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01/05/2019

Le "1er mai social et solidaire" des catholiques américains

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En accord avec les évêques US : "Le 1er mai, prions pour les travailleurs, pour leur dignité, et pour une société plus juste qui placerait les droits du travail au-dessus des droits du capital" :


<<   Le 1er mai est la fête de saint Joseph artisan, établie en 1953 par le pape Pie XII. Celui-ci voulait certainement une fête catholique pour rivaliser avec les célébrations du  1er mai par les partis communistes dans le monde. Le communisme a abandonné depuis ; mais nous, catholiques, continuons à célébrer le 1er mai en pensant spécialement à la dignité du travailleur.

Les travailleurs n’ont pas toujours été traités dignement aux Etats-Unis (et ne le sont toujours pas aujourd’hui en bien des occasions). Les syndicats ne s’étaient pas levés parce que les travailleurs n’avaient rien de mieux à faire : ils s’étaient levés parce que des capitalistes implacables traitaient les travailleurs comme des outils à jeter, utiles seulement dans la mesure où ils servaient les bilans de la firme. L’exploitation des travailleurs par des titans industriels comme Andrew Carnegie tourna à la violence brute quand il confia le management à Henry Frick, le plus notoire anti-syndicaliste de la fin du XIXe siècle.

Le mois dernier, les salariés de Stop & Shop [chaîne de supermarchés du nord-est des USA] ont fait grève pendant onze jours car le management voulait alourdir considérablement leurs frais médicaux et réduire la rémunération de leurs heures supplémentaires en week-end – alors que la chaîne roule sur le cash et utilise les réductions d’impôts républicaines pour racheter ses propres actions, enrichissant managers et actionnaires. La grève a dépassé le week-end de Pâques… La semaine dernière, ça m’a fait plaisir de pouvoir retourner au magasin et féliciter les salariés de leur victoire. Ils sont heureux d’être revenus au travail et d’avoir obtenu un contrat les traitant correctement. Voilà comment les choses doivent être. Voilà à quoi ressemble la dignité.

L’an dernier a vu une énergie nouvelle émerger dans le mouvement social. Non seulement des grèves ont éclaté à travers le pays, mais une nouvelle sorte de grève : la grève pour le bien commun […], une négociation collective impliquant la communauté entière parce que l’enjeu débordait le lieu de travail. De la Virgijnie occidentale à la Californie, des professeurs se sont mis en grève non seulement pour de meilleurs salaires, mais pour que leurs écoles et leurs étudiants aient de meilleures ressources… Je ne peux imaginer une évolution plus en accord avec la doctrine catholique traditionnelle, que cette nouvelle approche de la négociation collective.

Cette énergie nouvelle dans le mouvement social est d’autant plus opportune par rapport à la décision agressivement anti-syndicale de la Cour suprême (2018) dans l’affaire Janus [Janus v. American Federation of State, County and Municipal Employees, Council 31, No. 16-1466, 585 U.S, 2018]. Les évêques américains, après quelques débats internes – et contre l’avis ultralibéral de gens comme Ed Whelan de l’Ethics and Public Policy Center [*] – ont pris position en faveur des travailleurs et travailleuses de ce pays. Il est singulier de voir les évêques US s’opposer à l’establishment conservateur officiel, qui d’habitude obtenait ce qu’il voulait de la conférence épiscopale (même quand ça impliquait de tordre l’enseignement de l’Eglise).

Il y a  en effet ceux qui tordent par réflexe l’enseignement de l’Eglise sur les syndicats : M. Whelan n’est que l’un des exemples de ce chœur de catholiques subordonnant leur religion à leurs opinions politiques – surtout en ce qui concerne le rôle des syndicats du secteur public. Durant le débat sur l’affaire Janus, j’ai entendu beaucoup d’amis conservateurs répéter que le pape Léon XIII n’avait jamais parlé directement de ces syndicats-là, et donc qu’il ne devait pas les inclure dans son soutien aux syndicats en général… C’est comme si vous disiez que l’Eglise ne bâme pas votre épouse de vous tromper avec votre collègue de bureau, mais qu’elle la blâmerait de le faire avec un voisin d’immeuble !  Les syndicats du secteur public étant plus importants hier (et encore aujourd’hui)  en Europe qu’aux USA, les papes – s’ils l’avaient voulu – auraient eu toute liberté de faire une distinction entre ces syndicats et ceux du privé.

Il est triste de voir que certains de nos amis conservateurs, comme de nos amis progressistes, refusent de se laisser déranger par les enseignements de l’Eglise qui contredisent leurs opinions politiques, et ne professent que ceux qui leur conviennent. Ce n’est pas du catholicisme : c’est de la cafétéria ! L’Eglise est aux côtés de tous les travailleurs  et soutient leur droit de former un syndicat… même si ce syndicat vient à prendre des décisions que l’Eglise désapprouve.

Le 1er mai, même si vous n’allez pas à la messe, priez au moins pour les travailleurs, pour leur dignité, et pour une société plus juste qui placerait les droits du travail au-dessus des droits du capital. >>

 

Michael Sean Winters

(National Catholic Reporter)

 

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[*]  Edward Whelan III, juriste, militant conservateur et agitateur médiatique : en première ligne des “catholiques” ennemis du pape pour raisons politico-économiques. L’Ethics and Policy Center est un lobby trumpiste.

 

 

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12:47 Publié dans Social, USA | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 1er mai, social, usa

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