21/10/2019
Saint John Henry Newman : leçons pour aujourd'hui
Ma chronique de Radio Espérance (Auvergne Rhône-Alpes) :
<< Bonjour à tous. Le 13 octobre, le pape François a proclamé saint John Henry Newman, anglican du XIXe siècle converti au catholicisme, devenu oratorien, puis nommé cardinal par Léon XIII. C’est l’occasion d’évoquer cette remarquable figure de théologien à la fois traditionnel et d’avant-garde, aussi intellectuellement ouvert, que sévère dans la controverse face à ceux qui auraient voulu freiner la marche de l’Eglise...
Lors de son centenaire en 1990, le cardinal Ratzinger déclara Newman “l’un des grands maîtres de l’Eglise", L'Essai sur le développement de la doctrine chrétienne, publié en 1845, est considéré comme le précurseur génial de l’ecclésiologie du concile Vatican II : une redynamisation de la foi par un recentrage sur ses sources. Comme le dit son biographe Ian Ker :"Newman refusant de voir les choses en noir ou blanc, il était à la fois conservateur et novateur. S’il avait vécu au temps de Vatican II, il aurait soutenu les réformateurs, mais il aurait mis en garde contre la division ultérieure entre modérés et radicaux. Il croyait à l’objectivité de la foi, mais il voyait combien les points de vue pouvaient être divergents : cette subtilité de sa part est une leçon pour aujourd’hui, dans les débats autour de l’athéisme, du scientisme et du relativisme actuel."
Et comme le souligne le journaliste catholique américain Michael S. Winters : "Si l’Eglise aujourd’hui cherche à dépasser ses divisions idéologiques, nous pourrions tous commencer par relire Newman honnêtement : non pas en choisissant seulement ce qui correspond à nos propres idées, mais en nous laissant mettre en question par ce qui ne leur correspond pas – ainsi qu’il le faisait lui-même… Toute la pensée de Newman est un refus du clivage trop facile entre gauche et droite, clivage dans lequel pour notre part nous restons pris."
Le cardinal Newman à son époque dénonçait une conception trop répandue qui soumettait la religion au confort intellectuel et moral de certains milieux. Cette leçon est toujours valable aujourd’hui.
Une autre leçon nous vient de la devise qu’il avait choisie en devenant cardinal : "Cor ad cor loquitur", "le cœur parle au cœur". Et de la citation gravée sur son monument en Angleterre : "Ex umbris et imaginibus in veritatem", "hors des ombres et des images, dans la vérité". Au fond ces deux maximes disent l’essentiel pour notre temps : un témoin du Christ est un cœur accessible à tous les autres cœurs quels qu’ils soient. Commençons par sortir des ombres du vieil homme en nous – et par abandonner les fausses images, peut-être, que nous avions de notre propre religion. Merci au pape François d’avoir canonisé John Henry Newman ! A la semaine prochaine. >>
12:07 Publié dans Eglises | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : catholicisme
Commentaires
TÉMOIGNAGE
> "Intellectuellement ouvert" et fidèle au successeur de Pierre : un témoignage de foi que beaucoup, aujourd'hui, pourraient méditer...
https://twitter.com/jeanpierredenis/status/1178418200368881664
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 22/10/2019
NOUVELLE AFFAIRE
> https://www.lepoint.fr/monde/le-vatican-de-nouveau-eclabousse-par-un-scandale-financier-22-10-2019-2342640_24.php
http://espresso.repubblica.it/attualita/2019/10/17/news/vaticano-corruzione-peculato-truffa-1.340096
Une affaire qui aurait sans doute suscité la totale désapprobation du nouveau saint !
Il est consternant d'apprendre que la Secrétairerie d'État ait agi comme un fonds d'investissement new-yorkais : comment un cardinal (Becciu), ancien nonce en Angola, a-t-il pu suggérer d'investir dans l'industrie pétrolière angolaise des centaines de millions d'euros prélevés sur le denier de saint Pierre ?
Tout ceci éloigne l'Église du message évangélique : on évangélise mal quand les médias rapportent que des prélats se comportent comme des banquiers d'affaires (et s'en mettent sans doute plein les poches au passage).
Prions pour le Pape qui, entre les manoeuvres des conservateurs excités Burke, Busch et consorts, la crise des abus sexuels sur tous les continents et la corruption de prélats jusqu'aux plus hautes arcanes du Siège apostolique, doit néanmoins conduire la barque de Pierre. Ou comme en conclut 'L'Espresso' : "Pour François, il ne sera pas facile, face à ce nouveau scandale, de se dégager des vrais ennemis, des faux amis, des bons et des mauvais conseillers." L'homme est seul : aidons-le !
PV
[ PP à PV – J'en parle dans ma chronique de demain mercredi à Radio Présence. Ce sera en ligne ici. ]
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 22/10/2019
SON EXEMPLE
> Puissant exemple que celui du cardinal Newman, merci cher PP de nous le rappeler. Il mettait avant tout sa confiance dans la prière – comme le font par exemple des milliers de personnes aujourd’hui via Internet (ex. : le site Hozana.org).
Newman souligne cette priorité dans une de ses plus fameuses homélies :
« Quelqu’un désire-t-il apporter du réconfort à son âme, enfoncer très avant en son cœur la pensée du Christ et faire les plus grandes et les plus glorieuses choses pour le monde entier ? J’ai dit comment procéder. Qu’il loue Dieu, que le psautier de David soit comme les paroles usuelles de sa bouche, son service quotidien, toujours répété, et pourtant toujours nouveau et toujours sacré. Qu’il prie, spécialement qu’il intercède. Ne mettons pas en doute la puissance de la foi et de la prière pour réaliser toutes choses en Dieu. Vous avez beau essayer, vous ne pouvez faire des choses comparables à celles que la foi et la prière accomplissent au nom du Christ. Donneriez-vous votre corps pour être brûlé et tous vos biens pour nourrir les pauvres, vous n’arriveriez pas à faire autant que par une continuelle intercession. Peu sont riches, peu sont capables de souffrir pour le Christ, mais tous peuvent prier. Seriez-vous un apôtre de l’Eglise ou un prophète, vous ne pourriez faire plus que vous ne pouvez faire par la puissance de la prière. »
(« Le secret de la prière – huit sermons », John Henry cardinal Newman, éd. Téqui, 1981, pp. 111-112).
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Écrit par : D. Solignac / | 22/10/2019
PRIONS
> Prions saint John Henry Newman pour la conversion de l’Angleterre.
Et prions-le aussi, avec le Cœur de Jésus, pour la conversion de la France :
https://hozana.org/communaute/8458-consecration-de-la-france-au-coeur-de-jesus.
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Écrit par : D. Solignac / | 22/10/2019
CONVERTIS
Il faut ajouter que le cardinal Newman savait ce qu’il devait à la prière de quelques grands convertis de l’anglicanisme et, par exemple, le P. Ignace Saint-Paul (1799-1864) né dans une famille de la haute aristocratie anglaise sous le nom de George Spencer (il fut le grand-oncle de Winston Churchill et l’arrière-grand-oncle de la princesse Diana). Converti lui-même au catholicisme en janvier 1830, Georges Spencer devint religieux passionniste en 1841 (*). Georges Spencer avait initié en octobre 1837 avec l’aide du curé de Notre-Dame des Victoires à Paris, l’abbé Desgenettes, une croisade de prière pour la conversion de l’Angleterre. Un ex-voto fameux de cette basilique, déposé par « three english converts » fin 1864, en rappelle le souvenir. En voici le texte :
« Thank offering from three english converts (AR, IA, IG - 4 May, 1 June, 2 July 1864)
Reconnaissance à Notre-Dame des Victoires aux pieds de laquelle tant de prières ont été faites depuis le mois d’octobre 1837, pour la conversion de l’Angleterre, à la demande de l’honorable et révérend Georges Spencer, récemment converti, connu sous le nom de Père Ignace Saint-Paul de l’ordre des Passionistes, mort le 1er octobre 1864.
Cœur immaculé de Marie, trésor de miséricorde, achevez votre œuvre ! Par votre toute puissante intercession, hâtez la conversion complète de notre pays. »
(*) George Spencer, déclaré en 2016 vénérable par le pape François, succéda à la tête des Passionistes anglais au Bx Dominique Barbieri, qui reçut la conversion de John Henry Newman le 9 octobre 1845.
DS
[ PP à DS – J'ai par atavisme peu d'amitié envers la High Church, mais il me semble qu' "abjuration" serait plus exact que "conversion"... ]
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Écrit par : D. Solignac / | 22/10/2019
à Patrice :
> https://catholicherald.co.uk/news/2019/10/22/vaticans-asset-manager-says-holy-see-is-not-going-broke/
À ces allégations s'ajoute le livre de Nuzzi, à prendre certes avec détachement puisqu'il s'appuie sur des documents confidentiels.
Ce qui est certain, c'est que le Saint-Siège est dans une situation financière difficile, comme vient de le reconnaître à demi-mots Mgr Galantino, peut-être effectivement au bord de la cessation de paiement.
On se croirait à la veille du conclave de 2013 avec cette impression que rien n'a changé...
Quand des hauts prélats détournent des centaines de millions d'euros dus aux pauvres, dans un acte d'insupportable dépossession de ces derniers, on peut légitimement penser qu'il y a quelque chose de pourri dans la barque de Pierre.
PV
[ PP à PV – C'est ce que disait Joseph Ratzinger avant d'être élu pape. C'est ce que dit François dans deux discours sans précédent à la Curie.
Et si la cessation de paiement était la seule issue, pour que les rats quittent le navire avec leurs falbalas passéistes et leurs slogans libéraux ?
Le seul moyen d'en sortir est une réforme radicale de l'Eglise.
Quant à ceux qui s'opposent à cette réforme par tous les artifices de diversion (même les pires), on comprend quels intérêts ténébreux ils servent... ]
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 23/10/2019
à Patrice :
> Réforme radicale qui pourrait commencer par se poser la question suivante : l'Eglise du Christ a-t-on réellement besoin d'une bureaucratie pour évangéliser ?
Dès 1952, Hans Urs von Balthasar appelait à "raser les bastions".
À la question 'vous êtes d’accord avec ceux qui dénoncent le risque qu’avec cette hypertrophie des structures cléricales, l’Eglise finisse par se transformer en une gigantesque bureaucratie qui ne servirait qu’elle-même', Balthasar répondait en 1985 par l'affirmative :
« Bien sûr. Relisons ensemble l’Evangile : Jésus a toujours confié une charge à une personne, jamais à des institutions. C’est sur la personne de l’évêque que se fonde l’Eglise et non pas les bureaux diocésains. Il n’y a rien de plus grotesque que de penser que le Christ aurait voulu créer des commissions ! Nous devons redécouvrir une vérité catholique : dans l’Eglise, tout est personnel, rien ne doit être anonyme. Pourtant, c’est bien derrière des structure anonymes que se cachent aujourd’hui tant d’évêques. Toutes ces commissions, ces sous-commissions, ces groupes et ces bureaux en tous genre… On se plaint que nous manquons de prêtres, et c’est vrai, alors que des milliers d’ecclésiastiques sont préposés à la bureaucratie cléricale. Tous ces documents, ces papiers que personne ne lit et qui n’ont d’ailleurs aucune importance pour l’Eglise vivante… la foi est bien plus simple que tout cela. »
https://www.diakonos.be/linterview-censuree-de-hans-urs-von-balthasar/
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 23/10/2019
JURIDISME
> Ladite bureaucratie est liée à l'envahissant juridisme de l'Eglise depuis le XIXe siècle. Trop de droit, trop de chicanes, plus assez d'Esprit. Et ce n'est pas fini, quand on lit les réquisitoires aberrants des prélats anti-François.
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Écrit par : Julien Sarmiento / | 23/10/2019
D'une prière du Cardinal Newman
"Demeure en moi, Seigneur Jésus, et alors je pourrai, comme Toi, rayonner au point d’être à mon tour une lumière pour les autres, lumière, Seigneur, qui émanera complètement de Toi.
C’est Toi qui, à travers moi, illumineras les autres. Ainsi ma vie deviendra une louange à ta gloire, la louange que tu préfères, en Te faisant rayonner sur ceux qui nous entourent."
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Écrit par : Michel de Guibert / | 25/10/2019
DE LA LETTRE AU DUC DE NORFOLK
> Et aussi du cardinal Newman cet extrait de sa lettre au duc de Norfolk, section 5 :
"Elle [la conscience] est la messagère de Celui qui, dans le monde de la nature comme dans celui de la grâce, nous parle à travers le voile, nous instruit et nous gouverne. La conscience est le premier de tous les vicaires du Christ."
L'extrait de citation complet dans le Catéchisme de l'Eglise catholique, § 1778 : "La conscience est une loi de notre esprit, mais qui dépasse notre esprit, qui nous fait des injonctions, qui signifie responsabilité et devoir, crainte et espérance. Elle est la messagère de Celui qui, dans le monde de la nature comme dans celui de la grâce, nous parle à travers le voile, nous instruit et nous gouverne. La conscience est le premier de tous les vicaires du Christ."
La 'Lettre au Duc de Norfolk' (1875) a été éditée en 1970 par Desclée de Brouwer et rééditée par Ad Solem.
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Écrit par : Michel de Guibert / | 25/10/2019
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