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07/02/2021

L'interventionnisme américain est de retour

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Les délires de M. Trump ont pris fin, mais le discours de politique étrangère de M. Biden montre que les démocrates US n'ont rien oublié et rien appris. Ils veulent imposer leurs leitmotive au reste du monde, quitte à déclencher le contraire un peu partout :  


 

Du point de vue du reste du monde et notamment de la France, il n’y a pas de “bon” président américain dans la mesure où tous partagent le fantasme d’un leadership mondial : ce qui les mène tous – avec plus ou moins de courtoisie selon leur éducation – à considérer comme “hostile” (donc à réprimer) les velléités d’indépendance des autres Etats ; tâche d’autant plus facile que ces velléités sont faibles chez les nombreux dirigeants du rest of the world qui voient en Washington leur suzerain.

Sous cet angle, la présidence Trump présentait un avantage involontaire : celui de refroidir l'américanolâtrie de Paris, Berlin, Bruxelles etc. Nos dirigeants reprochaient à M. Trump de les obliger à s’éloigner un peu de la vassalité : par exemple dans l’affaire de la taxe sur les GAFAM où M. Trump lui-même avait éprouvé une bouffée d’impérialisme…

Mais là n’était pas l’essentiel pour nos dirigeants. Aucun d’eux n’envisageant de tomber dans ce que les business-schools appellent avec mépris “le souverainisme” (qui équivaudrait selon eux à croire à la terre plate), la véritable raison de leur allergie au trumpisme était non pas politique mais idéologique : c’était l’aversion de M. Trump et de ses supporters envers le LGBTQI+, l’ex-président reprochant surtout à ce lobby d’être lié au parti démocrate. Le lobby étant aussi – quasi-officiellement – lié à la classe politique de plusieurs pays d’Europe, il y avait là un mur d’aversion réciproque ; rester vassaux de la Maison Blanche dans ces conditions était difficile, d’autant que sous M. Trump la Maison Blanche ne voulait plus être suzeraine.

Mais s’éloigner de la vassalité était douloureux à nos dirigeants. D’où leur allégresse en voyant arriver M. Biden. En bon démocrate, le nouveau président annonce son intention de revenir à l’interventionnisme planétaire : et cela, en fonction non pas d’analyses géopolitiques, mais de l’idéologie chic des campus et du parti démocrate, avec pour cibles les cinq continents. Dans son premier discours de politique étrangère, le 4 février, M. Biden a donné comme “axe fort" à sa diplomatie “la promotion des droits humains des personnes lesbiennes, gay, bisexuelles, transgenres, queer et intersexes à travers le monde”.  Notamment par des interventions américaines pour “combattre” des législations étrangères…

Mais : 1. cette directive confond relations internationales et pressions morales ; 2. elle vise des Etats sur lesquels Washington a peu de prise sinon la menace, ce qui est lourd de risques ; 3. en Ouganda, en Gambie, au Liberia, les tentatives de M. Obama dans ce sens n’avaient abouti qu’à aggraver la répression ; 4. d’autant que les gouvernements des pays visés pourront accuser les “personnes LGBTQI+” d’être des agents occidentaux – comme cela se fait déjà en Russie. D’où l’inquiétude de Mme Jessica Stern, porte-parole du lobby OutRight Action International, qui craint les effets pervers de ce retour d’une Amérique menaçante fût-ce sous le drapeau arc-en-ciel. Même inquiétude de la part de Philip Ayoub, de l’Occidental College californien, qui confie lui aussi à la presse : “ Ce genre de politique étrangère ne peut être imposée par le haut.” À supposer que les USA soient un “haut”...

Ces considérations semblent échapper aux dirigeants européens. Eux aussi pensent que la politique étrangère consiste à chercher querelle aux Etats étrangers pour des raisons “sociétales”, en exigeant ceci ou cela sous peine de “sanctions”... On peut craindre que les velléités de résistance commerciale euro-française, manifestées à l'époque Trump, ne s’évaporent devant M. Biden et les parangons de political correctness qui forment son entourage.

 

 

 

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19:49 Publié dans Biden, USA | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : biden

Commentaires

LE TAFTAB

> Reste le grand retour d'un TAFTA ambitieux en échange du retour dans l'accord de Paris, et la boucle sera bouclée.
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Écrit par : bertrand / | 07/02/2021

AMÉRICANOLÂTRIE MÉDIATIQUE

> https://www.lemonde.fr/sport/live/2021/02/07/super-bowl-2021-suivez-la-finale-de-la-nfl-en-direct_6069110_3242.html
Signe de l'américanolâtrie qui gagne la société française : une retransmission en continu (en 'live') du 'Super Bowl', dans les colonnes du journal en ligne 'Le Monde', avec ce commentaire truffé d'anglicismes : "Grâce à trois passes de touchdown de leur quarterback Tom Brady, les Buccaneers mènent 21-6 devant les tenants du trophée, les Kansas City Chiefs menés par Patrick Mahomes, en finale de la saison."
Faisant sans doute partie des ploucs qui, quoique maniant assez correctement la langue anglaise, ne nourrissent aucun intérêt particulier pour le football américain, je trouve scandaleux que le premier titre de France donne un écho aussi important à un événement états-unien, comme si le football américain, qui ne fait pas partie de notre culture sportive, devait retenir l'attention de ses lecteurs.

Concernant Biden : il est assez incompréhensible pour un président qui revendique aussi fortement son catholicisme de promouvoir dans le même temps les droits LGBT. Il ne s'agit évidemment pas pour quiconque de vilipender les personnes homosexuelles ou transsexuelles : le premier ministre luxembourgeois, le ministre français Gabriel Attal, revendiquent leur homosexualité sans que cela doive faire l'objet d'aucune discrimination. La promotion des droits LGBT et de l'idéologie qui les soutient est en revanche tout autre chose : c'est remettre en cause le modèle familial traditionnel au profit d'un individualisme exacerbé, incompatible avec l'Évangile que tout chrétien se doit d'annoncer. Que le président Biden soutienne le lobby LGBT avec tant d'ardeur le regarde, mais qu'il se fasse photographier au premier rang de la cathédrale catholique de Washington est quelque peu déconcertant. Comment ne pas y voir une certaine hypocrisie ? M. Biden va visiblement à la messe : souhaitons qu'il médite la deuxième lecture entendue hier : "Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Évangile ! Certes, si je le fais de moi-même, je mérite une récompense. Mais je ne le fais pas de moi-même, c’est une mission qui m’est confiée. Alors quel est mon mérite ? C’est d’annoncer l’Évangile sans rechercher aucun avantage matériel, et sans faire valoir mes droits de prédicateur de l’Évangile." On ne saurait être plus clair.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 08/02/2021

PAS PRÈS

> Avec de tels objectifs, ils ne sont pas près d'être amis avec le monde arabo-musulman...
Et comme nous nous alignons sur eux...
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Écrit par : E Levavasseur / | 08/02/2021

LES U.S.A. ET NOUS

> Sans vouloir que les Européens soient nécessairement les "vassaux" de l'Amérique, pourquoi ne pas admettre que les partenaires d'un même camp se rassemblent plutôt que de se jalouser (par désir mimétique) ? Pour les questions de Défense, il est clair que notre intérêt consiste en de bonnes relations avec les USA. Pour les autres questions, il me semble que les USA grosso modo défendent les mêmes valeurs que nous, la démocratie, la paix, la liberté religieuse, etc. Les Américains sont du reste plus forts que nous dans la philanthropie, même si nous les battons à plate couture pour la politique sociale -- regardons ce que va inventer Joe Biden, pour cette dernière.
Donc, je vous trouve un peu sévère dans votre rejet de la "tutelle" américaine, qui plus est : démocrate. On n'est plus au temps du général de Gaulle, pour qui "l'indépendance de la France" était une manie, une obsession. Je ne pense pas que les Américains, néanmoins, soient des impérialistes qui vont saper notre tradition culturelle, et détruire par exemple notre chère gastronomie. Beaucoup viennent en France et dans le reste de la vieille Europe pour étudier notre art de vivre, notre littérature, etc. Je sais, mon cher PdP, que vous préférez les Russes (presque par idéologie), mais avouez, et les événements récents l'ont hélas démontré, que ce n'est pas l'idée de démocratie ou de liberté qui les submerge !

Bégand


[ PP à Bégand ˜ Pourquoi qualifier de manie et d'obsession ce qui devrait être le premier devoir de tout chef d'Etat ? L'indépendance du pays est, en dernière instance, la liberté humaine la plus précieuse... parce que toutes les autres finissent tôt ou tard par en dépendre.
Quant aux valeurs communes que nous partagerions avec les USA... La géopolitique ne se fait pas sur la base de valeurs, mais d'intérêts conciliés. Les USA ne concilient pas : ils ne voient que leurs intérêts économiques et stratégiques, et exigent que leurs "alliés" s'y soumettent. Cela depuis 1920... Je vous suggère de lire l'ouvrage d'Eric Branca 'L'ami américain', Perrin 2017. ]

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Écrit par : Bégand / | 09/02/2021

DISCUSSION

> Je pense que l'indépendance d'un pays devrait aujourd'hui se mesurer au respect responsable que ses alliés partagent avec lui. Je suis tout à fait gaulliste, mais je me demandais juste si cette idée prioritaire d'indépendance n'était pas devenue partiellement obsolète, en des temps où nous dépendons de l'Europe et des USA en tant que membre de l'Otan. Quand aux valeurs, je suis d'accord avec vous que ce n'est peut-être plus le bon terme à employer. Mais regardez les rayons d'une grande librairie : pourquoi cette grande place réservée à la littérature américaine, qui frise le monopole ? Parce qu'elle nous parle. Les Américains sont des surdoués du "soft power". Ils séduisent ainsi. Bien sûr, ils ne sont pas parfaits, mais aucune civilisation ne l'est... Merci de m'indiquer ce livre, j'essaierai de le lire. Bien à vous.

Bégand


[ PP à Bégand – Si vous êtes gaulliste, souvenez-vous du réalisme de De Gaulle :
– l'OTAN, on peut en sortir ! (et on a puissamment intérêt à en sortir, vu le genre de guerres que déclenche Washington depuis vingt ans) ;
– l'Europe, ce doit être un véritable volonté géopolitique commune, indépendante des Etats-Unis... Ce ne doit donc pas être l'absurdité techno-financière actuelle, qui s'en remet aux Américains pour le reste c'est-à-dire l'essentiel.
– Quant aux motifs de l'invasion "culturelle" US, je les vois dans notre mépris de nous-mêmes (et de notre propre culture) plus que dans un talent spécial des Américains... ]

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Écrit par : Bégand / | 10/02/2021

L'O.T.A.N. ET NOUS

Cher PdP :
-- Pour l'Otan, j'en suis partisan. Désormais, la France n'a plus assez de finances à consacrer à sa sécurité. Par exemple, je crois que les Américains disposent d'une douzaine au moins de porte-avions, alors que nous, nous n'en avons qu'un seul ! Et tout est comme ça.
-- Pour l'Europe, je suis pleinement d'accord avec vous. Je regrette cette Europe technocratique, qui ne s'intéresse qu'à l'économie. L'Europe présente se nie elle-même, oubliant sa culture, son importance historique dont il doit bien rester quelque chose. Je crois d'ailleurs aux fondements chrétiens de l'Europe. Les bureaucrates européens actuels sont de grands criminels, des "prévaricateurs", pour utiliser ce mot violent et très beau, dont usait Cicéron dans ses plaidoieries fameuses.
-- Pour votre troisième point, vous n'avez pas complètement tort. Bien des productions culturelles américaines ne valent rien, et vont même à l'encontre de toute dignité humaine. Je vais rarement voir des films américains, par exemple. Mais néanmoins il ne faut pas tout condamner, en jetant le bébé avec l'eau du bain. Ainsi, j'aime Scorsese, ce grand catholique d'origine. Paul Auster a traduit Mallarmé, et est l'auteur de quelques bons romans.
Ma conclusion est qu'il ne faut pas sous-estimer les USA, ni aucun pays -- ni aucun homme. Je ne suis jamais allé en Russie, mais je suis sûr que je serais tombé amoureux de ce pays, dont j'aime le cinéma et la littérature. Tarkovski est mon cinéaste préféré !!!
Bonne journée à tout le monde.

Bégand


[ PP à Bégand – Ne mélangeons pas sentiments et géopolitique. Il ne s'agit pas de "sous-estimer" ou de sur-estimer. Il s'agit de bien voir qu'une défense est au service d'une politique, et que l'intérêt politique de la France (et de l'Europe) n'est pas celui des Etats-Unis quoi qu'en pensent nos "dirigeants". On le voit bien dans la question russe et la question iranienne.
Or l'OTAN est subordonnée aux intérêts américains...
La question des moyens n'intervient donc pas à ce niveau essentiel : savoir qui nous sommes et où sont nos intérêts.]

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Écrit par : Bégand / | 11/02/2021

POUR FINIR

> Il nous faudrait alors parler de "souveraineté", et voir peut-être comment, depuis le XIXe siècle, les Etats la voient diminuer pour eux-mêmes, au profit d'institutions "morales" supérieures, comme l'Onu. Je regrette évidemment que les USA n'en fassent pas plus cas, tout comme la Russie, ou même Israël s'inquiétant récemment de la saisie du TPI sur les territoires occupés. Vaste sujet... Mais aujourd'hui, le Général ne pourrait plus déclamer qu'il se fait "une certaine idée de la France". Cela aussi est fini, et c'est peut-être un bien (un progrès). Bonne journée.

Bégand


[ PP à Bégand – Pour finir : je partage l'idée selon laquelle la France peut et doit être autre chose que le relais ouest-européen d'une vision américaine du monde (que le pape appelle "le nouveau colonialisme"). Bonne journée.]

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Écrit par : Bégand / | 12/02/2021

L'O.T.A.N. SE CHERCHE DES ENNEMIS

> https://www.lemonde.fr/international/article/2021/06/15/pour-l-otan-la-chine-represente-desormais-un-defi-systemique-pour-l-ordre-mondial_6084147_3210.html

Un exemple de ce que vous annonciez il y a six mois : l'OTAN (l'Oncle Sam) se cherche des ennemis. La Russie ne suffit plus : Washington vient d'entraîner l'Europe dans la nouvelle guerre froide sino-américaine. Comme nos atlantistes ne refusent rien à leur suzerain redevenu sympa à leur égard, ils ont signé ce communiqué hissant la Chine au rang de "défi systémique".
Emmanuel Macron a eu raison de rappeler que l'OTAN n'a pas d'autre vocation que de protéger le territoire de ses membres... et que la Chine est tout de même bien loin de l'Europe. Même son de cloche chez Merkel, mais les deux ont tout de même accepté la perche lourdement tendue par Joe Biden.
Communiqué stérile : la Chine n'a aucune prétention territoriale hors de son pré carré historique, à savoir son territoire actuel, la mer de Chine méridionale et Taïwan. Elle ne revendique même plus la Mongolie qui a pourtant fait partie de son empire.
Aucun risque de voir défiler des soldats chinois sur les Champs-Élysées ou sous la porte de Brandebourg. Si risque il y a, il est économique, il se situe au niveau de la prise d'influence, il est au plan du contrôle de données numériques. Or ces domaines ne relèvent pas de l'OTAN. Qu'à donc fait M. Stoltenberg - sosie officiel de Thierry Lhermitte - lorsque la Chine acheta le port du Pirée, approcha plus récemment l'Italie, mena une OPA sur la compagnie portugaise d'électricité ? On a dû éclater de rire, à Pékin, en découvrant que la réponse euro-américaine aux nouvelles routes de la soie était un encouragement à développer de nouveaux armements.
À qui profite le crime ?...
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 15/06/2021

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