29/01/2020
L'hypothèse Gaïa et la théologie chrétienne
Au sujet de l'écologie, achevons de désencombrer le catholicisme français de préjugés partisans hérités des années 1970 ! Soyons à l'écoute du colloque parisien des 6-7 février aux Bernardins et à l'Institut catholique... Ma chronique de ce matin à Radio Présence (Toulouse Midi-Pyrénées) et Radio Fidélité Mayenne :
<< Excusez-moi de vous parler ce matin d’un événement parisien ! Il s’agit du colloque de deux jours organisé les 6 et 7 février à l’Institut catholique de Paris et au Collège des Bernardins, carrefour de recherches fondé par le cardinal Lustiger. Ce colloque s’intitule : ‘Gaïa face à la théologie : l’enjeu religieux de la mutation climatique’. Gaïa, c’est le nom de l’hypothèse scientifique du grand géochimiste anglais James Lovelock : la découverte que la Terre (notre maison commune) est un système global, auto-régulé, équilibré par les interactions entre tous les différents êtres qui l’habitent.
D’où notre responsabilité ! Si le Créateur nous a confié sa création dans le livre de la Genèse, ce n’est pas pour la saccager et la rendre inhabitable, ce dont les peuples pauvres seront les premières victimes. Cette responsabilité des humains, le pape François l’analyse en termes théologiques, eschatologiques et liturgiques dans l’encyclique sociale Laudato Si’ : un des textes essentiels de l’Eglise à notre époque. La pensée catholique a toujours épousé le mouvement des connaissances. (Rappelez-vous qu’au moment de l’affaire Galilée les astronomes jésuites de Rome partageaient déjà la thèse de Copernic…)
Et il y a une autre raison. C’est que tout est lié, comme dit le pape François. L’évangélisation, c’est-à-dire le témoignage d’espérance donné par les croyants aux non-croyants, suppose que les croyants épousent tous les soucis de la condition humaine : donc, aujourd’hui, le souci – sans précédent – de l’habitabilité de notre planète. Parce que le bien commun de l’humanité en dépend. Et parce que nous en serons responsables au dernier jour devant le Créateur !
Pour être "prêts à rendre compte à autrui de notre espérance", comme dit la 1ère lettre de Pierre, encore faut-il donner à autrui envie de nous interroger. Et que notre espérance englobe la condition humaine et toute la création… Il est temps d’achever de nous désencombrer d’habitudes mentales d’il y a quarante ans, qui rejetaient les problèmes du monde nouveau. L’Eglise catholique procède autrement : elle confronte sa pensée à ces problèmes, qu’il faut examiner sans lunettes partisanes. >>
12:02 Publié dans Ecologie, Ecologie intégrale | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : climat, catholiques
Commentaires
"ENFIN"
> Enfin ! Des institutions officielles de l'Eglise catholique secouent le cocotier des vieux préjugés ! On ne va plus pouvoir dire dans les salons (mauves, roses, beiges ou cacadoie) que "même si elle ne le dit pas, l'Eglise doit penser comme nous que l'écologisme c'est le nouveau communisme athée"...
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Écrit par : Irénée Brotteaux / | 29/01/2020
GAÏA
> Gaïa… je trouve un peu dommage l'utilisation de ce nom qui tend à faire penser que la planète ait une volonté. C'est sûrement ma réticence au new-age et aux références à Gaïa justement.
Mais dans le fond du propos, je suis d'accord quand même, ce colloque s'annonce d'être très intéressant.
TonyZ
[ PP à TonyZ – Je ne crois pas que "volonté" soit le mot puisque l'équilibre dépend, justement, des créatures en action sur la planète.
Le terme serait plutôt : "miracle permanent", ou "milliers de coïncidences dont la conjugaison était infiniment improbable". D'où l'idée de "Création permanente"...
Le New Age s'est emparé de l'hypothèse scientifique de Lovelock pour la déformer, justement en prêtant une "volonté" au système terrestre. Le colloque a raison de rétablir le sens originel (purement scientifique) du terme "Gaïa".
Et il a raison une seconde fois en ôtant au mot "Gaïa" la charge fantasmatique (quasi-paranoïaque) que lui avaient donné les intégristes catholiques pour se débarrasser du problème environnemental en le déguisant en culte païen – ou satanique, au choix, car "païen" et "satanique" sont synonymes à leurs yeux. ]
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Écrit par : TonyZ / | 31/01/2020
LE COLLOQUE "GAIA"
> Dans ce billet de janvier vous invitiez à être à l'écoute de ce colloque "Gaïa face à la théologie" au collège des Bernardins en début de mois. Je n'ai pas pu y assister, bien que cela m'aurait intéressé. Le compte-rendu que j'ai pu en lire ici
https://www.terrestres.org/2020/02/28/gaia-face-a-la-theologie/
me paraît ceci dit un peu, disons, ... bizarre (voir par exemple la proposition pour une "prière gaïesque"). Ce qui n'est pas étonnant d'ailleurs, compte tenu de ce que disent ou écrivent par ailleurs certains intervenant.e.s (comme ils.elles écrivent) philosophes ou "scientifiques". Y aviez-vous finalement assisté ?
JM
[ PP à JMB – J'y ai assisté. Le propos de ce colloque était une confrontation entre trois types d'interlocuteurs : 1. les scientifiques, 2. les philosophes (éventuellement antichrétiens) se disant concernés par la question de la Terre, 3. les théologiens catholiques.
Rencontre tripartite, donc, avec les contradictions que cela impliquait :
1. Le scientifique britannique Tim Lenton, ex-collaborateur de James Lovelock concepteur de "l'hypothèse Gaia" (selon laquelle l'équilibre permanent du système terrestre est le résultat "bottom-up" des multiples interactions du vivant avec l'environnement), a démontré que cette hypothèse – purement scientifique – excluait (par définition) de prêter une "personnalité" au système terrestre !
N'étant donc que le nom de code donné à un ensemble d'innombrables interactions, "Gaia" n'est pas plus le nom d'une déesse tellurique que "Cynthia" n'est le nom d'une déesse des tempêtes...
2. Néanmoins l'une des intervenantes, Emilie Hache, philosophe liée à l'aile la plus idéologue du LGBTQ+, a développé la théorie que le Pr Lenton venait de bannir du champ du débat... Théorie allant jusqu'à prôner le polythéisme contre un christianisme accusé d'être par nature écophobe et misogyne "puisque la Trinité ne comporte pas de déesse", etc.
C'est de cette intervenante que sont venues les bizarreries dont vous parlez. Encore n'ont-elles été émises qu'en petit comité à part : sans écho sur le reste du colloque, contrairement à ce que donne à croire l'article que vous citez.
La formule même du colloque incluait l'expression de diverses approches y compris celle-là, réquisitoire émanant d'un "club" comme le laisse voir le texte de la "prière" (ou tract) cité dans l'article... Il n'y a donc pas lieu de s'étonner.
Par ailleurs les autres intervenant(e)s laïcs, chrétiens ou non, ont exprimé des points de vue beaucoup plus rationnels.
3. La pensée catholique sur la question de la Terre et la responsabilité humaine envers la création a été présentée par le P. Souletie, recteur de la faculté de théologie de la Catho, dans la perspective du magistère des trois derniers papes et notamment de l'encyclique de François, 'Laudato Si'.
L'Eglise ne perd rien en organisant des carrefours qui remettent les idées en mouvement. Mais notre tâche immédiate – en tout cas la mienne, n'étant pas universitaire – est plutôt d'aider les catholiques français à connaître et adopter ce que dit 'Laudato Si'. Et ça, déjà, c'est un vaste programme...
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Écrit par : JM / | 29/02/2020
> Merci pour ces précisions, qui permettent bien de resituer les différents discours.
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Écrit par : JM / | 29/02/2020
GAEL GIRAUD - VANDANA SHIVA
> https://youtu.be/Gnx6kkF8WkQ
Un autre exemple de "carrefour qui remet les idées en mouvement" : cette rencontre organisée par le P. Giraud, s.j., au centre Sèvres avec la physicienne, philosophe et féministe indienne Vandana Shiva, probablement hindoue comme en témoigne le troisième œil qu'elle arbore. Un colloque fort intéressant !
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 01/03/2020
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