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13/08/2021

2. Les "athées pieux", censeurs de l'Eglise aujourd'hui

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De plus en plus souvent, des notables nous expliquent qu'ils n'ont pas la foi mais qu'à leur avis l'Eglise catholique devrait être ceci au lieu de cela. Et ils s'indignent contre les voies et les décisions de l'Eglise réelle... Pourquoi ce phénomène se développe-t-il ?


Piliers de la droite dite libérale-conservatrice (deux mots pourtant contradictoires), nos bons bourgeois soutiennent depuis quarante ans un système économique aiguillonné par l'ultralibéralisme mondial qui "disrompt" la société, parce qu'il repose sur l'extension permanente des domaines du marché. Donc sur l'abolition progressive des secteurs non-marchands : normes de comportements, patrimoines culturels, etc... D'où l'impression de tout-fout-le-camp qui affole soudain les libéraux-conservateurs. Ne voulant ou ne pouvant pas voir ce que Marx prédisait dès 1848 – que par nature le libéralisme exclut toute conservation –, ils cherchent ailleurs un bouc émissaire. Et désignent l'Eglise catholique. Pourquoi ?

Parce qu'à leurs yeux, dans une société que malmène leur propre système économique, la fonction de l'Eglise serait de constituer un conservatoire des traditions : en gros, la procession des Rogations au spectacle du Puy-du-Fou. Or l'Eglise – "depuis Vatican II et surtout maintenant", grincent-ils – demande que l'on prenne l'Evangile au sérieux : ce qui fait passer la foi avant les coutumes... Cette exigence chrétienne renouvelée désavoue  la fonction de conservatoire, et le bourgeois de droite se sent trahi. "Athée pieux", comme disait l'ancien évêque de Nanterre, il s'irrite contre une Eglise ne répondant pas à l'idée qu'il s'en faisait. En résulte la pluie de sottises hargneuses que l'on peut lire sur Facebook ou entendre sur C8 – et sur Radio Classique, où par exemple Jean-Marie Rouart de l'Académie française, excellent garçon au demeurant, nous expliquait avant-hier matin que sans avoir la foi il trouvait quand même que tout allait mal depuis que le pape voulait nous priver de la messe en latin ; ajoutant qu'il était allé récemment à l'abbaye de Lagrasse où les offices latins étaient très beaux et qu'il ne voyait pas pourquoi le pape interdisait tout ça. L'excellent Jean-Marie ne sait visiblement pas que les chanoines réguliers de la Mère de Dieu (abbaye de Lagrasse) sont dans les meilleurs termes avec le diocèse qui leur Pape-Francois-300x200.jpgconfie des tâches pastorales, donc ne sont nullement visés par le Motu proprio du pape... [Photo : l'abbé de Lagrasse avec le pape François]. Plus aimable que MM. de Villiers ou Zemmour, mais pas mieux informé qu'eux de ces choses, l'académicien tient néanmoins à en parler : parce que son milieu est en ébullition contre François "l'islamo-gauchiste", l'épiscopat français "immigrationniste", etc. Non seulement ces bons bourgeois reprochent à l'Eglise de pratiquer la charité et de n'être pas un conservatoire des neiges d'antan, mais il l'accusent d'être coupable d'effets sociaux qui ne relèvent pourtant pas d'elle ;  effets qu'ils déplorent mais dont ils chérissent les causes globales – qui sont économiques. Logique bourgeoise.

 

 

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12:57 Publié dans Idées, Société | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : droite, pape

Commentaires

DISCUSSION

> Votre illustration semble nous indiquer que vous nous parlez d'une droite "libérale-conservatrice" qui remonte à Mathusalem. Vous rencontrez peut-être ces fidèles d'un autre âge à la sortie de la messe, le dimanche -- et encore. Certains doivent être en fauteuil roulant. Je ne me rappelle plus si Bourdieu s'était attaqué à eux -- peut-être dans son livre sur Flaubert. Ils n'on plus de pouvoir aujourd'hui, et je trouve que c'est leur faire un honneur qu'il ne mérite évidemment pas d'en parler comme vous faites, comme s'ils présentaient un quelconque danger. A moins qu'on puisse considérer que, désormais dépourvus de toute influence dans les affaires d'aujourd'hui, si ce n'est pour conserver leurs économies à la banque, ils n'essaient se rattraper dans une action spirituelle, c'est-à-dire dans leur paroisse, en protestant chaque dimanche auprès de leur curé sur le nouveau message de l'Eglise catholique, après Vatican II. Voilà, ce doit être cela. Les curés les laissent parler, en général, excepté ceux qui sont nostalgiques de ces temps abolis que plus personne à part eux ne regrettent : l'Ancien Régime, sans doute, ou plutôt un fantasme de restauration nationale qui n'est plus à l'ordre du jour depuis très longtemps. La seule question sérieuse, dans tout ce que vous nous décrivez, est la situation de désertification en Europe de la messe dominicale, et la non-venue d'une relève, notamment face à l'islam qui progresse de manière vertigineuse chez nous, grâce à une méthode simple et efficace. Vous avez raison de critiquer un peu notre cher académicien Jean-Marie Rouart, mais son dernier livre, que j'ai lu attentivement, et qu'il commentait sans doute pour Radio Classique l'autre jour, exprimait bien ce danger de dépérissement spirituel qui menace le catholicisme. Lui-même en était inquiet, qui se dit agnostique. Son livre n'est certes pas parfait -- mais il contenait d'excellentes remarques, et pour finir une belle profession de foi. Je regrette que Rouart se laisse par ailleurs entraîner dans des considérations surfaites, que vous dénoncez avec raison. Mais vraiment, que quelqu'un comme lui, de nos jours, en soit réduit réduit à cette expectative ambiguë, voilà qui me chagrine. Il était fait pour être un bon catholique, avant tout, messe en latin ou pas, motu proprio ou pas. C'est tout !

Bégand


[ PP à Bégand – J'ai dû mal expliquer. Les libéraux-conservateurs remontent effectivement au XIXe siècle, mais si je parle d'eux c'est parce qu'ils ont bon pied bon oeil aujourd'hui, malgré la contradiction interne de leur posture.
Il ne s'agit pas du tout d'un phénomène résiduaire puisque ce milieu compte bon nombre de jeunes, qui expriment avec violence des thèses semblables à celles de leurs arrière-grands-pères.
Il ne s'agit pas non plus de grognons qui feraient des réflexions sans importance à leur curé, mais d'un phénomène envahissant la cathosphère des réseaux sociaux, aiguillonné en phobie anti-François par des notabilités comme Mme Delsol ou le Pr Pitte.
D'où le fait (je parle d'expériences personnelles récentes) que de braves bourgeois fortunés tiennent en ce moment des propos virulents et injustes contre le pape. Ou que des notables agnostiques comme JMR critiuquent l'Eglise dans des domaines de compétence où ils ne sont ni formés, ni même informés... ]

réponse au commentaire

Écrit par : Bégand / | 13/08/2021

LE PAPE CONTRE L'HYPOCRISIE

> https://www.vaticannews.va/fr/pape/news/2021-08/audience-generale-pape-francois-hypcrisie-lettre-paul-galates.html
Le pape, s'appuyant sur l'épître aux Galates, dénonce l'hypocrisie, en particulier dans le contexte ecclésial où elle est "détestable" : un hypocrite, c’est « une personne qui fait semblant, qui flatte et qui trompe car elle vit avec un masque sur le visage, et elle n’a pas le courage de se confronter à la vérité. C’est pourquoi elle n’est pas capable d’aimer vraiment : elle se limite à vivre d’égoïsme et n’a pas la force de montrer son cœur en transparence. »
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 25/08/2021

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