27/05/2019
Européennes : tout ça pour ça ?
Les résultats des européennes n'ont rien pour surprendre :
► Le parti écologiste fait 13,5 % et crie au triomphe. C’est excessif, puisqu’en 2009 les Verts (avec Cohn-Bendit) avaient fait 16% : après quoi rien ne s’est passé en France dans le sens écologique ; dix ans après, Dany colle les affiches de M. Macron.
► Les lepénistes (23,3 %) n’ont que 0,9 % d’avance sur les macronistes (d’où même nombre de sièges à Strasbourg), et font moins bien qu’en 2014 : de quoi tempérer les cris de guerre de la cheffe, qui exigeait déjà une dissolution de l’Assemblée nationale... D’autant que les Italiens du Mouvement 5 étoiles veulent quitter les bancs europhobes et s’inscrire chez les libéraux, ce qui ramènera les groupes europarlementaires nationaux-populistes à leur niveau de 2014-2019.
► Le score RN se ramenant finalement à ça, les macronistes se retrouvent un peu ballots après avoir clamé pendant des semaines qu’une vague brune déferlait et que seul M. Macron pouvait en préserver les peuples… Il n’y avait pas de vague brune : on le savait d’avance.
► Ce que la Macronie a réussi – on s’y attendait – c’est l’asphyxie des Républicains. Non sans le concours actif de M. Wauquiez, sabordeur du parti : les 8,5 % du pauvre Bellamy correspondent en effet aux intentions de vote LR avant la formation de la liste, quand l’opinion s’attendait à y voir M. Wauquiez lui-même... Cet homme porte malchance, au point que, dès hier soir, MM. Larcher et Retailleau demandaient (en langage de sénateurs) qu’on ferme la parenthèse LW et qu’on fasse un autre parti, où reviendraient les ex-juppéistes ! Il était amusant de voir M. Retailleau déclarer, un peu nerveux, que le moment venait même de tendre la main “à Xavier Bertrand”. C’est dire.
► Et les autres ? LFI coule aussi, victime de son incohérence fondamentale : quoi de commun entre M. Quatennens (“mon Saint-Just”, disait M. Mélenchon) et Mme Obono, égérie du communautarisme libéral-libertaire version “racisée” ? Le PS est une épave. Le PCF n’est pas arrivé à refaire surface : le “phénomène Brossat” n’existait que dans des cervelles de journalistes. Et ce marasme durera tant que la gauche n’aura pas fait son autocritique en lisant Mark Lilla (La gauche identitaire - L’Amérique en miettes, Stock 2018), au lieu de l’anathématiser au nom des Nouvelles Mœurs.
Et maintenant ? Les macronistes avaient beau dire “ça passe ou ça casse », la situation réelle est que ça ne casse pas : ça lasse. M. Macron ne changera rien parce que c’est plus fort que lui ; tout au plus lancera-t-il ses filets sur des amis de M. Jadot, dont plusieurs aimeraient être Canfin à la place de Canfin… Quant à nos ministres, ils n’ont plus qu’une seule grave préoccupation : obtenir de Jupiter reloaded l’autorisation de faire campagne aux municipales tout en gardant leur portefeuille.
13:19 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : européennes
Commentaires
ÉVIDEMMENT
> Evidemment, le RN ne peut se réjouir de faire moins bien qu'en 2014 (dès que la participation monte, le RN baisse en pourcentage). Derrière ses fanfaronnades, l'extrême droite ne progresse guère et ne surfe que légèrement sur le mouvement gilets jaunes.
Evidemment, 'En marche' ne peut se réjouir de sa deuxième place mais tous les partis présidentiels ont connu des européennes difficiles dans le passé. 'En marche' a plutôt sauvé les meubles en siphonnant LR et le PS. Son manque d'encadrement local risque d'être plus dévastateur aux municipales.
Evidemment, les Verts ne peuvent se réjouir de faire moins bien que Cohn-Bendit en 2009 surtout que ces vagues vertes n'ont guère de suite. Néanmoins, cela a eu le mérite de faire sortir un électorat jeune engagé dans les marches pour le climat. La question des alliances va compliquer l'avenir des Verts.
Evidemment LR ne peut être que catastrophé par son score, prévisible. Bellamy était trop versaillais et trop tradi pour l'électorat modéré. La droite Trocadéro rétrécit encore à cause du positionnement de Bellamy sur l'avortement et sur les parents de V Lambert. Il y a tout un électorat catho centriste qui ne supporte plus l'influence néfaste des tradis et des intégristes au sein de l'Eglise et qui déserte silencieusement les paroisses. L'épiscopat, qui avait fait une faute en 2017 en étant la seule religion à ne pas prendre ses distances avec la candidate FN, a en a fait une seconde en parlant de "précipitation" pour Vincent Lambert.
Evidemment, la gauche ne peut se réjouir de son émiettement suicidaire. Les Insoumis payent les dérives verbales et comportementales de Melenchon, le PS garde son étiage de la présidentielle, Hamon ne représente rien mais il n'y avait que lui à ne pas le savoir, le PCF est moribond depuis des lustres.
La décomposition-recomposition n'est pas finie.
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Écrit par : souvenance / | 27/05/2019
PIÈGE À CONS
> Si M. Cohn-Bendit aura quelque chose à transmettre à la postérité, c'est d'avoir mis en lumière qu'il y a des élections qui sont des pièges à cons. Et celle-là en était un beau.
- D'abord parce que les élections européennes sont un leurre qui sert à donner une apparence démocratique à l'UE. On vote pour des listes qui ne donneront jamais de vrai majorité politique sauf à voter pour ou contre une directive sur les nuisances sonores causées par les aspirateurs.
- En conséquence les promesse des candidats n'ont pas vocation à s'appliquer puisque les élus n'arriveront jamais pleinement aux manettes de l'UE.
- Ensuite parce que le résultat est confus et que donc, on peut lui faire dire ce qu'on veut. Selon les camps, on peut dire "Macron a presque gagné" ou "Macron doublé par le RN". Sur Twitter, la cellule de riposte numérique de l'Elysée se déchaîne: "Les GJ ont fait 0,6%" (alors que ces listes n'étaient pas représentatives), "Les Français approuvent globalement la politique du gouvernement" (mais bien sûr).
- Et surtout, beaucoup d'élections, et notamment celle-là, servent à tuer dans l'œuf les mouvements politiques grâce à une offre électorale restreinte.
Il suffit que le clan Le Pen rentre dans le jeu pour que l'opposition soit divisée.
Le sectarisme des partis réduit la marge de manœuvre des électeurs. On défend avant tout une famille politique plutôt que des gens. Le mouvement des GJ a démontré que les structures syndicales étaient trop limitées par des logiques d'appareil pour défendre efficacement les travailleurs. C'est un peu la même chose pour les partis politiques.
- Et aussi, Chirac et Raffarin en 2004 ont biaisé le mode de désignation des députés européens. Le système profite surtout aux grands partis.
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Écrit par : Cyril B / | 27/05/2019
FARAGE ET JOHNSON
> Et outre-Manche, les résultats sont également fort intéressants : M. Farage réunit un tiers des suffrages exprimés, faisant plonger conservateurs et travaillistes. Là-bas aussi, l'ancien monde s'écroule.
Mme May ayant annoncé son départ non sans une compréhensible émotion, elle pourrait être remplacée par Boris Johnson, sorte de Trump anglais qui rêve de transformer la Grande-Bretagne en un immense paradis fiscal dérégulé (ce qu'elle est déjà en partie). Bruxelles a du souci à se faire.
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 27/05/2019
RELATIVISME
> Quand j'entends Geoffroy Didier parler de la campagne, je me dis que la droite a un très grave problème. Le score n'est là que pour anathématiser un perdant ainsi que ses idées. Ce Monsieur aurait encensé un gagnant (ou au moins atténué ses critiques). Peu importe le flacon (la pensée) pourvu qu'on ait l'ivresse (de la victoire).
Ce relativisme est bien le problème de la droite à la remorque de LREM ou du RN selon les cas. Une pensée mettant au centre l'humain qui n'est pas incompatible avec la défense de la liberté économique (et non la profitabilité) est totalement absente et même ridiculisée par une certaine droite qui aujourd'hui tente de reprendre les rênes du parti.
Celle-ci, à la remorque de LREM, ne manquera d'obtenir les mêmes scores qu'hier. On ne rassemble pas en excluant une partie de son électorat. La crise des gilets jaunes a clairement montré qu'il y a un décalage entre les idées des états-majors et celles du peuple...
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Écrit par : Benoit C / | 27/05/2019
LA DROITE FANTÔME
> Oui, pauvre M. Bellamy. Qu'allait-il faire dans cette boutique (cela dit sans nécessairement partager tous ses points de vue) ?
Certes, M. Wauquiez a probablement contribué à la déroute de son parti, mais ceux qui réclament sa tête devraient se demander si cette déroute se résume à un problème de stratégie électorale. Après tout, "LR" n'est que ce qui reste de l'UMP, assemblage hétéroclite de personnes, de tendances et de partis aux idées fort diverses, ne se reconnaissant pour point commun que le fait d'être "de droite", ce qui est bien vague.
Des partis plus représentatifs d'idées eussent sans doute été plus petits et auraient eu des résultats assez réduits, mais au moins leurs électeurs auraient pu y trouver autre chose que l'habitude de voter "à droite" parce que "chez-nous-on-a-toujours-voté-à-droite".
SL
[ PP à SL - Oui, sachant que l'expression "à droite" ne veut plus rien dire sinon (mais c'est peu avouable) une adhésion au système capitaliste néolibéral... en dépit de la menace qu'il constitue pour l'humanité et le reste de la création. ]
réponse au commentaire
Écrit par : Sven Laval / | 27/05/2019
DROITE
> Corollaire de votre réponse à mon commentaire : ceux qui "votent-à-droite" par adhésion audit système seront allés voir du côté de LREM.
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Écrit par : Sven Laval / | 27/05/2019
UN JÉSUITE ET L'EUROPE
> Un lien vers une interview intéressante d'un jésuite sur l'Europe. Une fois n'est pas coutume je la trouve intéressante. Le Père Maier est lucide sur le caractère anti-social de l'Europe. Vu sous cet angle, on ne peut que souhaiter que ses désirs deviennent réalité. Même si cela me paraît quasi-improbable. C'est à écouter là: https://rcf.fr/la-matinale/recomposition-et-lecons-pour-l-europe-avec-martin-maier?fbclid=IwAR1AjuiVgc_oxJuMVh9qdxHoVaIZ-izQ-Tvh0blv0pnSOMJqc5-kdunmtns
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Écrit par : ND / | 27/05/2019
à Patrice :
> La vision de Mme Obono, importée tout droit d'Amérique, s'installe progressivement en France. Cela peut paraître anecdotique, mais les salles de sport Curves, réservées exclusivement aux femmes, me semblent difficilement compatibles avec la conception française du vivre ensemble : que les Américains se complaisent dans leur manichéisme ('nous les filles contre les hommes, par définition tous dangereux violeurs'), soit, mais qu'ils l'exportent chez nous n'est pas acceptable... or Curves semble prospérer un peu partout dans l'Hexagone.
Rappelons cependant que le terreau des positions de Mme Obono sont les études post-coloniales qui, comme les études de genre, sont nées aux États-Unis de la 'théorie française' des Michel Foucault, Jacques Derrida, Gilles Deleuze et autres penseurs soixante-huitards. Personnages un peu oubliés chez nous mais très présents dans les universités américaines : j'en ai été abreuvé ad nauseam lors de mes études outre-Atlantique.
Sachons dire non au communautarisme en France !
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Écrit par : Philippe de Visieux / | 28/05/2019
A noter:
> Résultat de LREM chez les cathos pratiquants: 43%.
Culte de l'idole Bruxelles.
RN en téte dans presque tout l'Outre Mer. Pas mal pour un parti "raciste".
PH
| PP à PH – Les "cathos pratiquants" ? D'où vient ce label ? Quels sont ceux qui le décernent ? A qui le décernent-ils ?
On connaît la réponse : elle est... géographique. Pour les bureaux d'opinion, "l'Ouest" est considéré comme la réserve d'Indiens de "catholiques pratiquants"... dont la "pratique" se borne à aller parfois à la messe, mais qui n'auraient pas l'idée de lire une encyclique sociale. Ils ignorent donc les critères catholiques en économie et dans les questions de société, qui rendent Macron "non catho-compatible" si l'on prend ces critères au sérieux.
Par ailleurs Europe-Ecologie est tout aussi europhile que LREM (et plus proche de 'Laudato Si') : or les "cathos" de sondages se gardent bien de voter vert. Pourquoi ? Parce que la droite bourgeoise est allergique au vert de père en fils "depuis 68", et que le vote Macron est fondamentalement un vote sociologique bourgeois (ce que confirment, mais là de façon étayée, les analyses post-électorales).
Conclusion : dans un tel contexte, taper sur l'Eglise c'est charger les moulins à vent. ]
réponse au commentaire
Écrit par : Pierre Huet / | 28/05/2019
@ PP
> Source : sondage IFOP pour La Croix.
PH
[ PP à PH – So what ? ]
réponse au commentaire
Écrit par : Pierre Huet / | 28/05/2019
> LREM chez les "cathos pratiquants": 37% selon la Croix
Le journal 'La Croix' qui ne définit toujours pas ce qu'il entend par "catholiques pratiquants" ce qui en l'occurrence serait assez "sablonneux, malaisé" puisque ce vote montre une faible adhésion à l'enseignement de l'Eglise... catholique !
https://www.la-croix.com/France/Sondage-resultats-Europeennes-2019-catholiques-pratiquants-massivement-rallie-Macron-2019-05-27-1201024883?utm_medium=Social&utm_source=Twitter#Echobox=1558973822
Ce comportement a été souligné par un prêtre sur twitter : ce vote est-il "fonction de convictions catholiques ou plutôt d'intérêts financiers de caste bourgeoise nantie ?
Il n'en a pas fallu plus pour qu'un blogueur lui demande "Est-ce par cécité ou simple goût de la rhétorique populiste qu'en tant que prêtre vous venez insulter ces catholiques " ?
ah...
Il paraît donc qu'il y a une insulte là-dedans... fichtre !
On en conclut que notre blogueur n'aime pas les bourgeois puisque le mot lui semble insultant.
Mais alors pourquoi cette indignation si... bourgeoise ?
C'est donc être aveugle que, connaissant les natures mêmes du macronisme et du catholicisme, on en conclue que le vote Macron ne peut être l'expression de la foi catholique ?
Est-ce de la cécité que de constater que le vote macron se contrefiche de la DSE ? que c'est un réflexe sociologique au même titre tant que l'identitarisme que notre blogueur mieux inspiré avait dénoncé comme anticatholique dans un essai il y a peu ?
C'est de la rhétorique populiste que de constater un fait et de le dire en faisant passer la vérité avant le risque de ne plus être invité à prendre le thé ?
ou est-ce le fait de dénoncer le manque de cohérence de gens se disant par ailleurs catholiques ?
mais dans ce cas, n'est-ce pourtant pas ce que fait le pape ?
EL
[ PP à EL –Incapables de discuter de questions de fond (ils sont enfermés dans leur point de vue de classe), ces bourgeois libéraux-cathos se disent "insultés" ou "jugés" dès qu'on les contredit. Crier à la "division des cathos"(confondre ainsi consensus de milieu et unité dans le Christ) est évidemment plus facile que de regarder les problèmes en face. Et le problème, c'est que leurs réflexes sont incompatibles avec les préconisations de l'Eglise, mais qu'ils ne veulent pas le savoir. ]
réponse au commentaire
Écrit par : E Levavasseur / | 28/05/2019
ÉTOILES
> Que les catholiques votent par intérêt n'explique pas tout, hélas. Des décennies de conditionnement leur donnent une adhésion pavlovienne aux "étoiles de Marie" de l'UE. Et LRMR en a usé à outrance.
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Écrit par : Pierre Huet / | 29/05/2019
@ PP
> Jadot plus proche de "Laudato si" ?... mais il veut détruire les États-nations (il dit "dépasser") seuls rempart RÉEL contre le libéralisme. Il est soit incohérent, soit malhonnête, plus proche de Macron que de François.
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Écrit par : Pierre Huet / | 01/06/2019
@ PP
> Les mots entre " " se trouvent dans une réponse que vous m'avez faite ci-dessus.
En fait, Jadot et Macron, même combat.
PH
[ PP à PH – "Même combat" à partir du moment où l'on ne veut voir qu'un seul problème, celui de Bruxelles.
Encore que Jadot voudrait que le système de l'UE change dans un sens qui n'est pas du tout celui de Macron (verbiage circonstanciel mis à part).
Peut-être Jadot se fait-il des illusions sur ses capacités transformatrices : mais son "Europe" idéale n'est pas conforme au tropisme ultralibéral macronien.
Même chose à propos de 'Laudato Si' : on ne peut pas nier que le programme écologique de Jadot soit en consonance avec les chapitres de l'encyclique sur le saccage environnemental ; et qu'il est impossible d'en dire autant du bilan de Macron.
Et là non plus, il serait factice de dire que ce saccage vient exclusivement (ni même principalement), de l'Europe supranationale. Les gouvernements nationaux n'ont pas attendu Bruxelles pour céder aux lobbies et ravager l'environnement depuis les années 1950. ]
réponse au commentaire
Écrit par : Pierre Huet / | 02/06/2019
HABILE
> Il faut quand même reconnaître une certaine habileté politique à notre président. Quasiment au bord de la démission il y a trois mois, il vient de se garantir une réélection dans un fauteuil en 2022 ! Grâce aux médias, un mouvement GJ "outé" (entendu au cours d'un repas de famille, où il n'y avait pas que des représentants des CSP++ : "ils vont finir par lasser leur monde"). Pas d'opposition politique sérieuse... avant (très ? ) longtemps.
Peut-être va-t-il faire comme Louis-Napoléon Bonaparte : 20 ans au pouvoir !
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Écrit par : Feld / | 03/06/2019
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