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16/07/2021

Le Motu proprio : 1. Face au séparatisme en action sous prétexte liturgique, le pape François fait acte d'autorité

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Promulgué aujourd'hui par le successeur de saint Pierre, le motu proprio donne un coup d'arrêt à la prolifération d'un intégrisme politico-religieux devenu arrogant depuis 2013-2014, et qui se répandait dans les diocèses sous prétexte de "tradition liturgique" :


 

Vatican News / 16 juillet 

 

<<  Le pape François, après avoir consulté les évêques du monde entier, a décidé de modifier les règles régissant l'utilisation du missel de 1962, libéralisé sous le nom de «rite romain extraordinaire» il y a quatorze ans par son prédécesseur Benoît XVI. Aujourd'hui, le Souverain Pontife publie le motu proprio intitulé Traditionis custodes, sur l'usage de la liturgie romaine d’avant 1970, l'accompagnant d'une lettre dans laquelle il explique les raisons de sa décision.

Le rôle des évêques

La responsabilité de réguler la célébration selon le rite préconciliaire revient à l'évêque, modérateur de la vie liturgique diocésaine : «Il est de sa compétence exclusive d'autoriser le recours au ‘Missale Romanum’ de 1962 dans son diocèse, selon les directives du Siège apostolique». L'évêque doit veiller à ce que les groupes qui célèbrent aujourd’hui avec l'ancien missel «n'excluent pas la validité et la légitimité de la réforme liturgique, des écrits du concile Vatican II et du magistère pontifical».

Les messes suivant l'ancien rite ne seront plus dites dans les églises paroissiales. Il reviendra à l’évêque de déterminer l'église et les jours des célébrations. Les lectures seront «en langue vernaculaire», selon les traductions approuvées par les conférences épiscopales. Le célébrant devra être un prêtre délégué par l'évêque. Ce dernier sera également chargé de vérifier s'il sera opportun ou non de maintenir les célébrations selon l'ancien missel, en vérifiant leur «utilité effective pour la croissance spirituelle» : il est en effet nécessaire que le prêtre en charge ait à cœur non seulement la célébration digne de la liturgie, mais aussi le soin pastoral et spirituel des fidèles. Par ailleurs, l'évêque «veillera à ne pas autoriser la création de nouveaux groupes».

Une autorisation nécessaire pour les prêtres

Les prêtres ordonnés après la publication du Motu proprio d'aujourd'hui, et qui ont l'intention de célébrer selon le missel préconciliaire, «devront adresser une demande formelle à l'évêque diocésain, qui consultera le Siège apostolique avant de donner son autorisation». Quant à ceux qui le font déjà, ils doivent demander à l'évêque diocésain la permission de continuer. Les instituts religieux, «à l'époque érigés par la commission pontificale Ecclesia Dei», relèvent dorénavant de la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique. Les dicastères du Culte divin et des Religieux veilleront au respect de ces nouvelles dispositions.

Les raisons de François

Dans la lettre qui accompagne le document, le pape François explique que les concessions établies par ses prédécesseurs pour l'utilisation de l'ancien missel avaient été motivées avant tout «par le désir de favoriser la réduction du schisme avec le mouvement dirigé par Mgr Lefebvre». La demande, adressée aux évêques, d'accueillir généreusement les «justes aspirations» des fidèles qui demandaient de pouvoir utiliser ce missel, «avait donc une raison ecclésiale de recomposer l'unité de l'Église». Cette faculté, observe François, «a été interprétée par beaucoup au sein de l'Église comme la possibilité d'utiliser librement le Missel romain promulgué par saint Pie V, déterminant un usage parallèle au Missel romain promulgué par saint Paul VI».

Le pape rappelle que la décision de Benoît XVI, avec le Motu Proprio Summorum Pontificum de 2007, était soutenue par «la conviction qu'une telle mesure ne mettrait pas en doute l'une des décisions essentielles du concile Vatican II, sapant ainsi son autorité». Il y a quatorze ans, Joseph Ratzinger déclarait que les craintes de scissions dans les communautés paroissiales n'étaient pas fondées, car les deux formes d'utilisation du rite romain pouvaient s'enrichir mutuellement. Mais l'enquête récemment menée par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi auprès des évêques a fourni des réponses qui révèlent, écrit François, «une situation qui me chagrine et m'inquiète, me confirmant dans la nécessité d'intervenir» : le désir d'unité a été «gravement méprisé» et les concessions offertes avec magnanimité ont été utilisées «pour accroître les distances, renforcer les différences, construire des oppositions qui blessent l'Église et entravent son chemin, l'exposant au risque de la division».

Contre une remise en doute du Concile

Le pape se dit attristé par les abus dans les célébrations liturgiques «d'un côté comme de l'autre», mais aussi par «une instrumentalisation du 'Missale romanum' de 1962, de plus en plus caractérisée par un rejet croissant non seulement de la réforme liturgique, mais aussi du concile Vatican II, avec l'affirmation infondée et insoutenable qu'il trahirait ‘la Tradition’ et la 'vraie Église'». Douter du concile, explique François, «signifie douter des intentions mêmes des Pères, lesquels ont solennellement exercé leur pouvoir collégial ‘cum Petro et sub Petro’ au cours du concile œcuménique ; et, en définitive, douter de l'Esprit Saint lui-même qui guide l'Église».

François ajoute enfin une dernière raison à sa décision de modifier les concessions du passé : «Il est de plus en plus évident, dans les paroles et les attitudes de nombreuses personnes, qu'il existe un rapport étroit entre le choix des célébrations selon les livres liturgiques antérieurs au Concile Vatican II et le rejet de l'Église et de ses institutions au nom de ce qu'ils jugent être la ‘vraie Église’. Il s'agit d'un comportement qui contredit la communion, qui alimente cette tendance à la division […] contre laquelle l'Apôtre Paul a fermement réagi. C'est pour défendre l'unité du Corps du Christ que je me vois contraint de révoquer la faculté accordée par mes prédécesseurs». >>

 

 

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Commentaires

"AHURISSANT"

> Bonjour, mais c'est complètement ahurissant : d'un trait de plume, François supprime des communautés paroissiales qui existent pour certaines depuis des décennies (Saint-Eugène à Paris par exemple) ou pour beaucoup plus récentes, mais toujours installées par l'évêque, pour les reléguer où ? Dans la rue ? Et vous soutenez avec l'argument qu'elles sont devenues trop "arrogantes" ? Mais ce n'est pas un argument, c'est un sentiment. Trop d'enfants ? Des poussettes trop voyantes ? Si le pape n'aime pas telle communauté, il a le droit de la supprimer ad nutum ? En disant exactement le contraire de JPII et de Benoit XVI ? N'est-ce pas un exemple extraordinaire d'abus d'autorité, de cléricalisme comme le dit François ? Bonne soirée

AM


[ PP à AM :

Mais non. Pas du tout.
► Le pape rend aux évêques la maîtrise des choses : c'est en gros un retour à la situation instaurée par Jean-Päul II ;
► dire que le pape "supprime" des communautés parce qu'elles auraient "trop d'enfants" est une bassesse polémique ;
► ce motu proprio était devenu inévitable : depuis cinq ans on voit, dans nombre de ces communautés, monter à l'encontre du pape une hostilité sourde ou violente (politico-religieuse). Par exemple une extrême mauvaise volonté, à l'égard de l'encyclique 'Laudato Si' et des réformes de l'Eglise voulues par François.
► Je connais très bien le milieu traditionaliste, j'ai le plus profond respect pour la forme extraordinaire du rite, et j'ai vécu en 1988 les joyeuses premières heures de la FSSP.
Mais ensuite j'ai vu, très concrètement, le bonheur d'être revenus dans l'Eglise se transformer en arrogance (oui) : en certitude que "nous allons sauver l'Eglise", ce qui est une hérésie majeure !
Ce n'est pas "nous" qui sauvons l'Eglise : c'est l'Eglise qui nous sauve.
Et si nous ne croyons pas cela, vitalement, c'est que nous sommes hors de la foi au Christ. Même si nous nous proclamons non sans orgueil "les plus fervents" et "les militants de l'avenir".
Alors réfléchissez et priez, avant d'invectiver le successeur de saint Pierre. ]

Réponse au commentaire

Écrit par : AM | 16/07/2021

DISCUSSION

> Sur la forme c'est stratégiquement maladroit et me semble entraîner plus de risques de divisions que d'avantages, ce qui est gênant compte-tenu de la perte déjà considérable de fidèles. Sur le fond je n'ai pas d'avis tranché, n'étant pas un bon connaisseur des divergences théologiques, sauf qu'elles semblent exister ce qui est là aussi très gênant et interroge quant aux biens fondés de certaines évolutions prises dans le passé. Le refoulé ressort toujours, plus tard et plus violent.

BCM


[ PP à BCM – Maladroit ? Mais à votre avis, qu'aurait alors dû faire le pape face à un problème de séparatisme sociologique et politico-religieux, exploitant les lacunes du Motu proprio de Benoît XVI, et que les évêques demandaient au Saint-Siège de régler ? ]

réponse au commentaire

Écrit par : BCM | 16/07/2021

DÉSACCORD

> Bonsoir, merci pour votre réponse détaillée.
► Oui pour la question de rendre aux évêques la maîtrise de la liturgie traditionnelle, c'est une évolution normale, le pouvoir du Saint-Siège voulu par Summorum pontificum était par définition transitoire, le temps que la paix s'établisse.
► Précisément, le journal La Croix publiait hier un grand article titré "Entre traditionalistes et diocèses, les tensions s'apaisent". L'article commence par citer l'érection d'une paroisse personnelle dans un diocèse, les services du diocèse très contents, l'évêque aussi etc.
► Ces communautés tradis ont de fait beaucoup d'enfants. Ce n'est pas la même chose que des communautés qui ont 80 ans de moyenne d'âge, ce qui est fréquent dans les diocèses ruraux, je connais. On pourrait s'attendre qu'un pape ait quelques égards à l'intention de ceux qui sont de fait une partie de l'avenir de l'Église.
► Vous connaissez une hostilité sourde ou violente ou pape dans ces communautés : vous êtes en train de justifier une punition collective parce que certains disent n'importe quoi ? Je ne comprends pas. Vous dites que ces communautés sont rétives par exemple à Laudato Si. Vous ne pouvez pas en déduire qu'il faut les supprimer ! c'est cela que je trouve ahurissant. Il faut de la pédagogie, du temps, mais là c'est quand même dictatorial: pas d'accord, alors couic ?
► Vous dites que vous connaissez très bien le milieu tradi. Mais sans vous offenser, vous dites 1988. Je ne vais pas vous dire OK boomer, mais nous sommes quand même plus d'une génération après - presque deux dans le milieu tradi lol. Je ne connais qu'un peu ce milieu, mais assez pour savoir que les jeunes d'aujourd'hui ne sont pas les clones de leurs grands-parents que vous avez connus en 1988.
► Et surtout: on ne supprime pas un rite, des communautés, 60 000 fidèles disait La Croix pour la France, des fidèles qui ont été encouragés par Jean-Paul II et Benoît XVI précisément dans ce rite là, et maintenant on leur dit ben non on le supprime ce rite, il faut regagner "in due time" la forme ordinaire comme on disait encore hier. Il y a quelque chose qui cloche.
► Objectivement, cela paraît une décision très brutale, le ton du document est très dur, pas un mot sympa contrairement à Jean-Paul II et Benoit XVI. Vraiment, les tradis sont à éradiquer ? Je ne comprends pas qu'au nom de l'unité, on supprimer une légitime diversité, diversité qui était louée par Jean-Paul II et Benoît XVI.
Merci pour votre ouverture au débat et bonne soirée.

AM


[ PP à AM :

► Vous suggérez que mon information sur les groupes tradis s'arrête à 1988, qui est pour vous la nuit des temps. Vous m'avez mal lu : j'ai évoqué l'évolution de ces groupes depuis leur origine (1988) jusqu'à maintenant, et faites-moi la grâce de croire que je sais précisément ce qui s'y passe. L'information reste mon métier.
(Comme vous le concédez, "OK boomer" n'est pas un argument ; le mieux serait que vous ne paraissiez pas y recourir).

► Que vous n'aimiez pas le successeur de saint Pierre, c'est visible, et c'est à la mode dans la bourgeoisie de droite. Mais ça ne vous donne pas le droit de raconter que le Motu proprio vise à "supprimer 60 000 personnes". C'est faux et vous le savez, si vous avez lu le document.

► Oui, les tradis sont plus jeunes que la moyenne des catholiques français, et font beaucoup d'enfants.
Le drame est que ce milieu dynamique a basculé dans le rejet clanique du pontificat de François, c'est-à-dire le rejet de la voie d'évangélisation prise par l'Eglise catholique mondiale. Et que ce milieu s'est bloqué dans l'attitude hostile, pour des raisons pas toutes religieuses : des allergies politiques y jouent un grand rôle (contre l'écologie et le "socialisme" de Laudato si', contre la pastorale des migrants, etc).
Ce bloc, désormais réfractaire à tout ce qui vient du pontificat, a pour clergé "autonome" des prêtres qui refusent la concélébration diocésaine à la messe chrismale, et qui recommencent (depuis pas mal d'années) à dire que la forme ordinaire du rite est mauvaise pour les âmes...
C'est ce blocage global qui a fini par causer des problèmes aux évêques, lesquels ont demandé au pape de sévir.
Si les communautés tradis avaient été un moins dans l'entre-soi et le mépris de ce qui n'est pas elles, s'il y avait eu l'ombre d'une chance de les faire un peu évoluer, François n'aurait pas eu à sévir.
Au demeurant, je ne suis pas choqué qu'un pape sévisse. Je ne suis pas un libéral-libertaire : voyez-y là encore un effet de mon grand âge. ]

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Écrit par : AM / | 16/07/2021

à AM :

> François ne "supprime" pas "des communautés paroissiales" : il invite les ordinaires à opérer un discernement quant à ces mêmes communautés. La nuance est de taille.
______

Écrit par : Philippe de Visieux / | 17/07/2021

CONSEQUENCES ?

> Décision forte du pape François (honnêtement, quand j'ai appris ça, j'ai d'abord cru à ... un premier avril en retard).
Ceci dit, je crains que, pour l'Eglise de France, ce motu proprio ait des conséquences catastrophiques. Il ne faut pas nier que les "tradis conciliaires " constituent une grande partie de ses forces vives. Des croyants "tradis" qui étaient simplement mal à l'aise avec certaines orientations du pape François, se sentant "rejetés vers les ténèbres extérieures", risquent de rallier la FSSPX... et d'entraîner des "non tradis" (choqués par la brutalité de la décision) avec eux.
A l'heure où les catholiques pratiquants représentant moins de 2 % de la population, peut-on se permettre cela ? Bon, l'on peut voir le côté positif des choses : les catholiques de France, réduits à des groupuscules rivaux, à la fois haïs et enviés (car composés essentiellement de représentants des CSP+++), au milieu d'une masse non chrétienne, apprendront à vivre comme des chrétiens d'Orient !

Feld


[ PP à Feld – Ces communautés fermées sur elles-mêmes rejettent en bloc la marche de l'Eglise réelle. Si elles finissaient par rejoindre la FSSPX d'où elles ont émané historiquement, la pastorale et le caritatif de l'Eglise réelle n'en souffriraient pas. Et ce serait la fin d'une situation malsaine...]

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Écrit par : Feld / | 17/07/2021

"COMME TOUS LES SCHISMATIQUES"

> J'ai découvert l'existence de ce Motu Propio sur Twitter. Et je dois dire qu'en lisant la réaction des "ultras", je ne suis pas étonné de la décision de François: "antipape", "coup d'Etat contre Benoît XVI", "n'en déplaise au pape, je dirai la messe en latin", "les fumées de Satan empestent St Pierre"... Ça leur va bien que le Saint-Siège serait soi-disant "vacant", à défaut d'avoir un pape, ils sont en roue libre.
On trouve à peine quelques voix modérées pour envoyer du "je regrette cette situation" mais ça se compte sur le doigt d'une main.
L'esprit de schisme n'est pas pour eux une option, c'est un filtre à travers lequel ils regardent le monde. Et comme tous les schismatiques, ils sont convaincus d'être en plein dans la communion (quoiqu'ils disent et quoiqu'ils fassent).
C'est un beau gâchis. Benoît XVI leur a accordé sa confiance. Certains ont joué le jeu (ils doivent être sacrément dégoûtés), d'autres ont pris ça pour une consécration. Évidemment, leur retirer ce joujou des mains, c'est "blesser l'unité de l'Eglise".
______

Écrit par : Cyril B / | 17/07/2021

DE QUOI PARLE-T-ON ?

Cher Patrice de Plunkett, je lis régulièrement votre blog dont je partage beaucoup d'analyses, merci à vous. Mais sur ce point des "tradis", je vous trouve vraiment extraordinairement injuste.
► Vous parlez d'un "bloc" ou d'autres synonymes. Non, vraiment non. Vous faites à propos des tradis comme l'homme de la rue à propos des catholiques, qui en parle comme si c'était un bloc homogène. Eh bien non. N'essentialisez pas "les tradis" ! C'était peut-être en effet un peu vrai il y a quelques décennies, mais aujourd'hui, non. Ce qui unit les fidèles tradis, c'est la messe, le catéchisme, les sacrements, bref, la foi. Une foi en actes qui donc évidemment inclut la visite des malades, les pauvres - cf les maraudes de l'ICRSP à Lille etc.
► La preuve en est que les évêques témoignent que cela se passe bien dans leurs diocèses : Mgr Stenger à Troyes par exemple, cité par La Croix. Mgr Stenger est un évêque admirable pour qui la charité veut dire quelque chose. Ce n'est pas vraiment un tradi ! Eh bien la communion est possible. Heureusement. C'est la charité en actes. Même la note de synthèse de la CEF d'il y a quelques mois, malgré ses critiques, conclut en disant que la situation est aujourd'hui "apaisée". Il est donc factuellement faux de dire comme vous le faites qu'il y a "un blocage global".
► Les tradis ne refusent sûrement pas l'évangélisation, ils démontrent même qu'elle est toujours possible en France : doublement des communautés et des fidèles en dix ans 2007-2017, sûrement plus 2007-2021, ce n'est pas la simple augmentation démographique, de nombreux fidèles ont trouvé ou retrouvé la foi grâce à la messe traditionnelle. Il suffit de connaître une communauté tradi d'aujourd'hui pour s'en apercevoir : ça marche. Ce que Guésnois dans Le Figaro appelle "le mouvement de fond en faveur de la liturgie traditionnelle de la jeune génération, clergé et fidèles". Et Guénois n'est pas du tout tradi, que je sache.
► Vous dites "si les communautés tradis avaient moins été dans l'aentresoi". Franchement, si vous avez connu la situation en 1988, vous devez quand même savoir que les tradis ont été rejetés par leurs évêques et par les cathos bien pensants pendant des décennies ! Ce n'est pas eux qui ont souhaité se constituer en ghettos, n'inversons pas ! Que cela ait joué sur le caractère de ceux qui ont survécu au matraquage, je peux le comprendre. Mais tout cela a changé par la charité de Benoît XVI en 2007. Et pas du jour au lendemain. Il y a encore eu des conflits, mais de moins en moins, de plus en plus de rencontres, de dialogue, de compréhension, de moins en moins de ghettos. En quatorze ans, le changement est spectaculaire.
► Dans La Croix, qui rapportait il y a quelques jours l'instauration d 'un dialogue permanent évêques - instituts tradis en France : "C’est la première fois qu’il y a un dialogue de cette envergure, se félicite Mgr Olivier Leborgne. Cela nous a permis de prendre du recul et de nous rendre compte que souvent les uns pensaient à la place des autres. » Forte remarque ! Et LA Croix poursuit: "Le vice-président de la CEF reconnaît que les difficultés frontales sont rares et souhaite approfondir les relations avec les « tradis ». Cher Patrice de Plunkett, cela me paraît clair ! Difficultés frontales "rares" !
► Et l'article de La Croix d'il y a deux jours conclut avec Mgr Leborgne : « À nous d’entendre pourquoi ces fidèles demandent la messe en forme extraordinaire. Les deux liturgies peuvent constituer une richesse pour l’Église, dès lors qu’elles se tissent en communion et non en mondes parallèles. »
► Voilà un programme chrétien, non ? Voilà pourquoi je ne comprends pas du tout le marteau-pilon du motu proprio de François et votre soutien à ce texte.
Bonne journée,
AM.

[ PP à AM – Votre tableau des communautés tradi ne tient pas compte de leur dérive, que j'ai décrite dans ce même fil de discussion. Mais je crains que notre échange soit inutile : vous me reposez des questions auxquelles j'ai déjà répondu. Sans doute n'aimez-vous pas plus mes réponses que vous n'appréciez le pape ? ]

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Écrit par : AM / | 17/07/2021

INDIVIDUS, OU STRUCTURES

> Qu'aurait dû faire le pape ? peut-être sanctionner uniquement les prêtres auxquels il reprochait des faits graves, à titre d'exemple pour faire réfléchir les autres.

BCM



[ PP à BCM – Hélas le problème n'est pas lié à des individus. Il est structurel : les groupes auxquelles appartiennent ces prêtres sont pétris d'hostilité envers la marche de l'Eglise au XXIe siècle ! (Cf leur attitude à l'encontre de 'Laudato Si' etc).
D'où la disposition du Motu proprio décidant que désormais la messe "1962" sera célébrée par des prêtres désignés par l'évêque du lieu. Ce seront des messes diocésaines, et l'évêque sera responsable de ce qui s'y dit. Les fidèles "1962" ne seront plus tenus à l'écart des thèmes proposés à leurs frères et soeurs du reste du diocèse. Il serait tout de même étonnant que des catholiques jugent scandaleux ce retour à la normale... ]

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Écrit par : BCM / | 18/07/2021

TÉMOIGNAGE

> Beaucoup parlent des "forces vives" de l'Eglise, mais dans ma paroisse, je n'ai jamais vu la communauté tradi assister à la messe quand l'évêque a fait sa visite annuelle, ou venir à la sortie paroissiale. Je ne les vois pas donner un coup de main dans les divers services d'Eglise : ils ont "leur" caté, "leur" préparation au mariage et au baptême, "leurs" troupes scouts, "leur" service de charité aux pauvres, etc. Je n'ai jamais fréquenté la messe tradi, même "de temps en temps", car il m'a toujours semblé problématique de ne pas suivre le calendrier de toute l'Eglise. Mais je me sens liturgiquement "tradi" à l'intérieur du missel de Paul VI, donc je n'avais vraiment rien contre la communauté qui s'est installée dans le centre-ville, au contraire. Et le curé de l'époque, assez "catho de gauche", les avait accueillis gentiment, et on avait suivi. Mais force est de constater qu'on ne les a jamais vus. Ils sont dans leur "bunker", ils occupent l'église sur "leurs" créneaux, et basta. Puisse ce motu produire un changement d'état d'esprit. Je ne crois pas que mon évêque va les "rayer de la carte", ce sont des fake news.

Maud


[ PP à Maud – Exactement. Merci de votre témoignage ! ]

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Écrit par : Maud / | 18/07/2021

BIEN PEU CHARITABLES...

> Je suis étonné par l'attitude des défenseurs de la forme extraordinaire du rite, se réfugiant derrière l'argument du "manque de charité chrétienne du pape". J'en connais -et j'ai connu ce milieu de l'intérieur- et je peux affirmer qu'en matière de charité chrétienne, il y a de graves carences de leur côté en ce qui concerne tout ce qui vient de "l'Eglise conciliaire", au moins sur le plan verbal où j'ai régulièrement entendu, toutes époques confondues, les pires excès. Le pape en est la première victime, ce qui est très étonnant venant de la part de gens qui devraient savoir que "les portes de l'enfer ne l'emporteront pas sur elle", sur cette église fondée sur Pierre. Les "pestilences de l'enfer" qu'ils sont censés dénoncer ont pour fruit justement cet esprit sectaire qui déchire la tunique du Christ avec des mots qui blessent terriblement.
Dans la prière à l'Esprit Saint, nous demandons qu'Il assouplisse ce qui est raide... belle intention en ce moment.
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Écrit par : Fernand Naudin / | 18/07/2021

LE TRAVAIL DE LA CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI

> Un aspect important fut le travail réalisé en amont du Motu proprio par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. On pourrait trouver ce choix curieux s'il ne s'agissait que de liturgie : la Congrégation pour le Culte divin aurait dû être compétente.
Eh bien non, et c'est capital. La compétence de la Doctrine de la Foi démontre que le problème ne se situe pas au plan liturgique mais de l'acceptation du Concile par toute l'Église. Le problème est non liturgique mais doctrinal.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 18/07/2021

LES MOTU PROPRIO DU PAPE FRANÇOIS

> "Le pape se dit attristé par les abus dans les célébrations liturgiques «d'un côté comme de l'autre» ".
Aussi on peut rapprocher ce motu proprio.... d'autres motu proprio, tout aussi récents, sur des ouvertures de ministères :
(source Aleteia)
- Avec le motu proprio "Spiritus Domini", le pape François ouvre les ministères institués de la parole et de l’acolytat aux femmes.
- et il institue "le ministère laïc de catéchiste" par le Motu proprio “Antiquum ministerium” – Ministère très ancien, en latin –.
Deux décisions majeures !
Pour ENFIN s'assurer de l'envoi en mission des laïcs s'occupant de la liturgie et de la catéchèse, et surtout veiller à ce qu'ils aient une FORMATION SUFFISANTE pour être FIDELES aux enseignement de l'Eglise, et qu'ils soient en lien avec les évêques.
En espérant que les évêques et les laïcs prennent la balle au bond, et utilisent ces ouvertures.
https://fr.aleteia.org/2021/01/12/six-cles-pour-comprendre-louverture-aux-femmes-des-ministeres-institues/
https://fr.aleteia.org/2021/05/14/cinq-choses-a-savoir-sur-le-nouveau-ministere-laic-de-catechiste/
______

Écrit par : Isabelle Meyer / | 20/07/2021

OUTRANCIÈRES

> Un peu surpris d'abord par cette décision, j'avoue que j'en comprends mieux les raisons quand je vois les réactions outrancières dans les milieux tradis.
La réception, ou plutôt l'absence de réception de ce Motu Proprio, en dit long sur l'état d'esprit qui règne dans ces milieux et illustre clairement que le Pape François a vu juste.

MG


[ PP à MG – Sociologie : en 1926, quand Pie XI a mis à l'index "L'Action française", les dirigeants de celle-ci ont réagi par une explosion de fureur insultante envers le pape, les cardinaux, etc. Près de cent ans plus tard, le même milieu idéologique (les arrière-petits-enfants des supporters du "non possumus" de Maurras) réagit à une autre décision papale par une autre explosion de fureur insultante. La rage outrancière est dans l'ADN de ce milieu... ]

réponse au commentaire

Écrit par : Michel de Guibert / | 20/07/2021

ENTRE-SOI ET ÉLITISME

> Il existe chez les tradis de l'orgueil mal placé selon le prêtre de ma paroisse.
Et je dois bien avouer que leur dynamique, presque toutes les familles avec enfants y sont, risque de faire mourir les paroisses où il reste surtout des personnes âgées. Ces tradis vont beaucoup à la messe mais que font-ils pour faire vivre les paroisses ?
Casser cette dynamique fera, je l'espère, revenir ces croyants. Nous avons besoin d'eux, parce que l'Eglise ne peut laisser dériver cet entre-soi où tout est propre, "supérieur" et "mieux que".
______

Écrit par : Alexandre / | 25/07/2021

POINT DE VUE D'UN PRÊTRE

> A lire dans "La Croix" : 'Le pape François et la liturgie préconciliaire, ou la fin de la récréation' : tribune du Père Gilles Drouin.
Le père Gilles Drouin est prêtre du diocèse d’Évry-Corbeil-Essonnes et directeur de l’Institut supérieur de liturgie (ICP Paris).
https://www.la-croix.com/Debats/Le-pape-Francois-liturgie-preconciliaire-fin-recreation-2021-08-12-1201170508

MG


[ PP à MG – L'article est réservé aux abonnés. Pouvez-vous nous en donner des extraits ? ]

réponse au commentaire

Écrit par : Michel de Guibert / | 15/08/2021

'LA CROIX', LE PAPE ET LE RITE

En voici l'intégralité !

[ "Le pape François et la liturgie préconciliaire, ou la fin de la récréation"

Tribune de Gilles Drouin

Le père Gilles Drouin est prêtre du diocèse d’Évry-Corbeil-Essonnes et directeur de l’Institut supérieur de liturgie (ICP Paris).

Mais quelle mouche a donc piqué le pape François pour signer, en plein été, un nouveauMotu Proprio Traditionis Custodes (TC), consacré à l’usage de la liturgie préconciliaire ? Ce texte, dont les attendus sont précisés dans une lettre d’accompagnement au ton inhabituellement ferme, peut être compris, dans un paysage libéral dérégulé, comme une fin de récréation sifflée en direction d’une partie du catholicisme marquée par ce qu’elle considère comme une « question liturgique ». Cependant les enjeux de cet acte sont, comme souvent en matière liturgique, au moins autant d’ordre ecclésiologique et doctrinal que strictement liturgiques.

Le motu proprio met fin à une situation d’exception

Au plan ecclésiologique, TC met fin à une situation d’exception qu’avaient générée deux textes précédents, les Motu proprio Ecclesia Deide Jean-Paul II et surtout Summorum Pontificum (SP) de Benoit XVI. SP avait en effet sensiblement déplacé le centre de régulation des adaptations de la liturgie reconnu par la Constitution sur la sainte Liturgie de Vatican II, des évêques vers les curés : en effet, ces derniers obtenaient alors la faculté de décider de proposer une messe selon ce qui était alors devenu la forme extraordinaire de l’unique rite romain, pour peu qu’ils puissent justifier sa demande par un groupe stable. TC met fin à une situation d’exception, à deux niveaux : celui des Églises locales en rétablissant les évêques dans leurs prérogatives, celui du Siège apostolique en supprimant la procédure Ecclesia Dei. Ainsi ramène-t-il l’usage de la liturgie préconciliaire dans le droit commun de la régulation liturgique de l’Église.

En affirmant qu’il n’y a qu’une seule expression de la Lex orandi du rite romain, celle que contiennent les livres liturgiques réformés promulgués par Paul VI et Jean-Paul II, l’article 1 de TC a une réelle portée doctrinale. En mettant fin à la distinction entre formes ordinaire et extraordinaire de l’unique rite romain, des expressions introduites par SP qu’il n’est plus possible, en toute rigueur, d’utiliser, TC ne permet pas que soient traitées à parité ce que nous pouvons appeler vetus ordo (VO) et novus ordo (NO). L’expression « messe traditionnelle » ne peut d’ailleurs dans cette logique être appliquée au VO, comme elle l’est souvent de manière abusive, puisque c’est le NO, la messe de Paul VI, qui est l’expression de la tradition vivante de l’Église, promulguée par un acte solennel du magistère pétrinien, à la demande d’un concile œcuménique.

C’est en ce sens également qu’on peut comprendre ce que vise François quand, dans la lettre d’accompagnement, il dénonce « une utilisation instrumentale du Missale Romanum de 1962 » qu’il interprète comme un refus du Concile au moins autant que de la réforme liturgique. Moins qu’un refus explicite de l’enseignement conciliaire, qui peut exister dans certains milieux, il s’agit aussi de cette expérience vécue par ceux qui pratiquent les deux ordines, que la liturgie manifeste et façonne un rapport à l’Église, au Mystère qui lui est propre et qu’il n’est donc pas tenable dans la durée de fonctionner avec un attelage à ce point dispars entre une liturgie ante conciliaire et une théologie, en particulier une ecclésiologie, exprimée selon les catégories de Vatican II.

Enfin, sans le préciser formellement TC prend également position sur une des voies de résorption de la crise liturgique ouverte par Benoit XVI dans la lettre d’accompagnement de SP : le fameux enrichissement mutuel entre les deux formes de l’unique rite latin, et la perspective d’une sortie de crise par une sorte de convergence avec l’émergence progressive d’une via media… S’il n’y a qu’une expression de la lex orandi du rite romain, les « bricolages rituels » auxquels on assiste depuis quelque temps et qui prétendent combler les « silences rubricaux » du NO par des rites ou pratiques « léguées » par le VO, au mépris de la cohérence de chacun des éthos célébratoires, et qui sont loin de répondre aux exigences de contenu et de régulation de l’enrichissement précisées par Benoit XVI dans SP, doivent être considérés avec la même rigueur que les fameux abus post-conciliaires aussi légitimement que généreusement dénoncés.

Remettre cette question liturgique à sa juste place

Enfin ce texte de François ne peut probablement être compris à l’aune de la situation française, dont il manifeste une certaine « provincialisation » dans la stratégie pastorale et missionnaire de l’Église universelle. Il faudrait ici évoquer les questions politiques et sociologiques sous-jacentes depuis ses origines dans notre pays, avec ses racines historiques très profondes, d’une crise dont l’aspect liturgique n’est souvent que l’étendard. La prise en compte de la dimension sociologique de la question, en France, est également essentielle pour interpréter les affirmations massives sur la jeunesse et la vitalité missionnaire et vocationnelle des communautés attachées au VO, et ne pas se laisser tromper par un effet d’optique en grande partie interprétable par une simple prise en compte de la composition sociologique de ces groupes.

Il nous faut probablement considérer d’autres réalités, bien vivantes même si elles sont moins visibles, du catholicisme français : je pense, entre autres aux nouveaux chrétiens issus du catéchuménat pour qui ces questions ne font pas sens, ou encore à ces communautés interculturelles, de banlieue, lesquelles posent des questions tout autres mais bien réelles à nos pratiques liturgiques. Des franges également actives du catholicisme qui, à force d’être les spectateurs étrangers et muets des incessants débats sur une prétendue « question liturgique », risquent de partir dur la pointe des pieds… vers les communautés évangéliques, qui, elles, sauront les accueillir, à bras ouverts !

Puisse le coup de sifflet du pape nous conduire à ramener cette question liturgique à sa juste place, à ne surtout jamais interpréter ces textes successifs comme une victoire d’un camp sur l’autre… et à orienter nos regards, nos énergies vers des horizons plus vastes, plus ouverts, plus oxygénés…. ]

(fin de la reproduction de l'article)
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Écrit par : Michel de Guibert / | 17/08/2021

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