante est que Lui le sera. >>
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[1] Fratelli tutti, 198.
[2] Cf. Sollicitudo rei socialis, 22.]
[3] OXFAM, The hunger virus multiplies, 9.7.2021, basé sur le rapport 2021 de kla FAO.
[4] Lettre aux Mouvements populaires, 12 4 2004
[5] à consulter sur le site vatican.va
[6] Compendium, 193.
[7] Compendium, 185.
11:21 Publié dans Pape François | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : pape françois
Commentaires
"SOUSCRIRE ET DIFFUSER"
> Nous ne pouvons que souscrire et diffuser.
A l'horizon des paroles du pape François: le Royaume annoncé par Jésus !
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Écrit par : Francesco / | 27/10/2021
LES DEUX SUGGESTIONS
> J'entends déjà, en lisant ce texte magnifique, les imprécations de certains à l'adresse du "pape socialo". Si ce devait être le cas, c'est l'Évangile et donc le Christ Lui-même qu'il faudrait affubler du même qualificatif.
Les deux suggestions que fait le pape sont à prendre en compte. La fiscalité n'a pas à "imposer un insoutenable fardeau aux classes moyennes", comme on le voit en matière énergétique depuis plusieurs semaines et plus généralement en France : comment ne pas réagir devant le taux spoliateur de 60 % applicable à certains droits de succession ?
Quant à "abréger la journée de travail", c'est effectivement "une autre possibilité", testée en France sous Jospin avec plus ou moins de flexibilité en direction des PME. L'idée défendue alors par Martine Aubry était pourtant bonne, dans un esprit de solidarité entre travailleurs.
Le Saint-Père voit juste lorsqu'il affirme que "quand des hommes et des femmes ont souffert dans leur propre chair l’injustice, l’inégalité, les abus de pouvoir, le dénuement et la xénophobie, ils comprennent bien mieux ce que d’autres subissent" : pour avoir subi un licenciement abusif il y a quelques années, je mesure combien une telle épreuve m'a permis de grandir en humanité, sinon en communion avec tous mes frères qui subissent l'injustice.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 29/10/2021
UN CERTAIN MICRO-MILIEU
> https://www.youtube.com/watch?v=cG__fbkfUkk
Il est tout à fait inacceptable d'entendre sur KTO un journaliste, par ailleurs spécialiste des religions au 'Figaro', interroger avec autant d'agressivité sinon de condescendance un auteur affublé de l'étiquette de "catho de gauche". Foucauld Giuliani sut avec intelligence sortir de ce véritable réquisitoire à double voix, Mme Delsol s'étant faite pour l'occasion la vaillante substitut du procureur Guénois.
Giuliani ne propose dans son intervention que l'application de l'Évangile, qui n'est en soi ni de droite ni de gauche. Fort naturellement, il dénonce le capitalisme et le libéralisme comme une idolâtrie. Guénois, en retour, lui reproche son silence sur le régime chinois (?!), considère que l'auteur ne s'attaque qu'au capitalisme en ignorant le socialisme (pourtant effondré depuis trente ans en Europe), et lui sort, parce que Giuliani dénonce les bourgeois cathos installés dans leurs habitudes de classe, un impétueux et épouvanté [donc à vos yeux] "le diable, c'est le capitalisme".
Giuliani lui répond en rejetant tout autant le marxisme bureaucratique que le catholicisme identitaire : il défend l'universalité du message évangélique. Message qui aurait dû empêcher tout autant le massacre de la Grande Guerre que l'horreur nazie ou, plus près de nous, la destruction de la planète au profit d'une poignée de multi-milliardaires.
Fort logiquement, Delsol se dit "pas du tout d'accord avec ce bouquin", avec ce brin de dédain dans la voix qui aurait pu tout au moins accorder à l'ouvrage le terme de "livre".
Heureux que ce M. Giuliani ait figuré sur le plateau. S'il n'avait pas été là, le trio Guénois-Delsol-Cuchet aurait donné un son de cloche quelque peu déprimant du catholicisme actuel.
PV
[ PP à PV – Déprimant, oui,. Mais Cuchet est l'historien de référence chez les officiels de l'Eglise de France ; la bourgeoisie catho prend Delsol pour une grande catholique ; et Guénois reflète toujours les affinités idéologiques inavouées du petit milieu social qui mène KTO... ]
réponse au commentaire
Écrit par : Philippe de Visieux / | 01/11/2021
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