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09/09/2021

Belmondo : c'était vraiment une autre époque

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Ma chronique du 08/09 à Radio Présence (Toulouse Midi-Pyrénées)


<< La saison commence mal : on a perdu Bébel ! Jean-Paul Belmondo n’est plus de ce monde. Dans le film de Jacques Deray Le Marginal (dialogues de Michel Audiard), Belmondo nous disait d’avance : “Vous me regretterez parce que c’était marrant”. Un éditorialiste de la presse parisienne écrit que l’insouciance naturelle de Belmondo nous est devenue “inaccessible”. Avec lui disparaît toute une époque du cinéma, et quelque chose de plus : un sens de l’humour très français, mais français à l’ancienne mode, joyeusement désinvolte : une insouciance inoxydable que plus grand-monde ne partage aujourd’hui, et surtout pas nos comiques officiels tout en agressivité ricanante. (Je ne désigne personne mais vous avez sûrement des noms à l’esprit)... Ce qu’on appelle l’humour en France depuis une dizaine d’années n’a plus aucun rapport avec l’humour des films de Belmondo comme Le Magnifique, cette bouffonnerie sur les James Bond et les rapports auteur-éditeur ; ou comme le succès de Rappeneau Les Mariés de l’an II, qui réussissait la prouesse d’être, à la fois, une satire de la Révolution française et un film très drôle, plébiscité par le grand public et porté par un Belmondo dont tout le monde savait qu’il se foutait complètement de la culture et de l’histoire de France… Résultat : Les Mariés de l’an II furent et restent un gros succès populaire, y compris à la télévision chaque fois qu’il repasse aujourd’hui alors qu’il date déjà de cinquante ans.

Faut-il s’en étonner ? Non, puisque le fait est là. Belmondo disait : “Les critiques font preuve de la plus grande arrogance et bêtise en se permettant de remettre en question les goûts des spectateurs”. Il disait aussi : Je joue pour tous les publics, je n’ai pas à influencer les gens. Le métier d’acteur sert à les divertir, pas à leur mettre des idées dans la tête !” Belmondo refusait le cinéma de propagande. Ce n’est pas lui qui aurait voulu que tous les scénarios soient des allégories socio-politiques, ou, aujourd’hui, des indignations sociétales.

Mais il ne se résumait pas à l’hurluberlu cascadeur : il y avait aussi l’autre Belmondo, l’ancien élève du Conservatoire avec Marielle, Cremer, Rich et Rochefort ; et Belmondo l’acteur de Godard, Allégret, Carné, Chabrol, Sautet, Melville, Verneuil, Truffaut, Louis Malle… Et si Belmondo acteur cultivait l’insouciance, Belmondo producteur était lucide : on ne sait pas assez qu’en 1996 il a essayé de protéger le cinéma français de l’invasion américaine. Mais là aussi, c’était une autre époque. >>

 

https://www.radiopresence.com/IMG/mp3/08092021_chroeco_airtemps.mp3

 

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11:54 Publié dans Idées | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : belmondo

Commentaires

DÉSINVOLTE ET TRAVAILLEUR

> "Joyeusement désinvolte" est une manière pertinente de qualifier l'impression que donnait Belmondo, surtout dans ses jeunes années (disons qu'ensuite son jeu semblait un peu plus appuyé, mais peut-être est-ce une affaire de goût). Et cela aussi bien dans des films "populaires" que dans des films "d'auteurs". Cela ne devait pas aller sans travail du reste (on doit pouvoir trouver l'enregistrement d'une colère du jeune Belmondo sur un tournage de Melville, à qui il reprochait un manque de discipline quant aux horaires : ne pas confondre désinvolture et je-m'en-foutisme !).
Demeurera l'admiration pour un artiste à la fois complet (par sa formation, sa culture, sa filmographie éclectique) et humble ("je n’ai pas à influencer les gens...").
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Écrit par : Sven Laval / | 09/09/2021

HUMORISTES

> Sur Allociné, site créé BEAUCOUP plus tard que le film, "Les Mariés de l'An II" font un score de 3,4/5 pour les spectateurs ; film ancien, il ne compile pas la note de la presse, comme pour les films plus récents... Cette dissociation entre public et presse est parfois impressionnante, pour certains films.
L'humour en France cependant n'est pas mort ! Il faut soutenir le travail de Karim Duval, par exemple, délicieux dénonciateur de tous les "éologistes" (tous ceux qui brassent du vent), jamais vulgaire, à l'écriture millimétrée, hilarant : https://www.youtube.com/c/KarimDuvalHumour
Ou encore le clown Bastien Crinon, et sa série CLAP, avec son personnage de Prospectus : https://www.youtube.com/watch?v=ZV0rHDzaM3g
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Écrit par : Alex / | 09/09/2021

GRAND ACTEUR, PETITS FILMS

> C'était un immense acteur, mais qui malheureusement s'est complu la plupart du temps à jouer, par facilité, dans des films médiocres. Néanmoins, je retiendrai très subjectivement des oeuvres majeurs, qui brillent par leur rareté : les films de Godard, bien sûr -- "Léon Morin, prêtre" et "L'Aîné des Ferchaux" du grand Melville, et sans doute "L'Affaire Stavisky" de Resnais, en 1974. Après cette date, la critique de ce film ayant été négative, il n'a plus joué que des dans des films de divertissement léger, très léger. Il aurait pu mettre un terme à sa carrière à ce moment-là, cela n'aurait strictement rien changé. Pour le théâtre, il en a surtout joué quand il était jeune, puis la gloire cinématographique l'a happé. Il est néanmoins remonté sur scène dans les années 80, pour "Kean" de Sartre, énorme succès populaire sous la houlette de Robert Hossein. Comme si tout ce qui le concernait désormais devait être a priori démesuré. C'est donc une carrière d'acteur profondément polarisé par la gloire populaire, faisant de lui un personnage surdimensionné, toujours à en rajouter, de manière absurde, compulsive. Il en avait la stature, évidemment, mais il en a abusé. Il était devenu une hyperbole du spectacle, ce qui n'était pas naturel du tout et l'a conduit à ces choix en cul-de-sac où finalement le succès obligé s'est substitué à l'art véritable. Mais évidemment, comme tout le monde, je l'aimais beaucoup. Delon a été plus subtil, par exemple...
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Écrit par : Bégand / | 10/09/2021

À LA FRANÇAISE

> Merci pour cette chronique sur Belmondo et pour ce que vous dites sur la désinvolture très française.
Elle existe toujours dans les milieux populaires et les milieux peu américanisés ; elle n'existe plus au cinéma, à la radio et à la télévision parce que ces médias n'ont plus rien de populaire.
D'ailleurs ils confondent populaire et vulgaire, mais s'ils ne sont pas le premier ils sont bien le second, souvenons-nous de la dernière cérémonie des Césars.
Lorsque 'L'As des As' est sorti, le film a subi des attaques, accusé d'être "du cinéma populaire" (sic), de "détourner les spectateurs" d'un film de Jacques Demy* qui sortait en même temps, film tellement bobo comme on ne disait pas encore à l'époque. On a accusé Gérard Oury d'avoir "préconçu son film pour le succès" (sic) et toutes sortes d'autres accusations délirantes envers ce film coupable d'être populaire.
Tout cela avait entraîné une cinglante réponse de Belmondo intitulée "Lettre ouverte aux coupeurs de tête" et que Bébel terminait par une citation de Bernanos : 'Attention, les ratés ne vous rateront pas !'"
Même après sa mort, les ratés ont cherché à ne pas le rater : un pigiste du 'Monde' twittait "Belmondo un acteur blanc qui jouait dans des films avec des blancs. Merci très peu pour moi". Commentaire nombriliste** et déconnecté qui a entraîné de saines réactions ainsi que la publication de photos de la rédaction du 'Monde' : que des blancs !
Ce pigiste est révélateur de "cette hyperclasse de Sachants" sartrienne et déconstructrice, qui ne comprend rien à la sympathique joie de vivre de Bébel parce qu'elle ne comprend déjà rien à la France charnelle.
Elle ne pardonne pas à Bébel d'avoir abandonné Godard pour le ciné populaire.
Elle ne comprend rien à la France ni à aucun autre pays parce que si elle a des yeux pour voir les choses et les gens, elle préfère l'idéologie qu'elle s'est choisie sur le seul critère du confort narcissique qu'elle lui procure; le reste ne signifie rien pour elle.
Comment la France d'aujourd'hui pourrait-elle avoir cette désinvolture souriante quand une minorité dégoulinante des idéologies suicidaires de Sartre et compagnie, non seulement est active, mais est aux commandes ?
Serait-ce parce que cette France insouciante est celle d'avant 73 et les crises économiques cycliques ?
Non, les Français ont toujours été connus pour leur bonne humeur malgré les difficultés matérielles au point que les avaleurs de parapluie anglo-saxons jugeaient qu'ils étaient futiles, leur âpreté puritaine refusant de comprendre une telle attitude. Mais cela même les Français en doutent tant ils sont influencés par le ricanement ambiant et on ne cesse leur dire qu'ils sont "désagréables" et "râleurs".
qui se plaît à le répéter ? la petite clique bobo cynique des médias, du PAF...
Les Français disaient-ils "même pas peur" et prenaient-ils des pots en terrasse après les attentats ? Cela n'entrainait que ricanements et commentaires désobligeants : "peuple de poivrots"...
Le mal qui explique la tristesse des Français est plus profond que le cycle de crises économiques : d'une part le désintérêt des gouvernants pour le bien commun a entraîné le mépris des Français pour ceux qui les gouvernent, alors qu'ils devraient les admirer ; et d'autre part, comment la France, puisqu'elle est déchristianisée, pourrait-elle savoir encore ce qu'est l'abandon à la Providence ?
Puisque ce blog est chrétien, alors prions pour notre frère Jean-Paul Belmondo.

* Jacques Demy n'était pour rien dans ses attaques.
** ça intéresse qui de savoir qu'un pigiste inconnu du 'Monde' n'aime pas Belmondo ? Le tweet n'a été connu que parce qu'il y avait #Belmondo. Nombriliste jusqu'à la puérilité: tout ce qu'il a trouvé à répondre à un détracteur, c'est qu'il avait 3000 abonnés.
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Écrit par : E Levavasseur / | 10/09/2021

SYMBOLE D'UNE FRANCE

> Un acteur au registre très étendu comme Depardieu.
Populaire, pudique et pas moralisateur.
Il a symbolisé à merveille cette France des années 60-70-80 qui se détendait après l'effroyable Guerre. Et même dans ses films les plus "légers ", on y trouve de l'esprit, de la finesse et de l'humour dont pourraient s'inspirer bien des productions actuelles.
De " Peau de banane" à "L'As des as" en passant par "Un singe en hiver" ou "Le Magnifique", je garde tout.
Un acteur populaire qui jouait pour nous, à la différence de ces acteurs élitistes qui se jouent souvent de nous.
Lecteur de Louis-Ferdinand Céline mais refusant les partis politiques extrémistes, il laissera un bel os à ronger à des détracteurs psychorigides.
Merci "L'inclassable" !
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Écrit par : Alex / | 12/09/2021

SOURIANTE

> Désinvolture souriante... Mais n'a-t-elle pas une part de responsabilité dans l'individualisme qui a succédé ?
Désinvolture souriante... Bien plaisante pour nous, spectateurs, elle méritait un hommage, mais pourquoi aux Invalides? Cela m'a donné une impression de profanation.
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Écrit par : PF. Huet / | 12/09/2021

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