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18/08/2019

Pénurie croissante de médicaments : un exemple de fonctionnement de la "structure de péché" capitaliste

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Derrière la pénurie de médicaments contre laquelle s'insurgent depuis un an les malades et maintenant les médecins hospitaliers (dans tous les médias) :  la stratégie mercantile des laboratoires, et la concentration capitaliste de l'industrie pharmaceutique grâce à la mondialisation. Vices inhérents au système néolibéral, contre lesquels le groupe Macron ne souhaite pas rebâtir la politique publique que demandent désormais les médecins... Le système fonctionne ainsi comme l'une des "structures de péché" analysées par la théologie moderne :


 

18 août 2019, l'appel des médecins hospitaliers

Dans Le Journal du dimanche relayé par les radios, vingt-six médecins et professeurs des hôpitaux sonnent l’alarme sur les pénuries de médicaments. Ils demandent des mesures d’Etat pour ramener les laboratoires pharmaceutiques sur la voie du bien commun.

Les signataires de cet appel expliquent que ces pénuries, “très rares il y a une dizaine d'années”, se multiplient depuis peu. Déjà en 2018, disent-ils,"868 signalements de tensions ou de ruptures d'approvisionnement"  ont été relevés dans les hôpitaux : soit "vingt fois plus qu'en 2008".

Les malades en sont “les premières victimes", ajoutent les signataires. Et il s’agit des maladies graves : les pénuries affectent "des médicaments du cancer, des antibiotiques, des corticoïdes, des vaccins, des traitements de l'hypertension, des maladies cardiaques, du système nerveux..."  

La cause de la crise est la stratégie commerciale des laboratoires, n’hésitent pas à dire les médecins hospitaliers : "Ces pénuries ne touchent pas les très chères innovations thérapeutiques mais des médicaments peu coûteux qui, bien qu'anciens et tombés dans le domaine public, constituent toujours l'essentiel de la pharmacopée."

Quant aux mesures annoncées par la ministre de la Santé, elles sont jugées “dérisoires” par les signataires :  "ces plans visent à gérer les pénuries et non à les prévenir.".

L’appel demande donc que l’Etat impose aux laboratoires "la constitution et la gestion de stocks" des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur.

Ils appellent également à rapatrier "en Europe” la “production des principes actifs". Et ils demandent, au contrepied du néolibéralisme global, que soit créé en Europe un pôle public, donc “à but non lucratif”, de production pharmaceutique : seule manière "de prévenir les pénuries” et de garantir la qualité des médicaments ainsi que “des prix justes et pérennes".

L’appel des médecins hospitaliers exprime un rejet du dogme (en vigueur depuis les années 1990) selon lequel la dérégulation financière et commerciale produirait un équilibrage naturel de l’offre et de la demande. En fait elle ne produit qu'une optimisation des gains pour les groupes pharmaceutiques (en plein engrenage de concentration du capital), au prix de la négation du bien commun... et de conséquences dramatiques en matière de santé, comme le montre l’entretien du JDD avec des patients que la pénurie prive de leur traitement anti-cancéreux !

Quels sont les enjeux de cette pénurie ? La réponse était donnée dans une enquête de France Info diffusée le 29 octobre 2018, au lendemain d’un précédent appel de médecins et de malades :

 

29 octobre 2018, France Info

<<  Traitement de la maladie de Parkinson, anticancéreux, vaccins… La pénurie concerne plusieurs centaines de médicaments, dont beaucoup sont indispensables aux patients. Dans une tribune publiée par Le Parisien le 28 octobre, des associations de malades de Parkinson et des neurologues lancent un "cri d'alerte". Ils réclament "un plan d'action urgent". Et les malades de Parkinson ne sont pas les seuls concernés. On vous explique cette pénurie.

Quels médicaments sont concernés ?

En 2017, l'Agence nationale du médicament a reçu 530 signalements de rupture de stocks ou de difficulté d'approvisionnement pour des traitements considérés comme essentiels. En septembre 2018, l'Ordre des pharmaciens dénombrait 431 médicaments en rupture d'approvisionnement, dont 14 vaccins. L'Ordre estime qu'il y a une rupture d'approvisionnement chaque fois qu'une pharmacie d'officine ou une pharmacie d'un établissement de santé "est dans l'incapacité de dispenser un médicament à un patient dans un délai de 72 heures".

C'est une pénurie de Sinemet, médicament de base dans le traitement de la maladie de Parkinson, qui a poussé un collectif d'associations de patients à lancer un cri d'alerte. Mais les malades de Parkinson manquent aussi de Mantadix. Plusieurs anticancéreux font également défaut : Immucyst et Amétycine (traitements des cancers de la vessie), Aracytine et Fludarabine (leucémie), Fluorouracile (cancers colorectaux), Hexastat (cancer des ovaires)… 

Des vaccins courants sont également touchés par les ruptures et tensions d'approvisionnement : DT Vax (diphtérie et tétanos), Imovax (polio), Menveo et Nimenrix (méningocoque), Ticovac (encéphalite à tiques) et vaccin BCG (tuberculose), par exemple. Antibiotiques, antiépileptiques, anesthésiants, cortisone pour enfants, traitements de l'hypotension et de l'hypertension… L'Agence du médicament met en ligne une liste régulièrement actualisée des produits concernés.

Comment expliquer cette pénurie ?

[...] Pourquoi ces problèmes sont-ils plus récurrents ? [...] La "mondialisation de la fabrication et de la demande" est pointée du doigt, car elle a engendré des délocalisations massives et une forte concentration de la production sur un petit nombre de sites. "70 % des principes actifs, les molécules à la base des traitements, sont fabriqués aux Etats-Unis ou en Asie, sur un nombre restreint de sites. Au moindre problème dans une usine, c’est la catastrophe", résume Le Parisien. Aux Etats-Unis, la seule unité de production du Sinemet, médicament anti-Parkinson, "a dû fermer ses portes, le temps de se remettre aux normes", ajoute le quotidien.

Les laboratoires sont également responsables lorsqu'ils font le choix de produire en flux tendu. "Pour éviter les pertes et limiter les coûts, les labos réduisent au maximum les stocks, alors que la demande mondiale et l’exigence de qualité augmentent", explique encore Le Parisien

Les industriels tendent par ailleurs à privilégier la distribution dans des marchés offrant les prix les plus élevés, ce qui n'est pas le cas de la France, et inversement à limiter, voire arrêter, la production de médicaments anciens parce qu'ils jugent leur prix trop faible.

Comment y remédier ?

[...]  Un rapport du Sénat publié début octobre présentait 30 propositions pour prévenir les pénuries récurrentes de médicaments et vaccins en France. Le rapport recommandait par exemple de renforcer les moyens financiers des deux structures publiques susceptibles de produire des médicaments indispensables : la Pharmacie centrale des armées et l'Agence générale des équipements et produits de santé (Ageps). Une solution à laquelle la Suisse a déjà recours...

Les auteurs du rapport prônent une politique de la carotte et du bâton vis-à-vis de l'industrie pharmaceutique. D'un côté, des aides financières pour les entreprises pharmaceutiques qui s'engageraient à fabriquer en France certaines substances actives jugées essentielles. De l'autre, des sanctions en cas de manquement dans la mise en oeuvre de leurs plans de gestion des pénuries.

En attendant, que peuvent faire les patients ?

Mieux vaut éviter de chercher à acheter les médicaments manquants sur internet. Le risque de tomber sur des contrefaçons est trop grand. Les patients peuvent commencer par s'informer, auprès des pharmacies, afin de savoir si la rupture de stock est temporaire ou non. L'ANSM publie également des informations sur les médicaments en rupture de stock ou en situation de tension d'approvisionnement.

Médecins traitants et pharmaciens peuvent également chercher un traitement alternatif, avec des produits de substitution (mais il arrive qu'ils soient aussi concernés par la rupture d'approvisionnement)...  >>

 

 

 

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Commentaires

LIBÉRAUX PROGRESSISTES

> Mon beau frère a fini sa carrière dans l’industrie pharmaceutique en Thaïlande . Il a délocalisé la production de vaccins.
Ma belle sœur en avait un peu honte. Un jour, sans que jamais je n’ai évoqué le sujet, elle me dit : « si mon mari ne l’avait pas fait, un autre l’aurait fait ».
Couple de cathos de gauche libéral et progressiste...
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Écrit par : Ludovic / | 18/08/2019

COHÉRENCE

> Et qu'en pensent nos bons paroissiens qui travaillent dans ces grosses firmes ?
Cohérence, cohérence....
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Écrit par : Tangui / | 18/08/2019

LA DÉESSE CONCURRENCE

> Je lisais, il y a quelques mois, un rapport de l'Autorité de la concurrence sur la dérégulation du marché de la distribution de médicaments.
Evidemment on se demande pourquoi c'est l'Autorité de la concurrence qui traite de cette question et non pas une autorité de santé publique. Parce que la concurrence est une déesse dont le Temple sis à Bruxelles protège l'Empire qui nous gouverne.
Alors quand on lit se rapport, on commence par avoir une description du marché. On se dit que le rapport cherche peut-être à protéger les officines de proximité, mais même pas. Il faut tout libéraliser. Casser le monopole, autoriser la pub... Tout ce que réclament Aprium et Pharmabest.
Moi qui trouvais déjà que les pharmacies du XXIe siècle ressemblaient de plus en plus à des supermarchés. Dans mon enfance, j'avais connu le bon vieux pharmacien qui était un professionnel de santé; aujourd'hui dans une pharmacie, on est gavé de pub déguisée. Certaines pharmacie proposent même des cadeaux de Noël. La pharmacie Aprium de Lille vend même des médicaments pour chiens.

Ci-joint le lien du rapport: http://www.autoritedelaconcurrence.fr/pdf/avis/19a08.pdf
Et l'avis de l'USPO: https://uspo.fr/rapport-de-lautorite-de-la-concurrence-un-brulot-pour-le-gouvernement/
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Écrit par : Cyril B / | 18/08/2019

RÊVE

> "créer en Europe un pôle public, donc “à but non lucratif”, de production pharmaceutique : seule manière "de prévenir les pénuries” et de garantir la qualité des médicaments ainsi que “des prix justes et pérennes". "
Sacrebleu! ils rêvent! qu'ils lisent les textes! Une telle disposition serait contraire au principe de la concurrence libre et non faussée, donc cassée par la cour de justice de l'UE.
Certains secteurs spécifiques peuvent avoir des règles particulières, en particulier les sacro-saints transports.
L'industrie pharmaceutique ne paraît pas en faire partie.
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Écrit par : Pierre Huet / | 18/08/2019

L'EUROPE RÉALISÉE

> Quand arrivera-t-on à faire comprendre aux notables français (ici les médecins) que "l'Europe qui protège" est une fable ?
Au contraire cette Europe-là est faite, conçue et voulue pour NE PAS protéger. C'est le dogme de la Libre Concurrence, et comme par hasard l'UE patauge dans un malaise économique d'un genre qu'on ne voit pas ailleurs.
On dit : "oui mais face aux géants il faut la dimension européenne".
Peut-être (ça reste à prouver), mais en tout cas cette Europe-là ne veut pas jouer le rôle.
Alors : une "autre" Europe ? Peut-être encore, mais ne faisons pas comme si elle était là.
Elle n'est PAS là. L'Europe existante suit le programme contraire.
Comment ouvrir les yeux de nos notables ? Et bien des cathos sont les plus aveugles, parce qu'ils invoquent en plus des raisons métaphysiques pour ne pas regarder la réalité en face.
Et c'est le contraire du réalisme chrétien.
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Écrit par : Hale-bas / | 19/08/2019

à Hale-bas

> Exact ! C'est une grave faute que de faire comme si.
Dans le monde réel ça ne pardonne pas.
Je me permets de dire que l'Eglise catholique de l'UE n'arrive pas à sortir de cette erreur.
Elle continue ainsi à faire sans le vouloir le jeu de l'idole libre-échangiste que le pape dénonce par ailleurs dans ses interventions économiques et sociales.
Cohérence ?
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Écrit par : Tobie Mezenc / | 19/08/2019

CONVERSION

> ce système issue des lumières et de la révolution française est un système de destruction des peuples, des cultures, de la nature par le développement de l’égoïsme individuel. Apparaît maintenant au grand jour les conséquences de "l'ahéisation" du monde, du laïcisme "rationaliste".
Notre malheur est d'accepter encore ce système idéologique. Il ne s'agit plus d'être de droite ou de gauche, il faut retrouver (très vite maintenant) le chemin qui nous mène à l' Eglise pour nous convertir encore et encore.
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Écrit par : Zitoun 13 / | 19/08/2019

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