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21/02/2020

Le “libéralisme conservateur” est une impasse [1]

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L'inévitable MM au colloque de Rome, le 4/02  (image libre de droits)

Le libéralisme conservateur est une impasse en lui-même, comme l’avoue une tribune du Figaro. Et il l’est aussi (suggère le National Catholic Reporter) en ce qu’il esquive le problème-clé : le règne de l’Argent, qui détruit le politique et le social ! Explication :


Une fraction de LR, la majorité du RN, le boudoir de Mme Maréchal et les lecteurs de Valeurs actuelles veulent croire que le libéralisme – la finance au-dessus de tout –  est compatible avec les “valeurs traditionnelles” : il suffirait de remplacer les équipes dirigeantes (mettre des libéraux conservateurs à la place des libéraux progressistes), et tout irait mieux. C’est une idée plate et courte. Est-ce même une idée ?  Sans doute pas, constate une analyse publiée paradoxalement par Le Figaro (13/02).

Signée d’un “spécialiste des théories politiques”, le normalien Alexis Carré, cette analyse  a pour point de départ le colloque tenu au Plaza de Rome les 4-5/02 sur le thème du “national conservatism”. Organisé par l’universitaire israélien Yoram Hazony et une fondation rêvant de fournir un “socle idéologique” à Donald Trump, ce colloque a attiré deux cents personnes grisonnantes autour du plateau habituel : Viktor Orban, l’intégriste Roberto de Mattei, le bizarre Rod Dreher [1], la cheffe néofasciste Giorgia Meloni (Fratelli d’Italia), des membres de la droite du parti républicain US, trois représentants de la droite polonaise – et forcément Marion Maréchal.

Qu’en pense l’analyste du Figaro ?  Au terme d’un long article disséquant scrupuleusement le populisme, le nationalisme et ce qui tient lieu de vie politique aujourd’hui, il explique ceci :

<< Si le conservateur peut se permettre d’écarter si facilement la question du meilleur régime, s’il peut se dispenser de reposer à nouveaux frais la question de l’origine, c’est parce qu’elle est déjà résolue au moment où il parle. Il est en ce sens faux que le conservatisme soit une philosophie ou une théorie politique, puisqu’il suppose les questions essentielles déjà résolues pour lui par une tradition qu’il préserve. Il est en revanche un enfant du siècle dans la mesure où, en tant qu’homme produit par le progrès, son rapport inédit à cette tradition s’ancre dans la conscience qu’il a de pouvoir la détruire. Ainsi, le conservatisme est-il moins une pensée qu’une sensibilité. C’est pourquoi il est aisé de savoir qui fut conservateur et plus difficile de savoir ce qu’est le conservatisme. Les conservateurs, Burke lui-même, mais également Churchill, sont toujours en quelque sorte de “vieux libéraux”, des libéraux dont la raison est informée par un sentiment, la crainte ; crainte que le progrès qu’ils ont mis en marche détruise quelque chose d’irréparable. >>

“Crainte que le progrès qu’ils [les libéraux] ont mis en marche détruise quelque chose d’irréparable” ?  Exactement ! Ce “progrès” aujourd'hui est le système économique et financier installé dans les années 1990 pour “libérer la société de l’étatisme”, c’est-à-dire saper le rôle de l’Etat républicain (que la rhétorique des droites assimilait carrément au système soviétique [2]). Trente ans plus tard, voyant les impacts pervers du “progrès” libéral sur la société, certains libéraux cherchent à se poser en protecteurs des “valeurs traditionnelles” : mais comme ils restent au service de ce qui détruit ces “valeurs” (la broyeuse sociétale du libéralisme), la contradiction les bloque dans une impasse et les rend incapables de penser la situation – en dépit de leurs prétentions académiques.

“Les conservateurs écartent facilement la question du meilleur régime”, souligne Carré. Ils l’écartent pour deux raisons : 1. Poser sérieusement la question du régime mènerait à rompre avec le libéralisme, pour libérer le politique actuellement écrasé par le financier ; 2. Et surtout, cela reléguerait au second plan la chose qui motive réellement nos conservateurs : participer à de “bonnes élections” qui leur ouvriraient les carrières officielles… (d’où récemment, en France, la piteuse aventure de Sens commun). La pensée conservatrice ne va en effet pas plus loin que cela, explique Alexis Carré :

<< Sans avoir à transformer les institutions actuelles, cette démarche vise à modifier le caractère du régime démocratique en modifiant le caractère des élites chargés d’en assurer le fonctionnement  […Mais] le conservatisme ne saurait s’ériger en substitut à l’idéologie du progrès ou s’émanciper totalement d’elle. D’où il s’explique que le conservatisme ait fourni à la démocratie libérale, tant d’hommes d’États, souvent responsables de sa survie, et si peu de projets alternatifs... >>

Y compris lorsque les conservateurs se veulent nationalistes, comme Yoram Hazony déclarant que la souveraineté nationale suffit à résoudre tous les problèmes – ce qui est objectivement faux : certains problèmes, aujourd’hui les plus graves (le climat, les océans et la biodiversité) se posent à toute la planète et exigent par là des solutions internationales ; laisser par exemple Moscou et Washington régler le sort de l’Arctique, serait condamner celui-ci à la destruction. D’où l’insistance du Saint-Siège à plaider la cause du bien commun mondial, notamment dans les encycliques sociales.

Au demeurant, la dimension nationale est tendanciellement incompatible avec le libéralisme. Ce qui tend à “détruire la forme politique nationale”, comme le dit Alexis Carré, ce n’est pas “une certaine compréhension du libéralisme” mais le libéralisme en lui-même depuis ses origines, ainsi que Marx le signalait dès 1848. Devant ce fait avéré, on ne saurait se contenter de théoriser que “la nation est la condition de réalisation de la démocratie” : aujourd’hui le libéralisme éco-financier sape, à la fois, la démocratie et la nation. 

Voilà le fait. Quelques contorsions que fasse la droite pour apparier conservatisme et libéralisme (exercice où Mme Maréchal est plus légère à voir que M. Salvini), le libéralisme est l’ennemi de toute conservation. Aujourd’hui le service du bien commun exigerait d’émanciper le politique du carcan de la sphère financière : ce qui reviendrait politiquement à renverser l’idole Argent, comme dit le pape François. Et c’est ce que souligne l’article du National Catholic Reporter dont nous parlerons demain.

 

 __________

[1] Auteur d’un livre qui déporte l’idée bénédictine vers une sorte de survivalisme peu évangélique, Rod Dreher n’est pas un catholique (contrairement à ce que croit la droite conservatrice française). Méthodiste à l’origine, il a transité par le catholicisme avant de passer à une version US de l’orthodoxie.

[2] Je n’exagère pas : j’ai vécu ces années-là aux premières loges, c’est-à-dire au Figaro.

 

[à suivre]

 

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Commentaires

FAUX-MONNAYEURS

> "La politique est la forme la plus haute de la charité", disent pieusement les bonnes âmes réfugiées dans un monde imaginaire.
Aujourd'hui la politique est le royaume des faux-monnayeurs.
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Écrit par : Louis Supion / | 21/02/2020

@ Louis Supion

> Heu... La "pieuse âme " en question, c'était Pie XI.
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Écrit par : Feld / | 21/02/2020

QUOI FAIRE D'AUTRE ?

> "Aujourd’hui le service du bien commun exigerait d’émanciper le politique du carcan de la sphère financière : ce qui reviendrait politiquement à renverser l’idole Argent, (...)"
Mais comme ce n'est pas demain la veille (surtout avec une population globalement "shootée" à la consommation et des multinationales infiniment plus puissantes que les Etats), en attendant, on fait quoi ?

Feld

[ PP à Feld – On milite pour propager cette idée révolutionnaire. Que pourrait-on faire d'autre, qui ne fasse pas tomber dans un piège à cons passéiste ou "progressiste" ? ]

réponse au commentaire

Écrit par : Feld / | 21/02/2020

Feld,

> tu es sur que c'est de Pie XI? J'ai lu que c'était de Paul VI, puis de saint Thomas. Qui a dit cette fameuse phrase qui, à mon sens, du moins quand je lis les Evangile, est totalement fausse....

VF


[ PP à VF – D'accord sur la fausseté de la phrase par rapport aux prescriptions évangéliqiues. D'autant qu'aujourd'hui elle sert d'alibi-roudoudou aux plus conformistes, et que ça les mène de fil en aiguille à l'idée désastreuse du "moindre mal" : le vote catho pour les playmobil macronistes aux européennes, par exemple.
De qui est la phrase sur la "forme la plus haute de charité" ? Couramment attribuée à Pie XI (auquel cas elle ne s'appliquerait sans doute qu'à la démocratie-chrétienne alors naissante), elle est attribuée à Pie XII par le pape François (message de décembre 2017 au congrès des catholiques-en-politique à Bogota), mais avec un autre sens : "le service inestimable du dévouement au bien commun de la société"... Définition beaucoup plus large que la politique politicienne, et qui s'applique autant aux mouvements populaires (p. ex. latino-américains) qu'aux partis classiques.
Car tout dépend :
a) du degré auquel on admet la notion de bien commun, différente et souvent antagoniste de celle de "consensus sur les valeurs admises" ;
b) du contenu que l'on donne à l'idée de bien commun, contenu fatalement révolutionnaire dans l'état actuel des choses de la Terre, donc rejeté par les libéraux (conservateurs ou progressistes) acquis au système éco-financier dominant. ]

réponse au commentaire

Écrit par : VF / | 21/02/2020

CHURCH-SHOPPING

> Un mot à propos de M. Dreher, méthodiste devenu catholique puis orthodoxe. Il y a quelques jours, je discutais avec une ancienne collègue hondurienne qui me disait délaisser les messes catholiques pour rejoindre un culte évangélique : elle a même fait une sorte d'étude de marché pour finalement trouver 'la' communauté qui correspondait le mieux à sa personnalité. Je lui ai demandé si ça ne lui faisait rien de tourner le dos à l'Église dans laquelle elle a reçu le baptême ; sa réponse fut que, vu l'histoire peu reluisante (à ses yeux) du catholicisme, sans parler des scandales pédophiles récents, elle se sentait plus à l'aise dans cette communauté évangélique. Je lui ai dit ne pas comprendre cette démarche égocentrée, celle du 'church shopping' où l'on choisit une Église dans laquelle on se "sent bien" ; c'est faire preuve de bien peu de foi que de changer ainsi au gré de ses émotions. L'Église n'est pas parfaite ? Et bien, c'est aux baptisés de s'y investir davantage, certainement pas en la désertant !
Encore ici, une conséquence du libéralisme, comme si 'l'offre ecclésiale' était livrée au marché !
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 22/02/2020

> Merci pour ces judicieuses réflexions.
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Écrit par : Durand Michel / | 22/02/2020

@ Philippe de Visieux

> Oui, individualisme qui n'est pas récent toutefois. Déja dans les glorieuses années 70 (hum!) j'en entendais certains dire qu'ils allaient à la messe où et quand ils sentaient quelque chose (sic).

PFH


[ PP à PFH – D'où, depuis quinze ans, la progression (relative) des cultes évangéliques dont le côté showbiz US répond mieux aux attentes nerveuses du public.
Quand je faisais mon enquête sur eux, j'ai entendu par exemple un pasteur soulever l'aprobation de l'assistance en proclamant que "dans la liturgie catholique on ne sent rien se passer". Et un organisateur de meetings pentecôtistes déclarer au micro d'une radio (catholique) que "la Vierge Marie on ne la voit nulle part".
Sans doute voyait-il la Trinité ?
Mais l'erreur fatale, de la part des paroisses catholiques, serait de vouloir rivaliser en émotionnel avec les cultes pentecôtistes. La Présence eucharistique n'a pas besoin qu'on "chauffe la salle" artificiellement en fabriquant de l'enthousiasme superficiel... Les gens soucieux ou craintifs, ce n'est pas en leur faisant chanter "jubilons" (sur un air compliqué-syncopé) qu'ils jubileront vraiment... Ce dont ils auraient plutôt besoin ce serait d'une grâce d'espérance surnaturelle : celle qui fait admettre le réel tout en le rendant transparent. ]

réponse au commentaire

Écrit par : PF. Huet / | 22/02/2020

EXIGENCE

> J'aime beaucoup : "La politique est la forme la plus haute de la charité", mais parce que je vois ça comme une exigence et non comme un constat. Ça vaut condamnation pour la majorité du corps politique et non approbation.
Beaucoup de chrétiens ont tendance aujourd'hui à voir la religion de manière lénifiante et n'y recherchent que des réconforts. Ils perdent toute ambition de sainteté, croyant que ne pas tuer son voisin et aller à la messe suffit pour être sauvé. À part ça, ils pensent qu'il faut bien vivre dans le monde et adopter ses codes du moment.
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Écrit par : Guadet / | 22/02/2020

à Patrice :

> La progression "relative" : ne trouvez-vous pas qu'elle est préoccupante ? Je ne compte plus les anciens collègues ou camarades latino-américains, états-uniens, philippins, etc., qui se déclarent anciens catholiques et vont dorénavant au culte évangélique (ou, dans le cas d'une ancienne collègue philippine, chez les Témoins de Jéhovah !). Les entendre me déchire toujours le cœur. Le vice-président américain Pence, le président brésilien Bolsonaro, lorsqu'ils vont voir le pape, ne se sentent-ils pas mal à l'aise (à titre personnel) d'avoir ainsi quitté la boutique ?
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 22/02/2020

LE BAPTÊME

> Cette question en appelle une autre : que 'vaut' au plan du salut le baptême reçu dans une communauté ecclésiale non catholique ?
Je me souviens d'une discussion à bâtons rompus entre deux prêtres missionnaires MEP, dans un taxi circulant hasardement dans les rues de Taïpei il y a quelques années : l'un se réjouissait de tout baptême car c'est connaître le Christ pour la personne qui le reçoit quand l'autre se désolait de constater neuf baptêmes évangéliques pour un seul catholique à Taïwan (en Chine continentale, la proportion est identique : dix millions de catholiques pour neuf fois plus d'évangéliques, d'où le désir pour le Saint-Siège d'évangéliser coûte que coûte).
C'est la question du "subsistit in" dans 'Lumen Gentium', mais aussi celle du catéchuménat (généralement long et exigeant côté catholique, mais pouvant ne durer que quelques jours côté évangélique).
L'œcuménisme n'est pas un long fleuve tranquille !
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 22/02/2020

JEAN VANIER

> https://www.vaticannews.va/fr/eglise/news/2020-02/revelations-sur-des-abus-commis-par-jean-vanier.html

Il est certain qu'en lisant ce type de nouvelle, on ne peut qu'éprouver dégoût et incompréhension. Mais quitter l'Église parce qu'elle n'est pas préservée du péché est une démarche stérile : bien au contraire, que le Saint-Siège informe de sa propre initiative des conclusions d'une telle enquête démontre que la réforme est en cours et que la 'Lettre au peuple de Dieu' de 2018 porte ses fruits.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 22/02/2020

LA VRAIE POLITIQUE

> Je crois effectivement que la politique, la vraie et non la contrefaçon qu'on nous sert, est la forme la plus haute de la charité.
Cela implique pour quelqu'un de se donner entièrement pour le bien commun, de ne pas suivre les modes, de se sentir souvent bien isolé, d'être critiqué par tous les clans et partis, de se tromper parfois et d'avoir l'humilité de le reconnaître, de savoir qu'on ne sait pas tout et de s'entourer de gens compétents, généralement discrets et peu brillants, qui ne seront pas la coqueluche des medias…
C'est vrai que j'ai beau chercher, je ne vois guère de personnes de ce genre. Je suis sûre qu'il y en a, mais elles sont bien cachées et ne comptons pas sur les médias pour les mettre en lumière.
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Écrit par : Bernadette / | 22/02/2020

PAPES

> « La politique est la forme la plus haute de la charité car elle cherche le bien commun », tel est l’enseignement de l’Eglise, rappelle Mgr Matthieu Rougé, à la suite des papes Pie XI, Paul VI, Benoît XVI et François, et il ajoute : « Un chrétien authentique qui s’implique en politique aura souvent à discerner en conscience. Si l’Evangile n’est pas un manuel de vie politique, il est en revanche une lumière qui éclaire la conscience ».
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Écrit par : Michel de Guibert / | 22/02/2020

DREHER

> Au sujet du bizarre Rod Dreher.
Je comprends que vous trouviez Dreher bizarre, mais comme j’aime bien le bonhomme (ce qu’on peut faire sans forcément approuver toutes ses idées), j’ai envie d’expliquer ce qu’il essaie de dire.
Pour le comprendre, il faut à la fois connaître son histoire et garder à l’esprit qu’il est américain.
Sur son histoire, il faut lui reconnaître une chose: sur un point important, il est supérieur à la plupart d’entre nous. A moi, en tout cas. Ce point, c’est la capacité, comme disait je ne sais plus qui, à « accepter de voir ce qu’on voit ». Dans son cas, à voir l’immensité de la corruption dans l’Eglise au sujet de la pédophilie. Dès la fin des années 90, par son travail de journaliste, il avait pris conscience de la catastrophe qui s’annonçait et avait essayé, par tous les moyens, d’alerter. Il fut, en particulier, très tôt conscient des dérives de McCarrick. Bien entendu, il s’est trouvé confronté à un mur de déni et de mensonges. Au point que cela a fini, après une grosse dépression, par lui coûter non pas sa foi, mais du moins sa confiance dans l’Eglise. D’où son passage à l’orthodoxie.
Sur son américanisme. Disons que Dreher est maintenant parti dans une autre croisade, toujours dans le rôle de Cassandre (dont il n’est pas inutile de rappeler qu’elle avait raison). Sa conviction est que le « combat culturel » est perdu pour les chrétiens et que s’annoncent des temps de plus en plus oppressifs pour nous. C’est là qu’il faut regarder les choses avec ses yeux d’américain. Je pense que, de ce côté de l’Atlantique et parce que nous baignons dans un récit médiatique un peu manichéen, nous ne nous rendons pas vraiment compte du degré de dégénérescence intellectuelle et morale des « élites » (académiques, culturelles, politiques) américaines et plus généralement, anglo-saxonnes. Vraiment, nous n’avons pas idée. Et la répulsion qu’inspire Trump ne nous aide pas à ouvrir les yeux sur le fanatisme des Démocrates sur tous les sujets « sociétaux ».
Disons que nous commençons à en voir les prodromes en France, avec ces tentatives incessantes d’un certaine extrême-gauche à faire taire la moindre réserve face à l’agenda « hyper déconstructiviste ». Mais il faut transposer en se disant que ces « social justice warriors » sont, aux USA, défendus par la quasi-totalité des candidats démocrates, des médias « sérieux » et de l’industrie culturelle.
Quant à la ferme volonté de mettre les croyants au pas, elle fut très bien résumée par un essai de Mark Tushnet, professeur de droit à Harvard, publié peu avant l’élection de Trump et qui fit un certain bruit. Bien entendu, à ce moment, l’auteur était persuadé de la victoire de Clinton et partant, de la mainmise des Démocrates sur la Cour Suprême. Et ses préconisations étaient donc simples: fini de transiger, il faudra imposer notre agenda aux vaincus sans la moindre restriction. Comme nous l’avons fait avec les nazis après la guerre (je cite).
Il faut en donc comprendre que le « projet bénédictin » de Dreher n’est pas pour aujourd’hui. Il est une projection dans un avenir qu’il voit très sombre avec une question: comment continuer à transmettre la foi - à ses enfants en particulier - sous un régime oppressif. C’est d’ailleurs le sujet de son prochain livre: comment les chrétiens sous le joug communiste ont-ils fait pour préserver et continuer à transmettre leur foi?
Alors, bien sûr, on peut juger Dreher paranoïaque. Je suis moi-même perplexe.
Mais à la vitesse à laquelle évoluent les choses, qui peut dire ce qu’elles seront dans dix ans?
Et on peut aussi garder à l’esprit que « vous êtes paranoïaque » est précisément la réponse qui lui était faite, il y a vingt ans, quand il essayait d’ouvrir les yeux sur la corruption au sein de l’Eglise et sur le tsunami qui s’annonçait.
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Écrit par : Luc / | 22/02/2020

Cher Guadet,

> je comprend votre vision du politique mais non, elle n'est pas la forme la plus haute de la charité. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est le Christ. Il dit bien:"il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour son prochain".
Maximilien Kolbe, le colonel Beltram, cette infirmière espagnole qui meurt d'ébola après l'avoir contracté en Afrique en soignant les gens atteint dans la plus grande indifférence du monde, voilà des formes les plus hautes de charité. Vouloir le bien du prochain quitte à donner sa vie pour lui, là oui, c'est la forme la plus haute de la charité.
Mais vouloir être au pouvoir, même si on est honnête et que l'on veut agir dans le sens du bien commun, non, désolé, pour moi, c'est juste servir, ce n'est pas la forme la plus haute...
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Écrit par : VF / | 23/02/2020

PIE XI

> Les papes enseignent pour l'éternité donc Pie XI nou un autre ne parlait pas de politique politicienne mais de la vraie politique : la direction de la cité, le fait d'oeuvrer à ce que chacun reçoive ce qui lui est dû = travailler pour le bien commun.
Et dans ce cas "le politique est le champ le plus vaste de la charité" (c'est sous cette forme? "domaine le plus vaste", que je connaissais la phrase)
Le bien commun est une belle chose qu'il ne faut pas confondre avec ce qu'en font des nullités "zorglubesques" qui y voit un tremplin vers leur épanouissement personnel ; c'est un métier de seigneurs qui doit être exercé par des saints des prophètes des rois.
L'un des drames aujourd'hui c'est que beaucoup se lancent en politique non pas parce qu'ils aiment mais parce qu'ils veulent transformer un pays pour qu'il leur plaise, qu'il réponde à leurs attentes (donc ils ne l'aiment pas) ou bien et c'est pire pour se sentir populaires c'est-à-dire pour être aimés (mets un mandat politique n'est pas là pour vous aider à résoudre vos problèmes psychologiques)
Sur ce plan-là les démocratie finissent par énormément ressembler au dictature ton les chefs sont constamment en recherche de popularité, d'acclamations.
Les dictateurs ont tous des psychologies de faible c'est pourquoi ils sont violents et on besoin de l'approbation la plus bruyante possible.
Pour en revenir à ce que dit PP, on notera tout ce qui est dit dans les Écritures sur le fait que l'Esprit Saint esg un souffle léger... les messes devraient donc insister sur des moments de silence et de méditation et évidemment sur le discernement des esprits et non pas sur le dzim boum boum vulgaire ou les chants niaiseux et sirupeux façon Céline Dion du pauvre. Jésus n'a jamais fait de marketing.
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Écrit par : E Levavasseur / | 23/02/2020

à Michel de Guibert

> En somme, le Golgotha n'était pas "la forme la plus haute de charité" puisque ce n'était pas un acte politique ?
Bizarre, l'enseignement de tous ces papes. J'ai bien fait d'être orthodoxe.
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Écrit par : G.K. / | 23/02/2020

à G.K. et à VF

> Bien entendu, vous avez totalement raison, "il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour son prochain" et le Golgotha en est la plus totale expression qui, avec la résurrection, fonde notre foi.
Ne vous méprenez pas sur la formule de Pie XI et de ses successeurs ("la politique est la forme la plus haute de la charité car elle cherche le bien commun"), il faut la lire dans son ordre qui est celui du service du bien commun, ni plus ni moins.
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Écrit par : Michel de Guibert / | 23/02/2020

Cher Eric,

> les papes enseignent pour l'éternité ? Sérieusement ? Alors on relance la croisade de 1095 ? La peine de mort pour les juifs convertis retournant au judaïsme (Nicolas IV) et donc que faisons-nous de 'Nostra aetate' ? Ou le partage du monde par Alexandre VI...
L'infaillibilité est valable dans les domaines de la foi et des moeurs si je me souviens bien. Le reste est soumis à la discussion et à l'adaptation à l'époque.
Ceci dit, la phrase que tu cites me parait beaucoup plus juste dans la bouche d'un pape.
Le bien commun est une très belle chose, oui, mais rien à voir avec le don réel de sa vie par amour comme le dit le Christ.
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Écrit par : VF / | 23/02/2020

@ Luc :

> Très bon votre commentaire sur ce qui se passe outre-Atlantique. Dans sa vision lucide des événements en cours et d'un proche futur déjà partiellement présent, ce que vous dites de R. Dreher m'évoque les avertissements diffusés dans certains romans de l'écrivain canadien Michael O'Brien, comme "le Journal de la peste" et sa suite "L'éclipse du soleil" récemment paru, sur l'emprise croissante d'un totalitarisme caché derrière une fausse démocratie et de soi-disant libertés masquant mal des dérives ou même des perversions, toujours contraires au bien spirituel de l'Homme d'un point de vue vraiment chrétien, tel que défendu sur ce blog par exemple.
Dans son premier livre "Père Elie, une apocalypse" paru il y a plus de 20 ans, M. O'B. entrevoyait des dérives totalitaires déjà en cours, avec la figure d'un Antichrist comme force dominatrice parée d'humanisme mais liée à Satan ...
On trouve des articles à dominante eschatologique de cet auteur sur : https://www.pierre-et-les-loups.net/Michael-O-Brien, ainsi que des recensions ou critiques de ses livres (babelio, goodreads ...) et des vidéos facilement.
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Écrit par : Jonas / | 24/02/2020

@ VF

> J'aimerais bien pourtant que les hommes politiques prennent cette phrase au sérieux, qu'ils aient comme guide la charité chrétienne et comme but de donner leur vie pour leurs prochains. Il ne faut pas décourager les saintes ambitions.
Là-dessus je vous renvoie à ce que dit Levavasseur (que j'approuve aussi sur les "chants niaiseux").

Guadet


[ PP à Guadet – J'apprends ainsi que des paroisses continuent les "chants niaiseux" d'il y a trente ans ? Dans celles que je connais, les chants ne sont pas niaiseux mais théologiquement denses, ce qui est un progrès considérable. Ce que l'on peut critiquer, ce sont les mélodies ! (à mon sens le syncopé "chauffe-salle" est étranger au mystère eucharistique). ]

réponse au commentaire

Écrit par : Guadet / | 24/02/2020

@ PP

> Dans mon trou perdu de la cambrousse, texte et mélodie sont souvent au ras des pâquerettes. Il paraît que c'est pour plaire aux jeunes, qui jouent pourtant à l'homme invisible. Et puis les vieux prétendent que là, au moins, ils comprennent. Enfin il faut dire que le rock chanté par une chorale de vieilles dames, ça a de la gueule spirituelle !
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Écrit par : Guadet / | 24/02/2020

> https://www.monde-diplomatique.fr/2020/03/HALIMI/61551

Un texte fort juste et, hélas, sans illusions.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 27/02/2020

Les commentaires sont fermés.